The Project Gutenberg EBook of Mťmoires du marťchal Marmont, duc de Raguse
(5/9), by Auguste Frťdťric Louis Viesse de Marmont
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Title: Mťmoires du marťchal Marmont, duc de Raguse (5/9)
Author: Auguste Frťdťric Louis Viesse de Marmont
Release Date: October 2, 2010 [EBook #33832]
Language: French
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M…MOIRES
DU MAR…CHAL MARMONT
DUC DE RAGUSE
DE 1792 A 1841
IMPRIM…S SUR LE MANUSCRIT ORIGINAL DE L'AUTEUR
AVEC
LE PORTRAIT DU DUC DE REISCHSTADT
CELUI DU DUC DE RAGUSE
ET QUATRE FAC-SIMILE DE CHARLES X, DU DUC D'ANGOUL ME, DE L'EMPEREUR
NICOLAS ET DU DUC DE RAGUSE
TOME CINQUI»ME
PARIS
PERROTIN, LIBRAIRE-…DITEUR 41, RUE FONTAINE-MOLI»RE, 41
L'ťditeur se rťserve tous droits de traduction et de reproduction.
1857
M…MOIRES
DU MAR…CHAL
DUC DE RAGUSE
LIVRE SEIZI»ME
1813
SOMMAIRE.--Situation et faiblesse de la grande armťe aprŤs la campagne
de Russie.--Organisation d'une nouvelle armťe dite d'observation du
Mein.--Crťation des rťgiments provisoires.--CanonniŤre de
marine.--Composition de l'armťe du Mein.--Arrivťe du duc de Raguse ŗ
Mayence.--Composition du sixiŤme corps, sous les ordres de
Marmont.--Marche sur Dresde.--Combat de Wiessenfels.--Mort du duc
d'Istrie.--Napolťon ťtablit son quartier gťnťral ŗ
Lutzen.--Reconnaissance de l'ennemi exťcutťe par le sixiŤme
corps.--Bataille de Lutzen 2 mai 1813.--Combats de nuit contre la
cavalerie ennemie.--Danger que court le duc de Raguse.--Paroles de
l'Empereur.--Entrťe de l'armťe franÁaise ŗ Dresde.
Je passai les mois de janvier et de fťvrier 1813 ŗ soigner mes
blessures, impatient de rentrer en campagne. Gr‚ce ŗ la force de mon
tempťrament, dŤs le mois de mai, je fus en ťtat de partir. AprŤs quinze
jours passťs ŗ Ch‚tillon, oý j'arrÍtai les travaux dont la suite devait
m'occuper d'une maniŤre si grave et si importante, je me mis en route
pour l'armťe.
Les deux mois et demi passťs ŗ Paris et ŗ la cour firent ťpoque pour
moi. …tranger aux plaisirs et aux splendeurs de ce sťjour, depuis neuf
ans, je n'avais pas quittť les camps; et, sous le rťgime impťrial, je
n'avais habitť la capitale que pendant six semaines environ et ŗ trois
reprises diffťrentes, ŗ l'ťpoque du couronnement, en 1809, aprŤs la paix
de Vienne, et ŗ l'ťpoque de la naissance du roi de Rome, avant d'aller
prendre le commandement de l'armťe de Portugal. Aussi, sur ce terrain,
tout ťtait neuf pour moi. La cour, encore brillante, prťsentait
cependant un horizon sombre ŗ tous les yeux. La dťfection du corps
prussien d'York, indice effrayant de la situation des esprits, donnait ŗ
chacun le pressentiment de grands et de nouveaux malheurs. Et cependant
la fortune est venue au secours du courage, et il n'a tenu qu'ŗ Napolťon
de rasseoir pour toujours sa puissance ťbranlťe; mais il devait se
charger lui-mÍme de se dťtruire et pťrir par un suicide politique.
Depuis plusieurs annťes, Napolťon, rappelant, autant qu'il le pouvait,
dans les habitudes, les usages anciens de la cour de France, exigeait
que l'on vint ŗ ses fÍtes en habit habillť. L'intťrÍt des manufactures
servait de prťtexte ŗ cet usage singulier, imitation servile du passť.
Rien n'ťtait si extraordinaire que ce travestissement de soldats dont la
parure ťtait les cicatrices et l'air martial bien plus que la gr‚ce et
l'ťlťgance. Je me fis faire de beaux habits pour me conformer ŗ l'ordre
donnť, et ma manche ouverte, mon bras en ťcharpe et sans mouvement,
faisaient ressortir ce que ce costume avait de bizarre.
* * * * *
Les historiens de la campagne de 1812 en Russie ont racontť ses
dťsastres avec trop de dťtails pour que, sans y avoir assistť, je
m'occupe de les dťcrire. L'ouvrage de M. de Sťgur porte avec lui la
conviction et doit Ítre placť en premiŤre ligne. J'ai pu juger, dans la
campagne suivante, des dispositions physiques et morales de Napolťon. Il
ťtait en 1813 tel que M. de Sťgur le dťpeint en 1812. Plus tard, j'ai pu
apprťcier l'exactitude de ses rťcits quand il dťcrit les lieux oý se
sont passťes les grandes scŤnes de cette ťpoque. Enfin il a bien peint
le caractŤre des ťvťnements dans une armťe livrťe ŗ de semblables
circonstances, et c'est lui qui, ŗ mon avis, doit faire autoritť dans
l'avenir.
La grande armťe n'existait plus que de nom. ņ peine les rťgiments
conservaient-ils des fragments de cadres. L'effectif prťsent sous les
armes, dans le cadre d'un grand nombre de divisions, ne s'ťlevait pas ŗ
plus de huit ŗ neuf cents hommes. Les hommes ťchappťs ŗ la mort ťtaient
prisonniers ou ťparpillťs, sans armes et sans organisation. Quelques
corps, restťs en Prusse et ŗ Dantzig, furent victimes ŗ leur tour des
rigueurs de la saison et ťprouvŤrent une grande diminution. De leur cŰtť
aussi les troupes ennemies, sans avoir ťtť dťsorganisťes, ťtaient
beaucoup rťduites, malgrť les soins qu'on avait pris pour leur
conservation pendant la poursuite des opťrations. Nťanmoins leur nombre
et leur ťtat les rendaient trŤs-supťrieures aux nŰtres et fort
redoutables.
La dťfection de la Prusse avait mis inopinťment dans la balance de
nouvelles forces contre nous, et ces forces ťtaient aussi redoutables
par le nombre des soldats que par l'esprit qui les animait.
L'enthousiasme de la nation la fit se lever, pour ainsi dire, tout
entiŤre pour assurer sa dťlivrance.
La ville de Dantzig, abandonnťe ŗ elle-mÍme, fut bloquťe, ainsi que les
diverses places de la Vistule. Cependant le vice-roi, qui commandait
cette prťtendue grande armťe, dont les dťbris rťorganisťs composaient un
corps de tout au plus douze mille hommes, formť de quatre divisions,
ťtait restť ŗ Posen aussi longtemps qu'il l'avait pu sans danger. Il
s'ťtait ensuite retirť lentement et s'ťtait arrÍtť ŗ Berlin. Enfin,
quand le mouvement des armťes ennemies et la levťe en masse de la Prusse
l'y forcŤrent, il se rťfugia derriŤre l'Elbe, oý il reÁut des renforts
considťrables.
L'hiver de 1813 se passa ainsi en Allemagne. Pendant ce temps, une
nouvelle armťe, sous le nom d'armťe d'observation du Mein, se formait
sur la frontiŤre et se prťparait ŗ entrer en campagne.
Les dťsastres survenus en Russie avaient ťtť ressentis vivement par la
France entiŤre. Quelque lourd qu'eŻt paru le fardeau de la guerre,
quelle que fŻt l'impopularitť de l'Empereur et de ses entreprises
gigantesques, qui, se renouvelant chaque annťe, ťpuisaient toujours
davantage les peuples, l'honneur national, accoutumť, par des succŤs
continuels, ŗ dicter partout des lois, se rťveilla au bruit des revers.
Le sentiment patriotique fit faire des efforts extraordinaires pour
mettre Napolťon ŗ mÍme de reprendre sa position perdue et de rťtablir
son influence sur l'Europe. On espťrait que Napolťon ťtait corrigť, et
qu'enfin la France pourrait jouir de sa puissance au sein du repos. Les
levťes se firent avec facilitť et empressement. Une rťquisition immense
de chevaux s'exťcuta promptement et sans murmures. Tout marcha avec une
telle rapiditť, que les armťes semblaient sortir de terre.
Avant de commencer la campagne de Russie, l'Empereur avait emmenť avec
lui tout ce qu'il y avait de disponible dans l'armťe. Il n'avait laissť
en France que des dťpŰts; mais, par une sage prťvoyance, il avait
ordonnť la levťe de cent bataillons de rťserve, sous le nom de
_cohortes_. Afin de se mťnager la ressource des conscriptions futures,
il l'avait fait faire sur les conscriptions passťes, c'est-ŗ-dire parmi
les hommes libťrťs, mesure injuste et odieuse, mais qui lui fournit des
hommes faits, robustes, de l'‚ge de vingt-deux ŗ vingt-huit ans, et
plus en ťtat que ceux des levťes annuelles de supporter les fatigues de
la guerre. Pour dťguiser aux yeux de ces hommes, appelťs contre toute
espŤce de droit, la rigueur dont ils ťtaient l'objet, le
sťnatus-consulte, rendu ŗ cette occasion, dťclara que ces nouveaux
soldats n'auraient d'autre destination que la dťfense du territoire de
l'Empire; qu'ils ne pourraient en sortir; et, pour prťsenter ŗ l'esprit
l'idťe d'une organisation particuliŤre adaptťe ŗ cette destination
spťciale, on les plaÁa dans des corps nouvellement formťs sous le nom de
cohortes au lieu de bataillons.
M. de LacťpŤde, orateur du Sťnat, prononÁa, en prťsentant l'acte qui
mettait l'Empereur en possession de cette ressource, les paroles
suivantes, qui furent au reste frappťes de ridicule, au moment mÍme oý
elles furent profťrťes: ęMais ces jeunes soldats auront ŗ gťmir du sort
qui leur est rťservť, de rester loin des dangers et du thť‚tre de la
gloire des armes franÁaises.Ľ Le thť‚tre de la guerre se rapprocha d'eux
et vint les chercher. Un nouveau sťnatus-consulte, rendu dans l'hiver de
1812 ŗ 1813, autorisa ŗ les mobiliser et ŗ en faire des rťgiments, qui
prirent de nouveaux numťros dans l'armťe. Ces corps, ayant ťtť levťs au
moment du plus grand dťploiement de nos forces, avaient reÁu un grand
nombre d'officiers fort mťdiocres et trop ‚gťs, en rťforme ou en
retraite, rappelťs au service, mais les soldats ťtaient admirables. Les
cent cohortes organisťes en rťgiments prirent les numťros au delŗ du
122e et jusqu'ŗ 130 et quelques. Ces corps formŤrent la premiŤre
ressource dont l'Empereur disposa.
La conscription annuelle ťtait dťjŗ appelťe. Elle servit ŗ remplir les
cadres d'un grand nombre des troisiŤme et quatriŤme bataillons, qui
formŤrent des rťgiments provisoires, et furent envoyťs dans le corps
d'observation du Mein.--Des soldats, tirťs des compagnies
dťpartementales, formŤrent un rťgiment de quatre magnifiques bataillons.
Napolťon eut, en outre, l'idťe de faire servir ŗ terre, et comme
infanterie, les canonniers de la marine, corps nombreux, brave et fort
inutile dans les ports en ce moment. Il ordonna son doublement en y
versant un nombre de conscrits ťgal ŗ celui des vieux soldats. On forma
ainsi quinze bataillons de campagne, qui entrŤrent dans la composition
de mon corps d'armťe. Enfin, Napolťon appela ŗ lui un corps de trois
divisions, formťes avec des troupes de l'armťe d'Italie, composť
d'anciens rťgiments, dont la gloire et le courage rappelaient notre beau
temps militaire. Ce corps, confiť au gťnťral Bertrand, traversa le
Tyrol, et vint nous rejoindre dans les plaines de la Saxe.
L'armťe d'observation du Mein se composa en derniŤre analyse de corps
dont les numťros dťfinitifs, dans la grande armťe, furent les suivants:
TroisiŤme corps, marťchal Ney, quatre divisions;
QuatriŤme corps, gťnťral Bertrand, trois divisions, dont une
wurtembergeoise;
SixiŤme corps, duc de Raguse, quatre divisions, dont trois seulement
furent organisťes (canonniers de la marine).
Le premier corps, prince d'EckmŁhl, quatre divisions. Il ťtait sur le
bas Elbe, oý il se rťorganisait.
Le deuxiŤme corps, duc de Bellune, qui ťtait ŗ Magdebourg. Il fut formť
fort tard, et il ne put prendre part ŗ la premiŤre partie de la
campagne.
Les cinquiŤme, onziŤme et douziŤme corps, commandťs par le gťnťral
Lauriston et les marťchaux Macdonald et Oudinot, chacun de trois
divisions (cohortes). Ils avaient dťjŗ rejoint le vice-roi.
Enfin, aux forces ci-dessus il faut ajouter la garde impťriale, dont
l'infanterie s'ťlevait ŗ quinze mille hommes et la cavalerie ŗ quatre
mille, seule cavalerie, au reste, qui fŻt alors disponible dans toute
l'armťe. Ces forces, organisťes pendant le cours de l'hiver, ťtaient en
ťtat de rentrer en campagne ŗ la fin d'avril. Cependant l'Empereur ne se
contenta point de ces prťparatifs, quelque considťrables qu'ils fussent
dťjŗ. Il ordonna encore bien d'autres levťes. De plus il stimula les
alliťs pour remplacer leurs contingents, dont, il est vrai, il ne
restait presque plus que le souvenir. Les effets de ces mesures
extraordinaires, soutenues par une grande activitť et une puissante
volontť, se firent sentir successivement pendant le cours de la premiŤre
partie de la campagne et de l'armistice qui s'ensuivit. Des secours de
toute nature ne cessŤrent d'arriver, en sorte que l'armťe se trouva, ŗ
la fin de l'ťtť, composťe, il est vrai, en grande partie de trŤs-jeunes
soldats, peu en ťtat de supporter longtemps les fatigues de la guerre,
mais aussi forte en nombre d'hommes et en chevaux qu'elle eŻt jamais
ťtť. Ce n'est pas, au surplus, le moment d'entreprendre cette partie de
mes rťcits. Nous en sommes seulement ŗ prťsent ŗ la formation des
troupes entrant les premiŤres en ligne, aprŤs les dťsastres survenus en
Russie, et qui combattirent ŗ Lutzen.
Je me rendis ŗ Mayence, oý j'arrivai le 24 mars, encore trŤs-souffrant
de ma blessure reÁue en Espagne. Mes plaies, encore ouvertes, exigeaient
des soins journaliers, et mon bras ťtait encore sans aucun mouvement.
Beaucoup d'autres, ŗ ma place, eussent rťclamť du repos pour assurer
leur guťrison; mais le repos, au milieu du mouvement de la guerre, eŻt
ťtť pour moi une maladie mortelle. Je n'ťtais pas encore rassasiť de
cette vie de pťrils et d'ťmotions qui ťchauffent le coeur, exaltent
l'esprit, dťcuplent l'existence. Le temps et les malheurs ne m'avaient
pas encore dťsenchantť en me montrant les illusions dont elle est
souvent remplie.
Les dispositions de l'Empereur avaient ordonnť la formation de mon corps
d'armťe en quatre divisions d'infanterie; mais la quatriŤme, n'ayant eu
qu'une organisation incomplŤte, reÁut peu aprŤs une autre destination.
Mon corps d'armťe ne se composa donc rťellement, pendant toute la
campagne, que de trois divisions formťes de quarante bataillons. Quinze
de ces bataillons appartenaient ŗ l'artillerie de la marine. Ils ťtaient
composťs moitiť d'anciens soldats, et l'autre moitiť de recrues,
incorporťes au moment oý ils se mirent en marche des grands ports oý ils
tenaient garnison. Les vingt-cinq autres bataillons furent composťs,
savoir: du 37e lťger, nouveau corps, mais formť de vieux soldats tirťs
par dťtachement des compagnies dťpartementales; de vingt troisiŤme et
quatriŤme bataillons de diffťrents rťgiments des armťes d'Espagne,
organisťs en rťgiments provisoires; enfin, d'un bataillon espagnol.
1er rťgiment d'infanterie de la marine, quatre bataillons.
2e rťgiment, infanterie de marine, six bataillons.
3e rťgiment, infanterie de marine, deux bataillons.
4e rťgiment, infanterie de marine, trois bataillons.
37e lťger, deux bataillons.
32e lťger, deux bataillons.
23e lťger, deux bataillons.
11e provisoire, deux bataillons.
13e provisoire, deux bataillons.
15e de ligne, deux bataillons.
16e provisoire, deux bataillons.
70e de ligne, deux bataillons.
120e de ligne, deux bataillons.
20e provisoire, deux bataillons.
25e provisoire, deux bataillons.
Corps Joseph Napolťon, un bataillon.
L'artillerie se composa de quatre-vingt-quatre bouches ŗ feu. L'extrÍme
pťnurie ťprouvťe en cavalerie empÍcha de m'en donner une seule division
ou mÍme une seule brigade. J'eus ŗ ma disposition seulement les lanciers
de Berg, composťs d'environ deux cents chevaux. Les rťgiments
d'artillerie de la marine, faisant le fond de mon corps d'armťe,
mťritaient beaucoup d'ťloges pour leur bravoure et leur bon esprit.
Jamais soldats ne se sont exposťs de meilleure gr‚ce au canon de
l'ennemi, et n'y sont restťs avec plus de fermetť. Mais ces troupes
avaient une grande maladresse et un manque complet d'expťrience de la
guerre de terre. Elles eurent en consťquence, pendant quelque temps,
beaucoup de dťsavantage devant l'ennemi. Le personnel des officiers dut
Ítre remaniť. Il fallut nommer ŗ un grand nombre d'emplois. On exerÁa
constamment aux manoeuvres et les vieux et les jeunes soldats; mÍme
pendant les marches, l'instruction fut continuťe. On agit de la mÍme
maniŤre dans les autres bataillons, entiŤrement composťs de conscrits.
Ceux dont les cadres ťtaient bons, quoique formťs trŤs-rapidement,
purent Ítre prťsentťs ŗ l'ennemi avec confiance, tant les paysans
franÁais, belliqueux par essence, sont faciles ŗ dresser. Un bataillon
du 4e rťgiment de ligne, dont le cadre ťtait complet et admirable, m'en
donna la preuve. Ce bataillon, aprŤs avoir reÁu les recrues ŗ la fin de
janvier, ťtait un corps modŤle au mois de mai suivant.
Mes divisions ťtaient commandťes, savoir: la premiŤre par le gťnťral
Compans; la deuxiŤme par le gťnťral Bonnet; la troisiŤme, par le gťnťral
Freiderick; mon artillerie, par le gťnťral de division Fouchť.
J'ťtablis mon quartier gťnťral ŗ Hanau, et mes troupes, pour vivre et se
former, eurent le pays environnant sur la route d'Allemagne, jusques et
y compris Fulde.
Pendant ce temps, le troisiŤme corps, commandť par le marťchal prince de
la Moskowa, s'organisait dans le duchť de Saxe. La gauche se formait ŗ
Mayence, et la cavalerie en Lorraine et dans le Palatinat du Rhin. Le
vice-roi avait son quartier gťnťral ŗ Strassfurth et le marťchal Ney, ŗ
Meiningen. Les corps ennemis ťtaient ainsi placťs: celui de York ŗ
Dessau; Wittgenstein, au delŗ de l'Elbe, et la masse des troupes,
rťunies en arriŤre de Dresde, prÍtes ŗ dťboucher.
Je portai, le 13 avril, ma deuxiŤme division sur Vach. Le 15, elle prit
position ŗ Eisenach, tandis que la premiŤre la remplaÁa ŗ Vach, et que
le prince de la Moskowa dťbouchait sur Erfurth.
Le mouvement commencť continua, et, le 21, ma deuxiŤme division, qui
tenait la tÍte de la colonne, arriva ŗ Gotha, la premiŤre ŗ Langensalza
et la troisiŤme ŗ Eisenach, oý, dŤs le 19, j'avais portť mon quartier
gťnťral.
Pendant ces marches, nos troupes achevaient de s'organiser. De son cŰtť,
le vice-roi, marchant pour faire sa jonction, arrivait ŗ Mersebourg. Le
1er mai, au matin, le troisiŤme corps avait dťbouchť de Weissenfels, oý
je l'avais remplacť. Une avant-garde ennemie eut avec lui un lťger
engagement dans lequel le marťchal BessiŤres fut tuť. C'ťtait un de nos
compagnons d'Italie et sa perte fut apprťciťe par l'armťe. Je la
ressentis plus vivement que d'autres ŗ cause de nos souvenirs communs.
Sťparťs pendant longtemps et ayant eu pour lui quelques motifs
d'ťloignement, nous nous ťtions rapprochťs, et notre ancienne amitiť
s'ťtait rťveillťe. Homme d'esprit et de coeur, il donna toujours ŗ
l'Empereur des avis utiles. Vingt et un jours aprŤs, nous devions perdre
un autre camarade qui m'ťtait bien plus cher. La fortune devait enfin
s'appesantir sur nous, aprŤs nous avoir si longtemps protťgťs et comblťs
de ses faveurs.
Le troisiŤme corps alla prendre position ŗ Kaia, ŗ Kleingrossgorschen et
ŗ Starfield. Napolťon se rendit ŗ Lutzen, oý il ťtablit son quartier
gťnťral.
Je pris position ŗ Ripach et je mis mon corps d'armťe ŗ cheval sur le
ravin, prÍt ŗ marcher dans diffťrentes directions. Pendant ce temps les
troupes aux ordres du vice-roi, occupant la rive gauche de la Saale,
s'ťtaient rencontrťes ŗ Mersebourg, et avaient fait leur jonction avec
celles que Napolťon amenait en personne. L'Empereur ignorait la
position vťritable de l'ennemi et ne supposait pas qu'il se dťcid‚t si
promptement ŗ l'offensive. Une raison suffisante pour ignorer les
mouvements ťtait notre dťfaut de cavalerie. Nous ne pouvions pas battre
la campagne et avoir des nouvelles certaines. Mais Napolťon aurait dŻ
rťflťchir que l'ennemi, ayant trente mille chevaux, tandis que nous n'en
avions pas quatre mille, et possťdant ainsi sur nous de si grands
avantages dans un pays aussi plat, aussi dťcouvert, ou ne nous
attaquerait jamais, ou nous attaquerait en ce moment.
Le 2 mai, Napolťon dirigea les troupes du vice-roi, c'est-ŗ-dire le
cinquiŤme et le onziŤme corps sur Leipzig, et se mit en route lui-mÍme
pour s'y rendre. Il m'envoya auparavant l'ordre de faire une forte
reconnaissance dans la direction de Pťgau avec tout mon corps d'armťe,
de percer tous les rideaux de troupes qui me seraient prťsentťs, afin de
m'assurer oý ťtait la force des masses ennemies. Je me mis en mesure
d'exťcuter ces dispositions. On se le rappelle, j'ťtais campť sur le
ravin de Ripach, occupant par une division la rive droite, et la rive
gauche par les deux autres. Le troisiŤme corps ťtait campť aux villages
de Grossgorschen, Kaia et Starfield.
L'opťration qui m'ťtait prescrite ťtait dťlicate. M'avancer avec vingt
mille hommes sans cavalerie, au milieu d'une immense plaine oý je
pouvais subitement Ítre entourť par toutes les forces de l'ennemi,
exigeait de grandes prťcautions pour rester en liaison par l'armťe, et ŗ
mÍme d'Ítre soutenu si j'ťtais inopinťment attaquť par des forces
supťrieures. Or j'avais ŗ choisir entre deux chemins dans la direction
qui m'ťtait donnťe. De Ripach on peut aller ŗ Pťgau par la rive droite
et par la rive gauche du ravin. Le chemin de la rive gauche est le plus
court, et j'ťtais dťjŗ tout placť sur ce chemin; mais il avait
l'inconvťnient de me sťparer du gros des forces de l'armťe, de laisser
mon flanc droit exposť aux attaques de l'ennemi, tandis que j'aurais ťtť
acculť au ravin ŗ ma gauche. En marchant par la rive droite, le chemin
ťtait plus long; mais mon flanc devait Ítre couvert par le ravin, ma
gauche en liaison avec l'armťe, ma retraite sur Lutzen ťtait assurťe, et
je couvrais ainsi la portion des troupes qui avait marchť sur Leipzig.
C'est peut-Ítre ŗ cette combinaison sage que nous avons dŻ un succŤs
brillant ŗ la place d'une catastrophe.
AprŤs avoir passť le ravin de Ripach, et avoir formť mes troupes en six
carrťs qui marchaient en ťchiquier, je me mis en marche en suivant la
rive droite, et me portant ainsi sur Starfield.
ņ peine approchions-nous de ce village que nous vÓmes se former, sur les
hauteurs qui le dominent, des masses considťrables de cavalerie
ennemie, soutenues par une nombreuse artillerie, et, en mÍme temps, nous
entendÓmes le canon dans la direction de Kaia et de Grossgorschen. La
division Gťrard, du troisiŤme corps, campťe ŗ peu de distance sur la
rive gauche, et un peu en arriŤre de Starfield, venait d'Ítre surprise
par l'ennemi. Elle prenait les armes dans une grande confusion. Son
artillerie se trouvait sans attelages, ses chevaux ayant ťtť
inconsidťrťment aux fourrages. Cette division eŻt couru de grands
risques si je fusse arrivť quelques minutes plus tard; mais je h‚tai ma
marche, et je m'empressai de me porter en avant pour la couvrir et lui
donner le temps de s'organiser.--Les forces que l'ennemi nous montrait
ťtaient imposantes: mais, ne voyant encore que de la cavalerie, elles ne
me parurent cependant pas assez redoutables pour m'empÍcher de remplir
mes instructions. En consťquence, je me dťcidai ŗ les aborder sans
perdre un seul moment, afin de juger en quoi elles consistaient au
juste. Afin d'Ítre ŗ l'abri de tout ťvťnement f‚cheux si j'avais affaire
ŗ trop forte partie, je fis occuper en force le village de Starfield,
destinť ainsi ŗ me servir de point d'appui. Je portai en avant du
village, et un peu sur la gauche, la division Compans; et, en ťchelons
plus ŗ la gauche encore, la division Bonnet. Les troupes, soutenues par
le feu de ma nombreuse artillerie, se mirent ŗ marcher en avant et au
pas accťlťrť. Cette charge s'exťcuta avec vigueur et promptitude; mais,
les forces de l'ennemi augmentant avec rapiditť, je vis bientŰt qu'une
grande bataille allait Ítre livrťe. Alors j'arrÍtai mon mouvement, qui,
en m'ťloignant de mon point de rťsistance et de sŻretť, aurait
infailliblement occasionnť ma perte. Je maintins toutefois mon attitude
offensive, afin de partager l'attention de l'ennemi et de l'empÍcher
d'ťcraser les troupes du troisiŤme corps, qui combattaient ŗ Kaia et ŗ
Kleingrossgorschen. L'ennemi avait dirigť contre elles la majeure partie
de ses forces, et spťcialement beaucoup d'infanterie. La division Gťrard
les ayant rejointes, tout le troisiŤme corps se trouvait engagť; mais ma
position sur sa droite rťduisait ŗ son front le terrain qu'il avait ŗ
dťfendre.
Le marťchal Ney, ayant ťtť voir l'Empereur ŗ Lutzen, celui-ci l'engagea
ŗ l'accompagner ŗ Leipzig. Le marťchal, averti pendant la route, par le
bruit du canon, de ce qui se passait ŗ son corps d'armťe, y retourna en
toute h‚te. Il le trouva aux prises avec l'ennemi depuis deux heures
environ, et ayant dťjŗ perdu Grossgorschen, Kleingrossgorschen et Kaia.
L'Empereur, appelť par les mÍmes motifs, suivit Ney de prŤs, mais aprŤs
avoir envoyť l'ordre au duc de Tarente de se porter, ŗ marches forcťes,
sur ce point, et de se placer ŗ la gauche du troisiŤme corps.
L'ennemi sentait l'importance de profiter de notre faiblesse pour
envelopper le troisiŤme corps; mais il ne pouvait y rťussir qu'aprŤs
m'avoir forcť moi-mÍme ŗ reculer. Il rťunit donc de grandes forces
contre moi; il dirigea le feu de plus de cent cinquante piŤces de canon
contre mon seul corps d'armťe.
Mes troupes supportŤrent ce feu terrible avec un grand calme et avec un
remarquable courage. Les soldats de la division Compans surtout, plus
exposťs que les autres, furent dignes d'admiration. Les rangs
s'ťclaircissaient ŗ chaque instant, mais se reformaient de nouveau, sans
incertitude, et personne ne songeait ŗ s'ťloigner.--Les braves
canonniers de la marine, accoutumťs particuliŤrement ŗ des combats de
mer, oý l'artillerie joue le principal et presque l'unique rŰle,
semblaient Ítre dans leur ťlťment. Immťdiatement aprŤs ce feu terrible,
la cavalerie ennemie s'ťbranla, et fit une charge vigoureuse,
principalement dirigťe contre le 1er rťgiment d'artillerie de la marine.
Ce rťgiment, commandť par le colonel Esmond, montra ce que peut une
bonne infanterie, et l'ennemi vint ťchouer contre ses baÔonnettes.
D'autres charges furent renouvelťes, mais inutilement et sans succŤs.
L'infanterie ennemie se disposa ŗ venir prendre part au combat, et de
nouvelles forces en artillerie et en cavalerie furent ajoutťes aux
premiŤres. Un nouvel effort pouvant Ítre tentť et devenir dťcisif, je me
dťcidai ŗ prendre une meilleure position dťfensive. Je portai mes
troupes un peu en arriŤre, de maniŤre ŗ les masquer en partie et ŗ les
mettre, le mieux possible, ŗ mÍme de soutenir le village de Starfield.
Toute la division Compans fut mise dans ce village et chargťe de le
dťfendre. Les manoeuvres de l'ennemi, afin de s'ťtendre sur ma droite,
rendaient cette disposition encore plus nťcessaire pour empÍcher qu'il
ne pass‚t entre la tÍte du ravin et le village. En outre, je plaÁai en
deÁŗ et sur le bord du ravin une partie de ma troisiŤme division, ce qui
suffit pour complťter la sŻretť de mon flanc. Le reste de cette division
resta en rťserve pour pourvoir aux cas imprťvus.
L'ennemi dirigea une attaque complŤte sur Starfield; mais elle lui
rťussit mal: elle fut repoussťe. Sur ces entrefaites, l'Empereur et les
troupes de la garde ťtant arrivťes prŤs de Kaia, on se battit sur ce
point avec acharnement, et ce village, vivement disputť, avait fini par
rester en notre pouvoir. D'un autre cŰtť, le onziŤme corps, aux ordres
du duc de Tarente, dirigť de SchŲnau (oý il ťtait dťjŗ arrivť en
marchant sur Leipzig), en suivant le chemin qui conduit directement ŗ
Pťgau, s'ťtait emparť du village d'Eidorf, sur l'extrÍme droite de la
ligne ennemie. Il s'y ťtait maintenu, malgrť les efforts opini‚tres des
troupes russes, qui, aprŤs l'avoir perdu, voulurent le reprendre. Enfin,
il ťtait cinq heures, et le quatriŤme corps, venant de Iťna, arrivait en
arriŤre de la gauche de l'ennemi, qu'il prenait ŗ revers. Une division
de ce corps, la division Morand, suffit seule pour complťter ses
embarras. On dirigea de nouveau contre lui un grand effort en avant de
Kaia. Cet effort fut soutenu par ma deuxiŤme division, que j'envoyai au
secours du troisiŤme corps, aussitŰt que j'eus reconnu la prťsence de
celui du gťnťral Bertrand (quatriŤme corps). Ma division reprit le
village de Batuna. En ce moment, l'ennemi se dťcida ŗ la retraite. Alors
la division Compans dťboucha de Starfield et marcha ŗ lui. La division
Freiderick se plaÁa ŗ gauche et soutint son mouvement; tandis que la
division Bonnet, en communication avec le troisiŤme corps, servait de
pivot ŗ mon mouvement. Nous suivÓmes l'ennemi avec autant de rapiditť
que la conservation de l'ordre de notre formation nous le permit. Nous
continu‚mes notre marche jusqu'ŗ la nuit, aprŤs avoir fait un changement
de front presque perpendiculaire, l'aile droite en avant. Notre
mouvement ťtait rťglť sur celui du centre et de la gauche de l'armťe.
Ceux-ci s'arrÍtŤrent au moment oý la nuit commenÁait. Nous fÓmes halte
ŗ notre tour pour rester en ligne; nous devÓnmes ainsi stationnaires
pendant une demi-heure, en prťsence de l'ennemi, restť maÓtre de
Grossgorschen et placť en avant de ce village.
L'obscuritť ťtait devenue complŤte. Faute de cavalerie, il y avait
impossibilitť de se faire ťclairer. J'avais mis pied ŗ terre pour me
reposer, quand tout ŗ coup un bruit de chevaux se fit entendre; c'ťtait
la cavalerie prussienne qui arrivait sur nous. L'ťtat de mes blessures
m'obligeait ŗ quelques prťcautions pour me mettre en selle, et, n'ayant
pas le temps nťcessaire pour monter ŗ cheval, je me jetai dans le carrť
formť par le 37e lťger, le plus ŗ portťe. Ce rťgiment, ayant peu
d'ensemble alors, mais depuis devenu trŤs-bon, s'abandonna ŗ une terreur
panique et se mit ŗ fuir. En mÍme temps, mon escorte et mon ťtat-major
s'ťloignaient du lieu oý la charge s'opťrait. Ce malheureux rťgiment en
dťroute les prit pour l'ennemi et tira sur eux. EntraÓnť par ce
mouvement, j'avais l'‚me navrťe en reconnaissant l'erreur qui faisait
passer par nos armes nos pauvres officiers, et cependant je supposais
les Prussiens mÍlťs avec eux. Au milieu de cette confusion, je pensai
que, si, comme je le croyais, les cavaliers prussiens allaient nous
sabrer, il ťtait inutile de me faire enlever en me signalant ŗ eux et
en leur donnant le moyen de me reconnaÓtre aux plumes blanches dont mon
chapeau ťtait garni. Je fis ma retraite forcťe de quelques minutes, mon
chapeau placť sous mon bras. La foule, allant plus vite que moi, me
culbuta au passage du fossť de la grande route, mais enfin les fuyards
s'arrÍtŤrent. TrŤs-heureusement pour nous, les Prussiens n'avaient pas
ťtť informťs de notre dťsordre; aprŤs avoir chargť sur le 1er rťgiment
de la marine, qui avait fait bonne contenance et les avait reÁus
bravement, ils s'ťtaient retirťs.
Le 37e lťger s'ťtant reformť, je lui fis honte de sa conduite. Je
laissai mes troupes divisťes en plusieurs carrťs, afin qu'un nouveau
dťsordre ne vÓnt pas tout compromettre; mais je plaÁai mes carrťs si
prŤs les uns des autres et les faces les plus voisines des carrťs les
plus rapprochťes ŗ si petite distance, qu'elles ne pouvaient pas tirer
les unes sur les autres et empÍchaient cependant l'ennemi de pťnťtrer
entre elles.
Mes troupes, ainsi disposťes, attendirent. J'avais le pressentiment
d'une nouvelle entreprise tentťe avec des moyens plus complets, et la
chose arriva comme je l'avais prťvue. Vers les dix heures du soir,
quatre rťgiments de cavalerie prussienne, dont un des gardes, vinrent
fondre sur nous. Tout le monde cette fois fit son devoir; aucun
dťsordre n'eut lieu, et l'ennemi laissa cinq ŗ six cents hommes morts
autour de nous, et ensuite se retira. Une heure plus tard, tout ťtant
parfaitement tranquille, je portai mes troupes ŗ une petite distance,
auprŤs d'un ruisseau et de quelques arbres; elles purent s'ťtablir pour
la nuit et se reposer ensuite.
La triste ťchauffourťe dont je viens de rendre compte coŻta la vie ŗ mon
premier aide de camp, le colonel Jardet, officier du plus grand mťrite,
tuť par nos soldats. Je le regrettai beaucoup. Plusieurs autres
officiers pťrirent aussi malheureusement en ce moment, et le cheval de
mon chef d'ťtat-major reÁut onze balles qui le frappŤrent ŗ la fois.
AprŤs cette double tentative, l'ennemi ťvacua Grossgorschen et s'ťloigna
complťtement du champ de bataille.
Cette bataille fut glorieuse pour l'armťe franÁaise, dont les troupes,
composťes en grande partie de nouvelles levťes, montrŤrent beaucoup de
valeur. Les rťsultats en trophťes et en prisonniers furent nuls, attendu
notre manque absolu de cavalerie.
Le soir de la bataille, l'Empereur dit ŗ Duroc: ęJe suis de nouveau le
maÓtre de l'Europe.Ľ Cette bataille de Lutzen, bonne conception de la
part de Wittgenstein, avait ťtť mal donnťe. Il eŻt dŻ attendre, pour
attaquer, le moment oý l'armťe franÁaise eŻt ťtť plus engagťe du cŰtť de
Leipzig, et en mÍme temps agir avec tous ses moyens rťunis. En effet, le
corps de Miloradowitch, dťtachť, ne combattit pas. Wittgenstein devait
agir promptement et en masse par la gauche; une dťfaite complŤte des
troisiŤme et sixiŤme corps aurait eu une trŤs-grande influence sur le
sort de la campagne. La disproportion de nos forces, si l'ennemi eŻt agi
avec plus d'ensemble, jointe ŗ l'avantage rťsultant de la nature du pays
et de sa nombreuse cavalerie, l'autorisait ŗ l'espťrer.--D'un autre
cŰtť, Napolťon avait rapidement rťparť sa faute en marchant en toute
h‚te au secours de ses corps engagťs. Il s'exposa beaucoup en ralliant
et ramenant ŗ la charge les troupes du troisiŤme corps, qui avaient ťtť
culbutťes. C'est probablement le jour oý, dans toute sa carriŤre, il a
couru le plus de dangers personnels sur le champ de bataille.
En ce moment, toutes les troupes franÁaises rťunies en Allemagne
s'ťlevaient ŗ cent soixante-quinze mille hommes, et cent et quelques
mille seulement ťtaient rassemblťs sur le champ de bataille de Lutzen.
On estime, et des documents pris ŗ bonne source font croire que la
totalitť des forces russes et prussiennes ne leur ťtaient pas de
beaucoup infťrieures; quatre-vingt-dix mille hommes se trouvaient ŗ
Lutzen ou ŗ portťe.
Le 3 mai, l'ennemi s'ťtant retirť sur Pťgau, dans la direction de
Dresde, le duc de Tarente fut mis ŗ sa poursuite. Je me rendis ŗ
LŲbnitz, et je dirigeai des avant-gardes sur Berna. Le troisiŤme corps,
ayant le plus souffert pendant la bataille, resta ŗ Lutzen; il ťtait
d'ailleurs destinť ŗ passer l'Elbe ŗ Wittenberg.
Je marchai au soutien du onziŤme corps, qui eut plusieurs engagements
plus ou moins sťrieux, entre autres ŗ Colditz. L'ennemi continua son
mouvement en bon ordre sur l'Elbe, en marchant sur diverses colonnes;
mais la majeure partie prit la direction de Dresde.
Nous arriv‚mes devant cette ville le 8, et nous y entr‚mes
immťdiatement, tandis que l'empereur de Russie et le roi de Prusse
quittaient le jour mÍme la ville neuve, oý ils avaient, depuis
quarante-huit heures, ťtabli leur quartier gťnťral.
CORRESPONDANCE ET DOCUMENTS
RELATIFS AU LIVRE SEIZI»ME
LE MINISTRE DE LA GUERRE AU MAR…CHAL MARMONT.
ęParis, le 13 mars 1813.
ęMonsieur le marťchal, l'Empereur me charge de prťvenir Votre Excellence
qu'il est indispensable qu'au 20 mars vous ayez votre quartier gťnťral
ŗ Francfort, afin que vous puissiez voir par vous mÍme les troupes qui
doivent composer votre corps d'armťe; qu'au 1er avril votre quartier
gťnťral devra Ítre portť ŗ Hanau, et que, du 1er au 15 avril, vos quatre
divisions devront Ítre placťes ŗ Aschaffembourg et ŗ Hanau, ŗ moins de
nouveaux ordres de Sa Majestť.
ęConformťment aux intentions de l'Empereur, j'ai adressť ŗ M. le
marťchal prince de la Moskowa l'ordre d'ťtablir son quartier gťnťral, le
15 mars, ŗ Hanau: de faire partir, le 20, la premiŤre division du
premier corps d'observation du Rhin, qui est ŗ Aschaffembourg, pour
prendre position ŗ Wurtzbourg.
ęLa deuxiŤme division sera rťunie le 20 mars ŗ Aschaffembourg, et les
troisiŤme et quatriŤme divisions seront rťunies ŗ la mÍme ťpoque ŗ
Hanau. AussitŰt que la deuxiŤme division sera complťtement organisťe,
elle partira pour Wurtzbourg, et sera remplacťe ŗ Aschaffembourg par la
troisiŤme division.
ęM. le marťchal prince de la Moskowa conservera, jusqu'ŗ nouvel ordre,
son quartier gťnťral ŗ Hanau, et j'ai recommandť ŗ Son Excellence de ne
laisser aucune de ses troupes ŗ Francfort, pour que le deuxiŤme corps
d'observation du Rhin puisse se rendre dans cette ville.
ęIndťpendamment des quatre divisions franÁaises qui composent le premier
corps d'observation du Rhin, il y sera attachť deux divisions de troupes
alliťes fournies par Leurs Altesses Royales le grand-duc de
Hesse-Darmstadt, le grand-duc de Bade, le prince primat, et Sa Majestť
le roi de Wurtemberg.
ęCes deux divisions seront commandťes par le gťnťral Marchand, qui
reÁoit l'ordre de porter son quartier gťnťral ŗ Wurtzbourg, oý les
contingents qui doivent composer ces divisions seront rťunis.
ęUne autre division de troupes alliťes, fournie par Sa Majestť le roi de
BaviŤre, et qui sera commandťe par le gťnťral comte de Wrede, sera
ťgalement attachťe ŗ ce corps d'armťe; cette division se rťunit ŗ
Bamberg, Bayreuth et Cromach.
ęAinsi M. le marťchal prince de la Moskowa aura sous ses ordres quatre
divisions d'infanterie franÁaise et trois divisions de troupes alliťes;
au total, sept divisions.
ęLa cavalerie de ce corps d'armťe sera composťe de trois brigades qui
formeront une division.
ęAussitŰt que la premiŤre division du premier corps d'observation du
Rhin, commandťe par le gťnťral Souham, sera arrivťe ŗ Wurtzbourg, le
gťnťral Marchand portera sa division en avant de la direction de
Schweinfurth.
ęJ'ai aussi adressť au gťnťral comte Bertrand, commandant le corps
d'observation d'Italie, l'ordre de diriger le mouvement de ses troupes
de maniŤre que la premiŤre division soit rendue le 15 avril ŗ
_Nuremberg_, en passant par Augsbourg; la seconde division ŗ la mÍme
ťpoque ŗ Neubourg; la troisiŤme ŗ Donawert, et la quatriŤme ŗ Augsbourg,
oý le gťnťral Bertrand doit avoir ťtabli son quartier gťnťral le 5
avril.
ęLa cavalerie, le parc d'artillerie et les ťquipages militaires de ce
corps d'armťe devront Ítre rendus, au 15 avril, entre Augsbourg et
Donawert.
ęTels sont les ordres que j'ai expťdiťs, et que l'Empereur m'a chargť de
communiquer ŗ Votre Excellence, pour que vous puissiez connaÓtre le
mouvement du premier corps d'observation du Rhin, et du corps
d'observation d'Italie.
ęJe vous prie, monsieur le marťchal, de m'instruire des dispositions que
vous aurez faites pour ce qui concerne votre corps d'armťe, afin de me
mettre ŗ portťe d'en rendre compte ŗ Sa Majestť.
ęLe ministre de la guerre,
ęDUC DE FELTRE.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT ņ NAPOL…ON.
ęMayence, le 26 mars 1813.
ęSire, aussitŰt aprŤs mon arrivťe ŗ Mayence, j'ai pris connaissance de
la situation des troupes de mon corps d'armťe qui venaient d'arriver. Je
crois qu'il est de mon devoir d'adresser directement ŗ Votre Majestť un
tableau gťnťral de la situation de ces troupes, afin qu'elle puisse
prendre ŗ leur ťgard les dispositions qu'elle jugera convenables.
ęLes troupes de marine sont arrivťes ou arrivent aujourd'hui ou demain;
mais ni leur nombre ni la formation des dťtachements ne cadrent
nullement avec les ťtats fournis par le ministre de la guerre: il y a eu
nťcessairement erreur ou omission d'ordres. Dans tous les cas, je dois
le faire connaÓtre ŗ Votre Majestť afin qu'elle connaisse la vťritable
situation de ces troupes.
ęL'ťtat du ministre prťsente trois dťtachements composant le 1er
rťgiment de marine, l'un de 1,400 hommes, l'autre de 1,360, et le
dernier de 1,750, total, 4,510. Au lieu de cela, les colonnes ont ťtť
composťes, savoir: 985 hommes de Brest, 480 de Lorient, 600 de
Rochefort, 287 de Toulon, 1,215 d'Anvers, 68 de Boulogne, 45 de
Cherbourg; total, 3,680; dťficit 830 sur le nombre des hommes annoncťs
partis. Je ne parle pas de 219 hommes restťs en arriŤre ou aux hŰpitaux,
mais qui rejoindront plus tard; le dťficit est sur les partants.
ęLe 2e rťgiment, d'aprŤs l'ťtat du ministre, se compose de 20 hommes,
39, 14, 1,605, 1,410, 1,410. 1,400; total, 5,898. Au lieu de cela, il
est parti: premiŤre colonne, de Toulon, 1,277 hommes; deuxiŤme, 1,091;
troisiŤme, 1,563; de Brest, 78; de Cherbourg, 130; de Rochefort, 46;
total, 4,185; dťficit, 1,713 hommes au moment du dťpart, non compris
766 hommes restťs en route, mais qui rejoindront plus tard.
ęIl y a ťgalement des erreurs dans les 3e et 4e rťgiments. Votre Majestť
connaÓtra incessamment et dans le plus petit dťtail la situation de ces
quatre corps, les mesures ťtant prises pour que, d'ici ŗ cinq jours, les
ťtats de situation les plus circonstanciťs soient dressťs.
ęEn gťnťral, les troupes de la marine paraissent animťes du meilleur
esprit, mais elles manquent de diffťrentes choses indispensables pour le
service.
ę1į Ces corps manquent de tambours et de caisses de tambour; il en
manque ŗ peu prŤs deux cent cinquante dans les quatre rťgiments; il n'y
en a point dans les magasins de Mayence et de Strasbourg, et les moyens
de confection ici sont extrÍmement bornťs: un grand envoi de l'intťrieur
peut seul donner ŗ ces corps ce qu'il leur faut.
ę2į Ces corps, par leur organisation, n'avaient pas de chirurgiens, ceux
des vaisseaux devant leur suffire; il paraÓt juste et nťcessaire de les
en fournir comme l'armťe de terre.
ę3į Ces corps sont tout ŗ fait dťpourvus d'ustensiles de campagne, et,
ŗ cet ťgard, les autres corps sont dans le mÍme cas. Le magasin de
Mayence est tout ŗ fait dťpourvu et les arrivages paraissent suspendus.
Les confections sur lesquelles on comptait ŗ Francfort n'ont pu encore
avoir lieu, les marchťs n'ťtant pas mÍme passťs aujourd'hui; et
cependant le premier corps d'observation doit Ítre servi avant le
deuxiŤme, et il est loin d'avoir ce qu'il lui faut. Des dispositions
nouvelles et d'urgence peuvent seules pourvoir les troupes de ce qui
leur manque.
ę4į Le dťdoublement des troupes de marine a laissť un grand nombre
d'emplois d'officiers vacants; les propositions n'ont pas ťtť
accueillies par le ministre parce qu'elles n'ťtaient pas appuyťes
d'ťtats rťguliers. Mais les matricules qui seules peuvent donner les
moyens de les former sont dans les ports et n'existent pas ici. J'ai
donnť l'ordre de renouveler ces propositions, et je les adresserai de
nouveau au ministre, les choix d'ailleurs paraissant porter sur des
sujets qui en sont dignes et qui sont les plus anciens.
ę5į L'armement de ces corps aurait besoin d'Ítre ťchangť[1], mais
l'arsenal de Mayence n'en a pas les moyens; ces corps manquent
d'armuriers et en ont un besoin pressant. Le 1er rťgiment aurait aussi
besoin de gibernes, mais il n'en existe pas ici. Quant ŗ l'habillement,
presque toutes les recrues ne sont vÍtues que de vestes et de capotes,
et les effets sont encore en arriŤre; j'ignore s'il est permis
d'espťrer leur prochaine arrivťe.
[Note 1: Les troupes avaient pour arme le fusil de dragon,
c'est-ŗ-dire un fusil sans baÔonnette. (_Note de l'…diteur._)]
ęVoilŗ, Sire, les renseignements gťnťraux sur les rťgiments de marine.
Ces corps sont en mouvement pour se rassembler sur diffťrents points;
les gťnťraux de division placťs au milieu d'eux surveilleront constamment
leur instruction, et moi-mÍme je leur consacrerai autant de temps qu'il
me sera possible.
ęLe 37e lťger, qui se forme ici, ne sera pas rťuni aussi promptement que
l'indication du ministre avait pu le faire supposer. Soixante-huit
dťpartements ont envoyť leur contingent, quarante sont encore en retard,
mais en gťnťral ce sont les plus ťloignťs. L'espŤce d'hommes de ce
rťgiment est belle et ce corps sera fort beau lorsqu'il sera organisť;
mais tout lui manque ŗ la fois. Quoiqu'il ait deux mille cent hommes
rťunis, il n'a encore que quatre officiers. Les effets d'habillement ne
sont pas encore arrivťs, et on n'a pas de notions prťcises sur l'ťpoque
de leur arrivťe: il en est de mÍme des caisses de tambour et de ce qui
tient ŗ l'ťquipement. Cependant ce corps ne peut ni servir ni se mouvoir
avant d'avoir des officiers et son habillement. Dans le mouvement que
les troupes font sur la rive droite, je place le 37e ŗ Mayence et ŗ
Castel, oý M. le duc de Valmy a bien voulu me permettre de le laisser;
pour qu'ťtant tout rťuni et plus ŗ portťe des ressources il puisse Ítre
plus promptement organisť; il a bien voulu me permettre ťgalement de
placer dans ce rťgiment les premiers officiers arrivant de France, au
moins ŗ raison d'un par compagnie, mais il lui manquera encore des
sous-lieutenants; les sous-officiers de ce rťgiment ťtant en gťnťral peu
susceptibles de recevoir de l'avancement, la plupart d'entre eux ayant
ťtť nommťs par les prťfets, la veille de leur dťpart. Il faudrait pour
ce rťgiment un certain nombre d'ťlŤves de l'…cole militaire.
ęHanau ayant ťtť ťvacuť par le premier corps d'observation, les troupes
de marine de la deuxiŤme division sont en route pour s'y rendre; elles
ťtabliront leurs cantonnements au delŗ de Hanau, entre Fulde et Hanau.
ęCinq bataillons de la troisiŤme division, qui viennent d'arriver,
partent aussi pour se rendre ŗ Hanau, oý cette division se rassemblera.
ęLa premiŤre division se rassemble ŗ Hoescht, et de lŗ viendra ŗ Hanau,
lorsque je pourrai disposer d'Aschaffembourg; alors la quatriŤme
remplacera la premiŤre de Mayence ŗ Hoescht, et s'y formera.
ęChaque division reÁoit immťdiatement son ambulance, qui est organisťe
et en ťtat de marcher. Je serai moi-mÍme dans trois jours ŗ Hanau, oý
j'ťtablirai mon quartier gťnťral.
ęPresque tous les gťnťraux de brigade et adjudants commandants, et tout
ce qui tient aux ťtats-majors du corps d'armťe sont encore en arriŤre,
et nous en aurions cependant grand besoin.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU DUC DE VALMY
ęMayence, le 30 mars 1813.
ęPermettez-moi de vous rappeler diverses demandes que j'ai eu l'honneur
de vous faire verbalement, et auxquelles vous avez bien voulu me
promettre de faire droit.
ęVous avez bien voulu me promettre de faire incorporer dans le 37e
rťgiment les premiers officiers qui arriveraient de France, au moins
jusqu'ŗ concurrence d'un par compagnie. Je vous demande instamment,
aussitŰt que les deux premiers bataillons de ce rťgiment auront reÁu
leur habillement, de les faire partir de Mayence et de Castel pour
Fridberg, afin que le gťnťral Bonnet puisse avoir ce corps sous les yeux
et s'occuper de son instruction. Vous avez bien voulu me promettre de le
faire remplacer ŗ Mayence et ŗ Castel par les troisiŤme et quatriŤme
bataillons que commandera alors le major, et qui rejoindront les
premiers aussitŰt qu'ils auront reÁu officiers et habillements.
ęJe vous demande, mon cher marťchal, de placer dans Mayence, aussitŰt
que vous le croirez possible, le fond de la quatriŤme division, et de
porter, lorsque les troupes de la premiŤre division l'auront laissť
libre, son quartier gťnťral ŗ Hoescht, afin que, sortie de Mayence, elle
puisse mieux se former.
ęJe vous rappelle la promesse que vous avez bien voulu me faire de faire
changer tout l'armement des rťgiments de marine. Les rťgiments ont ordre
de dresser leurs ťtats de demande, et ils rťclameront prŤs de Votre
Excellence, dans le cas oý l'artillerie ferait des difficultťs, pour les
satisfaire et leur fournir les moyens de transport qu'il leur faudra.
ęLa premiŤre division est ŗ Hoescht, la deuxiŤme ŗ Friedberg, la
troisiŤme ŗ Hanau. Je vous demande de faire donner l'ordre que, quand il
arrivera des dťtachements pour ces divisions, on les dirige sur ces
diffťrents points. Lorsque les circonstances me les feront changer,
j'aurai l'honneur de vous en informer.
ęEnfin, mon cher marťchal, lorsqu'il y aura de la cavalerie dťsignťe
pour moi, je vous prie d'en h‚ter la marche autant que possible, attendu
que, n'en ayant pas un seul homme, je n'ai aucun moyen de communication
entre mes divisions.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU DUC DE VALMY.
ęHanau, le 1er avril 1813.
ęJ'ai l'honneur de vous informer que, conformťment aux nouveaux ordres
que je viens de recevoir de Sa Majestť, j'ordonne ŗ la deuxiŤme
division, qui est ŗ Friedberg, de se porter sur Fulde, et elle va
exťcuter son mouvement. La premiŤre division, qui est ŗ Hoescht, en
partira pour se rendre ŗ Friedberg, et je donne ťgalement ordre au
gťnťral Teste de partir avec les troupes qu'il a disponibles pour se
rendre ŗ Giesen, l'intention de Sa Majestť ťtant que cette division
reste sur les confins du royaume de Westphalie, du grand-duchť de Berg
et de la principautť de Nassau jusqu'ŗ ce qu'elle soit toute rťunie.
C'est donc sur Hanau que je vous prie de faire envoyer, au fur et ŗ
mesure de leur arrivťe, tous les corps ou dťtachements qui
appartiendraient ŗ la deuxiŤme ou ŗ la troisiŤme division, sur Friedberg
ceux de la premiŤre, et sur Giesen ceux de la quatriŤme. Je laisse
toujours ŗ Mayence et ŗ Castel, ainsi que nous en sommes convenus, le
37e lťger, jusqu'ŗ ce qu'il ait reÁu son habillement et des officiers,
et je vous rťitŤre la demande de diriger sur Hanau les deux premiers
bataillons aussitŰt qu'ils seront en ťtat.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT ņ NAPOL…ON.
ęHanau, le 1er avril 1813.
ęJ'ai l'honneur de rendre compte ŗ Votre Majestť que, conformťment ŗ ses
ordres qui viennent de me parvenir, je prescris au gťnťral Bonnet de se
porter, avec onze bataillons de marine qui appartiennent ŗ sa division,
de Friedberg, oý il est maintenant, sur Fulde. La premiŤre division le
remplacera ŗ Friedberg; la troisiŤme se rassemble ŗ Hanau, et le gťnťral
Teste, avec les corps de la quatriŤme division qu'il a, va se rendre ŗ
Giesen, oý il sera ŗ portťe du royaume de Westphalie, du grand-duchť de
Berg et de la principautť de Nassau.
ęJe laisse ŗ Mayence le 37e lťger jusqu'ŗ ce qu'il ait reÁu des
officiers et ses effets d'habillement. Ce serait compromettre
l'existence de ce beau rťgiment que de le faire marcher dans l'ťtat oý
il se trouve. AussitŰt que les deux premiers bataillons seront en ťtat,
ils rejoindront leur division avec le colonel. Les troisiŤme et
quatriŤme bataillons viendront ensuite avec le major.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU VICE-ROI.
ęHanau, le 1er avril 1813.
ęPermettez-moi de me rappeler au souvenir de Votre Altesse Impťriale et
de la fťliciter de la campagne laborieuse qu'elle vient de faire, et
dont le mťrite sera approuvť par tous les coeurs vraiment franÁais.
J'espŤre que vous Ítes ŗ la fin de vos travaux pťnibles, et que
l'avenir vous dťdommagera complťtement de tous les sacrifices que vous
avez faits.
ęJe viens d'arriver ici, oý je rťunis un beau corps d'armťe dont Sa
Majestť a daignť me confier le commandement. Nous serons, j'espŤre,
trŤs-promptement en ťtat de marcher. Dans la situation actuelle des
choses, Votre Altesse Impťriale trouvera peut-Ítre convenable que nous
ne soyons pas tout ŗ fait dans l'ignorance des ťvťnements qui se passent
du cŰtť oý elle se trouve, et c'est avec confiance que je lui fais la
demande d'Ítre assez bonne pour m'en faire informer.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęParis, le 1er avril 1813.
ęMon cousin, j'ai reÁu votre lettre du 26 mars.--Vous trouverez ci-joint
un rapport sur les renseignements que j'ai fait prendre dans les bureaux
du ministŤre de la guerre. J'ai donnť ordre que cinq mille hommes se
missent en marche de diffťrents ports pour rejoindre leurs rťgiments. Il
est nťcessaire que vous fassiez la revue de ces rťgiments, bataillon par
bataillon, compagnie par compagnie, afin de me faire connaÓtre les
cadres qui existent et ce qui y manque. Vous deviez avoir vingt
bataillons, formant seize mille hommes. Il paraÓt que, pour le moment,
ils ne formeront que dix mille hommes, puisqu'il faudra beaucoup de
temps pour que les dťtachements qui sont en route arrivent ŗ leurs
rťgiments.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU MAJOR G…N…RAL.
ęHanau, le 2 avril 1813.
ęJ'ai reÁu la lettre que Votre Altesse m'a fait l'honneur de m'ťcrire le
29 mars.
ęJ'ai l'honneur de vous rendre compte que, conformťment aux ordres de
l'Empereur, la division Bonnet est en roule pour Fulde, et que je vais
porter la division Compans entre Hanau et Fulde.
ęIl paraÓt que le prince de la Moskowa porte ses troupes sur Meiningen
au lieu de le faire sur Eisenach. Je ne pourrai porter moi-mÍme des
troupes sur Eisenach que lorsque le prince de la Moskowa dťbouchera de
Meiningen pour se porter sur la Saale. Tout autorisant ŗ croire que
l'ennemi est ŗ Leipzig et peut faire ŗ chaque instant un mouvement plus
en avant, il pourrait y avoir les consťquences les plus graves ŗ courir
risque de mettre en contact avec lui la division Bonnet, qui aura un
tiers de son monde en arriŤre, tant que le 37e n'aura pas rejoint, qui
n'a pas un seul homme de cavalerie pour l'ťclairer, et qui, plus que
cela, n'a pas encore une piŤce de canon ni un seul caisson de
cartouches.
ęLa division Compans et la division Friederich ont encore en arriŤre,
l'une, six bataillons, et l'autre sept, et ne les recevront que dans
quelques jours, de maniŤre qu'il me paraÓt impossible que Sa Majestť
calcule pouvoir faire opťrer les trois premiŤres divisions de mon corps
d'armťe avant le 15 avril.
ęJ'ai l'honneur de vous rendre compte aussi que le 23e rťgiment
d'infanterie lťgŤre, n'ayant qu'un seul officier par compagnie et ŗ
peine un sous-officier et pas un caporal ayant plus de trois mois de
service, il m'a paru de la plus urgente nťcessitť de donner quelques
secours ŗ ce corps, en lui accordant des sous-officiers tirťs d'autres
rťgiments. J'ai, en consťquence, ordonnť provisoirement que le 14e de
ligne, dont l'instruction est parfaite et le cadre excellent, lui
fournirait six caporaux pour Ítre faits sergents, et six soldats pour
Ítre faits caporaux; que le 37e lťger, qui est extrÍmement riche en
vieux soldats, fournirait douze caporaux et soldats pour Ítre faits
sergents et caporaux, et le 16e rťgiment provisoire, six autres: ce qui
donnera au 23e lťger deux sergents et deux caporaux nouveaux par
compagnie. Sans ce secours, il ťtait impossible que ce rťgiment, dont
l'espŤce d'hommes est trŤs-belle et de la meilleure volontť, rendÓt
aucun service avant six mois. Je vous prie d'obtenir de Sa Majestť
qu'elle approuve ces dispositions.
ęJ'ai adressť des mťmoires de proposition au ministre de la guerre pour
les 23e et 37e lťger, 11e provisoire, 121e de ligne et 2e de marine.
Comme ces corps manquent d'officiers, il serait de la plus grande
urgence que les nominations parvinssent promptement.
ęLe chef de bataillon Millaud, du 23e lťger, ayant obtenu sa retraite,
il manque ŗ ce rťgiment deux chefs de bataillon. Je sollicite ces deux
emplois, l'un pour M. Voisin, capitaine de grenadiers au 1er rťgiment,
qui a vingt ans de grade et qui jouit de la meilleure rťputation dans
son corps, et l'autre pour M. Fonvielle, capitaine de grenadiers au 82e
rťgiment, qui a quatre ans de grade, et que je connais pour un officier
trŤs-distinguť.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęParis, le 3 avril 1813.
ęMon cousin, il se rťunit ŗ Mayence deux divisions de marche de
cavalerie, la premiŤre, composťe de tous les dťtachements fournis de
France par les rťgiments qui font partie du premier corps de cavalerie,
formťs en quatre rťgiments de marche; l'autre, composťe de tous les
dťtachements des rťgiments qui font partie du deuxiŤme corps. Vous
prendrez le commandement de ces deux divisions, et vous les placerez
dans les environs de Hanau, dans des lieux oý elles puissent se former
et s'organiser. Les cinquante et un rťgiments de cavalerie de la grande
armťe entrent dans la formation de ces deux divisions, dont le ministre
de la guerre vous enverra le tableau.--Chacun de ces cinquante et un
rťgiments finira par fournir cinq cents hommes, ce qui portera ces
divisions ŗ vingt-cinq mille hommes. La tÍte de ces rťgiments ťtant ŗ
l'armťe de l'Elbe, et formant ŗ peu prŤs quinze mille hommes, cela fera
quarante mille hommes de cavalerie pour les cinquante et un
rťgiments.--Mon intention est bien, aussitŰt que cela sera possible, de
rťunir tous ces dťtachements ŗ leurs rťgiments respectifs ŗ l'armťe de
l'Elbe; mais, en attendant, ils doivent pouvoir servir et pouvoir se
battre, si cela est nťcessaire, avant leur rťunion. Vous passerez en
revue tous les dťtachements; vous leur ferez fournir ce qui leur
manquerait. Vous me proposerez la nomination aux emplois vacants: enfin
vous ferez tout ce qui est nťcessaire pour que les divisions soient bien
et promptement organisťes.--Le ministre de la guerre envoie les
gťnťraux, colonels, majors et chefs d'escadron nťcessaires ŗ ces corps.
Je donne ordre au duc de Plaisance de se rendre ŗ Mayence pour y suivre,
sous vos ordres, tous les dťtails de cette organisation.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęParis, le 7 avril 1813.
ęMon cousin, j'ai donnť ordre que la division Bonnet se rendÓt ŗ Fulde.
J'ai donnť ordre que deux bataillons de Wurtzbourg, faisant partie de
la division Durutte, se rendissent de Wurtzbourg ŗ Fulde, oý ils seront
sous les ordres du gťnťral Bonnet.--Les quatre bataillons de la division
Durutte, qui sont ŗ Mayence, se rendent ťgalement ŗ la division Bonnet.
Le gťnťral Bonnet aura ainsi six bataillons de la division Durutte,
qu'il fera repasser ŗ leur division aussitŰt que cela pourra se faire
avec sŻretť.--J'ai ordonnť que le gťnťral Durutte, s'il ťtait obligť de
quitter la Saale, se renferm‚t dans Erfurth, ce qui porterait la
garnison de cette place ŗ cinq mille hommes.--Le gťnťral Bonnet doit se
mettre en communication avec le prince de la Moskowa ŗ Wurtzbourg. Il y
a une route directe; faites-la reconnaÓtre.--Il y a ŗ Gotha un millier
d'hommes appartenant aux princes de Saxe, et neuf cent un hommes de ma
garde ŗ cheval, commandťs par le colonel Lyon. Ces troupes ne se
retireront que dans le cas oý cela serait nťcessaire, et oý l'ennemi
ferait un grand mouvement par Dresde, ce qui ne paraÓt pas probable.--Le
gťnťral Bonnet tiendra une avant-garde ŗ Vach-sur-la-Werra, et se mettra
en correspondance avec le gťnťral Souham, qui est ŗ Meiningen, ťgalement
sur la Werra.--Faites reconnaÓtre cette route; donnez ordre au gťnťral
Pernetti de fournir sans dťlai son artillerie ŗ la division Bonnet. Il
est de la plus grande importance que cette division ait ses seize
piŤces de canon.--AussitŰt que la division Bonnet aura son artillerie et
que la division Compans aura ťgalement ses seize piŤces, vous pousserez
la division Compans sur Fulde et Bonnet sur Eisenach.--Faites connaÓtre
ŗ Gotha que les troupes de Saxe-Gotha et de Saxe-Weimar sont sous les
ordres du gťnťral Bonnet.--Si les neuf cents hommes de ma garde ťtaient
obligťs d'ťvacuer Gotha, donnez ordre au gťnťral Bonnet de les retenir
avec lui.--AussitŰt que votre troisiŤme division aura ťgalement son
artillerie, vous la dirigerez sur Fulde. Tous ces mouvements
prťparatoires ont pour but de faire sentir ŗ l'ennemi la prťsence de nos
forces et de l'empÍcher de se porter sur le vice-roi, qui est, avec cent
mille hommes, en avant de Magdebourg.--Il paraÓt que vous ne pouvez pas
compter sur votre quatriŤme division, puisqu'elle ne sera formťe qu'au
mois de mai ou de juin.--Faites-moi connaÓtre la situation de vos
divisions, de votre artillerie et de votre gťnie, en matťriel et
personnel.--Je suppose que les rťgiments de marine ont leurs musiques.
S'ils n'en avaient pas, faites-leur-en former. Je suppose aussi qu'ils
ont des sapeurs avec de bonnes haches.--Les rťgiments provisoires
doivent aussi avoir au moins quatre sapeurs par bataillon.--Vous devez
connaÓtre mon rŤglement pour les bagages et les ambulances, et ce que
j'ai accordť aux officiers pour porter leurs bagages et aux corps pour
porter leur comptabilitť en chevaux de b‚t.--Donnez des ordres en
consťquence. Faites-moi connaÓtre si vos troupes sont au courant pour la
solde.--Cela est important et soulagerait le pays.--Les bataillons de
vos rťgiments de marine sont trop faibles; vous devez donc laisser ŗ
Mayence six cadres de bataillons, savoir: deux pour le rťgiment qui a
huit bataillons, deux pour celui qui en a six, et un pour chacun des
deux qui en ont trois.--De sorte que les bataillons qui vous resteront
seront au moins de six cents hommes chacun.--J'ai pris des mesures pour
complťter les six cadres de bataillons laissťs ŗ Mayence; il ne faut
donc les affaiblir en aucune maniŤre.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęParis, le 7 avril 1813.
ęMon cousin, j'ai ordonnť qu'un bataillon espagnol se rendit ŗ la
division Bonnet. Comme le gťnťral Bonnet connaÓt l'esprit des Espagnols,
il faudra qu'il exerce sur eux une grande surveillance.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęParis, le 7 avril 1813.
ęMon cousin, donnez ordre que quatre mille quintaux de farine soient
rťunis ŗ Fulde pour le service de votre corps d'armťe.--Faites-y
confectionner cent mille rations de pain biscuitť, de sorte qu'en
passant, votre corps puisse prendre du pain pour quatre jours.--AussitŰt
que la division Bonnet sera arrivťe ŗ Eisenach, vous y ferez ťgalement
rťunir quatre mille quintaux de farine.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęParis, le 7 avril 1813.
ęMon cousin, les cadres des cinq bataillons des 35e, 36e lťgers, 131e,
132e, et 133e ont dŻ arriver ŗ Erfurth le 2 avril. Je leur avais donnť
l'ordre de se rendre ŗ Mayence; depuis, j'ai changť cette disposition.
Ils doivent Ítre dirigťs par Wurtzbourg sur Ratisbonne, oý ces cadres
trouveront quatre mille hommes bien armťs et bien ťquipťs, venant de
l'armťe d'Italie. Envoyez donc ŗ leur rencontre et faites-les dťtourner
de la route au point oý on les rencontrera.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT ņ NAPOL…ON.
ęHanau, le 8 avril 1813.
ęSire, je reÁois les lettres que Votre Majestť m'a fait l'honneur de
m'ťcrire le 3 avril. Je ferai en sorte de remplir les intentions de
Votre Majestť ŗ l'arrivťe des divisions de cavalerie qui doivent venir
ici.
ęJe viens d'achever la revue de dťtail de celles des troupes de mon
corps d'armťe qui sont arrivťes ici. J'ai, en gťnťral, eu lieu d'Ítre
content: et, avec quelques jours donnťs ŗ l'instruction, quelques
nominations dont les demandes ont dťjŗ ťtť faites, et quelques envois
d'officiers pour les corps qui manquent de sujets, ces troupes seront en
ťtat de bien servir Votre Majestť. Elles sont animťes d'un trŤs-bon
esprit. J'aurais dťjŗ adressť au prince de Neufch‚tel un rapport
circonstanciť, corps par corps, si je n'avais pas ťtť obligť d'attendre
des ťtats qui me sont nťcessaires et n'ont pu encore m'Ítre fournis.
ęL'artillerie de la division Bonnet est arrivťe aujourd'hui ici et part
demain pour rejoindre sa division ŗ Fulde: c'est la seule que j'aie
encore reÁue. Cette artillerie est fort belle, bien attelťe et en fort
bon ťtat. Comme les canonniers destinťs ŗ la servir ne sont pas encore
arrivťs, j'ai ordonnť de former, par division, un dťtachement de cent
cinquante hommes pris dans les rťgiments de marine.
ęJe supplie Votre Majestť de me faire connaÓtre si, en portant la
division Bonnet sur Eisenach, elle ne m'autorise pas ŗ mettre aux ordres
de ce gťnťral cinq cents chevaux de la cavalerie qu'elle m'annonce.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU DUC DE TR…VISE.
ęHanau, le 9 avril 1813.
ęJ'ai reÁu l'ordre de l'Empereur d'envoyer une division sur Vach ou
Eisenach, afin d'avoir plus de pays et de ressources pour organiser mes
troupes; mais, d'aprŤs les nouvelles rťpandues de la retraite du gťnťral
Durutte et des mouvements de l'ennemi en avant de la Mulde, j'ai
suspendu ce mouvement jusqu'ŗ ce que cette division fŻt organisťe et eŻt
reÁu de l'artillerie et de la cavalerie. Elle va recevoir son
artillerie, mais je ne suis pas en mesure encore de lui fournir de la
cavalerie. On m'assure qu'il y a ŗ Gotha un corps de cavalerie de la
garde; s'il en est ainsi, veuillez me le faire connaÓtre, parce qu'alors
je pourrais porter des troupes sur Vach sans inconvťnient; et, dans ce
cas, je vous prierais d'ordonner au commandant de la garde, ŗ Gotha,
d'entrer en communication avec le gťnťral Bonnet et de s'informer de
toutes les nouvelles qu'il aurait de l'ennemi; et, si l'approche de
l'ennemi le forÁait de se retirer, de se diriger sur Vach, et de rester
avec le gťnťral Bonnet pour manoeuvrer de concert avec lui, ce gťnťral
devant se retirer sur Fulde si les circonstances l'exigeaient.
ęVeuillez, mon cher marťchal, me faire connaÓtre si ce que j'ai
l'honneur de proposer ŗ Votre Excellence vous convient, afin que je
puisse donner des ordres en consťquence au gťnťral Bonnet.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęSaint-Cloud, le 9 avril 1813.
ęMon cousin, le gťnťral Durutte a envoyť quatorze piŤces de canon
attelťes ŗ Erfurth. J'ai ordonnť que ces piŤces fussent donnťes ŗ votre
corps d'armťe. Faites-les prendre aussitŰt que vous serez ŗ portťe de le
faire, sans les compromettre.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęSaint-Cloud, le 10 avril 1813.
ęMon cousin, cinq mille hommes bien habillťs et bien ťquipťs sont
dirigťs des dťpŰts de France sur Mayence, pour complťter les six cadres
de la marine que vous avez laissťs ŗ Mayence.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęSaint-Cloud, le 10 avril 1813.
ęMon cousin, veillez ŗ ce que les bataillons qui composent les rťgiments
provisoires se procurent les chevaux de b‚t qu'ils doivent avoir pour
leur ambulance.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU G…N…RAL BONNET.
ę13 avril 1813 soir.
ęMonsieur le gťnťral, je reÁois votre lettre en date de ce jour. J'ai
reÁu une lettre du vice-roi, qui ťtait le 10 ŗ Strasfurth. Le gťnťral
d'York ťtait ŗ Dessau, le gťnťral Vittgenstein au delŗ de l'Elbe; un
rassemblement de troupes considťrable paraissait avoir lieu entre Dresde
et Golditz, tout annonÁait un mouvement gťnťral de l'ennemi, mais rien
n'annonÁait d'une maniŤre prťcise ce qu'il voulait faire, et si son
intention ťtait seulement de couvrir une entreprise sur Wittembourg ou
de se porter dans la Thuringe. Dans cet ťtat de choses, arrÍtez votre
mouvement sur Vach et occupez, si vous le croyez sans inconvťnient,
Eisenach par une arriŤre-garde ou seulement par des postes. Nous
verrons, d'ici ŗ deux jours, ce qu'il convient de faire; ordonnez
cependant ŗ Eisenach qu'on y rassemble des vivres.
ęEn restant ainsi placť vous serez facilement liť avec le gťnťral
Compans, et, comme je pousse ma troisiŤme division sur Fulde et que le
prince de la Moskowa se concentre ŗ Meiningen, nous prťsenterons, d'ici
ŗ peu de jours, une force considťrable sur ce point.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU MAR…CHAL NEY.
ę13 avril 1813.
ęMon cher prince, j'ai portť une division sur Vach ayant ses postes sur
Eisenach, une autre est ŗ Fulde, la troisiŤme va soutenir celle-ci. Sa
Majestť m'a fait l'honneur de m'ťcrire qu'elle vous avait donnť l'ordre
de rassembler votre corps sur Meiningen, et que peut-Ítre vous le
porteriez sur Erfurth. Veuillez me faire connaÓtre ce que vous comptez
faire, afin que je rŤgle mes mouvements en consťquence et que je
m'avance sur Eisenach et mÍme sur Gotha, si votre mouvement en avant
s'exťcute. Une lettre du vice-roi m'annonce qu'il avait encore, le 10,
son quartier gťnťral ŗ Strasfurth, que le gťnťral d'York ťtait ŗ Dessau
et paraissait Ítre suivi par le gťnťral Wittgenstein, et que tout
annonÁait un mouvement gťnťral de l'ennemi; mais que rien n'indiquait
d'une maniŤre prťcise ce qu'il voulait faire, et si son intention ťtait
de se porter sur lui ou de chercher ŗ pťnťtrer dans la Thuringe.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęSaint-Cloud, le 14 avril 1813.
ęMon cousin, je reÁois votre lettre du 11 avril, et j'y vois que, le 12,
la division Compans sera ŗ Fulde, et que, le 12, la division Bonnet part
pour Eisenach. Elle aura donc pu y arriver le 15. Vous ne me parlez pas
du mouvement de votre troisiŤme division. Je suppose que, le 15, cette
division sera aussi prŤs de Fulde, et que, vous-mÍme, vous aurez votre
quartier gťnťral sur Eisenach.--Gotha est un trŤs-beau pays, oý il est
nťcessaire de faire sur-le-champ une rťunion de farines.--Je suppose que
votre troisiŤme division a dťjŗ son artillerie; mais ce qui importe,
c'est que vous ayez au moins une ou deux compagnies d'artillerie lťgŤre
et vos batteries de rťserve. Il faut beaucoup d'artillerie dans cette
guerre.--Vous devez avoir quatre-vingt-douze piŤces de canon; mais seize
piŤces ťtaient destinťes ŗ la quatriŤme division, qui ne peut pas encore
entrer en ligne: cela doit donc au moins vous faire soixante-seize.--Le
duc d'Istrie arrive avec une division de la garde ŗ pied et une ŗ
cheval, et environ cinquante-deux piŤces. Ainsi ce corps d'armťe,
formant provisoirement quarante mille hommes d'infanterie et six ŗ sept
mille chevaux, aura donc cent vingt-huit piŤces de canon.--La seconde
division d'infanterie de la garde, avec trente-huit piŤces de canon, ne
doit pas tarder ŗ le joindre.--Par une inconcevable disposition du
gťnťral Sorbier, seize compagnies, qui devaient arriver de Magdebourg,
sont en retard. Je suppose cependant qu'elles ne tarderont pas ŗ
arriver. On y a pourvu nťanmoins par le mouvement de quatorze autres
compagnies.--Je suppose que les premier et second bataillons du 37e sont
en marche pour rejoindre la division Bonnet, et que les troisiŤme et
quatriŤme bataillons ne tarderont pas, ce qui, joint aux six bataillons
du gťnťral Durutte, provisoirement en subsistance dans cette division,
en portera le nombre ŗ vingt bataillons. Il faudra en former trois
brigades, chacune de six ŗ sept bataillons.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU MAJOR G…N…RAL.
ę15 avril 1813.
ęJ'ai reÁu l'ordre de l'Empereur de porter, du 13 au 18, ma deuxiŤme
division sur Vach, et mes premiŤre et troisiŤme sur Fulde, et ensuite de
pousser des troupes sur Eisenach.
ęMa deuxiŤme division est dans ce moment-ci ŗ Vach, ayant ses
avant-postes sur Eisenach; ma premiŤre division est ŗ Fulde; ma
troisiŤme division part demain matin pour se rendre ťgalement sur cette
place, et j'y serai moi-mÍme aprŤs-demain. Les ordres de l'Empereur
ťtant en pleine exťcution, je serai sur Eisenach aussitŰt que possible.
ęL'Empereur m'avait donnť l'ordre de passer en revue et d'organiser les
deux divisions de marche de cavalerie qui sont attachťes ŗ mon corps
d'armťe. Ces troupes, arrivant plus tard que Sa Majestť ne l'avait
pensť, et mon dťpart ťtant devenu nťcessaire, je ne pourrai pas remplir
cette mission.
ęJe crois qu'il est de mon devoir de vous prier de reprťsenter ŗ Sa
Majestť qu'elle ne doit pas considťrer mon corps d'armťe, dans l'ťtat
actuel des choses, comme en ťtat de combattre. Elle en connaÓt la
situation d'aprŤs le rapport que j'ai eu l'honneur de lui faire; mais je
vais entrer encore ŗ cet ťgard dans quelques dťtails.
ę1į Les corps sont sans officiers, et de vieilles troupes bien
instruites ne seraient pas capables de marcher avec un si petit nombre
d'officiers pour les conduire, et ŗ plus forte raison des nouvelles. Les
corps ont envoyť des mťmoires de proposition pour tous les sujets
susceptibles d'occuper les emplois; de ces mťmoires, envoyťs depuis
plusieurs mois au ministre, et en duplicata par moi, il n'en est pas
revenu un seul.
ęIl y a environ quatre-vingts emplois pour lesquels les corps ne peuvent
pas prťsenter de sujets. Sa Majestť a ordonnť d'envoyer sur les deux
corps d'observation du Rhin un assez grand nombre d'officiers. Tous ont
ťtť envoyťs au premier corps, et il ne m'en est revenu que neuf chefs de
bataillon qui ont ťtť placťs. Il y en a, ŗ Mayence, que j'ai demandťs
et qui n'arrivent pas, entre autres le colonel Deschamps, ŗ qui j'ai
fait donner l'ordre de venir commander le 2e rťgiment de marine, et dont
je n'entends pas parler.
ęSi Sa Majestť veut que ces troupes s'organisent promptement, il faut
qu'elle m'autorise ŗ faire recevoir, dans les corps, les sujets pour
lesquels il a ťtť envoyť des mťmoires de proposition.
ę2į Les premiŤre et deuxiŤme divisions ont seules leur artillerie. La
troisiŤme n'a ni un canon ni un caisson de cartouches.
ę3į Je n'ai pas un seul homme de cavalerie. Il me semble qu'il faudrait
prendre, sur les deux divisions qui se forment, un millier de chevaux
les plus en ťtat de servir, pour que je ne fusse pas tout ŗ fait
dťpourvu des moyens de m'ťclairer.
ę4į C'est depuis avant-hier seulement que nous connaissons ici le dťcret
de l'Empereur relatif aux ambulances, et les corps n'ont eu encore ni le
temps ni l'argent pour se procurer les chevaux de b‚t.
ę5į Tous les corps manquent tout ŗ fait de chirurgiens.
ę6į Il n'y a, pour tout le corps d'armťe, qu'un seul adjoint ŗ
l'ťtat-major. Il n'existe pas un commissaire des guerres, ni aux
divisions, ni au quartier gťnťral.
ęVotre Altesse sentira qu'il y a ici une grande rťunion d'hommes, mais
qu'il n'y a pas une armťe organisťe, et qu'il serait funeste au bien du
service de Sa Majestť de mettre ces troupes en situation de rencontrer
l'ennemi avant d'Ítre rťguliŤrement constituťes pour tout ce qu'il leur
faut.
ęUn de mes aides de camp est prŤs du prince de la Moskowa, et me
rapportera la nouvelle de l'ťpoque prťcise de ses mouvements, d'aprŤs
lesquels je me rťglerai.
ęJ'ai l'honneur de joindre ŗ ma lettre l'ťtat de situation que vous
m'avez demandť.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU DUC DE PLAISANCE.
ę15 avril 1813.
ęJe reÁois, seulement, monsieur le duc, votre lettre du 12 et je vous ai
ťcrit, ŗ l'arrivťe du gťnťral Dommanges, pour vous dire combien
j'attachais de prix ŗ ce que les troupes passassent promptement le Rhin
et vinssent s'ťtablir dans les cantonnements, auprŤs de Hanau. Il y a
place pour recevoir tout ce que vous enverrez; mais, aujourd'hui que je
mets en mouvement mon infanterie, il y a encore plus de place.
ęJe vous prie d'ordonner que tous les emplois de sous-officiers soient
remplis immťdiatement dans les compagnies s'il y a des sujets propres ŗ
les occuper; il faut aussi faire des propositions, pour les nominations
d'officier, de tous les sujets susceptibles d'Ítre ťlevťs en grade, car
les dťtachements ne pourront servir qu'autant que les cadres seront bien
complets. Un vieux corps bien instruit, dans lequel il y a peu de
sous-officiers et d'officiers, sert mal; un nouveau corps ne sert pas et
se dťtruit.
ęJe pars de Hanau pour suivre mon infanterie; en consťquence, je ne
pourrai donc pas m'occuper de ce travail important. Je laisse ici le
gťnťral Millaud pour le faire momentanťment. Je pense qu'il serait
convenable au bien du service de l'Empereur que vous vinssiez ici pour
faire ce travail, aussitŰt que vous aurez fait passer le Rhin aux
troupes arrivťes, et pris des mesures pour qu'aucune de celles qui
arriveront ne s'arrÍte sur la rive gauche; alors le gťnťral Millaud
viendrait prŤs de moi pour commander tout ce qui serait disponible et
vous m'enverriez tout ce qui serait susceptible de faire un peu de
service. Je prendrai d'ailleurs des mesures pour l'instruction de ce
dťtachement que je dťsirerais que vous pussiez porter immťdiatement de
mille ŗ douze cents chevaux.
ęJe vous prie de me faire connaÓtre journellement vos opťrations, afin
que je sache toujours sur quoi je peux compter et que je connaisse
quelles sont les troupes dont je puis disposer de suite, et ŗ quelle
ťpoque je pourrai faire usage du reste.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU G…N…RAL MILLAUD.
ęHanau, le 16 avril 1813.
ęMonsieur le comte, forcť de quitter Hanau et de suivre mes divisions,
je vous prie de me supplťer pour faire sur la cavalerie qui doit
arriver, le travail dont j'ťtais chargť par Sa Majestť jusqu'ŗ l'arrivťe
du duc de Plaisance. Vous ťtablirez votre quartier gťnťral ŗ Hanau; vous
passerez en revue tous les dťtachements de cavalerie qui arriveront, et
vous m'en rendrez compte journellement et me ferez connaÓtre: 1į la
force des dťtachements ŗ leur arrivťe; 2į le nombre d'hommes et de
chevaux laissťs en route; 3į le nombre des chevaux blessťs; 4į enfin le
lieu d'oý est parti le corps. Vous me ferez connaÓtre ťgalement le
nombre des officiers prťsents et le nombre des emplois vacants; le
nombre des sous-officiers prťsents et le nombre des emplois de
sous-officiers vacants. Vous ordonnerez de remplir immťdiatement tous
les emplois de sous-officiers vacants lorsqu'il y aura des sujets
propres ŗ les remplir; vous ferez faire des mťmoires de proposition pour
tous les emplois d'officiers vacants lorsqu'il y aura des sujets dignes
de les occuper. Enfin, monsieur le comte, vous ne nťgligerez rien pour
me faire connaÓtre la vťritable situation de ces corps et accťlťrer leur
organisation.
ęAussitŰt aprŤs l'arrivťe du duc de Plaisance, vous partirez pour me
rejoindre, emmenant avec vous tous les dťtachements susceptibles de
servir, et prendrez ŗ l'armťe, jusqu'ŗ l'organisation des divisions, le
commandement de ce qui part aujourd'hui et de ce que vous avez.
ęVous ferez connaÓtre au duc de Plaisance que je dťsire qu'il continue ŗ
m'adresser des rapports semblables.
ęJe vous ai fait remettre un projet de cantonnement qui donne le moyen
de placer six mille chevaux aux environs de Hanau.
ęVous aurez soin de placer ces troupes d'une maniŤre mťthodique, afin
que les corps puissent se rassembler facilement et que les officiers
supťrieurs puissent faire chaque jour la visite de leurs cantonnements.
Enfin vous rťglerez, par un ordre, vos instructions de maniŤre ŗ tirer,
le plus promptement possible, le meilleur parti de ces hommes, et afin
qu'ils soient bientŰt en ťtat de faire le service devant l'ennemi.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęMayence, le 17 avril 1813.
ęMon cousin, je n'ai aucune nouvelle de votre corps d'armťe.
L'ťtat-major ne connaÓt ni le nombre d'hommes que vous avez sous les
armes ni le nombre d'officiers qui manquent. Le major gťnťral assure
que vous avez envoyť cela au ministre de la guerre: c'est autant de
chiffons qui resteront dans les bureaux sans rťponse.--Envoyez vos ťtats
de situation et vos demandes au prince major gťnťral. Votre
correspondance avec le ministre de la guerre est inutile
aujourd'hui.--Envoyez l'ťtat des places vacantes et celui des officiers
que vous proposez d'avancer. Enfin faites connaÓtre tout ce qui vous
manque, afin que j'y pourvoie sans dťlai.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęMayence, le 17 avril 1813.
ęMon cousin, le gťnťral Durutte, par une lettre de Blankenberg du 15
avril, annonce qu'il a envoyť ŗ Erfurth, et de lŗ ŗ _Salsungen_, sur la
Werra, quatorze piŤces de canon qui lui ťtaient inutiles. Voyez oý sont
ces piŤces et rťunissez-les ŗ l'artillerie de votre corps d'armťe.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęMayence, le 17 avril 1813.
ęMon cousin, j'ai dťcidť que huit cadres d'artillerie ŗ pied partiraient
le 19 de Mayence pour votre corps d'armťe. Ces cadres seront complťtťs
en officiers et sous-officiers que vous ferez choisir dans l'artillerie
de marine. Vous porterez ensuite ces huit compagnies ŗ cent vingt hommes
chacune au moyen de huit cents canonniers marins, que vous prendrez dans
vos bataillons. Six de ces compagnies seront employťes au service de
l'artillerie de vos trois premiŤres divisions; les deux autres
compagnies serviront vos deux batteries de rťserve ŗ pied. Vous recevrez
ensuite deux compagnies d'artillerie venant de l'intťrieur: elles seront
employťes ŗ votre parc.Ľ
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęMayence, le 17 avril 1813.
ęMon cousin, je reÁois au moment mÍme votre rapport datť de Hanau le 10
avril, qui revient de Paris.--Vous trouverez ci-joint la notice de
dťcrets que je viens de rendre. Faites reconnaÓtre ces officiers
sur-le-champ. Il est de la plus haute importance que vous prťsentiez de
bons sujets pour les places vacantes dans les rťgiments de marine. Que
votre prťsentation arrive dans vingt-quatre heures, vous aurez
sur-le-champ les dťcrets et, sans perdre de temps, vous ferez
reconnaÓtre les officiers. Ayez toujours soin de prendre de bons
officiers, et de les prendre dans un rťgiment pour supplťer ŗ ce qui
manquerait dans l'autre. AussitŰt que j'aurai votre rapport, il n'y aura
plus rien ŗ faire sous ce point de vue.--De toutes les manoeuvres je
dois vous recommander la plus importante, c'est le ploiement en
bataillon carrť par bataillon. Il faut que les chefs de bataillon et les
capitaines sachent faire ce mouvement avec la plus grande rapiditť;
c'est le seul moyen de se mettre ŗ l'abri des charges de cavalerie et de
sauver tout un rťgiment; comme je suppose que ces officiers sont peu
manoeuvriers, faites-leur en faire la thťorie, et qu'on la leur explique
tous les jours, de maniŤre que cela leur devienne extrÍmement
familier.--Pour le 23e rťgiment, vous parlez toujours de vos envois au
ministre de la guerre. Envoyez-moi les demandes et les propositions
nťcessaires pour complťter ce rťgiment.--Choisissez les officiers pour
le 86e dans le 47e, et que, par ce moyen, ce rťgiment provisoire soit
complťtť en officiers.--Vous ne parlez pas du major ou colonel qui
commande le 25e provisoire.--J'ťcris au ministre de la guerre pour faire
rejoindre les deux compagnies du 86e, qui sont dans la Mayenne.--Donnez
des ordres pour que le bataillon espagnol ne soit point envoyť en
dťtachement, et qu'on l'ait toujours sous la main, ŗ l'abri de la
sťduction. Il ne faut point l'employer au service d'avant-garde ou
d'escorte, mais le tenir toujours ensemble et au milieu des bataillons
franÁais.--Sur les officiers revenus d'Espagne, on va vous envoyer les
officiers dont vous avez besoin.--Envoyez la rťcapitulation de ce qui
vous manque en colonels, majors, majors en second, chefs de bataillon,
capitaines, etc.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęMayence, le 19 avril 1813.
ęMon cousin, je vous envoie copie de la lettre que j'ťcris au duc
d'Istrie. Prenez les ordres du duc d'Istrie, s'il y est; prenez sur vous
s'il n'y est pas. La marche de l'ennemi me paraÓt fort imprudente; on
peut l'en faire repentir; mais surtout Űtez-nous toute inquiťtude sur
notre flanc gauche.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU DUC D'ISTRIE.
ęMayence, le 19 avril 1813.
ęLe major gťnťral a dŻ vous expťdier un officier pour vous faire
connaÓtre qu'un corps de partisans de trois ŗ quatre escadrons, de six
piŤces de canon et de deux ŗ trois bataillons, s'ťtait portť sur
Mulhausen et Vanfried; que le gťnťral westphalien Hammersten avait peur
d'Ítre sťrieusement attaquť et craignait d'Ítre obligť de se porter sur
Witzenhausen, ce qui donnait de fortes inquiťtudes au roi ŗ
Cassel.--J'espŤre que l'arrivťe du gťnťral Souham dans la journťe du 17
ŗ Gotha, et celle du gťnťral Bonnet qui, ce me semble, a dŻ Ítre, le 17
au soir, ŗ Eisenach, auront ralenti la marche de l'ennemi. J'espŤre que
vous-mÍme, arrivť ŗ Eisenach, vous vous serez portť sur les derriŤres de
l'ennemi pour dťgager le gťnťral westphalien et tranquilliser Cassel de
ce cŰtť. Cela est d'autant plus important que ces partis sur le flanc
gauche inquiťteraient nos communications avec Erfurth.--Ainsi donc,
aussitŰt que vous serez arrivť ŗ Eisenach, mettez plusieurs corps
d'infanterie et de cavalerie sur les derriŤres de l'ennemi, et dťgagez
le gťnťral Hammersten.--…crivez au roi ŗ Cassel pour lui faire connaÓtre
votre mouvement et le rassurer.--Le prince de la Moskowa ťtant dťjŗ sur
Erfurth, les mouvements que vous pouvez faire sur les derriŤres de
l'ennemi seront d'un heureux effet et pourront donner lieu ŗ quelques
coups de sabre et ŗ la prise de quelques bataillons ennemis.--Le gťnťral
LefŤvre Desnouettes me paraÓt trŤs-propre pour cette expťdition, mais
appuyez-le par de l'infanterie. Enfin faites faire tout ce qu'il faut:
cela est trŤs-important, car ce serait un trŤs-grand malheur si le roi
ťtait obligť d'ťvacuer Cassel.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU MAJOR G…N…RAL.
ęPhilippsthal, le 19 avril 1813, quatre heures du matin.
ęMonseigneur, je reÁois la lettre que Votre Altesse m'a fait l'honneur
de m'ťcrire le 17, ainsi que celles de Sa Majestť. J'ai reÁu hier au
soir une lettre du prince de la Moskowa, d'Erfurth, du 17 au soir. Elle
confirme les nouvelles qu'il m'avait donnťes prťcťdemment, que l'ennemi
n'a pas de forces ŗ portťe. Les coureurs qui s'ťtaient montrťs se sont
retirťs.
ęJ'ai deux divisions ŗ Eisenach, et j'occupe Gotha. Le prince de la
Moskowa comptait mettre aussi une division ŗ Gotha; je lui ai fait avec
instance la demande de me laisser cette ville, qui m'est indispensable
pour subsister. Ma troisiŤme division arrivera demain ŗ Eisenach; je
serai moi-mÍme dans cette ville dans trois heures.
ęJe vais faire reconnaÓtre aujourd'hui les officiers que Sa Majestť a
nommťs, et je vais faire rťdiger de suite le tableau des emplois vacants
et les mťmoires de proposition. Je n'ai pu faire faire ce travail hier,
parce que les troupes ťtaient en marche.
ęD'aprŤs la rťcapitulation que j'ai faite des emplois vacants et des
sujets propres ŗ les remplir, c'est-ŗ-dire des mťmoires de proposition
que je vais adresser de nouveau ŗ Votre Altesse, il faut soixante
capitaines, un officier payeur, deux adjudants-majors, soixante-sept
lieutenants, qui ne peuvent pas Ítre fournis par les corps, faute de
sujets. Ainsi c'est ce nombre de sujets qu'il est nťcessaire d'envoyer ŗ
mon corps d'armťe pour remplir les emplois vacants; et je suppose que
tous les sous-lieutenants nommťs pour les rťgiments de marine ont
rejoint.
ęLe 25e provisoire n'a ni colonel ni major; mais le duc de Valmy m'a
annoncť qu'il en avait ŗ Mayence, et je l'ai instamment priť de leur
donner l'ordre de me rejoindre. Ayant reÁu des officiers supťrieurs
revenant du troisiŤme corps depuis que j'ai eu l'honneur d'adresser mon
rapport, je les ai placťs dans les diffťrents corps qui en manquaient.
J'aurai l'honneur d'en adresser l'ťtat exact, afin que Votre Altesse
veuille bien donner les lettres de passe.
ęJ'ai eu l'honneur d'adresser ŗ Votre Altesse, par le colonel Jardet,
mon aide de camp, ŗ son arrivťe ŗ Mayence, un ťtat de situation dans la
forme demandťe. Ainsi je pense que Sa Majestť a, pour le nombre des
prťsents sous les armes, tous les documents que je puis lui fournir.
Quant au nombre des emplois vacants, ils se composent de ceux vacants
par manque de sujets, et que j'ai relatťs plus haut, et des propositions
faites par les corps et dont Votre Altesse va recevoir le double.
ęMes troupes, en passant ŗ Fulde, se sont complťtťes en pain. Il restera
encore en rťserve trois mille quintaux de farine, dont douze cents
ťtaient, ŗ mon passage, en magasin, et le surplus devait Ítre livrť dans
deux jours.
ęIl n'existe point de fours militaires ŗ Fulde: les moyens de
fabrication que le pays comporte sont de huit mille rations par jour et
de vingt-quatre mille dans un rayon de deux ŗ trois lieues. N'ayant ni
officiers du gťnie ni employťs pour la construction des fours, j'ťcris
au prťfet de Fulde, pour qu'il ait ŗ remplir les intentions de Sa
Majestť; et je ferai, ŗ Eisenach, tout mon possible pour exťcuter ses
ordres.
ęOn s'occupe de rassembler ŗ Eisenach les quatre mille quintaux de
farine demandťs. J'ai fait la demande d'un rassemblement de huit ŗ dix
mille quintaux ŗ Gotha, qu'on m'a promis de former immťdiatement.
ęAussitŰt que le retour d'hiver rigoureux qui se fait sentir sera passť,
je ferai camper les troupes; et, d'ici lŗ, je les rassemblerai, autant
que possible, pour que leur instruction soit poussťe avec activitť.
ęLes quatorze bouches ŗ feu du gťnťral Durutte sont ŗ mon corps d'armťe.
Je les ai attachťes provisoirement ŗ la troisiŤme division, qui n'a pas
encore son artillerie.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU MAJOR G…N…RAL.
ęEisenach, le 19 avril 1813.
ęMonseigneur, j'ai l'honneur de rendre compte ŗ Votre Altesse que je
porte aprŤs-demain la division Bonnet sur Gotha; elle sera cantonnťe en
entier dans cette ville ou dans les villages circonvoisins, en arriŤre
et sur la droite de cette ville. Elle h‚tera la formation des magasins
de farine ŗ Gotha. Je porte la premiŤre division sur Langensalza, oý je
fais rťunir aussi des subsistances. La troisiŤme division sera placťe ŗ
Eisenach et en avant. Il m'a paru indispensable d'occuper Langensalza
pour observer la grande route de Leipzig; aussitŰt que les magasins
seront suffisamment formťs, les troupes camperont. Par ce moyen elles
seront en situation d'exťcuter tous les mouvements que les circonstances
pourront nťcessiter, soit pour soutenir le prince de la Moskowa, soit
pour dťfendre les gorges de la Thuringe, et assez ťtendues pour vivre.
Les coureurs russes sont venus jusque sur la Werra et ont surpris un
escadron westphalien ŗ Wanfried; mais ils se sont retirťs. Je n'ai point
de nouvelles du prince de la Moskowa depuis la lettre dont j'ai eu
l'honneur de vous rendre compte; mais rien n'annonce que l'ennemi soit
en opťration sur lui.
ęLa division Bonnet est la seule qui ait des ustensiles de campement,
encore lui manque-t-il des gamelles; il est bien important, pour que les
troupes puissent camper sans dťsordre, que les autres divisions
reÁoivent les ustensiles de campement qu'il leur faut, et celle-ci ceux
qui lui manquent encore, et il serait bien nťcessaire qu'on y joignÓt
des haches qui manquent ŗ toutes les compagnies et qui sont cependant
indispensables, car celles des sapeurs sont loin de suffire aux besoins
du bivac et du campement.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU ROI DE WESTPHALIE.
ęEisenach, le 20 avril 1813, soir.
ęSire, aussitŰt aprŤs mon arrivťe ici, je me suis empressť de faire des
dispositions pour ťloigner les partis qui se sont prťsentťs sur vos
frontiŤres. J'ai envoyť une forte division sur Langensalza, et le duc
d'Istrie y a ajoutť un corps de cavalerie de la garde qui va pousser des
partis dans toutes les directions.
ęComme nous n'avons pas de nouvelles rťcentes de Cassel et qu'il serait
possible qu'il y eŻt de ce cŰtť quelques dťsordres, j'envoie demain, ŗ
moitiť chemin de cette ville ici, un corps d'infanterie et de cavalerie
qui serait soutenu par des forces plus considťrables s'il ťtait
nťcessaire, mais qui rentrera immťdiatement si, comme je le suppose,
tout est tranquille. Je prie Votre Majestť de me faire connaÓtre ce qui
pourrait se passer d'important du cŰtť oý elle se trouve, afin que je
puisse faire ce que les circonstances commanderont, et prendre des
positions conformes ŗ sa sŻretť.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT ņ NAPOL…ON.
ę20 avril 1813.
ęJ'ai reÁu la lettre que Votre Majestť m'a fait l'honneur de m'ťcrire
pour me faire connaÓtre ses intentions sur le moyen de remplacer le
personnel d'artillerie qui manque ŗ mon corps d'armťe. Les cadres des
huit compagnies n'ťtant pas encore arrivťs, je prie Votre Majestť de me
permettre de lui faire quelques reprťsentations sur une disposition qui
ne me semble pas d'accord avec le bien de son service.
ęLe corps des canonniers de la marine a un bon esprit, une assez bonne
composition; mais ce corps a dťjŗ ťtť ťnervť par diverses dispositions
intťrieures, et il me semble que ce corps perdrait presque toute sa
valeur d'opinion, et mÍme sa valeur rťelle comme ancien corps, si la
disposition prescrite ťtait exťcutťe littťralement.
ęLes canonniers de la marine, ŗ leur dťpart des ports, ont laissť un
certain nombre d'hommes pour le service de la marine, conformťment aux
dispositions du dťcret de Votre Majestť, et, en gťnťral, ceux conservťs
ont ťtť des hommes de choix. La marine a surtout conservť un grand
nombre de sous-officiers, et les meilleurs, de maniŤre que le plus grand
nombre des sous-officiers actuels a un ou deux mois de nomination, et
que le corps des sous-officiers dans ces rťgiments est en gťnťral
trŤs-faible. Depuis, ces mÍmes rťgiments ont fourni trois cents
canonniers pour la garde de Votre Majestť, et j'ai tenu la main ŗ ce que
les choix fussent faits tels qu'il convenait pour ce service important.
Ensuite on a tirť ŗ peu prŤs le cinquiŤme ou le sixiŤme des officiers
existante dans ces corps pour l'artillerie de terre, et on a choisi
encore les officiers les plus mťritants. Si ŗ cela on ajoute encore un
recrutement d'officiers et de sept ŗ huit cents canonniers, ce corps ne
sera le mÍme en rien, parce que les chefs de corps, qui espŤrent
beaucoup de leur situation actuelle et mettent un grand prix ŗ mťriter
la bienveillance de Votre Majestť, perdront l'espťrance de bien faire en
perdant les hommes dans lesquels ils avaient confiance, et seront
dťcouragťs en pensant que leur corps est destinť ŗ Ítre un dťpŰt de
recrutement pour les autres corps de l'armťe, et que l'avenir brillant
qui leur ťtait offert leur est fermť; et rťellement ce corps, de neuf
mille hommes environ, dont plus de quatre mille sont conscrits de
l'armťe, perdant environ onze cents hommes d'ťlite, pris sur les
anciens, sans compter les hommes plus recommandables encore qui ont ťtť
retenus dans les ports, sera peu de chose, en comparaison de ce qu'il
ťtait, par la diffťrence de son esprit et de sa composition. Je pense
donc que, puisque le besoin de l'artillerie de terre exige un secours
momentanť, il vaudrait mieux prendre une disposition seulement
provisoire, qui, sans changer la composition de ce corps, n'influerait
pas non plus sur l'esprit des officiers, et affecter, pour un temps
dťterminť, un bataillon tout entier au service des piŤces de campagne;
ou, si Votre Majestť tenait ŗ une disposition dťfinitive, que le
recrutement des huit compagnies port‚t indiffťremment sur tous les
bataillons de mon corps d'armťe. L'artillerie de marine s'en trouverait
beaucoup mieux et l'artillerie de terre guŤre plus mal, attendu qu'il
est bien facile de former en peu de jours des servants de piŤces de
campagne lorsqu'il y a par piŤce trois ou quatre bons canonniers.
ęJe prie Votre Majestť de me faire connaÓtre si mes observations lui ont
paru fondťes, ou si elle persiste dans les dispositions qu'elle avait
prescrites, pour que je puisse me conformer ŗ ses intentions.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU G…N…RAL COMPANS.
ę22 avril 1813.
ęMonsieur le comte, je reÁois votre lettre de ce jour. Les circonstances
ne rendent pas nťcessaire l'emploi des vingt mille rations de pain
commandťes ŗ Mulhausen. Vous devez, si elles sont fabriquťes, avoir soin
de les faire prendre. J'ai ťtť informť des obstacles que
l'administration westphalienne met ŗ la fourniture des subsistances
demandťes pour l'armťe; mais, comme nos besoins sont pressants, que les
rassemblements de troupes deviennent considťrables et nťcessitent une
prompte rťunion de subsistances, vous emploierez la force, s'il est
nťcessaire, pour forcer l'administration de Mulhausen ŗ fournir les
quatre mille quintaux de farine de blť, tant pour Eisenach que pour
Langensalza. Vous recevrez demain un dťtachement de cavalerie convenable
pour vous ťclairer.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU MAJOR G…N…RAL.
ę22 avril, soir.
ęMonseigneur, j'ai l'honneur de vous rendre compte qu'ayant fait ŗ
Mulhausen la demande de quatre mille quintaux de farine pour
l'approvisionnement des troupes qui vont Ítre campťes ŗ Langensalza et ŗ
Eisenach j'ai reÁu du prťfet westphalien la rťponse que, d'aprŤs les
ordres de son gouvernement, il ne devait rien fournir. Je prie Votre
Altesse de porter cette nouvelle extraordinaire ŗ la connaissance de
l'Empereur, afin que Sa Majestť puisse donner les ordres qu'elle croira
convenables.
ęJ'ai aussi l'honneur de vous rendre compte que le gťnťral Friederick,
que j'avais envoyť ŗ Bichhausen afin d'avoir des nouvelles de Cassel et
de poursuivre les dťtachements qui auraient pu s'avancer du cŰtť de
cette place, me fait le rapport que le commandant de Bichhausen l'a
informť qu'un assez grand nombre de soldats d'infanterie westphalienne
se trouvaient journellement dans les environs, porteurs de permissions
signťes des gťnťraux. Il a paru extraordinaire ŗ ce commandant que l'on
permÓt aussi facilement ŗ des soldats de venir dans un pays exposť aux
incursions de l'ennemi, et la chose me paraÓt digne de remarque.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU MAJOR G…N…RAL.
ę23 avril 1813.
ęņ l'instant oý j'ai reÁu l'ordre de partir de Hanau pour faire mon
mouvement sur Eisenach, n'ayant d'autre cavalerie que celle qui se
rassemblait ŗ Hanau, et ignorant le mouvement de la garde, je fis choix
de deux dťtachements formant quatre escadrons complets; le premier de
ces dťtachements, composť des 5e, 8e et 9e de hussards; l'autre, des 7e,
11e, 12e et 16e de chasseurs, ce dťtachement m'ayant paru susceptible de
faire quelque service en l'employant avec mťnagement et prťcaution. Il
paraÓt que l'Empereur a dťsapprouvť cette mesure et avait ordonnť que
ces dťtachements restassent ŗ Hanau, et j'ai reÁu du gťnťral Millaud la
nouvelle qu'il avait donnť aux dťtachements l'ordre de rťtrograder,
d'aprŤs ceux de Sa Majestť. J'ai donc eu lieu d'Ítre ťtonnť de leur
arrivťe avant-hier; c'est hier seulement que l'ordre de rťtrograder leur
est parvenu. Comme il y a sept marches d'ici ŗ Hanau, que ce serait une
fatigue ŗ pure perte pour les chevaux et un temps perdu pour
l'instruction des hommes, j'ai pensť qu'il n'ťtait plus convenable de
les faire rťtrograder et j'ai fait choix pour eux de bons cantonnements,
oý on les mettra promptement en ťtat de bien servir. Le chef d'escadron
Reisey, qui commande le dťtachement de hussards, pense qu'en quinze
jours il le mettra en ťtat de faire son service devant l'ennemi.
ęJ'avais donnť l'ordre au gťnťral Dommanges de venir prendre le
commandement de ces deux dťtachements, par suite de l'ordre de Sa
Majestť, dont il a eu connaissance avant son dťpart de Hanau; il est
restť. Si, comme je le suppose, Sa Majestť approuve les dispositions que
j'ai prises de ne pas faire rťtrograder ces corps depuis ici, il serait
utile que le gťnťral Dommanges, ou tout autre gťnťral de brigade ou
colonel, reÁŻt l'ordre de venir afin qu'il y eŻt un chef pour les
surveiller et les commander.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU MAJOR G…N…RAL.
ę26 avril 1813.
ęLe 1er rťgiment a plus de cent hommes qui manquent de culottes et de
pantalons, et qui, s'ils ne les recevaient pas, seraient hors d'ťtat
d'entrer en campagne. Cette position est d'autant plus f‚cheuse, que le
rťgiment ne peut attendre ces effets de son dťpŰt, attendu qu'il n'a
point reÁu les tricots que le ... avait annoncťs. Votre Altesse jugera
sans doute convenable de prendre une mesure extraordinaire pour faire
avoir au 1er rťgiment de marine les effets qui lui manquent, et je lui
demande avec instance de vouloir le faire promptement.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AUX MEMBRES DE LA COMMISSION DES SUBSISTANCES DE
GOTHA.
ę26 avril 1813.
ęMessieurs, je vous prťviens que, d'aprŤs les ordres de Sa Majestť, il
est indispensable que vous preniez des mesures pour faire diriger sur
Erfurth trois mille quintaux de farine, savoir: cinq cents quintaux par
jour; cinq mille quintaux de blť, ŗ raison de cinq cents quintaux par
jour; dix mille quintaux de viande sur pied, soit vaches, boeufs ou
moutons, ŗ raison de mille quintaux par jour; enfin cent mille boisseaux
d'avoine, ŗ raison de dix mille par jour, et ce ŗ compter d'aujourd'hui.
Je vous prie de me faire connaÓtre le plus promptement possible les
dispositions que vous aurez prises pour remplir les intentions de Sa
Majestť, afin que je puisse, s'il le faut, y concourir et les assister
de la force nťcessaire. Je vous prie de me faire connaÓtre ťgalement
dans quel rapport sont les ressources que les diffťrentes contrťes
prťsentent, afin que je puisse prendre des mesures directement si vos
efforts ne remplissaient pas le but que j'en attends.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęErfurth, le 27 avril 1813.
ęMon cousin, je viens de prendre dans les 123e et 134e rťgiments de
ligne des capitaines pour les faire chefs de bataillon dans le 37e
lťger, des lieutenants pour les faire capitaines, des sous-lieutenants
pour les faire lieutenants et des sergents pour les faire
sous-lieutenants. Mon dťcret va vous Ítre envoyť par le major gťnťral.
Tous ces hommes sont ici dans la citadelle; faites-les rťunir sans
dťlai, et qu'ils partent demain ŗ la pointe du jour, pour qu'avant midi
ils soient reconnus et placťs dans les compagnies. Il n'y a rien de plus
urgent que cela, ce rťgiment ne pouvant pas marcher avec les officiers
ineptes qui s'y trouvent. Vous mettrez en pied tous les sous-lieutenants
que je vous envoie, et qui ont tous fait la guerre. Vous renverrez au
dťpŰt d'Erfurth, et vous m'en remettrez la note, tous les capitaines qui
n'auraient pas fait la guerre. Vous mettrez ŗ la suite les
sous-lieutenants et lieutenants qui seraient dans le mÍme cas. Il est
absurde d'avoir dans un rťgiment des capitaines qui n'ont pas fait la
guerre. On verra dans la campagne ce qu'on pourra faire de ceux que vous
allez renvoyer au dťpŰt. Mais, en attendant, le commandement sera dans
la main des hommes que je vous envoie.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęWeissenfels, le 1er mai 1813, deux heures du matin.
ęFaites partir, ŗ cinq heures du matin, les cinq bataillons de la
division Durutte, qui sont avec le gťnťral Bonnet, pour se rendre ŗ
Mersebourg joindre leur division sans artillerie. Prťvenez le vice-roi,
par courrier, de l'heure ŗ laquelle ils arriveront ŗ Mersebourg. Les
quatorze bouches ŗ feu de la division Durutte resteront ŗ la rťserve de
votre corps jusqu'ŗ nouvel ordre. Le vice-roi aura soixante mille hommes
ce matin, 1er mai, ŗ mi-chemin de Mersebourg ŗ Leipzig. Approchez vos
divisions le plus possible de Weissenfels, afin de pouvoir soutenir le
marťchal Ney si cela ťtait nťcessaire. Je n'ai pas encore de nouvelles
du gťnťral Marchand, qui devait passer ŗ Stossen. Je n'en ai pas
davantage du gťnťral Bertrand. Si vous en avez, donnez-m'en. L'un et
l'autre devaient venir par Camburg. J'ai donnť l'ordre au marťchal
Mortier de se porter par la rive gauche de la Saale, en passant sur le
pont que j'ai fait construire prŤs de Naumbourg, avec la division de la
garde pour se rendre ŗ Weissenfels. Par ce moyen, Naumbourg sera tout ŗ
fait libre. Vous y pourrez placer votre troisiŤme division. Ce mouvement
par la rive gauche rendra aussi la rive droite, pour vos divisions,
trŤs-libre.
ęSi vous n'avez pas de nouvelles des gťnťraux Bertrand et Marchand,
envoyez un officier ŗ Camburg pour en avoir.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęLutzen, le 1er mai 1813.
ęLe quartier gťnťral de l'Empereur est ce soir ŗ Lutzen. La journťe a
ťtť fort belle. La jonction avec l'armťe de l'Elbe a eu lieu prŤs
Lutzen. L'ennemi, qui a montrť une nombreuse cavalerie, a constamment
ťtť repoussť par notre infanterie dans des plaines immenses, et a eu
beaucoup de monde tuť par notre canon. Nous n'avons perdu qu'une
centaine d'hommes; mais une perte bien sensible a ťtť faite. Un boulet a
coupť le poignet et traversť les reins ŗ M. le marťchal duc d'Istrie,
qui est mort ŗ l'instant mÍme sur le champ d'honneur. C'est le premier
coup de canon tirť par l'ennemi. L'armťe et toute la France partageront
les vifs regrets de l'Empereur.
ęLe prince de Neufch‚tel, major gťnťral.
ęALEXANDRE.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęWeissenfels, 1er mai 1813, huit heures du matin.
ęMon cousin, venez de votre personne sur la route de Lutzen. Je ne sais
pas oý a couchť la division Bonnet et la division Compans. Mettez-les en
marche pour les approcher de Weissenfels.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęLutzen, le 2 mai 1813, neuf heures et demie du matin.
ęMonsieur le duc de Raguse, l'Empereur me charge de vous donner l'ordre
de partir de votre position pour vous porter sur Pťgau. Je donne l'ordre
au gťnťral Bertrand que, au lieu de venir ce soir, comme il en a reÁu
l'ordre hier, jusqu'ŗ Kaia, de s'arrÍter ŗ _Tauchau_. Je le prťviens
qu'il peut mÍme arrÍter, s'il en est encore temps, la division italienne
ŗ _Gleisberg_, et celle wurtembergeoise ŗ _StŲhsen_. Par ce moyen, son
corps couvrira Naumbourg, Weissenfels, et menacera Zeitz, et sera en
position pour se porter sur Pťgau si l'ennemi menaÁait de dťboucher. Je
lui dis de se tenir en communication avec vous.
ęLe prince de la Moskowa est ŗ Kaia, et pousse de fortes reconnaissances
sur Zwickau et sur Pťgau.
ęLe vice-roi porte le gťnťral Lauriston sur Leipzig.
ęLe onziŤme corps se porte sur Markranstadt, d'oý il enverra des
reconnaissances sur Zwickau et sur Leipzig.
ęJe prťviens aussi le gťnťral Bertrand que, si l'ennemi dťbouchait de
Zeitz, il rťunirait ses trois divisions et marcherait ŗ lui[2].
[Note 2: ņ cette lettre ťtait jointe une longue lettre de l'Empereur
servant d'instruction: elle a ťtť perdue.
LE MAR…CHAL DUC DE RAGUSE.]
ęLe prince de Neufch‚tel, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
ORDRE DU JOUR.
ę8 mai 1813.
ęMonsieur le marťchal commandant en chef le sixiŤme corps tťmoigne son
mťcontentement aux troupes ŗ ses ordres pour les dťsordres qu'elles
commettent journellement. Si la bonne conduite qu'elles ont tenue sur le
champ de bataille est faite pour leur mťriter la bienveillance de Sa
Majestť, la continuation des dťsordres attirerait sur elles toute sa
sťvťritť. Les gťnťraux, chefs de corps et officiers doivent concourir
avec le mÍme zŤle au maintien de l'ordre. La recherche des vivres doit
Ítre faite d'une maniŤre rťguliŤre et par des corvťes armťes, conduites
par des officiers, et tout individu qui sera trouvť isolť, n'eŻt-il pris
que du pain, sera arrÍtť comme maraudeur et puni comme tel suivant la
rigueur des lois. Il doit Ítre fait un appel toutes les trois heures, et
tous les hommes qui ne seront pas prťsents seront arrÍtťs et mis ŗ la
garde du camp. Il est surtout expressťment dťfendu de se servir de ses
munitions pour d'autres usages que pour ceux de la guerre, et tout
contrevenant ŗ cet ordre qui sera pris sur le fait sera arrÍtť par la
gendarmerie, conduit au quartier gťnťral et traduit devant le grand
prťvŰt de l'armťe. M. le marťchal est convaincu que, si les officiers y
mettent l'activitť nťcessaire, les dťsordres si rťprťhensibles qui ont
lieu cesseront sur-le-champ. Leur honneur, comme leur devoir et leur
intťrÍt, le leur commandent ťgalement.
ęLe prťsent ordre du jour sera lu, pendant trois jours consťcutifs, aux
troupes rassemblťes.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU MAJOR G…N…RAL.
ęPrŤs Steinbach, 8 mai 1813.
ęMonseigneur, les mouvements continuels de mon corps d'armťe m'ayant
empÍchť, jusqu'ŗ ce moment, de vous adresser mon rapport sur les dťtails
de ses opťrations relatives ŗ la bataille de Lutzen, je m'empresse de
rťparer cette omission.
ęAprŤs avoir passť la Saale, je reÁus l'ordre de prendre position avec
mon corps d'armťe au dťfilť de Ripach.
ęLe lendemain 2 mai, les projets de l'ennemi ťtant encore obscurs,
l'Empereur me donna l'ordre de me porter sur Pťgau, afin de connaÓtre la
force de l'ennemi sur ce point et de culbuter tous les corps moins forts
que le mien, que je trouverais sur mon passage. Afin de ne pas Ítre
trompť par de simples apparences, je me mis immťdiatement en mouvement.
Deux routes me conduisaient ťgalement ŗ Pťgau, l'une par la rive gauche
du ravin et plus courte, l'autre par la rive droite et plus longue.
ęJe choisis la deuxiŤme parce qu'elle me liait plus avec l'armťe, et
que, dans le pas d'une grande bataille, je ne courrais pas risque d'en
Ítre sťparť.
ęMes troupes formťes en neuf colonnes, sur plusieurs lignes, prÍtes ŗ
former promptement des carrťs et disposťes en ťchelons, je m'ťbranlai;
aprŤs une heure de marche, j'arrivai au village de Starfield. En ce
moment le canon se fit entendre au village de Kaia, et, au mÍme instant,
l'ennemi se montra sur l'immense plateau qui prťcŤde et domine le
village de Starfield; les forces qu'il me montra dans ce moment ne me
parurent pas assez grandes pour devoir m'arrÍter; je me disposai donc ŗ
remplir la partie de mes instructions qui me prescrivait de marcher ŗ
lui; mais, afin d'Ítre ŗ l'abri de tout ťvťnement f‚cheux, j'occupai
fortement le village de Starfield, qui devait Ítre mon point d'appui. Je
portai en avant du village, et un peu ŗ sa gauche, la division Compans,
et en ťchelons sur sa gauche, celle du gťnťral Bonnet; et, soutenu d'une
nombreuse artillerie, je portai ces troupes en avant.
ęLa charge que j'avais ordonnťe s'exťcuta avec promptitude et vigueur;
les forces que l'ennemi me montra bientŰt me prouvŤrent qu'une grande
bataille allait Ítre livrťe; alors j'arrÍtai mon mouvement offensif,
qui, en m'ťloignant de l'armťe et de mes points d'appui, aurait
infailliblement causť ma perte; mais je conservai toutefois une attitude
offensive, afin de partager l'attention de l'ennemi, de l'empÍcher
d'ťcraser les troupes du troisiŤme corps qui combattaient ŗ Kaia, et de
donner le temps aux ťchelons que Sa Majestť avait formťs en arriŤre de
se rťunir et de venir nous dťgager. Alors l'ennemi rťunit de grandes
forces contre moi, et surtout une nombreuse artillerie. Plus de cent
cinquante piŤces de canon furent dirigťes contre mon seul corps d'armťe;
mais les troupes supportŤrent leur feu avec un calme et un courage
dignes des plus grands ťloges. La division Compans, surtout, la plus
exposťe, mťrite des ťloges particuliers; les rangs ťclaircis ŗ chaque
instant se reformaient aux cris de _Vive l'Empereur!_ Immťdiatement
aprŤs ce feu terrible, la cavalerie ennemie s'ťbranla et fit une charge
vigoureuse ťgalement dirigťe contre le 1er rťgiment d'artillerie de
marine. Cet excellent rťgiment, commandť par le brave colonel Esmond,
montra en ce moment tout ce qu'une bonne infanterie peut contre la
cavalerie, et les efforts de l'ennemi vinrent ťchouer contre ses
baÔonnettes; d'autres charges furent ťgalement faites, et toutes
ťgalement sans succŤs. Cependant le combat durait dťjŗ depuis plusieurs
heures; Sa Majestť, qui avait prťvu ce qui pouvait arriver et placť
l'armťe en consťquence, avait eu le temps de la rťunir et de marcher.
L'ennemi voulut faire un dernier effort sur moi et redoubla son feu dans
l'espťrance de me forcer ŗ ťvacuer le village de Starfield, et il
pouvait espťrer d'obtenir ce rťsultat si j'eusse continuť ŗ garder la
position offensive que j'avais prise et ŗ combattre ŗ dťcouvert; je crus
devoir ne pas compromettre ce poste important, et ŗ cet effet je
reportai mes troupes en arriŤre, de la distance nťcessaire pour en
masquer une partie, en ťtant ŗ portťe de soutenir le village de
Starfield, et toute la division Compans fut placťe dans ce village.
Cette disposition fut encore rendue plus nťcessaire par un grand
mouvement que l'ennemi fit sur ma droite, qui, ťtant en arriŤre du
ravin, n'avait plus de point d'appui, tandis que la tÍte de mes forces
ťtait au village, et n'ayant rien au delŗ du ravin. Peu de troupes
suffisaient pour arrÍter l'ennemi sur ce point. J'y employai une portion
de la troisiŤme division, et je gardai le reste de cette division en
rťserve, afin de pourvoir aux cas imprťvus. L'ennemi alors fit une
charge directe sur le village; mais elle lui rťussit mal. Cependant
l'Empereur ťtait arrivť sur Kaia, et, tandis qu'on se battait sur ce
point avec acharnement, les efforts de l'ennemi furent ralentis contre
moi, quoique j'eusse toujours en prťsence de grandes forces.
ęCinq heures et demie arrivŤrent, et le quatriŤme corps parut. AussitŰt
que je pus Ítre certain de l'avoir bien reconnu, j'eus lieu d'Ítre
tranquille sur ma droite, et j'exťcutai, sans perdre un seul instant,
avant mÍme d'avoir communiquť avec lui, l'ordre anticipť que Sa Majestť
m'avait donnť de porter une division sur Kaia aussitŰt que je serais en
liaison avec le gťnťral Bertrand. Enfin l'ennemi ťtait battu partout; Sa
Majestť ťtait victorieuse; elle ordonne une charge gťnťrale. La division
Compans dťbouche de nouveau du village. La division Friederich se porta
ŗ sa gauche et ŗ droite de la division Bonnet, et nous march‚mes
rapidement ŗ l'ennemi, qui fuyait devant nous, aussi loin que le jour le
permit. Nous nous canonnions encore qu'ŗ peine pouvions-nous distinguer,
dans l'obscuritť, les masses qui se retiraient devant nous. Il fallut
enfin s'arrÍter par suite de l'obscuritť de la nuit. Nous ťtions en
repos depuis quelques instants lorsqu'un corps de cavalerie ennemie se
prťsenta inopinťment et sans avoir pu Ítre reconnu, et chargea nos
carrťs. Il fut reÁu la nuit comme il l'avait ťtť le jour, et se replia,
mais sans avoir ťprouvť une grande perte, attendu que, dans l'obscuritť,
il eŻt ťtť dangereux de faire feu sans avoir bien reconnu la division
des carrťs. Immťdiatement aprŤs sa retraite, prťvoyant qu'il pourrait
revenir, je rapprochai tellement mes carrťs, qu'ils pouvaient tous se
voir, et je les ťchelonnai de maniŤre que deux cŰtťs pussent toujours
tirer, et qu'il y eŻt des feux dans toutes les divisions. Ce que j'avais
prťvu arriva. L'ennemi, comptant que, aprŤs la fatigue d'une aussi
longue journťe, les soldats seraient couchťs et les armes aux faisceaux,
arriva ŗ dix heures avec quatre rťgiments de cavalerie de choix, dont un
rťgiment de gardes prussiennes. Ces quatre rťgiments se jetŤrent avec
une impťtuositť extraordinaire au milieu de nous; mais ils trouvŤrent
chacun ŗ son poste. Tous les ordres donnťs furent exťcutťs
ponctuellement, et l'ennemi enveloppa de ses morts nos carrťs sans en
enfoncer aucun. Trois cents hussards restŤrent sur la place, et les
rapports des Prussiens annoncent que le rťgiment des gardes a ťtť
dťtruit entiŤrement. Ainsi a fini une belle journťe. C'est le sixiŤme
corps qui, dans cette mťmorable bataille, a eu l'honneur de tirer les
premiers coups de canon et les derniers coups de fusil. Je ne saurais
donner trop d'ťloges aux troupes dont Sa Majestť m'a confiť le
commandement. Les soldats de marine se sont montrťs dignes de l'armťe
dans laquelle Sa Majestť les a attachťs. Ces nouveaux soldats marchent
d'un pas ferme sur le pas des anciens. Je devrais nommer tous les
gťnťraux et tous les officiers supťrieurs; mais je dois faire une
mention particuliŤre du gťnťral Compans et du gťnťral Bonnet, des
gťnťraux Jamin, Joubert et Richemont. Le gťnťral Compans a eu ses
habits criblťs de mitraille: le gťnťral Bonnet, deux chevaux tuťs sous
lui: le gťnťral Jamin, quoique blessť, n'a pas quittť le champ de
bataille un seul instant. Je dois faire aussi mention du colonel Jardet,
mon premier aide de camp, officier d'une grande distinction, qui a ťtť
blessť d'une maniŤre extrÍmement grave. Je dois citer aussi le gťnťral
Faucher, commandant l'artillerie, et le colonel de Ponthou, commandant
le gťnie, dont j'ai eu ŗ me louer.
ęJ'aurai l'honneur d'adresser ŗ Votre Altesse des demandes de
rťcompenses pour les officiers et soldats qui ont si bien mťritť de Sa
Majestť, et en vous priant de les soumettre ŗ l'Empereur.Ľ
LIVRE DIX-SEPTI»ME
1813
SOMMAIRE.--Hťsitations du roi de Saxe.--Passage de l'Elbe ŗ
Priesnitz.--Reddition de Torgau.--Combat de Bichofswerda (12
mai).--Combats de Grossenheim, de Koenigswerth et de Weissig.--Positions
de l'armťe devant Bautzen.--Bataille de Bautzen (20 mai).--Bataille de
Wurtzen (21 mai).--Retraite de l'ennemi sur Weissenberg.--Combat de
Reichenbach.--Mort du gťnťral BruyŤre.--Mort de Duroc: son
portrait.--Passage de la Niesse par le septiŤme corps.--Surprise et
dťroute de la division Maison ŗ Haynau.--Combat de Jauer.--Armistice de
Pleiswig.--Ligne de dťmarcation des deux armťes.--Retour de l'Empereur ŗ
Dresde (10 juin).--…tablissement du sixiŤme corps ŗ Buntzlau.--Situation
de l'armťe franÁaise pendant l'armistice.--Haine des Prussiens pour les
FranÁais.--RŰle de l'Autriche.--Travaux de dťfense ŗ Buntzlau.--Arrivťe
de M. de Metternich ŗ Dresde.--Paroles de l'Empereur.--Ouverture du
congrŤs de Prague.--Dťnonciation de l'armistice (10 aoŻt).--ManiŤre de
voir de l'Empereur.--Ses conseillers.--Composition et force de l'armťe
franÁaise.--Travaux de dťfense autour de Dresde.--Plan de campagne de
Napolťon.--Composition et force des armťes ennemies.--Formation de
l'armťe franÁaise.--Arrivťe de Napolťon ŗ GŲrlitz (18
aoŻt).--Commencement des hostilitťs.--Opťrations du sixiŤme
corps.--Mouvements des armťes autour de Dresde.--La grande armťe alliťe
attaque Dresde (26 aoŻt).--Bataille de Dresde.--Mort du gťnťral
Moreau.--Retraite de l'ennemi.--Poursuite de l'armťe ennemie.--Combats
de Possendorf, de Dippoldiswald et de Falkenheim.--Combat de
Zinnwald.--Catastrophe du gťnťral Vandamme.
ņ la fin de mars, ŗ l'approche de l'armťe russe, le roi de Saxe, pour ne
pas tomber en son pouvoir, avait abandonnť sa capitale. Il s'ťtait rendu
d'abord ŗ Plauen et de lŗ ŗ Ratisbonne, accompagnť d'un corps de quinze
cents chevaux.
Nos revers ŗ la fin de la derniŤre campagne, la destruction de nos
forces, la dťfection de la Prusse et les passions qui se dťveloppaient
dans une grande partie de l'Allemagne, avaient frappť de terreur les
princes de la Confťdťration. L'Autriche avait, dŤs ce moment, entrevu
l'espoir de retrouver son ancienne prťpondťrance, soit par des
nťgociations, soit en rentrant plus tard dans la lice. Elle s'occupait,
dŤs lors, ŗ rťunir autour d'elle en faisceau tout ce qu'elle pouvait
dťtacher de notre alliance, afin de donner plus de poids ŗ ses paroles.
Le roi de Saxe, un des premiers ŗ qui elle s'ťtait adressťe, comprit
bientŰt que les intťrÍts bien entendus de l'Allemagne ťtaient dans un
systŤme modťrateur, assurant ŗ l'avenir le repos de l'Europe, et dont
l'Autriche serait le centre. Il signa d'abord une convention par
laquelle le corps polonais acculť ŗ Cracovie, ŗ la frontiŤre
autrichienne, aurait la facultť d'entrer en Galicie, en dťposant ses
armes. Ces armes devaient Ítre transportťes sur des chariots et devaient
lui Ítre rendues ŗ son arrivťe en Saxe. Cette disposition concernait
ťgalement quelques troupes franÁaises et un corps de cavalerie saxonne
qui se trouvait avec elles. ņ l'ombre de cette premiŤre convention, on
commenÁa ŗ nťgocier un traitť de neutralitť qui devait sťparer la Saxe
de l'alliance franÁaise et l'unir ŗ la politique autrichienne.
D'un autre cŰtť, l'Autriche avait pris une attitude pacifique en faisant
faire un armistice pour le corps auxiliaire que commandait le
feld-marťchal, prince de Schwarzenberg. Enfin, le 26 avril, elle avait
dťclarť ŗ l'ambassadeur de France ŗ Vienne que les stipulations du
traitť du 4 mars 1812 n'ťtaient plus applicables aux circonstances
prťsentes.
C'ťtait annoncer l'intention de suivre une politique indťpendante. AprŤs
tous ces divers actes, le roi de Saxe quitta Ratisbonne et se rendit ŗ
Prague. Cette dťmarche donna l'ťveil ŗ Napolťon sur ses intentions. Il
soupÁonna que les nťgociations relatives au dťsarmement du corps
polonais pourraient avoir ťtť plus loin, et se crut menacť de voir la
Saxe se sťparer de ses intťrÍts. DŤs son arrivťe ŗ Mayence, il avait
envoyť auprŤs de lui ŗ Ratisbonne le gťnťral de Flahaut pour surveiller
la conduite du roi et rťclamer la cavalerie qu'il avait avec lui. Il
n'eut cependant jamais la certitude d'un traitť convenu et signť. Il
crut seulement que des propositions avaient ťtť faites et reÁues avec
complaisance; mais enfin les mauvaises dispositions du roi de Saxe
devinrent patentes par la connaissance des ordres donnťs le 5 mai au
gťnťral Thielmann, qui commandait ŗ Torgau, de ne recevoir aucune troupe
ťtrangŤre dans la place, et par le refus d'en ouvrir les portes au
troisiŤme corps, qui s'y prťsenta.
Alors la victoire avait donnť du poids aux paroles de Napolťon, et il se
trouvait maÓtre de Dresde au moment mÍme oý le roi semblait vouloir
l'abandonner. Il envoya un officier ŗ Prague, le comte de Montesquiou,
pour remettre ŗ M. de Sera, alors ministre de France auprŤs du roi, une
lettre qui lui prescrivait de le faire s'expliquer dans l'espace de six
heures. Il devait, ŗ l'instant mÍme: 1į dťclarer par ťcrit dans une
lettre ŗ l'Empereur qu'il n'avait pas cessť de faire partie de la
Confťdťration du Rhin et reconnaissait les obligations qui en
rťsultaient pour lui; 2į donner l'ordre au gťnťral Thielmann d'ouvrir
les portes de Torgau et de mettre ŗ la disposition du gťnťral Rťgnier
les troupes saxonnes qui s'y trouvaient et devaient en sortir; 3į enfin
d'envoyer ŗ Dresde la cavalerie saxonne restťe prŤs de lui, et de la
mettre ŗ la disposition de l'Empereur; dans le cas d'un refus, M. de
Sera lui devait faire connaÓtre qu'il ťtait dťclarť fťlon et avait cessť
de rťgner.
Un langage pareil auprŤs d'un prince faible, dont les …tats ťtaient
envahis et en partie occupťs, devait avoir les rťsultats qu'en attendait
Napolťon. Le roi souscrivit ŗ tout et s'excusa auprŤs de l'Empereur
d'Autriche sur l'empire des circonstances. Il lui demanda le secret sur
le traitť fait, signť et ratifiť, et le secret lui fut gardť. Le roi se
rendit ŗ Dresde. L'Empereur donna, avec intention, un grand ťclat ŗ son
retour. Il alla, le 12 mai, ŗ sa rencontre ŗ une lieue, accompagnť de
tous les marťchaux alors ŗ Dresde, et j'ťtais du nombre. Il fut empressť
et affectueux envers son alliť; il s'efforÁa d'ťtablir l'opinion qu'il
n'avait jamais doutť de sa fidťlitť. On ne peut que plaindre un
souverain placť dans des circonstances aussi difficiles, entre le salut
de ses peuples et ses engagements. Les rťsultats de sa conduite lui ont
ťtť funestes; mais la campagne de 1813, dont la fin a ťtť si dťsastreuse
pour nous, a ťtť cependant bien prŤs d'Ítre couronnťe par des triomphes.
Ainsi, en prenant seulement pour base les probabilitťs et les intťrÍts,
on doit reconnaÓtre que peu s'en est fallu qu'il n'ait eu ŗ s'applaudir
de sa politique. Ce vieux monarque, si fort aimť par ses sujets, ne doit
pas Ítre jugť avec trop de sťvťritť.
Le onziŤme corps ťtait entrť ŗ Dresde le 8. DŤs le 9 au matin, un pont
fut jetť sur l'Elbe ŗ Priesnitz. L'ennemi mit obstacle ŗ ce travail
autant qu'il fut en son pouvoir. Le 9, les quatriŤme, sixiŤme et
douziŤme corps arrivŤrent ŗ Dresde. Le 11, le onziŤme corps passa l'Elbe
et prit position sur la route de Bautzen. Les quatriŤme et sixiŤme
corps, ainsi que le premier corps de cavalerie, suivirent la mÍme
direction. Le douziŤme corps resta ŗ Dresde avec le quartier gťnťral
impťrial et la garde. Ce mÍme jour le troisiŤme corps entra ŗ Torgau;
mais le gťnťral Thielmann, qui y commandait pour le roi de Saxe, aprŤs
avoir remis la forteresse au marťchal Ney, passa ŗ l'ennemi avec son
ťtat-major. Le cinquiŤme corps de Meissen se rendit ťgalement ŗ Torgau,
et ŗ ces deux corps se joignit le septiŤme, dont le gťnťral Rťgnier
reprit le commandement. Rťorganisť, il se composa de la division
franÁaise du gťnťral Durutte et des troupes saxonnes.
Le onziŤme corps, en s'ťloignant de Dresde, avait pris la route de
Bautzen, tandis que le quatriŤme s'ťtait portť sur KŲnigsbrŁck, et le
sixiŤme sur Reichenbach. Le 12, le marťchal duc de Tarente, ayant
rencontrť l'arriŤre-garde russe, commandťe par Miloradowitch, la poussa
devant lui. Un autre combat assez vif s'engagea ŗ Bichofswerda. Cette
ville fut enlevťe; mais les Russes l'incendiŤrent en l'ťvacuant, afin de
dťtruire les magasins qu'elle renfermait.
Le 13, le onziŤme corps continua son mouvement, et prit position ŗ
moitiť chemin de Bautzen. Les quatriŤme et sixiŤme corps restŤrent, ce
jour-lŗ, ŗ KŲnigsbrŁck et ŗ Reichenbach, ainsi que le douziŤme et la
garde ŗ Dresde. Le cinquiŤme, parti de Torgau, marcha dans la direction
d'Obrilugk; le troisiŤme dans la direction de Lukau. Le deuxiŤme,
commandť par le marťchal duc de Bellune, et le deuxiŤme de cavalerie du
gťnťral Sťbastiani, ťtaient arrivťs ŗ Wittenberg. Par ces dispositions,
Napolťon menaÁait la communication de la grande armťe ennemie avec
Berlin, et mÍme cette capitale. L'Empereur avait aussi pour motif, en
ralentissant ses opťrations, de recevoir des renforts, entre autres les
troupes de la vieille et de la jeune garde, commandťes par le gťnťral
Barrois, enfin de la cavalerie. Il voulait en outre donner le temps au
deuxiŤme et au septiŤme corps d'achever leur organisation.
Le 14, tous les corps restŤrent en position.
Le 15, le onziŤme corps se porta en avant et rencontra, ŗ Godeau, le
corps de Miloradowitch. AprŤs une rťsistance de quelques moments,
l'ennemi se retira ŗ Bautzen, et repassa la Sprťe. Appelť par le bruit
du canon et par l'invitation du marťchal Macdonald, je marchai
sur-le-champ; mais j'arrivai quand le combat finissait. Le onziŤme corps
campa en face de Bautzen, le sixiŤme campa ŗ sa gauche, et le quatriŤme
ŗ la gauche de celui-ci. L'ennemi, qui voulait gÍner les communications
de nos divers corps d'armťe, avait portť un grand nombre de Cosaques,
sous les ordres directs de Platow, ŗ Grossenheim, soutenu par le corps
de Kleist.
Napolťon, voulant nettoyer tout cet espace entre son centre et sa
gauche, donna l'ordre au duc de Trťvise de partir de Dresde avec une
division de jeunes gardes et le corps de cavalerie, commandť par le
gťnťral Latour-Maubourg, et de chasser l'ennemi de cette position trop
avancťe. AprŤs une rťsistance assez vive de la part des Prussiens, ce
but fut atteint. Kleist se retira dans la direction d'Elstenwerda, et
Platow dans celle d'Ortona.
AprŤs avoir rempli cet objet, le duc de Trťvise marcha sur Bautzen. Le
18, le cinquiŤme corps se porta sur Hoyerswerda, et les troisiŤme et
septiŤme suivirent.
Ces trois corps ťtaient destinťs ŗ tourner toutes les positions que
l'ennemi avaient fortifiťes. Le mÍme jour, l'Empereur et tout le reste
de sa garde partirent de Dresde. Ils vinrent s'ťtablir, avec le quartier
gťnťral, en face de Bautzen. Mais ce jour-lŗ, 18, l'ennemi ayant appris
le mouvement du cinquiŤme corps sur Hoyerswerda, et ignorant qu'il ťtait
soutenu par les troisiŤme et septiŤme corps, fit un dťtachement pour
s'opposer ŗ lui, et profiter de son isolement pour le battre.
Le gťnťral York vint avec dix mille Prussiens prendre position ŗ
Weissig. Il ťtait appuyť par Barclay de Tolly avec douze mille Russes.
Le gťnťral Bertrand dťtacha sur KŲnigswerth la division italienne de son
corps, pour maintenir la communication entre les deux parties de
l'armťe. Cette division, ťtablie nťgligemment, fut attaquťe et surprise
par Barclay. Elle fut mise dans un grand dťsordre. Cependant, comme elle
ťtait appuyťe ŗ des bois en arriŤre de la ville, elle rťussit ŗ se
rallier, et soutint le combat. Sur ces entrefaites, le comte de Valmy
arriva avec sa cavalerie, et KŲnigswerth fut repris. Pendant ces
ťvťnements, le cinquiŤme corps avait rencontrť le gťnťral York ŗ
Weissig. Un combat opini‚tre s'ensuivit. La position fut enlevťe, et
l'ennemi fut forcť de se replier sur le gros de son armťe.
Ces deux corps, d'York et de Barclay de Tolly, rentrŤrent en ligne. Le
corps russe fut chargť de dťfendre la Sprťe dans son cours infťrieur.
Le 19, toute l'armťe franÁaise ťtait dťployťe circulairement devant
Bautzen, le douziŤme corps occupait l'extrÍme droite, et ťtait placť sur
les hauteurs de Technitz. Le onziŤme corps ťtait prŤs de Breska,
derriŤre le WindmŁchlenberg. Le sixiŤme ťtait en avant de Salzfortgen.
Le quatriŤme appuyait sa gauche ŗ Welka et ŗ la chaussťe de Hoyerswerda.
La garde et la cavalerie ťtaient en arriŤre, sur la route de Dresde. Le
quartier gťnťral ťtait ŗ Fortigen. La gauche de l'armťe n'ťtait pas
encore en ligne. Le cinquiŤme corps occupait Weissig. Le troisiŤme, un
peu en arriŤre, se trouvait ŗ Markersdorf; le septiŤme ŗ Hoyerswerda. Le
deuxiŤme avait quittť Wittenberg, et s'ťtait avancť vers Galzen et
Dalheim. Il ťtait en face des corps prussiens de Bulow, de celui de
Berstel et de la division russe de Karper.
L'armťe ennemie avait deux positions ŗ dťfendre: la premiŤre ayant sa
gauche aux montagnes, dťfendue par des abatis et des redoutes, et le
front couvert par Bautzen et la Sprťe, dont le lit est encaissť et les
bords escarpťs; la deuxiŤme position, ťgalement appuyťe aux montagnes,
se composait des retranchements construits en avant de Kalskirch. Son
front ťtait couvert par une ligne de redoutes faites avec soin et bien
armťes, et par les hauteurs de Krekvitz. Enfin la droite occupait les
hauteurs de Glaima, et les points de Klitz et de Malschitz.
Le 20, au matin, l'armťe s'ťbranla. Le douziŤme corps, placť ŗ la
droite, attaqua les hauteurs oý ťtait la gauche ennemie, aprŤs avoir
jetť un pont sur la Sprťe et passť cette riviŤre. Le onziŤme corps fut
chargť d'attaquer Bautzen, aprŤs avoir aussi franchi la Sprťe au-dessus
de cette ville. Je reÁus l'ordre de passer la Sprťe ŗ une demi-lieue
au-dessous de Bautzen, et d'attaquer le corps de Kleist qui ťtait en
face, et occupait les hauteurs de Seydan. Une vive rťsistance nous fut
opposťe; mais, aprŤs un combat de cinq heures, l'ennemi fut chassť des
diverses positions qu'il occupait devant nous et forcť ŗ se retirer, sur
les hauteurs du village de Kayna, en arriŤre du ruisseau.
Comme Bautzen continuait ŗ se dťfendre et arrÍtait la marche du onziŤme
corps, je dťtachai ma premiŤre division, commandťe par le gťnťral
Compans, pour prendre la ville ŗ revers. La batterie qui en dťfendait
les approches fut enlevťe au pas de charge, et les remparts escaladťs.
Tous les soldats russes qui se trouvaient dans la ville furent faits
prisonniers.
Je fis attaquer ensuite, par la division Bonnet, le corps de Kleist, qui
venait d'Ítre renforcť et qui s'ťtait concentrť dans la position de
Kayna et de Basankwitz. Il fut culbutť et obligť de se retirer plus en
arriŤre. Il occupa alors la position retranchťe et prťparťe d'avance, oý
il avait dťcidť qu'une seconde bataille devait Ítre livrťe. Pendant ces
mouvements, les troisiŤme, cinquiŤme et septiŤme corps, sous les ordres
du marťchal Ney, s'approchŤrent de la Sprťe, au village de Klix. Il
devait forcer le passage et tourner les retranchements, tandis que le
quatriŤme corps observerait les bords de la Sprťe, en face de Krekwitz,
en attendant que la prise de Bautzen et le mouvement de la droite
eussent permis de l'attaquer.
Le soir du 20, l'armťe franÁaise ťtait donc ŗ cheval sur la Sprťe, et
occupait une ligne brisťe, la droite aux montagnes, le centre en face de
Krekwitz, et la gauche sur Klix.
Du cŰtť de l'ennemi, la gauche et la partie du centre qui se liait avec
elle ťtaient fortifiťes par tout ce que l'art peut offrir d'avantageux,
et un succŤs sur ce point ne compromettait pas le reste de l'armťe. Ce
n'ťtait donc pas le point d'attaque ŗ choisir: tandis qu'en attaquant la
droite on avait moins d'obstacles ŗ surmonter. On forÁait le centre et
la gauche ŗ se retirer en toute h‚te. Enfin, l'on pouvait espťrer en
couper une partie. Aussi ce fut le plan d'attaque adoptť par Napolťon.
La gauche de l'ennemi ťtait commandťe par le prince EugŤne de Wurtemberg
et le gťnťral Korsakoff, le centre par le gťnťral BlŁcher, et la droite
par le gťnťral Barclay de Tolly.
Le 21, ŗ cinq heures du matin, le marťchal duc de Reggio commenÁa le
combat par une fausse attaque, dont l'objet ťtait de masquer nos
vťritables intentions et de contenir une partie considťrable des forces
de l'ennemi. Celui-ci, qui avait portť sa gauche en avant du ruisseau et
des retranchements construits dans les montagnes, fut forcť ŗ un
mouvement rťtrograde; mais, ayant reÁu des secours, il rťsista et forÁa
le duc de Reggio, qui s'ťtait emparť de Meltheuer, de l'ťvacuer et de
reprendre sa premiŤre position. Le onziŤme corps prit part au combat, et
soutint le douziŤme. Pendant ce temps, le prince de la Moskowa enlevait
le village de Klix. Il attaqua ensuite l'ennemi dans une seconde
position, entre Glaima et l'ťtang de Malschitz, et le battit. Il avait
ainsi tournť ses positions. De son cŰte, le quatriŤme corps, dont le duc
de Dalmatie ťtait venu prendre le commandement, aprŤs s'Ítre emparť du
village de Krekwitz, forÁait l'ennemi ŗ la retraite. Enfin, l'affaire
ťtant engagťe sur tous les points, je dťployai le sixiŤme devant les
retranchements ennemis, et je commenÁai contre eux un feu d'artillerie ŗ
faire trembler la terre. Peu aprŤs, j'aperÁus un mouvement rťtrograde
prononcť ŗ la droite et au centre de l'ennemi. L'ayant reconnu le
premier, j'en fis prťvenir aussitŰt l'Empereur, et mis mes troupes en
mouvement pour marcher ŗ ces retranchements; mais, l'ennemi les ayant
ťvacuťs assez tŰt pour ťviter un engagement d'infanterie, je continuai ŗ
le poursuivre sans rel‚che jusqu'au village de Wurtzen.
Cette bataille, ŗ laquelle on donna le nom de Wurtzen, fut bien
conduite. Chaque ťvťnement arriva comme il avait ťtť prťvu, et chacun
fit son devoir. L'infanterie soutint la rťputation qu'elle avait acquise
ŗ Lutzen. La direction des attaques et le point choisi pour porter les
coups dťcisifs promettaient de grands rťsultats, et il est probable
qu'on les aurait obtenus sans notre extrÍme faiblesse en cavalerie.
L'ennemi se retira sur Weissenberg. On ne peut guŤre comprendre ses
illusions. Il aurait dŻ voir que cette position, choisie et fortifiťe
d'avance, devait tomber d'elle-mÍme par un simple mouvement stratťgique.
L'armťe franÁaise, avec les renforts qu'elle avait reÁus, consistant en
dix mille hommes de cavalerie et huit mille de la garde, et, au moyen
des cinquiŤme, septiŤme et douziŤme corps qui n'avaient pas combattu ŗ
Lutzen, s'ťlevait ŗ cent cinquante mille hommes. Les forces de l'ennemi
ťtaient au-dessous de cent mille.
Le 22, l'armťe franÁaise se mit en mouvement pour suivre l'ennemi. Le
douziŤme corps resta en position sur le champ de bataille pour le
couvrir contre les mouvements que le corps de Bulow aurait pu exťcuter.
L'ennemi prit position en avant de Reichenbach et sur les hauteurs entre
Reichenbach et Markersdorff. Le septiŤme corps, qui n'avait pas combattu
la veille, soutenu par la cavalerie du gťnťral Latour-Maubourg, reÁut
l'ordre d'attaquer. Le combat fut chaud et brillant, et la cavalerie
russe forcťe ŗ la retraite. Il coŻta la vie ŗ un excellent officier, un
de nos camarades de l'ťtat-major gťnťral de la glorieuse armťe d'Italie,
le gťnťral BruyŤre, commandant une division de la cavalerie lťgŤre. Nous
le regrett‚mes vivement.
Mon corps d'armťe suivait, et de ma personne j'avais ťtť joindre
l'Empereur ŗ la fin du combat. BruyŤre venait d'Ítre tuť, et j'en
causais avec le gťnťral Duroc, duc de Frioul, avec lequel j'ťtais
intimement liť. En ce moment, la figure de Duroc portait une expression
de tristesse que je ne lui avais jamais vue. Les circonstances qui
suivirent immťdiatement l'ont gravťe profondťment dans ma mťmoire et
pourraient faire croire ŗ la vťritť des pressentiments. Duroc donc,
triste et prťoccupť, montrait une sorte de dťcouragement et d'abattement
dans toute sa personne. Je marchai quelque temps en causant avec lui; il
me dit ces propres paroles: ęMon ami, l'Empereur est insatiable de
combats; nous y resterons tous, voilŗ notre destinťe!Ľ AprŤs avoir
cherchť ŗ le remettre un peu et ŗ combattre ses idťes noires et
misanthropiques, j'allai prendre les ordres de l'Empereur, qui m'ordonna
de faire camper mon corps d'armťe sur la crÍte que nous venions de
traverser. Napolťon, arrivť auprŤs du village de Markersdorff et
marchant dans un chemin creux, un boulet isolť, parti ŗ grande distance
d'une batterie qui se retirait devant notre avant-garde, tomba dans le
groupe qui l'environnait, tua roide le gťnťral Kirchner, bon officier du
gťnie, et blessa mortellement le duc de Frioul, dont les entrailles
furent mises ŗ dťcouvert. Peu de moments aprŤs, et lorsque j'ťtais
encore occupť de mon ťtablissement, j'appris cette triste nouvelle.
L'Empereur montra de la douleur et passa quelque temps avec Duroc, dans
la baraque oý il fut dťposť. Il paraÓt qu'il se justifia auprŤs de
l'Empereur de je ne sais quels torts, que celui-ci lui avait imputťs
sans fondement, et dont l'accusation l'avait profondťment blessť. Le
lendemain matin, je le vis de trŤs-bonne heure. Ses douleurs atroces lui
faisaient dťsirer la mort, et il la demandait avec instance. Je causai
avec lui pendant quelques moments. Je lui parlai des personnes qui
l'intťressaient, et, comme je lui montrais ma vive et profonde
commisťration, il me rťpondit: ęVa, mon ami, la mort serait peu de chose
pour moi si je souffrais moins vivement.Ľ
Dans le cours de mes rťcits, j'ai eu peu d'occasions de parler du duc de
Frioul. Ayant pour ainsi dire passť ma vie avec lui, et le rŰle qu'il a
jouť lui donnant de l'importance historique, je dois chercher ŗ le faire
connaÓtre.
Duroc ťtait d'une bonne famille. Son pŤre, gentilhomme de la province
d'Auvergne, sans fortune, servant dans un rťgiment de cavalerie en
garnison ŗ Pont-ŗ-Mousson, s'y maria, et s'ťtablit dans cette ville.
Duroc, placť comme ťlŤve du roi ŗ l'…cole militaire qui y existait
alors, fut destinť au service de l'artillerie, dťbouchť le plus sŻr,
carriŤre la plus avantageuse autrefois pour un gentilhomme qui n'avait
ni appui ni protection. Il y entra en mÍme temps que moi, et nous fŻmes
reÁus ťlŤves sous-lieutenants ŗ Ch‚lons, au commencement de janvier
1792. Plus tard, une partie de l'ťcole ayant ťmigrť, Duroc alla
rejoindre l'armťe des princes et fit le siŤge de Thionville. Son bon
sens naturel lui ayant promptement fait apprťcier la confusion qui
rťgnait parmi les ťmigrťs, il rentra en France, et vint ŗ Metz, oý
moi-mÍme, reÁu officier, j'ťtais en garnison. Il me fit confidence de ce
qui lui ťtait arrivť, et de sa rťsolution de reprendre du service. Le
gouvernement ferma les yeux sur son absence momentanťe, mais le
contraignit ŗ subir l'examen de sortie, et ŗ retourner ŗ Ch‚lons pour y
reprendre sa place d'ťlŤve. Quelque temps aprŤs, et cette formalitť
ťtant remplie, il rejoignit le quatriŤme rťgiment d'artillerie. De lŗ,
il passa dans une compagnie d'ouvriers employťe ŗ l'armťe de Nice. C'est
lŗ que je le retrouvai en 1794.
Duroc continua ŗ servir dans son arme, et devint aide de camp du gťnťral
Lespinasse, commandant l'artillerie de l'armťe d'Italie. AprŤs la
bataille d'Arcole, le gťnťral Bonaparte ayant perdu plusieurs aides de
camp, et m'ayant consultť sur les officiers qui pouvaient les remplacer,
je lui proposai et lui prťsentai Duroc qui fut admis. Voilŗ l'origine de
sa fortune. Duroc se l'est toujours rappelť, et m'a constamment vouť une
amitiť trŤs-vive, que le temps n'avait fait que consolider. Il fit, en
qualitť d'aide de camp, le reste des campagnes d'Italie et la campagne
d'…gypte. Arrivť au grade de colonel quand le gťnťral Bonaparte devint
premier consul, il eut l'administration de sa maison. Puis, quand
Napolťon prit la couronne impťriale, il fut grand marťchal avec une
autoritť trŤs-ťtendue, et investi d'une confiance sans bornes. Duroc eut
diverses missions diplomatiques ŗ Berlin et ŗ Pťtersbourg, qu'il remplit
ŗ la satisfaction de l'Empereur. Il ťtait le centre de mille relations
diverses. L'Empereur le chargeait souvent de travaux ťtrangers ŗ ses
fonctions habituelles, et il s'en acquittait toujours bien. Aussi fut-il
toujours surchargť de besogne, accablť de fatigues et d'ennuis, et au
point de murmurer souvent contre la faveur et les grandeurs.
Le duc de Frioul avait un esprit sans ťclat, mais sage et juste; peu de
passions, mais une profonde raison et une ambition bornťe. Les faveurs
sont venues le chercher plus souvent qu'il n'a couru aprŤs elles.
Naturellement rťservť, son commerce ťtait sŻr, et jamais on n'eut ŗ lui
reprocher la plus lťgŤre indiscrťtion. …tranger au sentiment de la
haine, il n'a nui ŗ personne; mais, au contraire, il a rendu une
multitude de services ŗ des personnes qui l'ont ignorť. Une rťclamation
juste et fondťe l'a toujours trouvť bien disposť, et il faisait auprŤs
de l'Empereur telle dťmarche qu'il croyait utile, sans jamais s'en faire
de mťrite auprŤs de celui qui en ťtait l'objet. Simple, vrai, modeste,
probe et dťsintťressť, son caractŤre froid l'aurait empÍchť de se
dťvouer pour un autre, de se _compromettre_ pour le servir; mais, dans
sa position, c'ťtait dťjŗ beaucoup que de rencontrer, si prŤs du pouvoir
suprÍme, un homme sans malveillance; car tout ce qu'on peut
raisonnablement dťsirer et espťrer, c'est d'y trouver, en outre de la
justice, une bienveillance active quand elle est sans danger. Duroc
ťtait bon officier, et il a regrettť d'Ítre ťloignť du mťtier pour
lequel il avait de l'attrait. TrŤs-utile ŗ l'Empereur, il lui a fait
souvent des amis. Ses opinions, toujours sages, lui permettaient, en les
exprimant, de s'ťlever avec une certaine indťpendance, quoiqu'il
craignÓt beaucoup Napolťon. S'il eŻt vťcu pendant l'armistice de 1813,
peut-Ítre aurait-il eu sur l'Empereur une influence utile et lui
aurait-il fait sentir les inconvťnients qui devaient rťsulter de la
reprise des hostilitťs. Mais Napolťon, aprŤs l'avoir perdu, n'avait prŤs
de lui alors presque que des flatteurs; et de ceux-lŗ seuls il aimait
les conseils.
Je reviens aux ťvťnements militaires. Le 23, l'armťe ennemie se retira
sur deux colonnes. Celle de droite, commandťe par Barclay de Tolly, sur
la route de Buntzlau, et celle de gauche, sous les ordres de
Wittgenstein, se dirigea sur Loubau. L'arriŤre-garde, commandťe par
Miloradowitch, brŻla le pont de la Niesse ŗ GŲrlitz, et dťtruisit tous
les moyens de passage. L'empereur de Russie et le roi de Prusse se
rendirent ŗ LŲwenberg. Le septiŤme corps, commandť par le gťnťral
Rťgnier, arriva devant GŲrlitz, et passa la Niesse de vive force. Le
cinquiŤme corps, qui le suivait, prit la direction de Buntzlau. Le
quatriŤme vint ŗ Hemersdorf, en arriŤre du septiŤme. Le onziŤme corps
s'ťtablit ŗ Schiomberg. Le quartier gťnťral, la garde, les troisiŤme et
sixiŤme corps restŤrent ŗ GŲrlitz.
Le 24, le quatriŤme corps se porta sur Loubau: au moment oý il se
disposait ŗ attaquer cette ville, l'ennemi l'ťvacua et prit position
derriŤre la Queiss.
Le corps commandť par Miloradowitch fut forcť ŗ la retraite; mais le
quatriŤme corps resta en position derriŤre Loubau, et le onziŤme corps
vint l'y joindre. Le cinquiŤme corps se porta ŗ Siegersdorf. Les
troisiŤme et septiŤme corps marchŤrent dans la direction de Valdau. Le
sixiŤme suivit le mouvement de l'armťe dans la direction de Buntzlau.
La colonne de droite de l'ennemi se retira sur Haynau; celle de gauche
sur Goldsberg.
Le 25, le cinquiŤme corps, aprŤs avoir rťtabli les ponts sur le Bober,
marcha sur Thomaswald. Les troisiŤme et septiŤme corps le remplacŤrent
ŗ Buntzlau. Le deuxiŤme vint ŗ Vichrau sur la Queiss. Le quartier
gťnťral vint ŗ Buntzlau. Le quatriŤme corps se rendit ŗ Loubau et ŗ
Gilesdorf.
Le 26, l'ennemi continua son mouvement sur Liegnitz. Il prťparait ainsi
sa retraite dans la haute Silťsie, en pivotant sur sa gauche qui resta
en position. Le mÍme jour, le quatriŤme corps passa le Bober ŗ Rakwitz,
et vint prendre position ŗ Deutmansdorf. Le onziŤme corps vint ŗ
LŲwenberg. Le cinquiŤme corps, qui marchait en tÍte de colonne ŗ la
suite de la droite de l'ennemi, vint prendre position en avant de
Haynau. La division Maison ťtait d'avant-garde. Elle s'ťtablit en avant
d'un ravin, sans s'Ítre fait suffisamment ťclairer. Au moment oý elle
campait, elle fut attaquťe ŗ l'improviste par les Prussiens qui
dťbouchŤrent des bois. Surprise sans Ítre en dťfense, elle fut culbutťe
et pour ainsi dire dťtruite. ņ peine deux cents hommes ťchappŤrent-ils
de cette ťchauffourťe, qui fit grand bruit et grand tort au gťnťral
Maison. Cet officier gťnťral, se croyant dťshonorť, voulut se brŻler la
cervelle. Le gťnťral de division Lagrange, son camarade de corps
d'armťe, le calma et l'empÍcha d'exťcuter la rťsolution que son
dťsespoir lui avait inspirťe.
Le troisiŤme et le septiŤme corps continuŤrent leur mouvement ŗ l'appui
du cinquiŤme corps dans la direction de Haynau et de Liegnitz.
J'arrivai, ce jour-lŗ, sur la Katzbach dont l'ennemi occupait en force
la rive droite. Le 27, l'ennemi prťpara un mouvement de concentration et
de retraite sur la haute Silťsie, en approchant sa droite du gros de ses
forces, qui se retira ŗ Merteskatz, ŗ peu de distance de Jauer, et y
prit position. Pendant ce temps, le septiŤme et le cinquiŤme corps
franÁais arrivaient ŗ Liegnitz, tandis que le quatriŤme prenait position
sur la Katzbach ŗ Hohendorf, et le onziŤme ŗ Goldsberg. Le troisiŤme
corps ťtait restť ŗ Haynau. Ainsi toute l'armťe ťtait en ligne, prÍte ŗ
s'engager contre les forces concentrťes de l'ennemi; mais, aprŤs cette
concentration, l'ennemi continua son mouvement rťtrograde en laissant de
fortes arriŤre-gardes pour couvrir Breslau.
Le quartier gťnťral ennemi se dirigea sur Schweidnitz.
Le mÍme jour, 27, je passai la Katzbach, et je chassai l'ennemi qui
gardait les dťfilťs en arriŤre de cette riviŤre. L'ennemi prťsenta ŗ ma
vue environ trente mille hommes placťs en ťchelons, ce qui annonÁait
l'intention de se retirer.
Le surlendemain, 29, je marchai sur Jauer, tandis que le quatriŤme corps
couvrait ma droite en se portant sur Hemsdorf. En avant de Jauer, je
trouvai un corps ennemi d'environ quinze mille hommes que je culbutai
aprŤs un combat assez vif. J'avais ťtť rejoint par le corps de cavalerie
du gťnťral Latour-Maubourg; mais cette cavalerie, toute nouvelle et peu
instruite, ťtait d'une faible ressource. Avec une cavalerie capable de
combattre, et sur laquelle j'eusse pu compter, ce corps de quinze mille
hommes aurait probablement ťtť dťtruit, tant le succŤs obtenu avait ťtť
prononcť. Il y eut un millier de prisonniers de faits. Toutes les forces
ennemies se dirigŤrent sur Striegau.
Les troisiŤme, cinquiŤme et septiŤme corps continuŤrent leur mouvement
dans la direction de Breslau, et s'ťtablirent ŗ Neumarck. Le 29, les
armťes restŤrent en position.
Le 30, je reÁus l'ordre de me diriger sur Eisendorf, et le duc de
Tarente, avec le onziŤme corps, fut dirigť sur Striegau. Pendant ce
mouvement de flanc, une nombreuse cavalerie s'opposa ŗ ma marche et
m'obligea ŗ prendre beaucoup de prťcautions. La position de l'armťe
ainsi rťunie obligeait l'ennemi ŗ rester acculť ŗ la BohÍme et ŗ la
Silťsie autrichienne. Si la guerre eŻt continuť immťdiatement avec des
succŤs marquťs, sa situation pouvait devenir fort critique et mÍme
dťsespťrťe.
Mais l'ennemi, en choisissant cette direction, avait calculť toutes les
chances qui pouvaient en rťsulter. En repassant l'Oder, il abandonnait
toute la Prusse et la livrait ŗ notre vengeance. Il consacrait l'opinion
d'une infťrioritť dťcidťe. L'Autriche, encore indťcise sur le parti
qu'elle prendrait, car des vellťitťs et des projets hypothťtiques
ťtaient seuls entrťs alors dans son esprit, ťtait abandonnťe et livrťe ŗ
ses craintes si on s'ťloignait d'elle. En se serrant sur elle, on
l'entraÓnait dans une alliance. En la prenant pour arbitre, la laissant
maÓtresse de dicter les conditions de la paix aux puissances
belligťrantes, on flattait son orgueil, on servait ses intťrÍts, et on
la forÁait ŗ prendre parti contre Napolťon, s'il se refusait ŗ se
conformer ŗ ses offres.
D'un autre cotť, ce parti hardi avait ses inconvťnients; car, si les
ťvťnements eussent pris un grand caractŤre d'urgence, l'Autriche,
n'ťtant pas encore prÍte, n'aurait pas voulu se compromettre en se
dťclarant pour les alliťs. Alors ceux-ci devaient avoir en vue, comme
complťment de leurs combinaisons, d'arriver ŗ la conclusion d'un
armistice. De son cŰtť, Napolťon ťtait dťcidť ŗ y consentir par mťfiance
de l'Autriche, motivťe sur la manoeuvre des ennemis, annonÁant de leur
part une confiance qui cependant ťtait loin d'Ítre entiŤre; mais il
fallait alors, pour cette raison, vouloir faire la paix.
Cependant il a ťtť dťmontrť depuis que, dans cette circonstance,
l'intťrÍt bien entendu de Napolťon aurait ťtť de continuer la guerre.
Son armťe ťtait plus nombreuse que celle de l'ennemi. Celle-ci, battue
dans deux grands engagements, et aprŤs une retraite fort longue,
ťprouvait du dťcouragement. Aucun renfort ne l'avait encore rejoint.
Quant ŗ nous, nos corps, organisťs ŗ la h‚te, avaient beaucoup souffert
des combats et des marches. Il y avait fatigue et lassitude. Notre
cavalerie, si peu nombreuse encore, n'avait aucune consistance. Un repos
de deux mois devait rendre ŗ nos troupes toute la valeur dont elles
ťtaient susceptibles. D'ailleurs, d'immenses renforts ťtaient en marche
de toutes parts pour nous rejoindre. Enfin nos jeunes soldats devaient
profiter, dans des camps de repos, des soins qu'on donnerait ŗ leur
instruction. Toutes ces considťrations firent pencher Napolťon en faveur
d'un armistice quand les Russes le lui firent proposer. Le gťnťral
Schuwaloff, aide de camp de l'empereur de Russie, se prťsenta ŗ nos
avant-postes pour le demander. Le duc de Vicence ayant ťtť envoyť par
Napolťon pour le recevoir, des confťrences suivirent dans le ch‚teau de
Pleiswig entre les avant-postes des deux armťes, et, en quarante-huit
heures, tout fut convenu et signť.
Cet armistice devait durer jusqu'au 20 juillet et cesser six jours aprŤs
avoir ťtť dťnoncť; plus tard, on le prolongea jusqu'au 10 aoŻt. La ligne
de dťmarcation suivante fut convenue entre les deux armťes: en Silťsie,
la ligne de l'armťe combinťe, partant de la BohÍme, passait par
Dittersbach, Paffendorf et Landshut, suivait le Bober jusqu'ŗ
Budelstadt, et de lŗ, passant par Boskenheim et Striegau, suivait la
riviŤre de Striegau jusqu'ŗ Kanth.
La ligne de l'armťe franÁaise partait ťgalement des frontiŤres de la
BohÍme, arrivait au Bober par Schreibersan et Rimnitz, suivait cette
riviŤre jusqu'ŗ Lahn, allait ensuite gagner ŗ Neukwitz la Katzbach,
qu'elle suivait jusqu'ŗ l'Oder.
Le pays entre les deux lignes de dťmarcation ťtait neutre depuis
l'embouchure de la Katzbach. La ligne de dťmarcation suivait l'Oder
jusqu'ŗ la frontiŤre de la Saxe, vers l'embouchure de la Sprťe, de lŗ
arrivait ŗ l'Elbe, non loin de l'embouchure de la Saale, en suivant les
frontiŤres de la Prusse, et ensuite le fleuve jusqu'ŗ la frontiŤre de la
troisiŤme division militaire. La dťmarcation du bas Elbe devait Ítre
dťterminťe de concert avec le prince d'EckmŁhl. Il fut convenu que
Magdebourg et toutes les places fortes entre les mains des FranÁais,
situťes dans les pays occupťs par l'ennemi, auraient un rayon d'une
lieue autour de leur enceinte et seraient ravitaillťes tous les cinq
jours.
Les deux armťes devaient Ítre placťes, le 12 juin, sur leurs nouvelles
lignes. Le quartier gťnťral de l'armťe s'ťtablit ŗ Reichenbach.
L'empereur Napolťon retourna ŗ Dresde, oý il arriva le 10 juin.
Pendant les mouvements dont j'ai rendu compte, le douziŤme corps,
commandť par le duc de Reggio, ťtait restť d'abord ŗ Bautzen. Il s'ťtait
ensuite portť sur Hoyeswerda pour couvrir l'armťe contre les troupes qui
venaient de Berlin, et que commandait le gťnťral Bulow. La mission de ce
corps d'armťe ťtait de couvrir cette capitale, et, en consťquence, il
s'ťtait placť ŗ Interbach. Lŗ, il reÁut des renforts de la landwehr de
Brandebourg, et son effectif atteignit le chiffre de trente mille
hommes. Ainsi renforcť, Bulow vint attaquer le duc de Reggio ŗ
Hoyerswerda, mais il fut repoussť avec perte. Il fit sa retraite sur
Kottebus, oý il prit position avec la masse de ses forces, occupant
ainsi Gaben, Drebkorn et Interbach, avec de forts dťtachements. Le duc
de Reggio marcha ŗ lui; mais, ayant voulu menacer Berlin, il se porta
dans la direction de Lukau. Bulow, informť de ce mouvement, accourut en
toute h‚te sur ce point. Lukau a une bonne enceinte et des fossťs pleins
d'eau. L'avant-garde ennemie fut culbutťe et forcťe de rentrer dans la
ville. Mais ce premier succŤs ne termina point le combat; la lutte se
prolongea et finit par tourner ŗ notre dťsavantage. Le douziŤme corps,
attaquť sur ses flancs et obligť de se retirer, se dirigea sur Ubigau,
oý il reÁut la nouvelle de l'armistice.
Par la dispersion de ses forces, l'ennemi avait donnť beau jeu au duc de
Reggio; mais celui-ci n'en sut pas profiter. Sa marche incertaine en se
portant en avant, ses directions variťes, donnŤrent au gťnťral Bulow le
moyen de rťparer toutes ses fautes et de combattre ŗ Lukau avec
avantage.
Le mouvement gťnťral des troupes, nous ayant ťloignťs de notre
frontiŤre, avait laissť l'Allemagne tout entiŤre sans troupes. Le corps
de Woronzoff devant Magdebourg, et un autre corps stationnť ŗ Hambourg,
servaient d'appui ŗ une foule de partisans qui opťraient sur nos
derriŤres. Ils se montraient partout et dans toutes les directions.
Divers convois furent enlevťs, plusieurs dťtachements pris, et beaucoup
d'atrocitťs commises contre les usages de la guerre. Un partisan
prussien, nommť Lutzow, acquit, dans ces circonstances, une sorte de
cťlťbritť.
Une opťration combinťe entre les gťnťraux Woronzoff et Czernikoff
faillit avoir pour rťsultat l'enlŤvement de la garnison de Leipzig, oý
beaucoup de blessťs se trouvaient rťunis; mais l'armistice en arrÍta
l'exťcution au dernier moment.
Enfin divers combats eurent lieu dans les environs de Hambourg. Les Óles
de l'Elbe et la ville de Hambourg elle-mÍme tombŤrent successivement au
pouvoir du gťnťral Vandamme, au moyen des secours que lui envoya le roi
de Danemark, qui resserra en cette circonstance ses liens d'alliance
avec l'Empereur. DŤs ce moment, une division danoise, commandťe par le
gťnťral Schomtenbourg, se trouva combinťe avec les troupes franÁaises.
Les diffťrents corps de l'armťe ťtablis dans les divers cercles de
LŲwenberg, de Goldsberg, Buntzlau, eurent ces territoires pour assurer
leurs besoins. Le sixiŤme corps fut placť ŗ Buntzlau. Chacun s'occupa
avec activitť ŗ refaire les troupes, ŗ les rťorganiser et ŗ les
instruire. Des dťtachements amenant des recrues ťtaient en route de
France pour tous les rťgiments; mais, comme ils ťtaient entiŤrement
composťs de nouveaux soldats sans aucune instruction, il fallait
consacrer tous ses efforts ŗ les mettre en ťtat de combattre. Ces soins
occupŤrent tous les chefs de l'armťe jusqu'au 10 aoŻt, moment auquel on
reprit les armes. Je vais rendre un compte succinct de ce qui se passa
jusqu'au renouvellement des hostilitťs.
SITUATION DE L'ARM…E FRAN«AISE PENDANT L'ARMISTICE ET LA DEUXI»ME
CAMPAGNE DE 1813.
La maniŤre et la promptitude avec laquelle l'armťe franÁaise avait
reparu sur la scŤne, l'espŤce de rťsurrection dont elle venait de
prťsenter l'image, avaient ťtonnť l'Europe. Les succŤs de Lutzen et de
Bautzen avaient montrť ce que l'on pouvait attendre de ses efforts. Mais
ces succŤs, si glorieux et si ťclatants qu'ils fussent, n'avaient donnť
que de faibles rťsultats. Ils n'avaient pas diminuť d'une maniŤre
sensible les forces de l'ennemi. D'un autre cŰtť, l'armťe combinťe ťtait
loin d'Ítre arrivťe ŗ la force que le mouvement imprimť en Prusse et en
Russie devait produire. Les recrues dont la levťe avait ťtť ordonnťe en
Russie, au commencement de l'annťe prťcťdente, ťtaient au moment de
rejoindre et de renforcer les corps. Le mouvement national de la Prusse
n'ťtait pas encore rťgularisť; le roi avait ordonnť une levťe en masse
de ses peuples contre les FranÁais quand ils franchiraient leur
territoire; il ordonnait la destruction des moissons et des fruits,
l'enlŤvement des bestiaux, enfin une guerre ŗ mort. Quand, en 1814, les
paysans franÁais voulurent prendre les armes, on les menaÁa de les
traiter en criminels. On prťtendit qu'ils agissaient contre le droit des
gens et les usages des peuples civilisťs. C'est ainsi que les hommes
changent de doctrines et de principes, suivant leurs diverses
situations.
Ces dispositions extrÍmes, inspirťes par le dťsespoir et la fureur,
restŤrent, au surplus, sans exťcution: mais un esprit public prononcť,
une ťnergie admirable, se montrŤrent dans toutes les classes en Prusse.
Les sociťtťs secrŤtes, formťes pour prťparer la dťlivrance du pays, avec
l'assentiment et l'appui du gouvernement, produisirent l'effet qu'on
avait dŻ en attendre. Les idťes de libertť, le dťsir d'institutions et
de garanties constitutionnelles, s'ťtaient mÍlťs aux idťes
d'affranchissement et d'indťpendance nationale. Tous ces dťsirs, toutes
ces espťrances, avaient ťtť encouragťs par le roi, ŗ titre de moyens
dťfensifs. Aussi tout bouillait en Prusse. Plus l'oppression de Napolťon
avait ťtť forte et sa tyrannie odieuse, et plus la rťaction avait de
violence. Les ťtudiants couraient aux armes. Cette jeunesse vive,
ardente et souvent redoutable, qui peuple les universitťs d'Allemagne,
rappelait, par son esprit, son ardeur et son but, la formation des
premiers bataillons des volontaires de France, qui furent tout de suite
si remarquables par leur conduite, et qui devinrent plus tard le noyau
de l'armťe franÁaise et la pťpiniŤre d'oý sortit le plus grand nombre de
ses chefs. Enfin l'ťnergie de la Prusse ťtait encore accrue par le
sentiment de la position dans laquelle elle s'ťtait placťe
volontairement. Sa dťsertion de la cause franÁaise au milieu de la
guerre, cette dťfection du gťnťral York, avaient autorisť toute espŤce
de vengeance de la part de Napolťon, qui n'ťtait, d'ailleurs, que trop
disposť ŗ s'y livrer. La force seule pouvait donc la prťserver. Mais,
pour mettre en oeuvre de pareilles ressources, pour rťgulariser de
semblables moyens, le gouvernement avait ŗ peine eu trois mois, et
encore le dernier de ces trois mois avait ťtť employť tout entier ŗ
combattre. La Prusse ťtait donc loin de prťsenter en ce moment les
forces rťelles dont elle pourrait bientŰt disposer. L'armistice devait
lui donner le temps d'achever ses prťparatifs.
Les Russes, ses alliťs, ťpuisťs par la campagne prťcťdente, par les
marches exťcutťes pendant l'hiver, ne comptaient dans leur armťe que des
bataillons incomplets. Les recrues, formťes et dressťes, allaient
arriver et doubler chez eux le nombre des combattants.
De son cŰtť, Napolťon avait ordonnť des levťes immenses. Ces levťes
s'exťcutaient avec facilitť; mais les produits n'en ťtaient pas encore
parvenus jusqu'ŗ lui. Deux mois de plus, et son armťe aurait une force
double, une cavalerie nombreuse, et tout ce qui pouvait lui donner les
chances de la victoire. Ainsi un repos momentanť avait dŻ entrer dans
ses idťes. Il profita avec activitť de l'armistice.
Enfin, pour achever le tableau de cette ťpoque mťmorable, je dirai que
l'Autriche, ayant vu, lors des dťsastres de 1812, le rŰle qu'elle ťtait
appelťe ŗ jouer, faisait ses prťparatifs dans ce but. Les circonstances
ťtaient favorables. Elles lui fournissaient l'occasion de devenir
modťratrice et mÍme juge suprÍme des dťbats, en raison de sa force, en
raison de sa position gťographique, et en raison mÍme de l'esprit de
sagesse et de lenteur qui prťside ŗ ses conseils.
On a dťjŗ dit que, dŤs le 26 avril, le gouvernement autrichien avait
dťclarť que les stipulations du traitť du 14 mars 1812 n'ťtaient plus
applicables ŗ la situation prťsente. C'ťtait dťvoiler toute sa
politique. Mais ses moyens militaires, pour l'appuyer, ťtaient
incomplets. Il fallait porter son armťe ŗ un effectif qui donn‚t ŗ son
langage le poids convenable. On s'occupa donc avec activitť en Autriche
de levťes d'hommes, d'achats de chevaux et de toutes les dispositions
qui doivent donner la possibilitť d'entrer en campagne. Pour cela, il
fallait du temps. Aussi l'Autriche fut-elle l'intermťdiaire utile par
lequel passa la demande d'une prolongation de suspension d'armes que fit
Napolťon. Elle la favorisa, l'appuya, en offrant en mÍme temps sa
mťdiation pour la paix. Ainsi, quand tout le monde parlait de la paix,
personne n'en voulait. Tout le monde ťtait de mauvaise foi et dans la
conviction que jamais la paix ne pourrait rťaliser des prťtentions
opposťes et inconciliables.
La Prusse, ainsi que je l'ai dťjŗ dit, voulait dťployer les moyens que
le mouvement national mettait ŗ sa disposition.--Les Russes recevaient
leurs recrues et leurs renforts; l'Autriche voulait donner ŗ son armťe
un effectif qui l'autoris‚t ŗ parler en maÓtre, et Napolťon atteindre
l'ťpoque oý il aurait fait arriver les levťes extraordinaires que les
efforts si honorables du peuple franÁais faisaient de bonne gr‚ce et
avec empressement. C'ťtait une halte, un repos profitable ŗ chacun, et
dont l'objet ťtait de se prťparer ŗ combattre et de se mettre ŗ mÍme de
le faire avec succŤs. Il n'y avait qu'une seule chance de paix: c'est
que Napolťon consentÓt ŗ faire le sacrifice d'une partie de sa
puissance, spťcialement en faveur de l'Autriche, afin de se la rendre
favorable. Du moment oý elle eŻt ťtť avec nous, sa prťpondťrance eŻt
dťcidť la question, et toute lutte cessait; mais, pour qu'elle fŻt avec
nous, il fallait adopter des sentiments autres que ceux qui animaient
Napolťon. Ainsi, malgrť le langage pacifique tenu par tout le monde,
tout le monde voulait la guerre; car chacun voulait des rťsultats que la
victoire seule pouvait donner, et Napolťon, dont le caractŤre dŤs lors
ťtait de s'abandonner aux illusions qui le flattaient, s'efforÁait ŗ se
persuader que jamais l'Autriche n'oserait prendre les armes contre lui,
et qu'ainsi il aurait seulement ŗ combattre la Prusse et la Russie.
Cette maniŤre d'envisager les ťvťnements futurs n'a plus cessť d'Ítre
la sienne et l'a conduit ŗ sa perte.
C'est dans cet esprit et avec ces dispositions que les armťes prirent
les positions rťglťes par l'armistice.
Les espťrances de l'Empereur pour l'augmentation de ses forces se
rťalisŤrent promptement. L'armťe croissait ŗ vue d'oeil. Les jeunes
soldats furent occupťs dans les camps ŗ tirer ŗ la cible, exercice dont
on n'a jamais fait un emploi suffisant en France, et qui, constamment en
usage en Angleterre, donnait autrefois ŗ l'infanterie anglaise un feu
supťrieur ŗ celui des autres troupes de l'Europe. Un grand nombre des
conscrits qui venaient de faire la campagne se trouvaient blessťs ŗ la
main gauche et avaient perdu un doigt. Cette blessure, cause de rťforme,
les fit soupÁonner de s'Ítre mutilťs pour Ítre exemptťs du service, et
l'Empereur ordonna les mesures les plus rigoureuses contre eux.
Quelques-uns pouvaient Ítre coupables; mais j'acquis la certitude que
ces blessures, si nombreuses et si semblables, avaient pu Ítre reÁues
naturellement ŗ cause du peu d'instruction des troupes. Je reconnus que,
lorsque les rangs sont trop ouverts, comme il arrive avec des soldats
peu instruits et chargťs de gros sacs, le deuxiŤme rang, en tirant, peut
facilement blesser les hommes du premier. Je fus heureux de constater un
fait servant de rťparation ŗ l'honneur franÁais.
J'allai m'ťtablir, de ma personne, dans un ch‚teau charmant appelť
Niederthomaswald, ŗ deux lieues en avant de Buntzlau.
Napolťon, voulant prťparer un point d'appui sur le Bober, me demanda si
Buntzlau pouvait Ítre fortifiť et mis ŗ l'abri d'un coup de main. Ayant
rťpondu d'une maniŤre affirmative, je reÁus l'ordre d'exťcuter les
travaux nťcessaires. Je parvins ŗ faire de cette ville une forteresse
qui eŻt exigť un siťge. Il y avait une premiŤre enceinte revÍtue, une
seconde enceinte, liťe aux maisons, qui pouvait servir de rťduit, une
contre-escarpe et des fossťs qui furent inondťs en partie au moyen des
nouveaux travaux; mais cette place, mise en ťtat en moins d'un mois, ne
fut pas occupťe pendant la campagne suivante et ne servit ŗ rien, ainsi
que je l'expliquerai plus tard.
L'armistice avait ťtť conclu par toutes les puissances dans le but
apparent d'arriver ŗ la conclusion de la paix, sans la mťdiation de
l'Autriche. Le prince de Metternich se rendit ŗ Dresde pour y voir
l'Empereur et juger de ses dispositions. Napolťon avait toujours eu pour
lui une bienveillance toute particuliŤre et un attrait marquť. Cependant
leur discussion fut vive, de la part de l'Empereur au moins; car le
prince de Metternich, toujours maÓtre de lui-mÍme, parlait de tout sans
passion, et discutait les intťrÍts dont il ťtait chargť avec le calme
qui convient ŗ un homme d'…tat. Les emportements de Napolťon, jouťs,
comme il lui arrivait souvent, ne produisirent aucun effet. La grande
affaire ťtait les pouvoirs ŗ donner aux mťdiateurs. L'Empereur voulait
que l'Autriche fŻt seulement une intermťdiaire; mais l'Autriche voulait
Ítre arbitre et rťsolut ŗ se dťclarer contre celui qui refuserait de
reconnaÓtre sa mťdiation. Cependant Napolťon accorda le principe et
convint de ce mode de nťgociation. L'Empereur reconnut clairement alors
la propension de l'Autriche ŗ devenir son ennemie; mais il refusait
toujours ŗ croire qu'elle s'y dťcid‚t. Il calcula avec le prince de
Metternich les forces qu'il allait avoir ŗ combattre. Il commenÁa par
les nier ou les rťduire de beaucoup. Forcť ensuite de reconnaÓtre tout
ce que ces forces avaient d'imposant, il lui dit avec humeur ces paroles
remarquables, qui n'ťtaient dignes ni de son esprit ni de son jugement:
ęEh bien! plus vous serez, et plus sŻrement et plus facilement je vous
battrai.Ľ
Le prince de Metternich le quitta aprŤs une conversation de dix heures,
mais ayant perdu l'espťrance d'obtenir une nťgociation suivie dont la
conclusion pŻt Ítre la paix. Pendant ce temps, Napolťon s'abandonnait ŗ
l'idťe que l'Autriche resterait neutre; car ses derniŤres paroles furent
celles-ci, au moment mÍme oý le prince de Metternich passait la derniŤre
porte de son appartement: ęEh bien! vous ne me ferez pas la guerre.Ľ
Cependant le congrŤs de Prague fut ouvert comme il ťtait convenu. Les
plťnipotentiaires franÁais, MM. de Vicence et de Narbonne, s'y rendirent
tard. Ensuite ils dťclarŤrent qu'ils n'avaient pas de pouvoirs, ajoutant
qu'ils les recevraient incessamment. Le temps s'ťcoula dans cette vaine
attente. On arriva ainsi au 10 aoŻt, dernier jour de l'armistice. ņ
minuit, les alliťs dťclarŤrent que, d'aprŤs les termes des conventions,
les hostilitťs recommenceraient le 16.
Le 12, tout ťtant rompu, les pouvoirs arrivŤrent; mais il ťtait trop
tard. Celui qui a approchť et bien connu Napolťon le reconnaÓtra dans
cette maniŤre d'agir.
Napolťon s'ťtait laissť aller tout ŗ la fois ŗ la fougue de son
caractŤre, ŗ la passion qui le dominait et ŗ une espŤce de finasserie
toujours fort de son goŻt. Il aurait dŻ comprendre, tout d'abord,
qu'aprŤs la consommation ťnorme d'hommes qu'il avait faite et la
nťcessitť oý il ťtait de faire la guerre avec des soldats si jeunes il
ne pourrait pas la prolonger pendant longtemps, car alors son armťe se
fondrait comme la neige au printemps. Napolťon, dans les derniers temps
de son rŤgne, a toujours mieux aimť tout perdre que de rien cťder. En
cela, son caractŤre a ťprouvť une grande modification. Ce n'ťtait plus
le jeune gťnťral d'Italie qui avait su renoncer ŗ l'espťrance de prendre
immťdiatement Mantoue, qui s'ťtait rťsignť ŗ abandonner cent cinquante
piŤces de siťge dans la tranchťe pour aller livrer une bataille, la
gagner et aller reprendre l'exťcution de ses projets.
Si, en 1813, Napolťon avait fait la paix (et il pouvait la faire avec
honneur aprŤs ses victoires de Lutzen et de Bautzen), en conservant de
grands avantages, il satisfaisait l'opinion publique en France. Il
rťcompensait le pays des efforts qu'il avait faits pour le soutenir. Il
laissait mŻrir son armťe, si je puis m'exprimer ainsi; et, aprŤs deux ou
trois ans, s'il avait voulu, il aurait recommencť la lutte avec des
moyens plus complets et plus imposants que jamais; mais sa passion
l'entraÓna. Son esprit supťrieur lui montra certainement alors les
avantages d'un systŤme de temporisation; mais un feu intťrieur le
brŻlait, un instinct aveugle l'entraÓnait, quelquefois mÍme contre
l'ťvidence. Cet instinct parlait plus haut que la raison, et
commandait.
Il avait d'ailleurs un conseiller funeste qui flattait ses passions,
adoptait toutes ses illusions, et mÍme les rendait encore plus
ťblouissantes. Le duc de Bassano, esprit ťtroit et vain, flatteur par
essence, avait jurť une adoration sans rťserve ŗ son maÓtre. Il la
professait hautement et s'en glorifiait. Il ťtudiait ses dťsirs pour en
faire ses lois, et il mettait son esprit et son ťloquence ŗ plaider les
causes que Napolťon avait dťjŗ jugťes. C'ťtait un moyen de lui plaire et
d'en Ítre bien traitť. Mais le prix de ses succŤs devait Ítre la perte
de son idole. Il rťpťtait, ŗ cette ťpoque, ŗ Napolťon sans cesse ces
paroles: ęL'Europe est attentive et impatiente de savoir si l'Empereur
sacrifiera Dantzig.Ľ La prťtention et l'espťrance de conserver cette
ville, ainsi que les sentiments d'orgueil qui s'opposaient ŗ toute
espŤce de sacrifice, ťtaient caressťs par ce langage. C'est lŗ ce qui a
fait recommencer la guerre, et en dťfinitive produit la chute de
Napolťon et la destruction de l'Empire.
L'ťpoque rapprochťe des hostilitťs dťcida l'Empereur ŗ faire cťlťbrer sa
fÍte, par l'armťe, plus tŰt qu'ŗ l'ordinaire. Le 15 aoŻt y ťtait
consacrť ordinairement. Elle fut fixťe cette annťe au 10 aoŻt, pour la
derniŤre fois.
Napolťon avait dťployť une telle activitť, les ordres et les mesures
prises pour la rťorganisation de son armťe avaient ťtť si bien combinťs,
les autoritťs en France avaient mis tant de zŤle ŗ les exťcuter, et le
pays avait montrť tant de bonne volontť, que ses forces ťtaient devenues
extrÍmement considťrables.
L'armťe se composait de douze corps d'armťe organisťs en quarante et une
divisions, toutes au complet, sans compter la garde impťriale, la
vieille garde, formant en tout quatre divisions. La cavalerie, qui nous
manquait complťtement ŗ Lutzen, ťtait portťe maintenant ŗ soixante-dix
mille chevaux. Enfin ce n'est pas trop de porter ŗ quatre cent cinquante
mille hommes les forces totales rťunies en Allemagne, et dont Napolťon
pouvait disposer.
Voici quels ťtaient les divers corps de l'armťe, et les noms de ceux qui
les commandaient:
Premier corps, Vandamme, trois divisions;
DeuxiŤme, duc de Bellune, quatre divisions;
TroisiŤme, prince de la Moskowa, quatre divisions;
QuatriŤme, gťnťral Bertrand, trois divisions;
CinquiŤme, gťnťral Lauriston, trois divisions;
SixiŤme, duc de Raguse, trois divisions;
SeptiŤme, gťnťral Rťgnier, quatre divisions;
HuitiŤme, prince Poniatowski, deux divisions;
OnziŤme, duc de Tarente, trois divisions;
DouziŤme, duc de Reggio, trois divisions;
TreiziŤme, prince d'EckmŁhl, trois divisions;
QuatorziŤme, marťchal Saint-Cyr, trois divisions.
En Franconie, le duc de Castiglione avec trois divisions.
Les troupes ŗ cheval ťtaient organisťes ainsi: Chaque corps d'armťe
avait une brigade de cavalerie lťgŤre. La rťserve, composťe de dix-sept
divisions, ťtait formťe en cinq corps, dont chacun avait trois ou quatre
divisions, et qui ťtaient commandťs, savoir:
Le premier corps, par Latour-Maubourg, quatre divisions;
DeuxiŤme, Sťbastiani, trois divisions;
TroisiŤme, duc de Padoue, quatre divisions;
QuatriŤme, comte de Valmy, trois divisions;
CinquiŤme, le gťnťral Millaud, trois divisions.
Enfin on doit ajouter ŗ la masse de ces forces les garnisons des places
de Pologne et de Prusse, qui tenaient en ťchec plus de cent mille hommes
ŗ l'ennemi.
Si les soldats, qui composaient cette armťe eussent ťtť plus ‚gťs et
plus instruits, jamais on n'aurait rien vu de plus formidable.
Napolťon avait prťparť ses mouvements par divers travaux exťcutťs sur
l'Elbe. Si l'enceinte de Dresde, dťtruite en 1809 par ses ordres, eŻt
existť alors, elle lui aurait servi puissamment au dťbut des opťrations.
On dut y supplťer par des travaux de campagne. Ces travaux, faits ŗ la
h‚te, occupaient un trop vaste espace pour leur nombre. Jamais ils ne
purent acquťrir une force suffisante pour mettre Dresde en sŻretť, sans
une armťe pour les occuper. Or, dans le plan de campagne qu'adopta
Napolťon, il aurait fallu que la ville de Dresde, pivot de ses
opťrations, fŻt ŗ l'abri d'un coup de main, et susceptible d'Ítre
abandonnťe momentanťment ŗ elle-mÍme.
Au nombre des points que Napolťon fit fortifier, je parlerai de
Lilienstein, oý un camp retranchť pour quelques milliers d'hommes fut
construit. Deux ponts sur l'Elbe furent ťtablis sous KŲnigstein. Ils
donnaient la possibilitť de se mouvoir, par une ligne trŤs-courte, de la
Silťsie et la Lusace, sur les dťbouchťs de la BohÍme. Par leur moyen,
Napolťon comptait se porter rapidement sur Dresde et sur les derriŤres
de l'ennemi, pendant qu'il serait contenu par cette place.
Au moment oý l'armistice fut rompu, Napolťon m'ťcrivit deux trŤs-longues
lettres pour m'en prťvenir, me faire connaÓtre le plan de campagne qu'il
projetait, et me demander mon avis. Ce plan ťtait ŗ peu prŤs celui qu'il
a suivi. Je lui rťpondis en le discutant, en bl‚mant, de toutes mes
forces, son systŤme, et voici quels ťtaient mes motifs[3].
[Note 3: Voir piŤces justificatives.]
Napolťon, au lieu de concentrer ses forces, se dťcidait ŗ les diviser en
trois parties, formant trois armťes indťpendantes: une en Silťsie, une ŗ
Dresde, une dans la direction de Berlin.
Personne, dans l'armťe, n'avait l'autoritť nťcessaire pour commander
plusieurs corps d'armťe ŗ la tÍte desquels ťtaient des marťchaux.
Napolťon seul pouvait se servir de semblables ťlťments.
Je pensais, au contraire, que Napolťon avait deux partis entre lesquels
il pouvait choisir:
1į Placer les troupes en arriŤre de la Sprťe, ŗ cheval sur l'Elbe,
ayant Dresde pour point d'appui central, ŗ une forte marche de cette
ville, et ťcraser le premier ennemi qui serait ŗ sa portťe. Une fois le
premier succŤs obtenu, les autres seraient faciles. En plaÁant ses
troupes aussi rapprochťes les unes des autres, Napolťon se trouvait pour
ainsi dire partout ŗ la fois et pouvait facilement, presque sous ses
yeux, combiner leurs mouvements;
2į Se dťcider ŗ une offensive en BohÍme immťdiatement. Les troupes
placťes sur le Bober et celles en avant de Torgau auraient couvert son
mouvement en partant de Dresde et dťbouchant par Peterswald. Ces troupes
se seraient rapprochťes de lui en se tenant sur la dťfensive, et ensuite
auraient fini par le rejoindre, celles du Bober en entrant en BohÍme par
Zittau; et les autres, aprŤs avoir laissť trente mille hommes pour la
dťfense de l'Elbe, auraient probablement pu suivre cette offensive.
Alors, continuant son mouvement, il aurait traversť la BohÍme, portť la
guerre en Moravie et marchť sur Vienne. Il couvrait ainsi la
confťdťration du Rhin et s'assurait de sa fidťlitť. Il ralliait l'armťe
bavaroise, prenait sa ligne d'opťration sur Strasbourg, et, plus tard,
il faisait sa jonction ŗ Vienne avec l'armťe d'Italie, dont le point de
dťpart ťtait les bords de la Save, et se trouvait ainsi trŤs-rapprochť.
Au lieu de cela, l'Empereur organisa la masse de ses troupes en trois
armťes vťritables. La passion le portait ŗ agir le plus promptement sur
la Prusse. Il voulait que les premiers coups de canon fussent tirťs sur
Berlin, et qu'une vengeance ťclatante et terrible suivÓt immťdiatement
le renouvellement des hostilitťs. Alors il fallait une armťe qui march‚t
sur Berlin, et une autre en Silťsie pour couvrir la premiŤre. Il fallait
enfin une troisiŤme armťe en avant de Dresde, pour empÍcher la grande
armťe ennemie de dťboucher de la BohÍme. Par ce systŤme, l'offensive
ťtait donnťe aux corps qui, dans mon opinion, auraient dŻ rester sur la
dťfensive, et la dťfensive ťtait rťservťe ŗ ceux dont le rŰle aurait du
Ítre offensif. La question me paraissait ainsi renversťe. AprŤs avoir
combattu ce projet par tous les raisonnements les plus propres pour
ramener l'Empereur ŗ mon opinion, je terminais par cette phrase:
ęPar la division de ses forces, par la crťation de trois armťes
distinctes et sťparťes par de grandes distances, Votre Majestť renonce
encore aux avantages que sa prťsence sur le champ de bataille lui
assure, et je crains bien que, le jour oý elle aura remportť une
victoire et cru gagner une bataille dťcisive, elle n'apprenne qu'elle en
a perdu deux.Ľ
Je fus malheureusement prophŤte. Ce fut prťcisťment ce qui arriva.
Pendant la victoire de Dresde, nous ťtions battus ŗ la fois en Silťsie,
sur la Katzbach, et en Prusse, devant Berlin, ŗ Grossbeeren.
Nonobstant mes observations et mon opinion contraire, dont Napolťon
avait provoquť la manifestation, il adopta dťfinitivement le plan qu'il
avait conÁu, et qui rendit ses mouvements incertains et confus pendant
cette partie de la campagne. Je vais entrer en matiŤre et commencer le
rťcit des opťrations.
Les forces de l'ennemi consistaient d'abord en cent trente mille
Autrichiens, divisťs en quatre corps, une rťserve et une avant-garde.
Cette armťe ťtait composťe de neuf divisions d'infanterie et de trois
divisions lťgŤres, formťes de deux et trois bataillons de chasseurs et
de douze ŗ dix-huit escadrons, de trois divisions de cavalerie de douze
ŗ vingt-quatre escadrons, faisant un total de cent douze bataillons,
cent vingt-quatre escadrons, auxquels il faut ajouter deux cent
soixante-treize piŤces d'artillerie.
L'armťe russe et prussienne en BohÍme, combinťe ŗ l'armťe autrichienne
sous les ordres du gťnťral Barclay de Tolly, se composait de cent
trente-cinq bataillons, trois cent soixante-huit piŤces de canon, cent
quarante-sept escadrons, de quinze rťgiments de Cosaques organisťs, de
huit divisions d'infanterie en trois corps d'armťe, et d'un corps de
deux divisions de cavalerie, qui, jointes aux divisions des gardes et
grenadiers russes et prussiens, et aux cinq divisions de cavalerie de
rťserve, s'ťlevaient ŗ cent mille hommes au moins, ce qui formait un
total de deux cent trente mille hommes, dont quarante-cinq mille ŗ
cheval, et six cent trente-huit piŤces d'artillerie.
L'armťe de Silťsie combinťe, c'est-ŗ-dire russe et prussienne, ťtait
composťe de cent trente-sept bataillons, trois cent cinquante-six piŤces
d'artillerie, cent quatre escadrons organisťs en sept corps de quinze
divisions d'infanterie, et huit divisions de cavalerie sous les ordres
de BlŁcher, ayant sous lui les gťnťraux Saken, Langeron, York,
Saint-Priest, etc., etc. Elle avait un effectif qui dťpassait cent vingt
mille hommes, dont vingt mille ŗ cheval.
L'armťe du Nord, commandťe par le prince royal de SuŤde, ťtait composťe
de cent quatre-vingt-six bataillons, de cent quatre-vingt-quatorze
escadrons et de trois cent quatre-vingt-sept piŤces d'artillerie. Elle
ťtait organisťe en cinq corps, formant douze divisions d'infanterie et
sept divisions de cavalerie. On y avait ajoutť treize rťgiments de
Cosaques, commandťs par le gťnťral Vinzigorod. Cette armťe ťtait sous
les ordres des gťnťraux Bulow, Tanentzien, marťchal Steding, gťnťral
Woronzoff. Elle prťsentait une force de cent cinquante-cinq mille
hommes, dont trente-cinq mille ŗ cheval.
Il existait, en outre, dans le bas Elbe, des troupes lťgŤres ou de
nouvelles levťes, de diffťrents pays, mÍlťes sous les ordres des
gťnťraux Valmoden, Vťgezac, Dornberg. Ces troupes prťsentaient un total
de quarante mille hommes, dont huit mille ŗ cheval.
Ce n'ťtait pas tout. On avait formť en Pologne deux armťes de rťserve
russes. La premiŤre, composťe de soixante mille hommes, aux ordres du
gťnťral Bemzsen, arriva ŗ Toeplitz le 28 septembre. La seconde, aux
ordres du gťnťral Tabanoff-Taslowsky, forte de cinquante mille hommes,
occupa le grand-duchť de Varsovie. Devant Dantzig, il y avait
trente-cinq mille hommes; devant Zamosch, quatorze mille; devant Glogau,
vingt-neuf mille quatre cent soixante-dix; devant Custrin, huit mille
quatre cent cinquante; devant Stettin, quatorze mille; total, cent deux
mille deux cents.
Enfin, indťpendamment de l'armťe d'Italie, l'Autriche avait deux armťes
de rťserve, qui, successivement, vinrent se joindre ŗ la masse des
forces combinťes, savoir: sur la frontiŤre de BaviŤre, dix-huit
bataillons et trente-six escadrons, faisant vingt-quatre mille sept cent
cinquante hommes; ŗ Vienne et ŗ Presbourg, quarante-huit bataillons et
soixante-douze escadrons, faisant soixante-cinq mille hommes; total,
quatre-vingt-neuf mille sept cent cinquante.
Ainsi l'ensemble des forces qui nous ťtaient opposťes s'ťlevait ŗ prŤs
de neuf cent mille hommes, dont plus de cent cinquante mille ŗ cheval.
J'ai indiquť la maniŤre dont elles ťtaient rťparties. Mais je ferai
remarquer ici la profondeur du calcul qui fit mťlanger toutes les
troupes des diffťrentes nations, seul moyen de donner de la consistance
ŗ la coalition, de mettre obstacle ŗ des combinaisons politiques
particuliŤres, et de substituer ŗ des jalousies de nation, si naturelles
et si habituelles en pareil cas, une rivalitť de soldat sur le champ de
bataille qui devenait une garantie de succŤs.
Voici quelle ťtait la formation de l'armťe franÁaise:
En Silťsie, les troisiŤme, cinquiŤme, sixiŤme et onziŤme corps, dont la
force, avec la cavalerie, s'ťlevait ŗ cent vingt mille hommes. Ils
ťtaient, au dťbut de la campagne, et accidentellement, sous les ordres
du marťchal prince de la Moskowa, le plus ancien des trois marťchaux
rťunis sur cette frontiŤre.--Les quatriŤme, septiŤme et douziŤme corps,
et le troisiŤme de cavalerie furent rassemblťs ŗ Dahme, sous les ordres
du duc de Reggio, en Lusace.--Les premier, deuxiŤme et huitiŤme corps,
avec les premier et quatriŤme de cavalerie, furent concentrťs dans les
environs de Zittau.--Le quatorziŤme corps occupait le camp de Pirna, et
couvrait Dresde, oý ťtait Napolťon avec sa garde.
L'Empereur arriva le 18 ŗ GŲrlitz. Le 19, il se rendit ŗ Zittau et
s'avanÁa jusqu'ŗ Gabel. Il fut tentť d'entrer en BohÍme par la route qui
mŤne ŗ Gitschin. Son objet ťtait de mettre obstacle ŗ la rťunion des
diverses armťes sur Prague; mais, apprenant que dťjŗ elle ťtait opťrťe,
il vit Dresde menacť et comprit la nťcessite de se tenir ŗ portťe de
secourir cette place. Laissant les premier et deuxiŤme corps ŗ Rumburg
et Zittau, il se rendit ŗ l'armťe de Silťsie, avec sa garde et le
premier corps de cavalerie, en se dirigeant sur LŲvenberg, oý il arriva
le 21.
BlŁcher avait commencť son mouvement offensif avant l'expiration de
l'armistice, et les corps d'armťe franÁaise, qu'il avait en face,
s'ťtaient aussitŰt mis en marche pour se rťunir sur le Bober. Le 16, le
corps de Langeron avait dťjŗ dťpassť Goldsberg. Un bataillon de la
division Charpentier, placť en avant de LŲvenberg, faillit Ítre enlevť,
et se fit jour ŗ travers l'ennemi. Le 18, le cinquiŤme corps se rťunit ŗ
LŲvenberg avec le onziŤme corps. L'ennemi, ayant passť le Bober, porta
une avant garde ŗ Lahore. Le duc de Tarente l'attaqua et lui fit
repasser la riviŤre.
BlŁcher ťtait ce jour-lŗ, avec le corps de Saken, ŗ Liegnitz. Le
premier, s'ťtant portť sur LŲvenberg, forÁa le cinquiŤme corps ŗ ťvacuer
les positions qu'il occupait. Appelť par le bruit du canon, je me h‚tai
de marcher ŗ son secours; mais, quand je fus ŗ portťe de le soutenir, le
combat avait cessť. L'ennemi, voulant passer le Bober ŗ Zobten, fut
repoussť par la division Rochambeau. Le prince de la Moskowa, craignant
de voir le gros des forces ennemies entre le troisiŤme corps et les
onziŤme et cinquiŤme, qui ťtaient ŗ LŲvenberg, jugea ŗ propos de s'en
rapprocher.
De Buntzlau, je reÁus l'ordre de m'avancer, avec le sixiŤme corps,
jusqu'ŗ Kresbau, pour observer Saken et retarder sa marche. BlŁcher,
informť du mouvement du prince de la Moskowa, vint ŗ sa rencontre, ne
laissant qu'une division pour masquer LŲvenberg. Le troisiŤme, ťtant
ainsi prťvenu, s'arrÍta ŗ Graditz. Il combattit tout ŗ la fois contre
York et contre Saken, et se replia sur le sixiŤme corps. Ces deux corps
repassŤrent le Bober et se placŤrent en deÁŗ de Buntzlau.
J'avais ťtť chargť auparavant par Napolťon de chercher sur l'une des
rives du Bober une bonne position, oý une armťe nombreuse pŻt livrer et
recevoir une bataille avec avantage. Je n'avais rien trouvť sur la rive
droite qui me satisfÓt complťtement. Cependant nous aurions pu occuper
avec les troisiŤme et sixiŤme corps la position ŗ Karlsdorf, assez forte
pour que l'ennemi n'os‚t pas nous attaquer immťdiatement, et pendant la
journťe nous aurions eu des nouvelles des cinquiŤme et onziŤme corps.
Le marťchal Ney en dťcida autrement. La rive gauche offrait ŗ la vťritť
une position meilleure, et nous all‚mes l'occuper. Mais Buntzlau, qui
avait ťtť l'objet de forts grands travaux et qui renfermait des
approvisionnements en vivres, n'ťtant pas encore armť, ne fut pas
occupť. On aurait pu y laisser quelques troupes sans danger et on
l'aurait occupť tant que nous serions restťs en communication avec cette
ville. C'ťtait une belle position d'arriŤre-garde pour une partie du
troisiŤme corps, et une bonne tÍte de pont pour reprendre l'offensive.
Le marťchal Ney ne voulut pas comprendre ces avantages et ne put pas
concevoir le rŰle dont ce poste ťtait susceptible, et, quand on n'ťtait
pas encore au moment de le quitter, il donna l'ordre d'en faire sauter
les fortifications.
AprŤs avoir repassť le Bober, les officiers, envoyťs par la rive gauche
aux renseignements sur le gťnťral Lauriston, firent le rapport que les
cinquiŤme et onziŤme corps ťtaient rťunis et en communication avec nous.
Ainsi les quatre corps ťtaient en mesure d'agir ensemble; mais ces
officiers m'apprirent en mÍme temps l'intention de ces deux corps de
continuer leur mouvement rťtrograde le lendemain et de repasser la
Queiss. Aucun raisonnement ne pouvait justifier ce mouvement. Nous
ťtions cependant forcťs de l'imiter. Nous nous prťpar‚mes donc ŗ
l'exťcuter pour notre compte, et je me h‚tai d'en prťvenir l'Empereur
en lui faisant remarquer toutes les aberrations constatant dťjŗ
l'impossibilitť d'opťrer sans lui, et la nťcessitť de sa prťsence pour
mettre chacun ŗ sa place.
L'Empereur arriva en toute h‚te, amenant avec lui sa garde. Arrivť le
21, au matin, il donna au moment mÍme l'ordre de reprendre l'offensive.
Je partis de ma position d'Ottendorf; je passai le Bober ŗ Bakwitz et je
pris position sur les hauteurs de Holzstein. Il y eut, en cette
circonstance, un lťger engagement avec l'ennemi, oý le 32e lťger et le
chef du 16e, Svalabrino, se distinguŤrent. Je restai, ce jour-lŗ, en
position. Pendant ce temps, Napolťon avait marchť en avant avec les
troisiŤme et onziŤme corps. Il poursuivit l'ennemi qui s'ťtait retirť
devant lui en toute h‚te et sans s'engager. Le 23, je reÁus l'ordre de
repasser le Bober, de placer mes troupes en ťchelons sur Naumbourg et
Lauban et de me disposer ŗ marcher rapidement sur Dresde si j'en
recevais l'ordre. Le 24, cet ordre m'ťtant parvenu, il fut exťcutť sans
retard. J'arrivai le 27, au matin, ŗ Dresde, et j'allai prendre
position, ma gauche au quatorziŤme corps, ma droite ŗ la jeune garde, en
avant de Grossgarten.
Pendant les mouvements opťrťs en Silťsie, la grande armťe ennemie avait
pris l'offensive et marchť sur Dresde. Son mouvement, commencť le 20
aoŻt, s'ťtait opťrť sur quatre colonnes. Celle de droite, commandťe par
Wittgenstein, avait dťbouchť par la route de Lovositz ŗ Pirna. Elle
laissa un corps de troupes suffisant pour observer, garder et couvrir le
dťbouchť. La deuxiŤme colonne, composťe de Prussiens, commandťe par le
gťnťral de Kleist, se porta ŗ GlasshŁth, en se liant avec la premiŤre.
La troisiŤme colonne, sous les ordres du gťnťral Colloredo, composťe
d'Autrichiens, arriva par Altenbourg et Dippoldiswald. La quatriŤme
colonne, composťe ťgalement d'Autrichiens, et sous les ordres du
marťchal de Chasteler, marcha par Frauenstein sur Bubenan.
Le 24, une division du quatorziŤme corps, que le marťchal Saint-Cyr
avait placťe sur les hauteurs de Berggus-HŁbel pour couvrir le camp de
Pirna, fut attaquť par le corps de Wittgenstein. Elle se replia en
combattant jusqu'ŗ Pirna et, de lŗ, elle fit l'arriŤre-garde du
quatorziŤme, qui se retira sur Dresde et occupa les retranchements
construits pour couvrir cette ville.
Le 25, vers les quatre heures de l'aprŤs-midi, l'armťe ennemie se
rapprocha de Dresde dans l'ordre suivant: La colonne de droite prit
position en arriŤre du grand jardin qu'elle fit occuper par les
tirailleurs; la deuxiŤme prit position derriŤre Strehla; la troisiŤme se
plaÁa en avant de Koritz et Recknitz; la quatriŤme colonne avait ŗ sa
gauche Plauen. Une cinquiŤme colonne, commandťe par le gťnťral Klťnau,
ťtait en marche et venait de Presbourg. Le corps de Klťnau et les
rťserves n'ťtaient pas encore arrivťs. Le quartier gťnťral s'ťtablit au
village de NŲtnitz. Le quatorziŤme corps occupait les faubourgs et les
retranchements qui les couvraient. Ceux-ci se composaient de huit
flŤches assez petites et de quelques ťdifices crťnelťs. On avait ainsi
cherchť ŗ tirer le meilleur parti des localitťs.
Une attaque immťdiate ťtait la seule chose opportune, car on ne pouvait
douter que l'empereur Napolťon n'arriv‚t, en toute h‚te, avec des
renforts. Accabler, anťantir le quatorziŤme corps (qui, fort ŗ peine de
vingt mille hommes, avait devant lui plus de deux cent mille
combattants), ťtait la seule chose raisonnable. Le prince de
Schwarzenberg hťsita; il ajourna l'action jusqu'au lendemain pour
attendre l'arrivťe du corps de Klťnau et de quelques rťserves. Il ne vit
pas que, dans la disproportion des forces qui ťtaient en prťsence, un
seul nouveau corps de l'armťe franÁaise arrivant ŗ Dresde donnerait plus
de chances ŗ la rťsistance que soixante mille hommes de renfort n'en
auraient donnť ŗ l'attaque.
Le 26, au matin, le prince de Schwarzenberg se dťcida ŗ attaquer, sans
attendre davantage l'arrivťe de Klťnau. Pendant l'action, Napolťon
ťtait arrivť ŗ Dresde avec sa garde, et le deuxiŤme corps, qui, des
environs de Zittau, y avait ťtť dirigť, le suivait de prŤs. Le premier
corps, qui avait ťtť envoyť sur KŲnigstein, avait passť l'Elbe et chassť
le corps ennemi, formť d'un dťtachement de gardes russes et du deuxiŤme
corps, commandť par le duc de Wurtemberg, qui bloquait cette forteresse.
Le huitiŤme corps ťtait restť sur la frontiŤre de BohÍme pour couvrir la
communication avec l'armťe de Silťsie. L'intention de l'Empereur avait
ťtť d'abord de faire son mouvement par KŲnigstein, sans venir ŗ Dresde,
avec le premier, le deuxiŤme, le sixiŤme corps et sa garde. S'il eŻt
passť l'Elbe sur ce point, pris l'ennemi ŗ revers, il est difficile de
calculer les immenses rťsultats qu'il aurait obtenus; mais les dangers
imminents de Dresde, les consťquences graves qui seraient rťsultťes de
l'entrťe de l'ennemi dans cette ville, dťterminŤrent Napolťon ŗ venir ŗ
son secours d'une maniŤre directe. En consťquence, toutes les forces
qu'il menait avec lui, le premier corps exceptť, furent dirigťes sur ce
point, et tout ŗ coup Dresde fut sous la protection d'une puissante
armťe.
L'attaque avait rťussi en partie. La redoute de la porte de
Dippoldiswald ťtait enlevťe; celle de la route de Freyberg avait eu son
feu dťtruit. L'ennemi occupait le grand jardin. Toutes ses forces se
trouvaient concentrťes devant les faubourgs; enfin tout annonÁait son
entrťe prochaine dans Dresde quand Napolťon reprit l'offensive. Il pensa
que des attaques simultanťes, sur les flancs des alliťs, les
surprendraient et changeraient en dťfense une offensive qu'il ťtait
difficile d'arrÍter.
En consťquence, il donna l'ordre au marťchal Ney, qui l'avait
accompagnť, et au duc de Trťvise, de dťboucher, chacun avec deux
divisions de la jeune garde, en amont et en aval, la premiŤre colonne
par la porte de Pirna, la deuxiŤme par la porte de Plauen, et
d'envelopper les ailes de l'armťe ennemie. Le succŤs fut complet.
L'ennemi, rejetť en arriŤre, occupa ŗ la nuit une position moins
rapprochťe que celle qu'il avait prise avant le commencement de
l'action. Cette attaque, appuyťe par un centre fortifiť, l'ensemble des
faubourgs ťtant fortement occupť, ne prťsentait aucune difficultť. Le
lendemain, le prince de Schwarzenberg renouvela ses attaques, mais sans
succŤs. Le deuxiŤme corps de l'armťe franÁaise ťtait en ligne et placť ŗ
droite. Il opťra un mouvement sur la gauche de l'ennemi, auquel le
premier corps de cavalerie concourut puissamment.
L'ennemi s'ťtait ťtendu au delŗ de la vallťe de Plauen, mais il n'ťtait
pas parvenu ŗ appuyer son aile gauche ŗ l'Elbe. Cette aile gauche,
sťparťe du centre par la vallťe dont les montagnes sont fort escarpťes,
ťtait isolťe et fort en l'air. Le sixiŤme corps avait pris sa place de
bataille au centre, et le premier corps avait chassť les troupes qui
bloquaient KŲnigstein, menaÁant les communications de l'ennemi. Ce qui
eŻt ťtť facile ŗ l'ennemi en arrivant ťtait devenu chanceux et mÍme d'un
danger imminent au moment oý il attaqua la ville.
Le deuxiŤme corps se porta, dans la matinťe, sur la gauche de l'armťe
alliťe et l'attaqua de front, tandis que la cavalerie, que le roi de
Naples commandait en personne, l'enveloppa. La cavalerie autrichienne,
culbutťe, ayant abandonnť la division Metzko, celle-ci fut chargťe par
nos cuirassiers. Sa rťsistance opini‚tre paraissait invincible, et l'on
vit, en cette circonstance, quelle puissance la lance exerce dans les
combats de cavalerie contre l'infanterie. Le temps ťtait horrible; des
pluies abondantes empÍchaient les fusils de faire feu: ŗ peine un fusil
sur cinquante partait. Tout ťtait donc au dťsavantage de l'infanterie.
Eh bien! les charges de cuirassiers demeurŤrent sans succŤs. On ne put
entamer les carrťs autrichiens qu'en faisant prťcťder la charge de
cuirassiers par celle d'un dťtachement de lanciers. Ceux-ci ouvraient
une brŤche, que les cuirassiers ťtaient ensuite chargťs d'agrandir. Une
brigade de la division Maurice Liechtenstein, envoyťe au secours de
cette division Metzko, pour la recueillir, partagea le sort de cette
derniŤre. Les rťgiments de Lusignan et de l'archiduc Rťgnier furent ŗ
peu prŤs dťtruits. Douze ŗ quinze mille hommes restŤrent en notre
pouvoir.
Pendant ces mouvements ŗ la droite, Napolťon occupait le centre de
l'ennemi par une forte canonnade. Une salve d'une batterie de la garde,
dirigťe par son ordre contre un groupe qu'il avait remarquť prŤs du
village de Bšcknitz, emporta les jambes du gťnťral Moreau. Ce gťnťral
avait contribuť ŗ la puissance de Napolťon en se rťunissant ŗ lui au 18
brumaire et en servant ses intťrÍts. La flatterie l'avait rendu son
rival de gloire, malgrť son immense infťrioritť. Les petites passions de
son entourage et la faiblesse de son caractŤre en avaient fait un
ennemi. Sa fin tragique et prťmaturťe n'inspira aucun intťrÍt dans
l'armťe franÁaise.
La gauche avait repoussť l'ennemi, et les quatre divisions de la jeune
garde, qui s'y trouvaient rťunies, forcŤrent Wittgenstein ŗ se retirer
jusqu'ŗ Bleswitz, sur le corps de Kleist, dťjŗ aux prises avec le
quatorziŤme corps. Le prince de Schwarzenberg, jugeant l'ensemble de ses
revers suffisants pour lui Űter tout espoir fondť de victoire, prit la
rťsolution de se retirer. Mais aucune disposition apparente ne
l'annonÁait, et, comme l'arrivťe d'une portion du corps de Klťnau avait
augmentť le nombre de ses troupes, toutes les probabilitťs, ŗ nos yeux,
semblaient Ítre pour une nouvelle bataille le lendemain. La nuit nous
laissa dans cette espťrance. L'intention de Napolťon ťtait d'attaquer
l'ennemi ŗ la pointe du jour, ŗ son centre, et je devais Ítre chargť de
cette opťration. Je passai la nuit ŗ faire les dispositions en
consťquence.
Le centre de l'ennemi ťtait appuyť aux villages de Bšcknitz et
Schernitz. La hauteur sur laquelle ils sont placťs, au milieu de
l'amphithť‚tre en face de Dresde, et dont nos avant-postes occupaient
les derniers mamelons, commande la plaine qu'il faut traverser. Porter
de l'artillerie en plein jour sur ces mamelons eŻt ťtť chose impossible.
Aussi, ayant placť pendant la nuit, dans la position qu'occupaient mes
avant-postes, assez de troupes pour nous ťtablir solidement, j'y fis
conduire toute mon artillerie pour ťcraser de son feu les deux villages
que j'ai nommťs. Sans cet appui, ils auraient ťtť difficilement
emportťs. Je prťsidais moi-mÍme ŗ ces prťparatifs. J'observais ce qui se
passait chez l'ennemi. Un bruit sourd me fit croire qu'il se mettait en
retraite. Les feux, qui s'ťteignaient successivement, me confirmŤrent
dans cette pensťe. J'envoyai quelques troupes pour s'en assurer, et l'on
trouva la position ťvacuťe.
Je fis prťvenir l'Empereur en toute h‚te ŗ Dresde, et il arriva ŗ mon
camp ŗ la petite pointe du jour. Les derniŤres troupes de
l'arriŤre-garde ennemie ťtaient dťjŗ ŗ une assez grande distance.
L'Empereur m'ordonna de me mettre immťdiatement ŗ leur poursuite dans la
direction de Dippoldiswald, et me donna la division de cavalerie du
gťnťral Ornano. Saint-Cyr fut chargť de le suivre dans la direction de
Maxen et GlasshŁth. Le gťnťral Vandamme, avec le premier corps, et
devant Ítre soutenu par la garde, fut dirigť du point oý il se trouvait
sur la grande route de Peterswald. Le deuxiŤme corps et la cavalerie du
roi de Naples marchŤrent sur Freyberg.
Pendant les deux jours oý on avait combattu devant Dresde, le gťnťral
Vandamme, avec le premier corps, augmentť de la quarante-deuxiŤme
division du quatorziŤme corps et d'une brigade du deuxiŤme, avait chassť
devant lui le faible corps du duc de Wurtemberg. Celui-ci, s'ťtant
repliť sur la droite de l'armťe, avait pris position devant Pirna, dont
Vandamme s'ťtait emparť. La difficultť des communications empÍcha le
gťnťral franÁais d'agir avec ensemble et rapiditť. Un fort dťtachement
de la garde russe, ayant ťtť envoyť au duc de Wurtemberg, avec une force
de dix-huit mille hommes commandťs par le gťnťral Osterman, fut chargť
de le contenir. C'est dans ces positions respectives que la retraite de
l'armťe alliťe, rťsolue le 27 au soir, commenÁa ŗ s'exťcuter.
L'ennemi se retirait par diverses directions. Voici les dispositions
premiŤres et les modifications que les circonstances y apportŤrent.
Le corps de Barclay, formant la droite de l'armťe, reÁut ordre de se
retirer par la grande route de Dahme, Waldgies, HŁbel et Peterswald, et
de couvrir ce dťbouchť principal pour entrer en BohÍme.
La grande armťe, c'est-ŗ-dire la masse des Autrichiens, prit la
direction de Dippoldiswald, Falkenheim, Altenbourg et Unterzinnwald.
Le corps de Kleist reÁut l'ordre de se retirer par GlasshŁth et
d'ťtablir sa liaison entre les deux principaux corps de l'armťe, tandis
que la gauche et les rťserves prendraient le chemin de Freyberg, par
lequel une partie de ses troupes ťtaient arrivťes.
La route de Dippoldiswald par Altenbourg prťsente les plus grandes
difficultťs. C'est un dťfilť continuel entre des montagnes et des bois.
La masse des troupes destinťes ŗ se retirer par cette communication
devait ťprouver un grand encombrement et de grandes difficultťs. Mais
elles furent tout ŗ coup beaucoup augmentťes et d'une maniŤre tout ŗ
fait imprťvue.
Le gťnťral Barclay, supposant le gťnťral Vandamme au moment d'agir sur
la route de Dippoldiswald, et ne voulant pas faire une marche de flanc
aussi prŤs d'un ennemi tout formť, chargea le gťnťral Osterman de
remplir la mission qui lui ťtait donnťe, et lui, avec la majeure partie
de ses troupes, imagina de changer de direction et de se jeter sur la
route d'Altenbourg, afin de se rťunir ŗ la masse des forces de l'armťe.
Il rťsulta de cette dťsobťissance, d'abord une horrible confusion sur la
route d'Altenbourg, un prodigieux encombrement, et ensuite la route
principale ne se trouva pas gardťe par une force suffisante. Ainsi
Vandamme, soutenu par la garde, n'eut plus devant lui que dix-huit mille
hommes environ, obligťs de dťfiler, pour ainsi dire, ŗ sa vue, pour
reprendre leur ligne de retraite, fort compromise. Les troupes
entreprirent cette t‚che difficile, et elles y parvinrent aprŤs avoir
ťprouvť d'assez grandes pertes. Une partie de la colonne, ayant ťtť
coupťe sur la gauche, fut obligťe de faire sa retraite isolťment et ŗ
travers les bois.
Je rencontrai d'abord l'ennemi au village de Possendorf. Son
arriŤre-garde fut culbutťe. Nous lui prÓmes deux mille cinq cents
hommes, douze piŤces de canon, cent cinquante voitures d'artillerie ou
de bagages. Lorsque nous fŻmes arrivťs sur les hauteurs de
Windiskarsdorf, presque toute l'armťe ennemie nous apparut en mouvement
dans diverses directions. De grosses colonnes, venant de Maxen,
longeaient le pied des montagnes pour se porter par Frauendorf sur la
route d'Altenbourg. Le quatorziŤme corps suivait et marchait sur
GlasshŁth, mais il ťtait encore fort en arriŤre. Je vis aussi des masses
considťrables qui s'ťtaient retirťes par Tharand et marchaient dans la
direction de Frauenstein. Enfin j'avais en position devant moi, au
dťbouchť de Dippoldiswald, une ligne fort ťtendue, soutenue par une
nombreuse artillerie, protťgeant la position qu'elle avait prise et la
marche de tous ces corps sťparťs, qui avaient peine ŗ gagner le dťfilť
sur lequel j'ťtais au moment d'arriver. L'ensemble de la position et la
force des troupes que j'avais ŗ combattre m'obligeaient ŗ rťunir mes
moyens avant de rien engager.
Une fois en mesure d'agir, je marchai. La deuxiŤme division, commandťe
par le gťnťral Lagrange, dťboucha par la grande route qui conduit ŗ
Dippoldiswald en tournant la position de l'ennemi. Je plaÁai ma
cavalerie en arriŤre de la division du gťnťral Lagrange, prÍte ŗ
dťboucher aussitŰt que le passage serait ouvert. Enfin je laissai ma
troisiŤme division ŗ Windiskarsdorf, pour me mettre ŗ l'abri de toute
entreprise de l'ennemi venant par ma gauche, et aussi ŗ portťe de
soutenir le gťnťral Lagrange s'il en ťtait besoin.
Une affaire assez vive s'engagea en mÍme temps sur les deux dťbouchťs.
Les premiŤres troupes du sixiŤme corps culbutŤrent les troupes ennemies
qui leur ťtaient opposťes. Des corps plus nombreux les arrÍtŤrent, mais
de nouveaux efforts complťtŤrent le succŤs. L'ennemi avait, en arriŤre
des dťfilťs franchis, une nombreuse artillerie et des troupes toutes
formťes. Cet ťtat de choses lui donnait sur nous un grand avantage; mais
la valeur des troupes triompha promptement de ce nouvel obstacle.
Partout Russes et Autrichiens furent culbutťs. Nous rest‚mes maÓtres des
dťbouchťs et du champ de bataille. Le gťnťral Compans fut occuper
Dippoldiswald, et le gťnťral Lagrange s'ťtait emparť de vive force des
villages de Kessenig et de Benholtheim. La cavalerie du gťnťral Ornano
avanÁa le plus promptement possible, mais la nuit ťtait presque arrivťe;
l'ennemi avait couvert de cavalerie toute la plaine, et il ne fut plus
possible d'entreprendre rien de sťrieux. En consťquence, mes troupes
prirent position.
Le lendemain, 29, je mis en position mon corps d'armťe dans la
direction qu'avait suivie l'ennemi, et je pris le chemin d'Altenbourg.
Mon avant-garde arrivťe au village d'Ober-Frauendorf, j'appris que
l'ennemi occupait le bois situť ŗ trŤs-peu de distance, et qu'une forte
arriŤre-garde ťtait au delŗ du village de Falkenheim. Une brigade
entiŤre, placťe en tirailleurs, fut chargťe de chasser l'ennemi du bois,
de le fouiller dans toutes ses parties, afin de prťvenir toute espŤce de
surprise. Avec un matťriel aussi considťrable, dans un pays aussi
difficile, il y a les plus grands pťrils ŗ marcher sans une extrÍme
prťcaution. Un corps d'armťe peut Ítre dťtruit s'il avance avec trop de
confiance et sans Ítre suffisamment ťclairť. Le bois ťtant ťvacuť par
l'ennemi, je trouvai au dťbouchť un corps de quinze mille hommes
environ, formť en avant du village de Falkenheim, avec vingt piŤces de
canon.
Cette position est trŤs-forte et appuyťe ŗ droite et ŗ gauche par de
trŤs-grands escarpements. Elle n'a qu'un seul inconvťnient, celui d'Ítre
suivie d'un mauvais dťfilť. AprŤs avoir reconnu la position de l'ennemi,
fait occuper par les premiŤres troupes deux mamelons qui protťgeaient la
sortie du bois, et placť quelques piŤces de canon sur la hauteur; aprŤs
avoir fait serrer la division du gťnťral Freiderich sur celle du gťnťral
Lagrange pour la soutenir, je donnai ordre ŗ celui-ci d'attaquer
l'ennemi. Malgrť une vigoureuse rťsistance de sa part, la valeur de nos
troupes fut telle, qu'en un instant tout fut culbutť et l'ennemi
poursuivi jusqu'ŗ l'entrťe du dťfilť, oý il laissa beaucoup de piŤces de
canon et de voitures. La nuit seule arrÍta notre poursuite. Le 37e lťger
et le 4e de marine se distinguŤrent, l'ardeur des troupes ťtait telle,
qu'il fallut plutŰt s'occuper ŗ la calmer qu'ŗ la stimuler, afin de ne
pas compromettre des succŤs toujours assurťs avec de pareils soldats,
quand ils sont bien conduits.
Le lendemain, 30, je me mis en marche pour Altenbourg. L'armťe ennemie
l'avait ťvacuťe pendant la nuit, et nous y trouv‚mes une arriŤre-garde
qui se retira ŗ notre approche. Dans le trajet de Falkenheim ŗ
Altenbourg, nous pŻmes juger par nous-mÍmes du dťsordre de la veille
chez l'ennemi. Plusieurs piŤces de canon et plus de cent voitures
ťtaient ťparses Áŗ et lŗ. Partout nous voyions des indices de confusion.
Il ne se passait pas un moment sans que des parcs entiers ne sautassent
ŗ notre approche. Je rťsolus de profiter d'une occasion si favorable
pour faire tout le mal possible ŗ l'ennemi, et de le poursuivre l'ťpťe
dans les reins jusqu'ŗ Toeplitz.
Je pouvais sans crainte agir ainsi; j'ťtais informť que le septiŤme
corps, commandť par le gťnťral Vandamme, soutenu par toute la garde,
marchait sur Toeplitz, tandis que le quatorziŤme corps, placť en
ťchelons, se trouvait entre le premier corps et moi, pour nous soutenir.
Vers midi, je rencontrai l'ennemi sur le plateau de Zinnwald,
amphithť‚tre ressemblant assez ŗ celui de Fralkenheim. On ne peut y
arriver que par des dťfilťs fort ťtroits. La division du gťnťral Compans
tenait la tÍte de la colonne. Trouvant des forces considťrables au
dťbouchť, il lui fut impossible de gagner assez de terrain pour se
former. Je donnai l'ordre au gťnťral Lagrange de se porter avec sa
division par un autre dťfilť ŗ droite, beaucoup plus ťtroit que le
premier, mais qui prenait en flanc la position de l'ennemi. Ce mouvement
eut un plein succŤs. Cette division, ayant marchť avec vigueur, en mÍme
temps que celle du gťnťral Compans, l'ennemi, culbutť sur tous les
points, fut poursuivi sans rel‚che et jetť dans les chemins ťtroits et
ťpouvantables qui conduisent de Zinnwald ŗ Eichwald. Nous prÓmes, dans
cette seule journťe, plus de quatre cents voitures d'artillerie et
d'ťquipages.
Nous poursuivÓmes l'ennemi ŗ peu de distance du village d'Eichwald, oý
nous trouv‚mes des troupes nouvelles toutes formťes. La nuit nous
arrÍta. L'avant-garde bivaqua prŤs du dťbouchť d'Eichwald, le corps
d'armťe sur le plateau de Zinmvald, et je prťparai tout pour dťboucher
le lendemain ŗ la pointe du jour sur Toeplitz, oý je supposais voir
arriver Vandamme de son cŰtť. Mais ce qui s'ťtait passť chez lui avait
bien changť l'ťtat des choses. ņ mon retour au camp, je trouvai un
officier d'ťtat-major du marťchal Gouvion Saint-Cyr qui m'apprit la
catastrophe. Le corps d'armťe avait ťtť dťtruit et pris presque en
entier par l'ennemi. Le matin mÍme, le marťchal avait marchť ŗ son
secours, mais n'avait pu arriver ŗ temps pour le sauver.
Cet ťvťnement a eu des rťsultats si importants et si graves, qu'il
convient d'en rechercher et d'en approfondir les causes.
Napolťon ťtait dans l'usage de recommander avec exagťration ŗ ses
gťnťraux de marcher en avant. S'il ne doutait pas de leur courage, il
est certain qu'il se mťfiait de leur rťsolution. Avec un homme ardent
comme le gťnťral Vandamme, il eŻt ťtť plus convenable de lui tenir le
langage de la prudence. Toutefois, dans la circonstance, il ťtait de son
devoir de marcher tÍte baissťe. Napolťon lui avait dit et fait ťcrire:
ęJe vous suis avec toute ma garde; marchez sans crainte.Ľ Enfin il
savait que le b‚ton de marťchal devait Ítre la rťcompense d'un succŤs
brillant, et il ťtait impatient de l'obtenir. Mais Napolťon, aprŤs avoir
mis en route sa garde, ťtait restť ŗ Dresde, incertain sur ce qu'il
ferait. Ayant reÁu la nouvelle de l'ťchec ťprouvť par le marťchal
Oudinot devant Berlin, et des revers du marťchal Macdonald sur la
Katzbach, il rťsolut de rester, de rappeler sa garde, et il eut le tort
incroyable de ne pas faire prťvenir Vandamme. On a dit qu'il s'ťtait mis
en route, et que, se trouvant tout ŗ coup indisposť, il avait
rťtrogradť. Ce fait est inexact, et le gťnťral Gersdorff, gťnťral saxon,
m'a dťclarť formellement que, n'ayant pas quittť un moment le palais
pendant les journťes du 28 et du 29, il avait la certitude absolue que
Napolťon n'ťtait pas sorti de Dresde ces jours-lŗ. La garde seule
s'ťtait mise en mouvement, et il la rappela, ainsi que je viens de le
dire. Vandamme se trouva donc seul et sans appui dans la plaine de Culm.
Vainqueur le 29, il fut accablť le 30 par les forces immenses qui se
jetŤrent sur lui.
Une circonstance inopinťe survint qui aggrava sa position, et la rendit
dťsespťrťe. Le corps de Kleist, qui s'ťtait retirť de GlasshŁth devant
Saint-Cyr, arriva ŗ Ebersdorff le 29. De ce point il ne put entrer en
BohÍme. Une communication mauvaise, praticable cependant aux voitures,
et meilleure que celle de Zinnwald, aboutit de ce point ŗ Culm. Mais,
dans ce moment, Vandamme ťtant ŗ la tÍte du dťbouchť, Kleist ne pouvait
pas raisonnablement s'y prťsenter. Le 30, au matin, il crut Vandamme
assez avancť pour avoir entiŤrement dťcouvert la grande route, et, ne le
supposant plus sur ce point, il se dťcida ŗ faire un mouvement par le
plateau et ŗ se porter d'Ebersdorf sur Nollendorf, espťrant ainsi
ťchapper ŗ l'armťe franÁaise, arriver ŗ la plaine, ťviter Vandamme, et
rejoindre, par un dťtour, le gros de son armťe. Une preuve incontestable
de la vťritť de cette opinion, c'est que ses meilleures troupes ťtaient
ŗ l'arriŤre-garde pour rťsister soit ŗ Saint-Cyr, soit ŗ ce qui pouvait
venir de Peterswald. Les mauvaises troupes et les parcs ťtaient en tÍte
de colonne. Au moment oý Vandamme, accablť par le nombre, se disposait ŗ
la retraite, le corps de Kleist arriva sur la route. La cavalerie de
Vandamme, s'ťlanÁant en colonnes, pour ouvrir le chemin, ťchappa en
partie. Cette cavalerie, rencontrant seulement d'abord des landwehrs et
des parcs, elle sabra tout, et prit cette nombreuse artillerie, qui
n'eut pas mÍme le temps de se mettre en batterie. Mais les troupes ŗ la
queue de la colonne, s'ťtant ravisťes, prirent position, et parvinrent ŗ
fermer le passage.
Si la garde eŻt suivi, Kleist, pris entre Saint-Cyr et la garde, mettait
bas les armes, et Vandamme eŻt battu, le 30, les divers corps qui l'ont
attaquť. Mais, bien plus, si la garde eŻt joint Vandamme le 29, pendant
qu'il ťtait victorieux, il aurait pu se porter en avant et se trouver
ainsi au milieu de toutes les forces ennemies qui ťtaient sans
organisation et dans une entiŤre confusion, par suite des difficultťs de
la retraite. Toute l'artillerie marchait isolťment. Les troupes
descendaient par dťtachement, en suivant tous les sentiers praticables.
Il n'y avait pas, le 29, trente mille hommes ŗ mettre rťguliŤrement en
bataille dans la plaine. C'ťtait un de ces coups de fortune, comme il on
arrive en un siŤcle de guerre. Tout le matťriel aurait ťtť pris, et tout
se serait dispersť. Des reproches rťciproques auraient servi ŗ tout
dissoudre, ŗ tout dťsorganiser. La fortune en a ordonnť autrement; mais
le seul coupable, et le vťritable auteur de la catastrophe, c'est
Napolťon.
Il convient maintenant d'examiner quelle influence a eue le marťchal
Saint-Cyr sur cet ťvťnement. Il pouvait en diminuer la gravitť, et il
n'est pas exempt de reproches. Il suivait Kleist, et arriva ŗ Ebersdof.
C'est de la hauteur, en avant de ce poste, qu'il vit l'ťvťnement du 30.
S'il est arrivť le 20, il est coupable de n'avoir pas descendu le
plateau et de ne s'Ítre pas joint ŗ Vandamme; s'il n'est arrivť que le
30 au matin, il ne pouvait pas dťboucher; mais alors il est coupable
d'avoir perdu de vue Kleist. En le suivant l'ťpťe dans les reins il
l'arrÍtait, et la route de Peterswald restait libre au gťnťral Vandamme,
et peut-Ítre mÍme l'enchaÓnement des circonstances aurait pu, Vandamme
battu et se retirant, entraÓner la perte de Kleist.
On a eu tort d'accuser Vandamme d'avoir montrť, dans cette circonstance,
trop de tťmťritť. Il s'ťtait arrÍtť dans une bonne et excellente
position en avant de Culm, position inexpugnable pour peu qu'il existe
quelque proportion entre le nombre des combattants. J'ai depuis ťtudiť
ces lieux sur place, et j'ai acquis la conviction que Vandamme aurait pu
s'y dťfendre un contre deux, et certainement il l'aurait fait; mais il y
a des limites au possible. Je pense, au contraire, qu'on pourrait lui
reprocher de la lenteur et peu d'ensemble dans sa marche. Ses troupes
n'ťtaient pas rťunies le 29; et, quoique maÓtre de Culm le 29, avant
midi, il ne put pas dťboucher pour culbuter et mettre en dťroute le
corps russe, trŤs-infťrieur en force, isolť dans une position ouverte,
sans appui et sans moyen pour rťsister. Mais aussi comment se prťcipiter
au milieu de cent quatre-vingt mille hommes qui, s'ils n'ťtaient pas lŗ,
se trouvaient cependant ŗ portťe dans un bassin vaste et dťcouvert, sans
avoir derriŤre soi les forces nťcessaires comme point d'appui? Et
pourtant il y avait un tel dťsordre dans l'armťe alliťe en ce moment,
que le corps de Vandamme seul pouvait, en l'accroissant encore, amener
des rťsultats incalculables.
C'est l'esprit de justice dont je fais profession, et ma conviction
profonde, qui me dťcident ŗ prendre la dťfense de Vandamme, car ce
gťnťral ne m'a jamais inspirť aucun intťrÍt. J'ajouterai ŗ ce qui
prťcŤde une derniŤre rťflexion sur la conduite de Napolťon, rťflexion
qui la rend encore moins concevable.
L'armťe ennemie se retirait sur diverses colonnes, et devait
naturellement se rassembler dans la plaine de Toeplitz. Le 30 aoŻt, elle
devait, d'aprŤs tous les calculs, s'y trouver rťunie, et, le jour
suivant, les divers corps de l'armťe franÁaise, aprŤs avoir descendu du
plateau de Saxe, se trouvaient en prťsence. Une fois nos corps rťunis,
qui devait commander, qui devait donner la direction, l'impulsion et
l'ensemble? Personne, puisque Napolťon ťtait le 30 ŗ Dresde, et n'avait
pris aucune disposition pour supplťer, le 31, ŗ sa prťsence en BohÍme.
Ainsi, dans le cas de succŤs constants dans la poursuite, il se mettait,
par sa propre volontť, dans des conditions qui en rendaient les effets
plus que douteux. L'on ne peut dire qu'il avait suspendu la poursuite,
car aucun ordre semblable n'arriva aux autres corps, et Vandamme en a
reÁu de contraires.
On se perd dans ce dťdale oý l'on ne peut dťcouvrir ni un calcul ni une
intention raisonnable. Seulement il paraÓt incontestable que Napolťon,
frappť de la nouvelle du dťsastre de la Katzbach, et ne pensant qu'ŗ la
nťcessitť de le rťparer, ne voulut pas s'ťloigner de l'annťe de Silťsie;
mais, quelque urgents que fussent les secours ŗ lui porter, ils ne
pouvaient pas Ítre immťdiats, tandis que les affaires de BohÍme, d'une
nature dťcisive, rťclamaient ŗ l'heure mÍme et le secours de sa garde
pour soutenir Vandamme, et sa prťsence pour la direction de l'ensemble
des opťrations. Dans tous les cas, rien n'excuse et ne peut excuser
Napolťon de n'avoir pas informť Vandamme du changement de ses
rťsolutions[4].
[Note 4: La lettre ci-aprŤs prouve que, le 30 aoŻt, l'intention de
l'Empereur ťtait que l'armťe continu‚t son mouvement offensif et
descendÓt le plateau de la Saxe pour pťnťtrer en BohÍme. Vandamme, non
soutenu par la garde, qui avait ťtť rappelťe ŗ Dresde, devait marcher
sur Toeplitz, tandis que je dťbouchais par Zinnwald, et que les autres
corps en faisaient autant, chacun dans sa direction. Vandamme est donc
parfaitement innocent de ce mouvement, et des consťquences qui en ont
ťtť la suite.
ęDresde, le 30 aoŻt 1813.
ęMonsieur le marťchal duc de Raguse, l'Empereur me charge de vous
prťvenir que le point difficile pour l'ennemi est Zinnwald, oý l'opinion
de tous les gens du pays est que son artillerie et ses bagages ne
pourront passer qu'avec une peine extrÍme; que c'est donc sur ce point
qu'il faut se rťunir et attaquer; que l'ennemi, tournť par le gťnťral
Vandamme, qui marche sur Toeplitz, se trouvera trŤs-embarrassť, et sera
probablement obligť de laisser la plus grande partie de son matťriel.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ę_Signť_: ALEXANDRE.Ľ]
Instruit de ce qui s'ťtait passť, je ne pouvais plus penser ŗ descendre
de la montagne. Garder ma position et attendre des ordres ťtait tout ce
qui me restait ŗ faire. Je restai donc sur la dťfensive pendant la
journťe du 31. L'ennemi attaqua mon avant-garde, mais il fut repoussť
constamment. Il avait perdu beaucoup de monde dans cette poursuite et
les divers combats dont je viens de rendre compte. Nous lui avions pris
trente piŤces de canon, sept ŗ huit cents voitures d'artillerie ou
d'ťquipages, et il avait eu en tuťs, blessťs et prisonniers, de neuf ŗ
dix mille hommes hors de combat.
Le 31, au soir, je reÁus l'ordre de prendre position ŗ Altenbourg. Je
m'y rendis, et me mis en mesure de m'y dťfendre. Le 1er septembre,
l'Empereur me prescrivit de me rapprocher de Dresde et de dťboucher sur
la rive droite de l'Elbe s'il ťtait nťcessaire. DŤs ce moment commenÁa
une sťrie de mouvements sans aucun rťsultat, qui semblaient destinťs,
comme par exprŤs, ŗ produire la destruction des troupes. Le quatorziŤme
corps avait fait un mouvement pareil au mien. Le deuxiŤme corps et sa
cavalerie s'ťtaient ťgalement rapprochťs de l'Elbe. Le 3, je marchai
encore dans la direction de Dresde, et pris position au village de
Recknitz. Le 4, je passai l'Elbe et allai camper ŗ Bischofswerda, et le
lendemain ŗ Bautzen.
CORRESPONDANCE ET DOCUMENTS
RELATIFS AU LIVRE DIX-SEPTI»ME
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęLiegnitz, le 29 mai 1813, deux heures aprŤs midi.
ęL'Empereur ordonne, monsieur le marťchal, qu'avec le sixiŤme corps
d'armťe et le corps de cavalerie du gťnťral Latour-Maubourg vous vous
portiez de Jauer en avant de Eisendorf, route de Neumarck. Le prince de
la Moskowa, avec les cinquiŤme et septiŤme corps, se porte sur Neumarck,
et le quartier gťnťral impťrial y sera probablement ce soir avec la
garde. Le troisiŤme corps d'armťe reste en avant de Liegnitz. Le duc de
Tarente, avec son corps d'armťe, et le gťnťral Bertrand, avec le
quatriŤme corps, resteront ŗ Jauer. Sa Majestť marche sur Breslau.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 10 juin 1813.
ęJe crois devoir vous faire connaÓtre, monsieur le marťchal, quel sera
l'emplacement des quartiers gťnťraux des diffťrents corps de l'armťe au
12 juin, ťpoque ŗ laquelle ces quartiers gťnťraux deviendront fixes.
ęLe deuxiŤme corps d'armťe, marťchal duc de Bellune, ŗ Guadenberg;
ęLe troisiŤme, prince de la Moskowa, ŗ Liegnitz;
ęLe quatriŤme, gťnťral comte Bertrand, ŗ Sprottau;
ęLe cinquiŤme, gťnťral Lauriston, ŗ Goldsberg.
ęLe septiŤme, gťnťral Rťgnier, ŗ GŲrlitz;
ęLe onziŤme, marťchal duc de Tarente, ŗ LŲwenberg;
ęLe douziŤme, marťchal duc de Reggio, ŗ Lukau;
ęLe premier corps de rťserve de cavalerie, gťnťral Latour-Maubourg, ŗ
Sagan;
ęLe deuxiŤme, gťnťral Sťbastiani, ŗ Freystadt;
ęDeuxiŤme division, jeune garde, marťchal duc de Trťvise, ŗ Hermolsdorf,
prŤs Glogau;
ęPremiŤre division, ŗ Gross-Kramche;
ęDeuxiŤme, ŗ Ober-Schonfeld;
ęTroisiŤme, ŗ Eichberg;
ęPolonais, huitiŤme corps, ŗ Zittau.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 11 juin 1813.
ęJe vous prťviens, monsieur le marťchal, que je donne l'ordre au duc de
Bellune de garder la frontiŤre le long de l'Oder, depuis Crossen jusqu'ŗ
la hauteur de MŁllrose.
ęLe duc de Reggio surveillera la ligne de dťmarcation depuis MŁllrose
jusqu'ŗ Insterburg.
ęLe gouverneur de Wittenberg placera des postes depuis Insterburg, en
passant par Bruck, et suivant la frontiŤre de la Confťdťration du Rhin,
jusqu'auprŤs de Barby.
ęLe gouverneur de Magdebourg couvrira son enceinte sur la rive droite,
et tout le long de l'Elbe sur la rive gauche, depuis Barby jusqu'ŗ la
trente-deuxiŤme division militaire, oý commencera la surveillance du
prince d'EckmŁhl.
ęLe duc de Trťvise, le prince de la Moskowa, le gťnťral Lauriston, le
duc de Tarente surveilleront la ligne dans leur arrondissement
respectif; depuis les postes du duc de Tarente, la ligne sera fournie,
le long de la BohÍme, par le prince Poniatowski, qui arrive ŗ Zittau.
Enfin, monsieur le marťchal, fournissez de votre cŰtť des postes jusqu'ŗ
l'Elbe, le long de la BohÍme, en vous concertant ŗ cet ťgard avec le
prince Poniatowski.
ęL'intention de l'Empereur est que tous les jours vous envoyiez le
rapport de ce qui se passe ŗ vos postes et des mouvements qui pourraient
se faire devant eux. Il faut aussi avoir soin d'empÍcher les chevaux,
les vivres, les meubles, les troupeaux, et enfin tout ce qui pourrait
nous servir, de sortir de la ligne de dťmarcation.
ęLe rťsultat de ces dispositions sera d'Ítre bien instruit de tout ce
qui se passe; mais il suffira pour cela, monsieur le marťchal, de postes
lťgers, ainsi que pour arrÍter le passage des troupeaux et de tout ce
qui est utile ŗ l'armťe.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 13 juin 1813.
ęJe vous adresse, monsieur le marťchal, ampliation de l'ordre du jour
relatif ŗ l'arrestation et la mise en jugement des soldats qu'on suppose
s'Ítre mutilťs eux-mÍmes d'un doigt ou de la main dans l'espoir de se
faire rťformer. Depuis plusieurs annťes, cette espŤce d'ťpidťmie s'est
introduite dans l'armťe: il est temps d'y apporter une attention sťvŤre
et de remťdier promptement ŗ ce genre de dťlit.
ęL'Empereur ordonne, pour cet effet, qu'il soit choisi deux hommes de
chaque corps d'armťe sur ceux prťvenus de s'Ítre blessťs eux-mÍmes. Ils
seront arrÍtťs; le grand prťvŰt instruira la procťdure. Il sera facile
de les convaincre. AussitŰt la procťdure instruite, ils seront envoyťs
au marťchal ou au gťnťral commandant, qui les fera fusiller devant tout
le corps assemblť, en faisant connaÓtre la nature de leurs dťlits, mais
sans rien imprimer lŗ-dessus.
ęVous ferez ramasser tous les hommes blessťs ŗ la main et ordonnerez
qu'ils soient gardťs comme des coupables par la gendarmerie. S'ils ont
ťtť trouvťs maraudant, la peine de mort leur sera infligťe. Vous aurez
soin de donner le mot aux officiers d'ťtat-major et aux chirurgiens, de
n'y comprendre ni sous-officiers ni vieux soldats, mais seulement ceux
qui, par leur ‚ge et la nature de leurs blessures, pourraient Ítre
soupÁonnťs de s'Ítre blessťs eux-mÍmes. ņ leur arrivťe ŗ leur rťgiment,
un jury, composť du colonel, de deux capitaines et de deux chirurgiens
du rťgiment, les examinera et fera une enquÍte pour constater la cause
de leurs blessures. Ces hommes feront toutes les corvťes et seront comme
les domestiques du rťgiment. Ils seront guťris par les soins des
chirurgiens des corps, et, aprŤs la correction convenable, ils
rentreront dans le rťgiment.
ęVous sentirez, monsieur le marťchal, l'importance de tenir l'ordre du
jour et les prťsentes dispositions secrŤtes; mais vous devez rťunir les
colonels des rťgiments et leur parler fermement pour qu'ils exaltent
l'indignation des soldats contre les l‚ches qui se mutilent eux-mÍmes.
ęEnfin l'intention de l'Empereur est que toutes blessures ŗ la main
provenant d'un coup de fusil ou de pistolet ou d'un coup de sabre ne
soient jamais un motif de rťforme.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
ORDRE DU JOUR.
ęDresde, le 11 juin 1813.
1.
ęTous les blessťs qui existent ŗ Dresde et dans les hŰpitaux des autres
villes en deÁŗ du Rhin, et qui sont blessťs aux doigts ou ŗ la main,
seront sur-le-champ dirigťs sur leurs corps respectifs.
2.
ęL'ťtat nominatif de tous les hommes blessťs aux doigts ou ŗ la main,
qui sont ŗ Dresde, sera dressť dans la journťe d'aujourd'hui et demain.
3.
ęIl sera formť autant de colonnes, composťes de gendarmes et de
flanqueurs de la garde, qu'il y a de corps d'armťe. Chacune de ces
colonnes sera commandťe par un officier d'ťtat-major, et un chirurgien
principal y sera attachť. Elles ramasseront tous ces hommes, dont il
sera formť un contrŰle, indiquant leurs noms, compagnies, bataillons et
rťgiments.
4.
ęLes blessťs ainsi ramassťs seront conduits ŗ la maison de la Douane
retranchťe, sur la route de Bautzen, oý ils seront campťs. DŤs que cent
hommes appartenant ŗ un mÍme corps d'armťe seront rťunis, ils seront mis
en marche pour ce corps d'armťe, sous une escorte suffisante. Ils seront
accompagnťs de leur contrŰle nominatif et d'un chirurgien pour les
panser.
5.
ęņ leur arrivťe aux corps, ils seront distribuťs dans leurs rťgiments,
oý ils seront traitťs par les chirurgiens-majors, et sous la
surveillance spťciale des officiers. Ils seront chargťs de faire toutes
les corvťes de la compagnie et du rťgiment.
6.
ęTout soldat blessť aux doigts ou ŗ la main, qui sera conduit ŗ son
corps de la maniŤre dont il vient d'Ítre dit, qui s'ťcarterait en route
de son escorte, soit pour marauder, soit pour dťserter, ou qui
dťserterait aprŤs son arrivťe au rťgiment, sera puni de mort.
7.
ęUn jury, formť du chirurgien en chef de l'armťe et de quatre
chirurgiens principaux, sera rťuni ŗ la susdite maison de la Douane,
pour visiter les blessťs qui y seront amenťs. Il fera choix de deux
hommes par chaque corps d'armťe, de ceux qui, par la nature de leurs
blessures, paraÓtront le plus ťvidemment avoir ťtť blessťs par
eux-mÍmes, lesquels seront sur-le-champ arrÍtťs et conduits devant le
grand prťvŰt de l'armťe, pour y Ítre examinťs et interrogťs.
8.
ęTout soldat qui serait convaincu de s'Ítre blessť volontairement pour
se soustraire au service sera condamnť ŗ mort.
9.
ęLe prťsent ordre du jour sera tenu secret, et sera adressť seulement
aux marťchaux et gťnťraux commandant des corps d'armťe; mais, au moment
du dťpart des hommes blessťs aux doigts ou ŗ la main, reconduits ŗ leur
corps, il leur sera donnť connaissance, par l'officier d'ťtat-major
commandant la colonne, de la disposition qui condamne ŗ mort ceux qui
dťserteraient ou marauderaient pendant la route.
10.
ęLe major gťnťral de notre grande armťe est chargť de l'exťcution du
prťsent ordre.
ę_Signť_: NAPOL…ON.
ęPour ampliation:
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 24 juin 1813.
ęMonsieur le marťchal, je vous envoie la copie d'une lettre que j'ai
ťcrite hier ŗ M. le gťnťral Barclay de Tolly pour lui faire connaÓtre
les ordres donnťs par l'Empereur ŗ l'ťgard des partisans.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
ę_P.-S._ Cela vous servira pour le langage que vous avez ŗ tenir.
AU G…N…RAL BARCLAY DE TOLLY.
ęDresde, le 23 juin 1813.
ęMonsieur le gťnťral, je m'empresse de porter ŗ votre connaissance la
conduite du major de LŁtzow et les ťvťnements auxquels elle a donnť
lieu. Ce major, chef d'un corps de partisans, a ťtť prťvenu, le 7, de
l'armistice. La copie lui a ťtť portťe par un officier d'ťtat-major. Il
en a eu connaissance par la traduction en allemand que le duc de Weimar
en a fait faire, et qu'il a fait imprimer, placarder et rťpandre ŗ
profusion.
ęLe major de LŁtzow a fait dire ŗ l'officier d'ťtat-major qui lui
portait la copie de l'armistice qu'il ne reconnaissait pas l'armistice.
On lui a fait observer que, le 12, il devait avoir repassť l'Elbe, et
qu'en consťquence il n'y avait pas de temps ŗ perdre: il fit dťclarer
qu'il ťtait corps franc.
ęDepuis le 7 jusqu'au 18, M. le major de LŁtzow a continuť les
hostilitťs: il a arrÍtť les malles de BaviŤre et de Dresde; il a levť
des contributions, comme dix-huit procŤs-verbaux le constatent. Il a
arrÍtť les individus tant civils que militaires rencontrťs sur la route;
il a continuť ŗ enrŰler les jeunes gens du pays et les ťtudiants des
universitťs; il a attaquť des dťtachements, pris des courriers venant
d'Augsbourg et d'Italie, et enfin des soldats marchant isolťment.
ęL'Empereur et Roi mon maÓtre n'est arrivť ŗ Dresde que le 10, et, le
14, voyant que les hostilitťs sur ses derriŤres continuaient, Sa Majestť
a ordonnť aux dťtachements de cavalerie en marche pour rejoindre l'armťe
de s'arrÍter et de se pelotonner pour courir sur les partisans, attendu
que, le 12, ils devaient, aux termes de l'armistice, en avoir exťcutť
les dispositions.
ęD'autres corps, se disant partisans, rťpondaient qu'ils ne pouvaient
reconnaÓtre l'armistice, donnant pour motifs, les uns qu'ils dťpendaient
de l'armťe suťdoise, les autres qu'ils ťtaient ŗ la solde de
l'Angleterre, et enfin d'autres corps indťpendants et insurrectionnels.
ęSa Majestť l'Empereur et Roi a donc cru nťcessaire de prescrire l'ordre
du jour dont je vous envoie copie. J'avais donnť un ordre ŗ peu prŤs
semblable dŤs le 16. Cependant, j'ai l'honneur de proposer ŗ Votre
Excellence d'ťchanger ceux des partisans qui sont actuellement en notre
pouvoir ou qui seront arrÍtťs contre ceux de nos gens qui ont ťtť faits
prisonniers par vos troupes depuis le 4 juin.
ęNous avons aussi ŗ nous plaindre de la non-exťcution de l'article 4 de
l'armistice, qui porte, entre autres choses: que, depuis l'embouchure
de la Katzbach, la ligne de dťmarcation suivra le cours de l'Oder
jusqu'ŗ la frontiŤre de Saxe, longera la frontiŤre de Saxe, etc.; dŤs
lors Crossen s'y trouve compris. Cependant les Prussiens, contre toutes
raisons, veulent occuper Crossen, quoique le droit soit de notre cŰtť et
que cela ne dŻt pas Ítre discutť: j'en prends pour juge Votre Excellence
elle-mÍme.
ęMais, voulant cependant ťviter toute discussion, l'Empereur et Roi
propose que ce pays soit considťrť comme neutre, de maniŤre qu'il ne
soit occupť ni par l'armťe combinťe ni par les armťes franÁaises et
alliťes.
ęLes troupes lťgŤres de Votre Excellence parcourent le pays jusqu'aux
portes de Liegnitz. Je la prie de vouloir bien donner des ordres ŗ cet
ťgard.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ę_Signť_: ALEXANDRE.Ľ
ORDRE DU JOUR.
ęDresde, le 24 juin 1813.
ęLes parlementaires qui se prťsenteront ne pourront dťpasser nos lignes,
c'est-ŗ-dire qu'ils seront reÁus aux avant-postes oý ils remettront
leurs dťpÍches. Ils seront maÓtres d'attendre les rťponses. Dans le cas
oý un parlementaire devrait Ítre amenť au quartier gťnťral, l'ordre en
sera donnť par le major gťnťral. En consťquence, sous aucun prťtexte que
ce soit, les parlementaires ne pourront pťnťtrer au delŗ de nos lignes,
c'est-ŗ-dire de nos avant-postes, sans un ordre formel.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ę_Signť_: ALEXANDRE.
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 19 juillet 1813.
ęMon cousin, je dťsirerais que Buntzlau, qui offre une position
centrale, contint deux manutentions, chacune de huit ŗ dix fours. Je
dťsirerais que la ville pŻt Ítre fortifiťe, de maniŤre qu'en quinze ŗ
vingt jours de travail deux bataillons pussent y protťger un hŰpital,
les deux manutentions et des magasins. Les deux grands moyens dťfensifs
de ce genre sont les eaux et les bois. Vous devez avoir des bois prŤs de
Buntzlau. Vous avez des moyens de transport, puisque vous avez tous les
chevaux de trait de votre corps d'armťe. Vous avez des sapeurs, des
pionniers. Les canonniers de la marine sont surtout propres ŗ ces
travaux. Quant aux eaux, il faut ťtudier si l'on peut remplir les fossťs
de la ville. Si on le peut, faites-y travailler vingt-quatre heures
aprŤs la rťception du prťsent ordre. Vous sentez de quel intťrÍt il
serait de pouvoir placer ŗ Buntzlau, sous la garde de deux bataillons et
de vingt piŤces de canon, un hŰpital de deux mille malades ou
convalescents, quelques millions de rations de biscuits, de farines et
de riz, et beaucoup d'embarras d'artillerie.--Autant que je puis m'en
souvenir, Buntzlau a des fossťs et une muraille. Ce serait donc ces
fossťs qu'il s'agirait de bien ťtablir, ces murailles et tourelles qu'il
faudrait organiser pour l'artillerie, en les garnissant de gabions et de
saucissons, les fossťs qu'il faudrait remplir d'eau, et enfin quelques
lunettes qu'il faudrait tracer et ťlever.--Il n'y a pas de moment ŗ
perdre; vous entendez la matiŤre. Vous pouvez y mettre six mille
ouvriers, en faisant fournir deux mille travailleurs par votre corps
d'armťe et en rťunissant deux ŗ trois mille paysans.
ęNAPOL…ONĽ
LE MAR…CHAL MARMONT ņ NAPOL…ON.
22 juillet 1813
ęSire, j'ai reÁu la lettre que Votre Majestť m'a fait l'honneur de
m'ťcrire le 19 juillet pour me donner ses ordres relatifs ŗ Buntzlau.
Cette ville ťtant placťe au bas d'un long amphithť‚tre, les localitťs
sont peu favorables ŗ la fortification. Cependant il m'a paru, aprŤs
avoir ťtudiť son enceinte avec soin, qu'il ťtait possible de remplir les
intentions de Votre Majestť, et je viens d'arrÍter les travaux ŗ
exťcuter.
ęIls commenceront demain et seront poussťs avec une grande activitť.
J'aurai l'honneur d'adresser demain ŗ Votre Majestť un plan de Buntzlau,
avec un rapport dťtaillť sur les ordres que j'ai donnťs.
ęL'artillerie et le gťnie du sixiŤme corps fournissent quinze cents
outils. Des rťquisitions ont ťtť faites au pays; mais, comme il est
probable que je n'obtiendrai pas tout ce que j'ai demandť, il serait
dťsirable que le grand parc du gťnie nous donn‚t un secours de deux
mille outils.
ęComme les travaux de la rťcolte vont rendre les bras extrÍmement rares,
il serait utile que les cercles de LŲvenberg et de Goldsberg fournissent
chacun mille ouvriers pour les travaux de Buntzlau.Ľ
* * * * *
ęJ'ai l'honneur d'adresser ŗ Votre Majestť le plan de Buntzlau. Cette
place a une double enceinte. L'enceinte intťrieure, ťtant contiguŽ aux
maisons, n'offrant ni espace, ni terre ŗ porter pour les remblais, n'est
pas susceptible d'Ítre mise en ťtat de recevoir du canon. Cependant
c'est un dernier obstacle qu'on peut prťsenter ŗ l'ennemi, et dont on
peut tirer parti en arrangeant quelques tours pour y placer de
l'infanterie. L'enceinte basse offre partout les moyens de faire un
parapet et des batteries. Les tours de cette enceinte sont en gťnťral
trop petites pour Ítre armťes de canon. Cependant, au moyen des
dispositions ordonnťes et dont je vais rendre compte, il y aura quatre
piŤces de canon placťes en A au-dessus de la porte de Breslau; un pareil
nombre au-dessus de la porte AV, mÍme ŗ Goirenberg (G), quatre ťgalement
sur la porte de Dresde (O), deux en P, deux en U, une autre en T, enfin
quatre, dont l'ouvrage projetť en Z.
ęExceptť en F, G, H, K, la place a partout une bonne contrescarpe,
revÍtue de plus ou moins d'ťlťvation, mais habituellement de quinze ŗ
seize pieds. En avant de la porte G, il n'y a pas de fossť.
ęJ'ai ordonnť d'ťlever une contrescarpe en F et d'en construire une en
G, de maniŤre ŗ ťlever assez les eaux pour qu'elles puissent se rťpandre
jusqu'en D au moyen du batardeau qui sera placť en G. Ce batardeau sera
couvert par la maison I, qui sera entourťe d'un fossť et d'un parapet en
terre. Le fossť H et K sera ťgalement rempli d'eau au moyen des remblais
qui seront faits en K autour du lac, afin de pouvoir ťlever les eaux et
les forcer d'inonder ce fossť K et les ťtendre dans le fossť R jusqu'au
delŗ de U; lŗ, ťlevant la contrescarpe qui environne les eaux en K de
cinq pieds et creusant le fossť en R de quatre pieds, il y aura dans
tout ce dťveloppement de la place un obstacle d'eau trŤs-difficile ŗ
franchir.
ęLa portion du fossť depuis S jusqu'en D n'est pas susceptible d'Ítre
inondťe; mais lŗ le fossť est trŤs-profond, la contrescarpe trŤs-ťlevťe,
et cette portion de fossť sera fraisťe et palissadťe avec beaucoup de
soin, et sera d'ailleurs couverte par l'ouvrage projetť en Z, qui
prendra aussi des revers sur la porte de Dresde, et, ŗ cet effet, on va
dťmolir toute la portion du faubourg en BB.
ęIl existe deux tours assez bien construites ŗ chacune des deux portes:
l'une, ŗ la porte de Breslau A, et l'autre ŗ la porte de Dresde O. Elles
sont liťes entre elles et liťes ťgalement au mur d'enceinte intťrieure.
On va construire devant ces tours deux massifs en glacis, ťlevťs de huit
pieds, de maniŤre ŗ couvrir le pied de ces tours du feu de l'ennemi,
faisant aboutir le chemin pour entrer dans la ville en suivant la
contrescarpe, afin d'empÍcher la porte d'Ítre vue de l'extťrieur. On va
faire un plancher qui rťunisse ces tours avec l'enceinte intťrieure, et
ce plancher sera placť ŗ sept pieds, c'est-ŗ-dire au-dessous du niveau
du masque, et on ťtablira sur ce plancher un parapet en gabion de douze
pieds d'ťpaisseur, qui garantira des piŤces de campagne. La place de
LŲyenberg sera arrangťe d'une maniŤre analogue, exceptť que cette
entrťe, oý sera le batardeau, sera supprimťe. Enfin on formera en P et U
et en X des parapets en terre qui donneront les moyens d'armer ces
points avec de l'artillerie, et en gťnťral, comme la muraille d'enceinte
extťrieure est assez mauvaise, on relŤvera les contrescarpes de maniŤre
ŗ la masquer de la vue de la campagne, et les tours seront disposťes ŗ
Ítre occupťes par de l'infanterie, dont l'action n'aura pour objet que
la dťfense du fossť. Les seuls points qui doivent avoir action sur
l'extťrieur devant Ítre ceux qui sont armťs de canon et les tours de
l'enceinte intťrieure, qui seront disposťes pour recevoir de
l'infanterie.
ęJe pense qu'une fois ces travaux exťcutťs la ville de Buntzlau,
dťfendue par mille hommes, non-seulement sera ŗ l'abri d'un coup de
main, mais exigera du gros canon et quelques travaux de siťge, et je ne
pense pas qu'il faille, pour que ces travaux soient terminťs, plus que
la durťe de l'armistice.
ęUne partie de la manutention avait ťtť placťe dans le faubourg; elle va
Ítre transportťe dans la ville et augmentťe.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 24 juillet 1813.
ęL'intention de l'Empereur, monsieur le marťchal, est que toute l'armťe
tire ŗ la cible de la maniŤre suivante: chaque compagnie tirera deux
coups ŗ la cible, et les quatre meilleurs tireurs de chaque salve,
c'est-ŗ-dire huit par compagnie, auront une gratification de 2 francs;
les huit meilleurs tireurs de chaque compagnie se rťuniront pour tirer ŗ
la cible par bataillon, ce qui fera quarante-huit tireurs par bataillon:
les huit meilleurs tireurs auront chacun un prix de 4 francs. Les huit
meilleurs tireurs de chaque bataillon se rťuniront pour tirer ŗ la cible
par division, ce qui, en supposant les divisions l'une dans l'autre ŗ
douze bataillons, fera quatre-vingt-seize tireurs par division: les huit
meilleurs tireurs auront chacun un prix de 6 franc. Les huit tireurs qui
auront eu le prix de chaque division seront rťunis pour tirer ŗ la
cible, ce qui, ŗ raison de trois divisions par corps d'armťe, fera les
vingt-quatre tireurs, et les huit meilleurs tireurs du corps d'armťe
auront chacun un prix de 12 francs.
ęLes 27-28 juillet, chaque compagnie tirera ŗ la cible. Les 28-29, les
huit meilleurs tireurs de chaque compagnie tireront ŗ la cible du
bataillon. Les 29-30, les huit meilleurs tireurs de chaque bataillon
tireront ŗ la cible de la division, et, le 1er aoŻt, les huit meilleurs
tireurs de chaque division tireront ŗ la cible du corps d'armťe.
ęLa dťpense de cet exercice, qui aura lieu dans tous les corps d'armťe,
ne sera que de deux cartouches par homme; et, quant aux prix, la dťpense
peut Ítre ťvaluťe de la maniŤre suivante:
ę1į _Prix de 2 francs, cible des compagnies._
ęHuit prix de 2 francs coŻteront 16 francs par compagnie, ce qui fera
pour un bataillon, ŗ raison de six compagnies (16 x 6), 96 francs; pour
une division, ŗ raison de douze bataillons (96 x 12), 1,152 francs; et
pour un corps d'armťe, ŗ raison de trois divisions, 3,456 francs.
ę2į _Prix de 4 francs, cible des bataillons._
ęHuit prix de 4 francs coŻteront 32 francs par bataillon; ce qui fera
pour une division, ŗ raison de douze bataillons (32 x 12), 384 francs;
et pour un corps d'armťe, ŗ raison de trois divisions (384 x 3), 1,152
francs.
ę3į _Prix de 6 francs, cible des divisions._
ęHuit prix de 6 francs coŻteront 48 francs par division: ce qui fera par
corps d'armťe, ŗ raison de trois divisions (48 x 3), 144 francs.
ę4į _Prix de 12 francs, cible par corps d'armťe._
ęHuit prix de 12 francs coŻteront par corps d'armťe 96 francs; ainsi la
dťpense des prix sera, par corps d'armťe, en supposant les proportions
indiquťes ci-dessus:
ęPour la cible des compagnies. 3,456 francs.
ęPour la cible des bataillons. 1,152
ęPour la cible des divisions. 144
ęPour la cible du corps d'armťe. 96
-----
ęTotal. 4,848 francs.
ęLes militaires qui obtiendront les prix du corps d'armťe ŗ 12 francs
auront nťcessairement obtenu celui de la division, celui du bataillon et
celui de la compagnie, ce qui leur fera un prix total de 24 francs.
ęDonnez vos ordres, monsieur le marťchal, pour l'exťcution de ces
dispositions dans votre corps d'armťe: prescrivez tout ce qui sera
nťcessaire pour faire de ces exercices autant de petites fÍtes. La
musique devra accompagner ceux qui auront remportť les prix. Le but de
l'Empereur est: 1į d'apprendre aux troupes ŗ tirer; 2į de rťpandre la
gaietť dans les camps. Faites donc tout ce qui vous sera possible pour
obtenir ces deux rťsultats.
ęLe prince, vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 10 aoŻt 1813.
ęMon cousin, je vous prie de me faire connaÓtre oý en est l'armement de
Buntzlau et la manutention. Je suppose que les magasins sont intacts. Il
serait bien nťcessaire d'y faire rentrer une vingtaine de milliers de
foin et de paille.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 12 aoŻt 1813.
ęMon cousin, l'Autriche nous a dťclarť la guerre; l'armistice est
dťnoncť; les hostilitťs recommenceront le 17. Voici le pian d'opťrations
qu'il est possible que j'adopte, mais auquel je me dťciderai
dťfinitivement avant minuit;--concentrer toute mon armťe sur GŲrlitz et
Bautzen, et dans le camp de Koenigstein et ŗ Dresde.--Si des
fortifications ont ťtť faites ŗ Liegnitz et ŗ Buntzlau, les
dťtruire.--Envoyer le duc de Reggio avec les douziŤme, quatriŤme et
septiŤme corps sur Merlin, dans le temps que le gťnťral Girard
dťbouchera avec dix mille hommes par Magdebourg, et le prince d'EckmŁhl
avec quarante mille hommes par Hambourg.--Indťpendamment de ces cent dix
mille hommes qui marcheront sur Berlin, et de lŗ sur Stettin, j'aurai
sur la ligne, savoir: les deuxiŤme, troisiŤme, cinquiŤme, sixiŤme,
onziŤme, quatorziŤme et premier corps de cavalerie; le deuxiŤme, le
quatriŤme, le cinquiŤme et la garde: cela fera prŤs de trois cent mille
hommes.--Avec ces trois cent mille hommes, je prendrai une position
entre GŲrlitz et Bautzen, de maniŤre ŗ ne pas pouvoir Ítre coupť de
l'Elbe, ŗ me tenir maÓtre du cours du fleuve et ŗ m'approvisionner par
Dresde, ŗ voir ce que veulent faire les Autrichiens et les Russes, et ŗ
profiter des circonstances.--Je prťfťrerais rester ŗ Liegnitz, mais de
Liegnitz ŗ Dresde il y a quarante-huit lieues, c'est-ŗ-dire huit
marches, et en longeant toujours la BohÍme, et il n'y en aurait que
trente-six de Buntzlau et vingt-quatre de GŲrlitz. Si je prenais une
position intermťdiaire entre GŲrlitz et Bautzen, il n'y en aurait que
dix-huit.--Ce pays se trouverait alors plein de troupes, et nous
serions, pour ainsi dire, entassťs: nous n'aurions pas de peine ŗ vivre
un mois. Pendant ce temps-lŗ ma gauche entrerait ŗ Berlin, ťparpillerait
tout ce qui se trouve lŗ; et, si les Autrichiens et les Russes livraient
bataille, nous les ťcraserions. Si nous perdions la bataille, nous
serions plus prŤs de l'Elbe; enfin nous serions plus en mesure de
profiter de leurs sottises.--Je ne vois guŤre qu'on puisse hťsiter sur
Liegnitz. Il n'en est pas de mÍme de Buntzlau. Je ne me dissimule pas
que cette position a l'avantage de me tenir dans le cas d'empÍcher
l'ennemi de passer entre l'Oder et moi; au lieu qu'entre Bautzen et
GŲrlitz, l'ennemi, passant par Buntzlau, peut se porter sur GŲrlitz.--Le
quartier gťnťral de l'armťe autrichienne se rťunit ŗ Hirschberg. Il
paraÓt que les Autrichiens veulent opťrer par Zittau.--Faites-moi
connaÓtre ce que vous pensez de tout cela. Je suppose que tout doit
finir par une grande bataille, et je pense qu'il est plus avantageux de
la livrer prŤs de Bautzen, ŗ deux ou trois marches de l'Elbe, jusqu'ŗ
cinq ou six marches; mes communications sont moins exposťes; je pourrai
me nourrir plus facilement, d'autant plus que, pendant ce temps, ma
gauche occupera Berlin et balaiera tout le bas Elbe, opťration qui n'est
point hasardeuse, puisque mes troupes ont Magdebourg et Wittenherg, ŗ
tout ťvťnement, pour retraite. J'ťprouve bien quelques regrets
d'abandonner Liegnitz; mais, en l'occupant, il serait difficile de
rťunir toutes mes troupes; il faudrait les diviser en deux armťes, et ce
serait une f‚cheuse position que celle qui nous ferait longer la BohÍme
sur un espace de trente lieues, d'oý l'ennemi pourrait dťboucher partout
et se trouverait dans une position naturelle.--Il me semble que la
campagne actuelle ne peut nous conduire ŗ aucun bon rťsultat, sans qu'au
prťalable il y ait une grande bataille.--Il n'est pas besoin de dire
que, tout en s'ťchelonnant, il sera indispensable de menacer de prendre
l'offensive, en se contentant d'avoir sur l'ennemi le pays de neutralitť
et une ou deux lieues en avant.--L'Autriche ayant une armťe contre la
BaviŤre et une contre l'Italie, je ne suppose pas qu'elle puisse avoir
contre moi plus de cent mille hommes sous les armes. Je suis plus loin
de croire que les Prussiens et les Russes rťunis puissent en avoir deux
cent mille, en ne comptant pas ce qu'ils ont ŗ Berlin et dans cette
direction. Toutefois il me semble que, pour avoir une affaire dťcisive
et brillante, il y a plus de chances favorables ŗ se tenir dans une
position plus resserrťe et ŗ voir venir l'ennemi. Je compte porter, le
14, mon quartier gťnťral ŗ Bautzen. …vacuez ŗ force vos
malades.--Envoyez un aide de camp au duc de Tarente afin d'Ítre prťvenu
de ce que l'ennemi fait sur son extrÍme droite.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 13 aoŻt 1813, soir.
ęMon cousin, voici le parti que j'ai pris. Si vous avez quelques
observations ŗ me faire, je vous prie de me les faire librement.--Le duc
de Reggio, avec les septiŤme, quatriŤme et douziŤme corps et le
troisiŤme corps de cavalerie, marchera sur Berlin dans le temps que le
gťnťral Girard, avec douze mille hommes, dťbouchera par Magdebourg, et
que le prince d'EckmŁhl, avec vingt-cinq mille FranÁais et quinze mille
Danois, dťbouchera par Hambourg. Il est actuellement ŗ trois lieues en
avant de Hambourg, qui est devenu une place de premiŤre force; cent
piŤces de canon y sont sur les remparts, et les maisons qui gÍnaient la
dťfense sont abattues, les fossťs pleins d'eau. Le gťnťral Hoyendorp y
commande une garnison de dix mille hommes.--J'ai donnť ordre au duc de
Reggio de se porter sur Berlin, en mÍme temps que le prince d'EckmŁhl
culbutera ce qu'il a devant lui, si l'ennemi lui est infťrieur, et du
moins le poussera vivement quand il effectuera sa retraite. J'ai donc
cent vingt mille hommes qui marchent dans diffťrentes directions sur
Berlin.--De ce cŰtť-ci, Dresde est fortifiť, et dans une position telle,
qu'il peut se dťfendre huit jours, mÍme les faubourgs. Je le fais
couvrir par le quatorziŤme corps, que commande le marťchal Saint-Cyr; il
a son quartier gťnťral ŗ Pirna; il occupe les ponts de Koenigstein qui,
protťgťs par la forteresse, sont dans une position inexpugnable. Ces
ponts ont un beau dťbouchť sur Bautzen. La mÍme division, qui fournit
des bataillons ŗ Koenigstein, occupe Neustadt avec la cavalerie. Deux
divisions campent dans une trŤs-belle position ŗ Gieshubel, ŗ cheval sur
les deux routes de Prague ŗ Dresde. Le gťnťral Pajol, avec une division
de cavalerie, est sur la route de Leipzig ŗ Carlsbad, ťclairant les
dťbouchťs jusqu'ŗ Hof.--Le gťnťral Durosnel est dans Dresde, avec huit
bataillons et cent piŤces de canon sur les remparts et dans les
redoutes.--Le premier corps du gťnťral Vandamme et le cinquiŤme corps de
cavalerie seront ŗ Bautzen.--Je porte mon quartier gťnťral ŗ
GŲrlitz.--J'y serai le 16.--J'y rťunirai les cinq divisions d'infanterie
et les trois divisions de cavalerie, et l'artillerie de la garde ainsi
que le deuxiŤme corps y seront placťs entre GŲrlitz et Zittau, et entre
le deuxiŤme corps et la BohÍme sera l'avant-garde formťe par le huitiŤme
corps (Polonais).--Vous Ítes ŗ Buntzlau;--le duc de Tarente ŗ
LŲwenberg:--le gťnťral Lauriston ŗ Gruneberg;--le prince de la Moskowa
dans une position intermťdiaire, entre Haynau et Liegnitz, avec le
deuxiŤme corps de cavalerie.--Cependant l'armťe autrichienne, si elle
prend l'offensive, ne peut la prendre que de trois maniŤres: 1į en
dťbouchant avec la grande armťe, que j'estime forte de cent mille
hommes, par Peterswald, sur Dresde. Elle rencontrera les fortes
positions qu'occupe le marťchal Saint-Cyr, qui, poussť par des forces
aussi considťrables, se retirerait dans le camp retranchť de Dresde. En
un jour et demi le premier corps arriverait ŗ Dresde, et dŤs lors
soixante mille hommes se trouveraient dans le camp retranchť ŗ Dresde.
J'aurais ťtť prťvenu, et en quatre jours de marche je pourrais m'y
porter moi-mÍme, de GŲrlitz, avec la garde et le deuxiŤme
corps.--D'ailleurs Dresde, comme je viens de le dire, abandonnť ŗ
lui-mÍme, quand mÍme il ne serait pas secouru du marťchal Saint-Cyr, est
dans le cas de se dťfendre huit jours.--Le deuxiŤme dťbouchť par oý les
Autrichiens pourraient prendre l'offensive, c'est celui de Zittau; ils y
rencontreront le prince Poniatowski, la garde, qui se rťunira sur
GŲrlitz, et le deuxiŤme corps; et, avant qu'ils puissent arriver,
j'aurai rťuni plus de cent cinquante mille hommes; en mÍme temps qu'ils
feront ce mouvement, les Russes pourraient se porter sur Liegnitz et
LŲwenberg: alors le sixiŤme, le troisiŤme, le onziŤme, le cinquiŤme
corps d'armťe et le deuxiŤme corps de cavalerie se rťuniraient sur
Buntzlau, ce qui ferait une armťe de plus de cent trente mille hommes,
et, en un jour et demi, j'y enverrais de GŲrlitz ce que je jugerais
superflu ŗ opposer aux Autrichiens.--Le troisiŤme mouvement des
Autrichiens serait de passer par Josephstadt, et de se rťunir ŗ l'armťe
russe et prussienne, de maniŤre ŗ dťboucher tous ensemble. Alors toute
l'armťe se rťunira sur Buntzlau.--Dans ce cas, il faut choisir la
position de bataille ŗ Buntzlau, en avant ou en arriŤre.--Je vous ai
dťjŗ mandť de vous occuper de ce travail important.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 13 aoŻt 1813.
ęMon cousin, je dťsire connaÓtre si, en avant ou en arriŤre de Buntzlau,
il y aurait une belle position oý un corps de deux cent mille hommes
pŻt Ítre placť favorablement pour arrÍter un ennemi qui dťboucherait en
force des frontiŤres de BohÍme et Silťsie, et oý on pourrait lui livrer
bataille. Faites-moi connaÓtre aussi s'il existe une bonne route de
Buntzlau ŗ Hoyerswerda.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 13 aoŻt 1813.
ęMonsieur le marťchal, l'Empereur me charge de vous faire connaÓtre que
la position de l'armťe est la suivante:
ęLe quartier gťnťral de Sa Majestť sera demain, 14, ŗ Bautzen, et, le
16, ŗ GŲrlitz.
ęLe corps du prince Poniatowski va prendre des positions entre Zittau et
GŲrlitz, oý son corps d'armťe pourra Ítre rťuni pour former
l'avant-garde de l'armťe, ťclairer la marche de l'ennemi, la retarder et
donner le temps ŗ l'armťe de se rťunir ŗ GŲrlitz. Il ťclairera aussi la
route de LŲban.
ęLe quatriŤme corps, le septiŤme corps et le douziŤme, avec le troisiŤme
corps de cavalerie, seront ŗ Lukau.
ęLe gťnťral Dombrowski est en avant de Wittenberg, ayant sous ses ordres
six bataillons, dont le 4e rťgiment polonais fait partie, et deux
rťgiments de cavalerie.
ęLe gťnťral Girard est, avec dix mille hommes, en avant de Magdebourg.
ęLe prince d'EckmŁhl est, avec le corps auxiliaire danois, ŗ trois
lieues en avant de Hambourg, sur la rive droite.
ęM. le marťchal Saint-Cyr a son quartier gťnťral ŗ Pirna, avec son corps
ŗ cheval sur l'Elbe, ayant une division sur Hohenstein ou Neustadt, et
trois divisions sur la position de Gieshubel, barrant les deux routes de
la BohÍme ŗ Dresde, et ayant un corps d'observation sur la route de
Leipzig ŗ Carlsbad.
ęLa ville de Dresde est ŗ l'abri d'un coup de main. Elle a une garnison
et cent piŤces en batterie, et elle est en ťtat d'attendre l'armťe cinq
ou six jours.
ęLe cinquiŤme corps de cavalerie et le premier corps, commandť par le
gťnťral Vandamme, arriveront le 18 ŗ Bautzen.
ęLe quartier gťnťral, avec les cinq divisions de la garde, les trois
divisions de cavalerie, son artillerie, et le deuxiŤme corps, avec le
premier corps de cavalerie, seront le 17 ŗ GŲrlitz.
ęLe sixiŤme corps est ŗ Buntzlau; le cinquiŤme ŗ Goldsberg; le troisiŤme
ŗ Liegnitz, et le onziŤme ŗ LŲwemberg. Ainsi, en trois jours, trois
cent cinquante mille hommes peuvent Ítre rťunis sur Buntzlau ou sur
GŲrlitz.
ęL'armťe autrichienne ne peut dťboucher sur la rive droite que par
Zittau ou par Josephstadt. Si elle venait par Zittau, elle rencontrerait
le corps du prince Poniatowski comme avant-garde. Si les Autrichiens
dťbouchaient par Josephstadt, leurs mouvements se confondraient avec
ceux des Russes et des Prussiens; et, dŤs lors, soit qu'ils se portent
sur LŲwemberg, soit qu'ils se portent sur Liegnitz, tous les corps
pourront se rťunir sur Buntzlau.
ęCes renseignements, monsieur le marťchal, _sont pour vous seul_.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT ņ NAPOL…ON.
ęBuntzlau, 15 aoŻt 1813.
ęSire, j'ai reÁu les lettres que vous m'avez fait l'honneur de m'ťcrire
en date des 12 et 13, et je m'empresse d'y rťpondre. Conformťment ŗ vos
ordres, je le ferai en toute libertť.
ęJ'ťtablis en principe, et je suis d'accord avec vous, qu'une grande
bataille est indispensable au dťbut de la campagne. Sans un premier
succŤs, qui nous donnera de l'ascendant sur l'ennemi, nous n'aurons
qu'une marche incertaine. Or elle doit Ítre livrťe sous vos auspices,
sous votre commandement immťdiat, quel que soit le cŰtť par lequel se
prťsente l'ennemi; et, pour qu'il en soit ainsi, l'armťe, quoique
trŤs-nombreuse, doit Ítre rťunie le plus possible.
ęD'aprŤs cela, Sire, Votre Majestť comprendra que, dans mon opinion et
dans aucun cas, nous ne devrions nous ťtendre jusqu'ŗ Liegnitz. Vos
rťflexions sur les inconvťnients d'une position oý l'on prÍterait le
flanc ŗ l'ennemi, et dťfilant continuellement prŤs de la frontiŤre de
BohÍme pendant huit marches, sont trop fondťes pour qu'il puisse jamais
Ítre question de s'ťloigner ainsi de l'Elbe. J'en dirai autant pour
Buntzlau; GŲrlitz mÍme ne devrait Ítre occupť que par une avant-garde.
Je voudrais que toute l'armťe fŻt ťtablie sur la Sprťe et sur l'Elbe, et
attendÓt que l'ennemi s'approch‚t assez pour qu'on pŻt l'accabler; et
cette grande proximitť des troupes entre elles vous donnerait le moyen
d'Ítre prťsent partout ŗ la fois dans les moments importants, chose que
je regarde comme la garantie de nos succŤs. Je comprends votre
impatience de vous emparer de Berlin, et je la partage; cependant le
moyen d'y arriver sŻrement n'est pas, je pense, de se h‚ter ŗ se mettre
en marche dans cette direction. Le sort de la campagne n'est pas de ce
cŰtť, et le destin de Berlin doit Ítre la consťquence de ce qui se
passera ailleurs. Si vous persistez ŗ prendre cette offensive tout
d'abord, vous vous privez d'une partie de vos forces, tandis que la
prťsence d'un seul corps d'armťe en avant de Torgau et quelques
mouvements de Magdebourg et de Hambourg suffiraient pour neutraliser
l'armťe prussienne qui couvre Berlin. AprŤs une grande bataille gagnťe
sur l'Elbe ou sur la Sprťe, vous pouvez sans danger faire tels
mouvements excentriques que vous voudrez, et le succŤs de la marche sur
Berlin sera incontestable.
ęMais, si le temps d'attente auquel je vous propose de vous soumettre
vous paraÓt trop pťnible, alors j'aimerais mieux une offensive directe
prise contre la BohÍme. Les troupes qui sont en Silťsie se rťuniraient
sur la Neisse pour couvrir le mouvement qui se ferait par Peterswald, se
rapprocheraient de l'Elbe si l'ennemi marchait ŗ elles pour les
combattre, et finiraient par suivre le mouvement gťnťral, ou bien
entreraient directement en BohÍme par le dťbouchť de Zittau. Une
bataille gagnťe en BohÍme aurait d'immenses consťquences, vous donnerait
de grands rťsultats et la possession d'un pays qui vous assurerait de
grandes ressources et peut-Ítre amŤnerait la sťparation de l'Autriche;
alors la Prusse serait ŗ votre merci.
ęJe n'ai pas vu les travaux de Dresde; mais, d'aprŤs ce qui m'en a ťtť
dit, je crains que Votre Majestť ne se fasse illusion sur leur force
rťelle et leurs moyens de rťsistance absolue, et c'est un point capital
dans vos combinaisons. Dans le choix de diffťrents partis ŗ prendre,
j'aimerais mieux attendre l'approche de l'ennemi pour lui livrer
bataille, et, aprŤs l'avoir ťcrasť, combiner une offensive suivant les
circonstances; et remarquez bien que, suivant cette hypothŤse, les
mouvements de l'armťe ennemie ne peuvent pas Ítre combinťs avec autant
de prťcision que ceux de l'armťe franÁaise, parce que celle-ci est
placťe au centre, dans un pays ouvert, tandis que les diffťrentes
parties de l'autre occupent un arc de cercle d'un grand dťveloppement,
et sont sťparťes par des montagnes.
ęEnfin, je le rťpŤte, Sire, par la division de ses forces, par la
crťation de trois armťes distinctes et sťparťes par de grandes
distances, Votre Majestť renonce encore aux avantages que sa prťsence
sur le champ de bataille lui assure, et je crains bien que, le jour oý
elle aura remportť une victoire et cru gagner une bataille dťcisive,
elle n'apprenne qu'elle en a perdu deux.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT ņ NAPOL…ON.
ę16 aoŻt 1813, matin.
ęSire, j'ai reÁu cette nuit la lettre que Votre Majestť m'a fait
l'honneur de m'ťcrire le 13 au soir. J'ai eu l'honneur de rťpondre hier
matin ŗ la lettre que Votre Majestť m'avait ťcrite le 12.
ęPuisque vous daignez, Sire, provoquer mes rťflexions, j'oserai vous
dire que je regrette que vous ayez renoncť ŗ la premiŤre idťe que vous
aviez eue de vous concentrer en attendant les mouvements de l'ennemi
pour profiter de ses fautes pour le combattre; mais j'ajoute bien vite,
Sire, que, puisque Votre Majestť a arrÍtť son opťration sur Berlin avant
d'avoir battu les Russes et les Autrichiens, il ťtait indispensable de
prendre les dispositions que vous avez arrÍtťes pour protťger les corps
d'armťe qui s'y rendent: il me semble cependant que les troisiŤme et
cinquiŤme corps sont un peu loin, surtout depuis qu'il paraÓt certain
que les forces principales de l'ennemi se rapprochent de l'Elbe. Votre
Majestť est sans doute bien mieux informťe que je ne puis l'Ítre des
mouvements de l'ennemi: mais il ne me paraÓt pas douteux, d'aprŤs les
nouvelles rťpandues dans le pays, que la plus grande partie de l'armťe
russe est entrťe en BohÍme pour se rťunir aux Autrichiens et traverser
en ce moment ce royaume. Le duc de Tarente me donne des nouvelles qui
cadrent parfaitement avec celles que j'ai reÁues des habitants. D'un
autre cotť, il paraÓt que le prince de la Moskowa croit avoir peu de
monde devant lui, ce qui est d'accord, et Votre Majestť trouvera sans
doute que le mouvement des alliťs est assez dans le gťnie du systŤme
qu'ils ont adoptť depuis cette guerre, et qu'ils ont exťcutť la veille
de la bataille de Lutzen, en marchant sur Pťgau lorsqu'une partie de
l'armťe marchait sur Leipzig.
ęEnfin, Sire, je crains que, par la division que vous adoptez, le jour
oý vous aurez cru avoir gagnť une bataille dťcisive, vous n'appreniez
que vous en avez perdu deux.
ęLes travaux de Buntzlau peuvent Ítre considťrťs comme finis. D'aprŤs
les divers ordres de Votre Majestť, j'y fais mettre la derniŤre main.
C'est un poste que j'aimerais mieux dťfendre que beaucoup de places qui
passent pour des forteresses, et qu'un homme de coeur et de jugement
doit dťfendre au moins dix jours; et, si, comme tout l'annonce, Votre
Majestť veut en faire usage, il est urgent d'y envoyer dix-huit ou vingt
bouches ŗ feu; il n'en est pas encore arrivť une seule. Toutefois je
fais tout prťparer pour dťtruire en douze heures les fortifications de
Buntzlau.
ęDepuis hier, tous mes malades sont ťvacuťs, et j'ai mÍme fait ťvacuer
des malades du cinquiŤme corps qui m'avaient ťtť laissťs ici, je ne sais
par quelle circonstance. J'ai de plus des transports prťparťs pour les
malades que je pourrais avoir d'ici ŗ quatre ou cinq jours. Ainsi Votre
Majestť peut considťrer le sixiŤme corps comme parfaitement mobile.
ęJ'ai passť toute la matinťe ŗ reconnaÓtre de nouveau tout le pays pour
remplir les intentions de Votre Majestť; mais je n'ai encore rien trouvť
qui me satisfÓt. Je monte ŗ cheval pour continuer mes recherches; si
elles me donnent les rťsultats que je dťsire. Votre Majestť en sera
informťe cette nuit.
ęJe n'ai plus rien ŗ ajouter, Sire que d'affirmer ŗ Votre Majestť que le
sixiŤme corps est animť du meilleur esprit, et que j'ai l'espoir qu'elle
en sera aussi contente quand elle le verra que lorsqu'il combattra pour
elle. Quels que soient ses sentiments, ils sont peu de chose en
comparaison du dťvouement pour votre personne, de l'amour pour votre
gloire, et du zŤle pour votre service, qui animent le plus ancien de vos
serviteurs.
ęLE MAR…CHAL DUC DE RAGUSE.Ľ
LE MAR…CHAL MACDONALD AU MAR…CHAL MARMONT.
ęLŲwenberg, le 18 aoŻt 1813, minuit.
ęL'ennemi n'a point renouvelť son attaque sur Lahn, ainsi que nous en
ťtions menacťs. Il a disparu au contraire ce matin, pour se rťunir aux
quarante mille hommes que l'on m'annonÁait devoir dťboucher sur la
grande communication d'_Hirschberg_ ŗ _Greiffenberg_. Cette armťe a pris
une direction plus ŗ droite et est venue se dťvelopper derriŤre
_Zobten_, et sur la route de Goldsberg ŗ LŲwenberg. Son avant-garde a
forcť le passage de _Siebeneichen_ et a attaquť le cinquiŤme corps sur
tout son front, sur les deux rives du _Bober_. Le gťnťral Lauriston l'a
repoussť par sa droite au delŗ de ce fleuve, tandis qu'il a rappelť sa
gauche qui ťtait tournťe par _Ludwigsdorf_.
ęL'armťe alliťe n'est sťparťe de nous que par le Bober; les feux font
voir un immense dťveloppement sur plusieurs lignes. De jour on avait
estimť sa force de soixante ŗ quatre-vingt mille hommes, elle doit Ítre
plus considťrable; on en jugera mieux demain.
ęLes communications sont interceptťes entre le prince de la Moskowa et
moi, comme elles l'ont ťtť toute cette journťe, entre les cinquiŤme et
onziŤme corps.
ęLes circonstances actuelles ne permettant plus un aussi grand
dťveloppement sur la gauche du Bober et du Kemnitz, le gťnťral Lauriston
prendra demain position en arriŤre de LŲwenberg, ŗ cheval sur la route
de _Lauban_, sa gauche appuyťe au Bober, ŗ la hauteur de Braunau; sa
droite ŗ la route de Greiffenberg; LŲwenberg sera gardť comme
avant-poste, couvert par un cordon, sur le Bober; on maintiendra cette
position, la journťe de demain, s'il est possible, pour avoir le temps
de recevoir les ordres de l'Empereur pour la concentration des forces.
ęLe onziŤme corps ťvacuera Lahn cette nuit et gardera demain le dťbouchť
d'Hirschberg sur la gauche du Kemnitz, et ses positions de Liebenthal,
Greiffenberg et Friedberg. La position suivante pour les deux corps sera
la _Queiss_, Marklena et Lauban, et Greiffenberg.
ęC'est avec peine que je vous fais part qu'un parti de Cosaques a
enlevť plusieurs de mes gens et mon portefeuille, qui renfermait ma
correspondance et le chiffre de l'armťe.
ęLe marťchal duc de Tarente,
ęMACDONALD.Ľ
LE MAR…CHAL MACDONALD AU MAR…CHAL MARMONT.
ęLŲwenberg, le 18 aoŻt 1813.
ęJe reÁois votre lettre de ce matin, je n'ai point eu d'attaque hier,
seulement l'ennemi est venu de _Lahn_ et _Mertzdorf_ reconnaÓtre les
positions; on lui a tuť quelques hommes et pris cinq ŗ six; il n'y a
point eu de canon de tirť.
ęJe n'ťtais pas prťvenu du mouvement du cinquiŤme corps, qui vient
d'arriver; le prince de la Moskowa et le gťnťral Lauriston me l'ont
annoncť ce matin; je me suis dŤs lors dťterminť ŗ prendre de suite
l'offensive avec le onziŤme corps pour rejeter l'ennemi de l'autre cŰtť
du Bober. Les Cosaques sont entrťs hier ŗ Greiffenberg; j'espŤre par mon
opťration couper tout ce qui s'est avancť sur cette ville et Liebenthal.
ęUne division du cinquiŤme corps et sa cavalerie prend position ŗ
_Braunau_ et _Ludwigsdorf_ pour se lier avec le prince de la Moskowa, et
couvrir les routes de Haynau et Buntzlau, les deux autres divisions en
avant et en arriŤre de LŲwenberg.
ęLauriston, qui a ťtť t‚tť hier soir, n'a pas ťtť suivi ce matin. Le
prince de la Moskowa me mande que le corps ennemi a filť sur Jauer;
peut-Ítre vient-il par Schonau et Hirschberg pour se rattacher ŗ la
BohÍme.
ęJe ne crois pas avoir des forces considťrables devant moi; mon attaque
d'aujourd'hui m'ťclaircira.
ęM. Murphy, qui vient d'Ítre promu au grade d'adjudant-commandant, chef
d'ťtat-major de votre vingtiŤme division, vous remettra cette lettre;
c'est un bon officier, dont vous serez content, et que je vous
recommande.
ęLe marťchal duc de Tarente,
ęMACDONALD.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęGŲrlitz, le 20 aoŻt 1813, trois heures aprŤs midi.
ęMon cousin, j'arrive ŗ GŲrlitz. Il est deux heures, je serai ŗ cinq
heures du soir ŗ Lauban. Mettez des postes de cavalerie entre Lauban et
la position oý vous Ítes, afin d'avoir plusieurs fois de vos nouvelles
dans la nuit.--La grande affaire, dans ce moment, c'est de se rťunir et
de marcher ŗ l'ennemi.--Si vous quittez Buntzlau, laissez-y une bonne
garnison.--Comme vous restez en correspondance avec le duc de Tarente,
vous devez connaÓtre la position qu'il occupe.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE G…N…RAL LAURISTON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęLauyenfurwerth, prŤs de LŲwenberg,
le 20 aoŻt 1813, onze heures du soir.
ęJe suis chargť de vous faire connaÓtre que Sa Majestť est arrivťe ce
soir ŗ cinq heures ŗ Lauban. Le mouvement que je devais faire en arriŤre
est suspendu. Je resterai ici, si vous restez ŗ Ottendorf. La lettre du
prince de la Moskowa fait connaÓtre que vous devez vous retirer; je
suppose que, lorsqu'il aura connu l'arrivťe de Sa Majestť ŗ Lauban, sa
dťtermination changera. Il est donc important que vous lui fassiez
connaÓtre promptement cette arrivťe. Les forces de l'ennemi ont passť de
ma droite ŗ ma gauche, et, je le pense, sur le prince de la Moskowa.
ęLe comte DE LAURISTON.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęLauban, le 21 aoŻt 1813, cinq heures
du matin.
ęMonsieur le duc de Raguse, vous trouverez ci-joint l'ordre de la
journťe d'aujourd'hui: conformez-vous-y; donnez les ordres d'exťcution
et de dťtail avec la prudence et avec les modifications que peut exiger
la position de l'ennemi.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
ORDRE POUR LE 21 AOŘT.
ęLauban, le 21 aoŻt 1813, deux heures et demie du matin.
ęL'Empereur ordonne les dispositions suivantes:
ęLe duc de Tarente, avec le cinquiŤme corps d'armťe, ayant le onziŤme
corps sur sa droite, sera prÍt ŗ dťboucher aujourd'hui ŗ midi pour
passer le Bober et attaquer l'ennemi.
ęLe duc de Raguse sera en position le plus tŰt possible, ŗ une lieue et
demie ou deux lieues de LŲwenberg sur la gauche.
ęLe prince de la Moskowa dťbouchera aujourd'hui par, ou prŤs Buntzlau,
avant dix heures du matin, avec tout son corps rťuni, culbutera tout ce
qu'il a devant lui et se portera sur Alt-Gersdorf, en faisant poursuivre
l'ennemi.
ęLe duc de Trťvise partira ŗ quatre heures du matin pour se porter sur
LŲwenberg.
ęLe gťnťral Latour-Maubourg partira ŗ cinq heures du matin pour se
porter sur LŲwenberg.
ęLe gťnťral Ornano partira avec sa division de la garde ŗ cheval, ŗ six
heures du matin, pour se porter sur LŲwenberg; il se tiendra toujours
sur la droite de la route.
ęLe gťnťral Walther partira ŗ sept heures du matin pour LŲwenberg.
ęLa division de la vieille garde ŗ pied partira ŗ cinq heures du matin
pour LŲwenberg.
ęL'Empereur sera, de sa personne, ŗ LŲwenberg ŗ neuf heures du matin.
ęLe prince, vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęLŲwenberg, le 22 aoŻt 1813, une heure et demie.
ęJ'ai reÁu vos deux lettres. Voici oý nous en sommes:
ęLe duc de Tarente, avec les cinquiŤme et onziŤme corps et la division
de cavalerie du gťnťral Chastel, poursuit l'ennemi dans la direction de
Goldsberg et Schonau.
ęLe prince de la Moskowa poursuit ťgalement l'ennemi sur Haynau.
ęLes renseignements que nous avons tirťs des prisonniers et recueillis
dans le pays portent ŗ croire que l'armťe ennemie, en Silťsie, est
composťe de trois corps:
ęCelui du gťnťral Langeron, composť de cinq divisions, ce qui forme ŗ
peu prŤs trente mille hommes;
ęLe corps de Sacken, composť de trois divisions, ou environ seize mille
hommes;--enfin un corps prussien, commandť par les gťnťraux BlŁcher et
York, de vingt-cinq ŗ trente mille hommes.
ęL'Empereur ne suppose donc pas que l'ennemi ait plus de quatre-vingt
mille hommes en Silťsie.
ęLe troisiŤme corps, aux ordres du prince de la Moskowa, est fort
d'environ trente-cinq mille hommes; le cinquiŤme et le onziŤme, de
cinquante mille. Avec la cavalerie, l'artillerie, etc., cela forme un
corps de prŤs de cent mille hommes, force qui paraÓt suffisante contre
l'armťe ennemie qui est en Silťsie.
ęL'Empereur laisse donc reposer aujourd'hui sa garde et votre corps
d'armťe, pour pouvoir, s'il y a lieu, les porter sur un autre point.
ęL'intention de Sa Majestť est que vous fassiez faire de suite assez de
ponts sur le Bober pour pouvoir repasser promptement et sans aucun
embarras cette riviŤre si l'Empereur voulait vous reporter sur une
autre direction. Soyez donc prÍt ŗ vous mettre en marche sur telle
direction qu'on pourrait vous donner. Si vous avez des renseignements de
l'ennemi, faites-les-moi connaÓtre.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęLŲwenberg, le 23 aoŻt 1813, quatre
heures et demie du matin.
L'Empereur ordonne, monsieur le duc, que vous partiez ce matin pour vous
rendre, avec votre corps, prŤs de Lauban; vous devrez passer la riviŤre,
afin de pouvoir, demain de bonne heure, partir pour GŲrlitz, s'il y a
lieu. L'intention de Sa Majestť est que vous envoyiez un aide de camp ŗ
GŲrlitz, oý sera ce soir le quartier gťnťral, pour faire connaÓtre
l'heure ŗ laquelle vous arriverez.
ęToute la garde part ŗ quatre heures du matin, et se trouvera sur le
chemin de LŲwenberg ŗ Lauban; la route sera donc encombrťe. Sa Majestť
juge qu'il est nťcessaire que vous preniez une autre route. L'intention
de l'Empereur est aussi que vous retiriez la garnison que vous auriez ŗ
Buntzlau.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęGŲrlitz, le 24 aoŻt 1813, trois heures
et demie du matin.
ęMonsieur le duc de Raguse, je vous envoie le duplicata de l'ordre que
je vous ai adressť hier par M. de Sternberg, officier de votre
ťtat-major. Sa Majestť pense donc que vous Ítes au delŗ de Lauban. Je
vous avais dit de m'envoyer hier soir ŗ GŲrlitz un autre de vos aides de
camp pour prendre des ordres; cet officier n'a pas paru.
ęL'Empereur, monsieur le marťchal, vous ordonne de continuer votre
mouvement, de la position que vous occupez, pour en prendre une ce soir
entre GŲrlitz et Bautzen. Ayez bien soin de me faire connaÓtre oý vous
coucherez. L'Empereur sera ŗ Bautzen.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęGŲrlitz, le 24 aoŻt 1813, dix heures du matin.
ęMonsieur le marťchal duc de Raguse, l'Empereur me charge de vous faire
connaÓtre qu'il faut qu'aujourd'hui vous arriviez ŗ Reichenbach; que,
demain 25, vous dťpassiez Bautzen et alliez ŗ Bischofswerda, afin que,
le 26, vous puissiez vous porter sur le point de l'Elbe oý votre corps
d'armťe devra passer.
ęLe quartier gťnťral impťrial sera cette nuit ŗ Stolpen.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęStolpen, le 25 aoŻt 1813.
ęMonsieur le duc, je vous prťviens que nous passons demain l'Elbe ŗ
Pirna; il est donc nťcessaire que vous approchiez demain sur Stolpen
pour prendre part ŗ l'affaire et que vous puissiez vous placer de bonne
heure dans la position que vous occuperez aprŤs-demain 27. Comme nous
nous portons sur la ligne d'opťration de l'ennemi, on doit s'attendre
qu'il fera tous les efforts imaginables pour se dťgager.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 27 aoŻt 1813, huit heures du soir.
ęMonsieur le duc de Raguse, l'Empereur vous ordonne de rťunir dans la
nuit toutes vos divisions et toute votre artillerie, et de vous appuyer
au prince de la Moskowa et au marťchal Saint-Cyr. L'ennemi n'est point
en retraite, et il faut s'attendre ŗ une grande bataille pour demain. ņ
cinq heures du matin, l'Empereur sera ŗ la redoute nį 4 sur la route de
Plauen.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęAlexandre.Ľ
ę_P. S._ L'intention de l'Empereur est que, pour la journťe de demain,
chaque commandant de corps ait un quartier gťnťral fixe; il laisserait,
s'il le quittait, quelqu'un pour recevoir les ordres de Sa Majestť et
dire oý il est.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 28 aoŻt 1813, neuf heures du soir.
ęMonsieur le marťchal duc de Raguse, j'ai reÁu votre lettre de quatre
heures et demie; je l'ai mise sous les yeux de l'Empereur. Sa Majestť
n'a pour le moment aucune autre instruction ŗ vous donner que de suivre
le mouvement de l'ennemi et lui faire le plus de mal possible.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 29 aoŻt 1813, cinq heures et demie du matin.
ęMonsieur le marťchal duc de Raguse, j'ai reÁu votre rapport d'hier onze
heures du soir, et je l'ai mis sous les yeux de l'Empereur. Sa Majestť
ordonne que vous suiviez vivement l'ennemi sur Dippoldiswald et dans
toutes les directions qu'il aurait prises.
ęSa Majestť le roi de Naples se porte sur Frauenstein, afin de tomber
sur les flancs et les derriŤres de l'ennemi, et le marťchal Saint-Cyr a
l'ordre de suivre l'ennemi sur Maxen et sur toutes les directions qu'il
aurait prises.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 30 aoŻt 1813.
ęMonsieur le marťchal duc de Raguse, l'Empereur me charge de vous
prťvenir que le point difficile pour l'ennemi est _Zinnwald_, oý
l'opinion de tous les gens du pays est que son artillerie et ses bagages
ne pourront passer qu'avec une peine extrÍme; que c'est donc sur ce
point qu'il faut se rťunir et attaquer; que l'ennemi, tournť par le
gťnťral Vandamme, qui marche sur Toeplitz, se trouvera trŤs-embarrassť,
et sera probablement obligť de laisser la plus grande partie de son
matťriel.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 31 aoŻt 1813, deux heures du matin.
ęMonsieur le marťchal duc de Raguse, l'Empereur m'ordonne de vous
prťvenir qu'il est de la plus grande urgence que vous vous rapprochiez
de Dresde, avec votre corps d'armťe, par la route directe, de maniŤre ŗ
en Ítre aujourd'hui le plus prŤs possible. Le gťnťral Vandamme, avec son
corps d'armťe, a ťtť cernť, enlevť au delŗ des montagnes, s'ťtant laissť
surprendre dans des gorges, de sorte que de ce corps il n'est revenu que
trŤs-peu d'hommes, et l'ennemi s'est dťjŗ montrť entre Pirna et
Peterswald; il est donc convenable, dans cet ťtat de choses, que vous
vous rapprochiez de Dresde; votre mouvement doit se faire avec beaucoup
d'ordre et Ítre autant que possible dissimulť ŗ l'ennemi. Faites-moi
connaÓtre les positions qu'occuperont ce soir vos troupes.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 31 aoŻt 1813, cinq heures et demie du matin.
ęMonsieur le duc de Raguse, je vous ai ťcrit il y a deux heures, pour
vous dire de vous rapprocher de Dresde; depuis ce moment l'Empereur a
reÁu des nouvelles du marťchal Saint-Cyr, qui est ŗ Liebenau et ŗ
Laenstein, point sur lequel s'est ralliťe une partie du premier corps;
je vous envoie la copie de l'ordre que j'ai expťdiť au marťchal
Saint-Cyr. Conformez-vous ŗ ce qui vous regarde pour occuper les
positions sur la droite de ce marťchal. Prťvenez le duc de Bellune qu'il
doit lui-mÍme prendre position sur votre droite.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral.
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL SAINT-CYR.
ęDresde, le 31 aoŻt 1813, cinq heures et demie du matin.
ęMonsieur le marťchal Saint-Cyr, j'ai mis votre lettre sous les yeux de
l'Empereur. L'intention de Sa Majestť est que vous preniez la position
la plus avantageuse pour couvrir la route de Peterswald ŗ Dresde. Le
marťchal duc de Trťvise restera en position en avant de Pirna. _Le duc
de Raguse occupera les positions sur votre droite_ et le duc de Bellune
en occupera une sur la droite du duc de Raguse, jusqu'ŗ ce que l'on ait
vu la tournure que prendront les choses. AussitŰt que vous serez ťtabli,
il faudra faire tracer des redoutes pour assurer votre position. Envoyez
tout ce qui vous arrive du premier corps sur Pirna, pour y Ítre
rťorganisť. Vous regarderez comme non avenue la lettre que je vous ai
ťcrite il y a deux heures.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 1er septembre 1813.
ęMonsieur le marťchal duc de Raguse, l'intention de l'Empereur n'est pas
de pťnťtrer en BohÍme: cette opťration n'est pas encore dans la ligne de
sa position militaire. L'intention de Sa Majestť est que le marťchal
Saint-Cyr et le duc de Bellune soient en premiŤre ligne pour observer
les frontiŤres; l'un ayant son quartier gťnťral ŗ Pirna, l'autre l'ayant
ŗ Freyberg: que vous, monsieur le duc, le marťchal duc de Trťvise et le
corps du gťnťral Latour-Maubourg, soyez groupťs autour de Dresde, pour
former une rťserve, disposťe de maniŤre ŗ pouvoir marcher partout oý les
circonstances l'exigeraient. En consťquence des dispositions gťnťrales
ci-dessus, _l'Empereur ordonne que vous vous portiez avec votre corps
d'armťe sur Dippoldiswald, laissant des colonnes en arriŤre pour masquer
votre mouvement: il sera nťcessaire que vous vous concertiez avec le
marťchal Gouvion Saint-Cyr et avec le duc de Bellune, auxquels j'ai
prescrit les dispositions suivantes:_
ęAu marťchal Saint-Cyr: de placer son quartier gťnťral ŗ Pirna et de
prendre position, la gauche ŗ l'Elbe, couvrant les deux routes de
Peterswald et de Dohna et observant le dťfilť d'Altenbourg;
ęAu duc de Bellune: de placer successivement son quartier gťnťral dans
la direction de Freyberg, en ťchelonnant son corps de maniŤre ŗ pouvoir
se porter sur Dresde ou sur des colonnes ennemies qui dťboucheraient par
Marienberg, Sayda, ou tout autre point de cette ligne. Faites-moi
connaÓtre quand vous occuperez la position dťfinitive qui vous est
assignťe.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT ņ NAPOL…ON.
ę2 septembre 1813.
ęSire, je reÁois la lettre que Votre Majestť m'a fait l'honneur de
m'ťcrire. Je n'exťcute pas l'ordre qu'elle contient, parce que les
circonstances sont de nature ŗ en rendre l'exťcution impossible, et que,
faute apparemment de m'Ítre bien expliquť, Votre Majestť ignore le
vťritable ťtat des choses.
ęD'abord, hier soir, les ordres de Votre Majestť m'ont trouvť prŤs de
Falkenheim. La plus grande partie de mon artillerie et de mes munitions
est dťjŗ ŗ Dippoldiswald, et toute la journťe ne suffirait pas pour la
faire revenir devant l'ennemi.
ęEnsuite, comme j'avais eu l'ordre prťcťdemment de prendre position ŗ la
droite du marťchal Saint-Cyr, pour dťfendre les dťbouchťs de la BohÍme,
la premiŤre opťration que j'ai faite dans cet objet, pour soutenir la
position que j'avais prise ŗ Altenbourg, a ťtť de faire des abatis sur
toutes les communications directes, pendant l'espace de plusieurs
centaines de toises. Toute la journťe ne suffirait pas pour les
dťtruire, et cependant la chose est indispensable pour pouvoir
dťboucher.
ęQuant ŗ l'ennemi, Sire, il n'a pas immťdiatement l'attitude offensive,
et il n'y a pas eu ... de la grande chaÓne une quantitť assez
considťrable de troupes pour espťrer quelques rťsultats en cherchant ŗ
les combattre.
ęJe vais rťcapituler rapidement ce qui s'est passť depuis cinq jours,
afin que Votre Majestť puisse juger elle mÍme la situation de l'ennemi.
ęJe l'ai poussť dans sa retraite de toutes mes forces et je l'ai
combattu prŤs de Dippoldiswald, ŗ Falkenheim et ŗ Altenbourg. Il a ťtť
culbutť partout et nous lui avons pris ou forcť ŗ dťtruire environ
quatre cents voitures, la plus grande partie d'artillerie. Le jour du
combat de Zinnwald, j'ai portť une avant-garde ŗ une lieue en avant,
c'est-ŗ-dire ŗ deux lieues de Toeplitz. De Zinnwald on voit Toeplitz et
le plus ťpouvantable dťfilť que j'aie jamais vu. Le soir de ce combat
j'ai appris l'ťvťnement arrivť au gťnťral Vandamme, et, cet ťvťnement
changeant tout ŗ fait ma position, j'ai dŻ m'arrÍter, et j'ai passť le
jour suivant sur le plateau de Zinnwald, ayant toujours mon avant-garde
dans la mÍme position. Cette avant-garde fut attaquťe avant-hier par
l'ennemi; elle le battit, lui tua beaucoup de monde et conserva sa
position. L'ennemi revenant ŗ son entreprise, il ťtait facile de voir, ŗ
l'immense quantitť de feux qui se voyaient dans la plaine de Toeplitz,
qu'il y avait une grande armťe au dťbouchť. Par d'autres rapports je
suis aussi informť que des retranchements et une nombreuse artillerie
ferment ce passage.
ęAyant en l'ordre de m'appuyer sur le marťchal Saint-Cyr, je me suis
repliť hier de Zinnwald sur Altenbourg oý j'ai pris position.
ęToute la journťe d'hier a ťtť employťe ŗ faire des abatis et ŗ ťtablir
un bon systŤme dťfensif. Ayant reÁu l'ordre de mouvement sur
Dippoldiswald, je me suis mis en mesure de l'exťcuter, et mon artillerie
est partie hier au soir. Sa marche a ťtť pressťe ce matin par la lettre
que Votre Majestť m'a ťcrite hier ŗ cinq heures du soir, par laquelle
elle m'ordonne de me mettre en mesure de passer le pont de Dresde le 3,
de maniŤre que mon corps d'armťe se trouve de Falkenheim ŗ
Dippoldiswald, cinq heures aprŤs le dťpart des derniŤres troupes de
Zinnwald.
ęL'ennemi a prťsentť d'abord quelque monde, ensuite environ quatre mille
hommes, sans canons ni cavalerie. Ces troupes, je les ai vues, elles
ťtaient prŤs de moi, parce qu'un dťfilť, des bois et des marais nous
sťparaient; mes postes ne pouvant pas Ítre placťs plus avant, parce
qu'ils auraient ťtť bientŰt enlevťs. Des paysans m'ont rendu compte
(mais je ne les ai pas vus) que six mille hommes, Russes et Prussiens et
du canon, ťtaient arrivťs sur les hauteurs de Furstenau. Enfin les seuls
indices que j'aie sur les changements de projets de l'ennemi sont que
l'armťe, qui ťtait en pleine retraite sur Thiresmstadt, est revenue sur
Toeplitz et s'est placťe au pied de la montagne, et enfin que les
paysans qui arrivent de Toeplitz, oý ils avaient accompagnť les Russes,
pour leur servir de guides, disent que l'ennemi veut retourner devant
Dresde. Et je conclus de tout cela, Sire, que, si le projet existe, le
moment de l'exťcution n'est pas encore arrivť.
ęMes derniŤres troupes ont quittť Altenbourg ŗ sept heures du matin.
L'ennemi ne montre aucune intention de nous suivre. On n'a vu que deux
escadrons.
ęD'aprŤs tous ces motifs, Sire, et l'impossibilitť oý je suis d'exťcuter
vos ordres aujourd'hui, je continue mon mouvement sur Dippoldiswald.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 2 septembre 1813.
ęMon cousin, j'ai reÁu votre lettre. J'envoie mon aide de camp, le
gťnťral Flahaut, pour connaÓtre l'ťtat des choses de votre cŰtť.--Votre
correspondance est trop laconique. Faites attaquer aujourd'hui
l'avant-garde ennemie, et sachez ce que vous avez devant vous et quels
sont dťfinitivement les projets de l'ennemi. S'il a moins de trente
mille hommes, vous le culbuterez au delŗ des montagnes.--J'attends
l'issue de cette journťe pour faire des opťrations de l'autre cotť; tout
cela est donc trŤs-urgent.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 3 septembre 1813, quatre heures et demie du matin.
ęL'Empereur, monsieur le duc de Raguse, me prescrit d'envoyer un
officier auprŤs de vous pour vous faire connaÓtre que son intention est
que vous sťjourniez aujourd'hui, 3 septembre, ŗ Dippoldiswald, afin d'y
rťunir votre corps, puisqu'il paraÓt que vous avez beaucoup de
traineurs. Si l'ennemi envoie ŗ vous, Sa Majestť vous ordonne de former
une forte avant-garde pour le repousser et le culbuter.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 3 septembre 1813.
ęL'Empereur, monsieur le marťchal duc de Raguse, me charge de vous
ťcrire que, s'il n'y a pas d'inconvťnient, il serait convenable que vous
vous approchassiez aujourd'hui de Dresde, afin de passer les ponts
pendant la nuit; que nous aurons une bataille ŗ Bautzen demain au soir,
ou au plus tard le 5 au matin; que le corps du duc de Tarente est tout ŗ
fait en dťsarroi.
ęDonnez-moi de vos nouvelles.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 3 septembre 1813, onze heures.
ęMon cousin, le major gťnťral vous a fait connaÓtre qu'il faut vous
approcher de Dresde et coucher sur la rive droite, afin de partir demain
ŗ la pointe du jour.--Nous aurons probablement bataille demain en avant
de Bautzen, ou au plus tard le 5.--Dans l'un et l'autre cas, il faut que
vous y soyez comme rťserve pour prendre part ŗ l'affaire.--Prťvenez le
duc de Bellune, qui est ŗ Freyberg, et le marťchal Saint-Cyr, que vous
disparaissez de dessus la ligne.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęAu bivac, ŗ une lieue de Reichenbach, le 5 septembre 1813, midi.
ęMonsieur le duc de Raguse, l'intention de l'Empereur est que vous ne
dťpassiez pas la ville de Bautzen et que vous preniez position de
l'autre cŰtť, oý vous attendrez des ordres.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęBautzen, le 6 septembre 1813, neuf heures du matin.
ęMonsieur le duc de Raguse, l'Empereur ordonne que vous portiez,
aujourd'hui 6, votre quartier gťnťral ŗ Hoyerswerda. Vous ťchelonnerez
votre corps entre Bautzen et Hoyerswerda. Vous prendrez sous vos ordres
la brigade de cavalerie lťgŤre du gťnťral de Pirť.
ęLe cinquiŤme corps de cavalerie, commandť par le gťnťral Lhťritier, qui
est ŗ Grossenhayn, et qui est fort d'environ deux mille cinq cents
chevaux, se joindra ŗ vous et sera ťgalement sous vos ordres, ce qui
vous fera quatre mille chevaux.
ęLe gťnťral Normann a deux bataillons de votre corps et six cents
chevaux qui se sont reposťs ŗ Hoyerswerda; donnez lui l'ordre de pousser
sur-le-champ ŗ une marche sur le chemin de Lukau, afin d'ťclairer ce qui
se trouve ŗ Sonnewald et ŗ Kalau.
ęL'intention de l'Empereur, monsieur le duc, est que vous manoeuvriez
pour battre et dťtruire un corps de sept ŗ huit mille hommes
d'infanterie prussienne qu'on dit se trouver ŗ Sonnewald. Il est
nťcessaire que vous mainteniez toujours vos communications avec Bautzen
pour recevoir des nouvelles, puisque toutes les opťrations sont
subordonnťes ŗ ce que l'ennemi ferait sur Dresde.
ęVotre ligne d'opťrations doit Ítre d'Hoyerswerda sur Dresde.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LIVRE DIX-HUITI»ME
1813
SOMMAIRE.--Opťrations sur la route de Berlin.--Combat de Grossbeeren (23
aoŻt).--Retrait d'Oudinot sur Wittenberg.--Le marťchal Ney remplace le
marťchal Oudinot.--Opťrations en Silťsie sous les ordres du duc de
Tarente.--Combat de la Katzbach.--Belle dťfense de la division
Puthod.--L'Empereur se porte au secours de l'armťe de Silťsie.--Retour
de l'Empereur ŗ Dresde.--Revers du marťchal Ney en Prusse.--Retraite de
l'armťe de Silťsie sur Dresde.--Entretien du duc de Raguse avec
l'Empereur.--Opťration des diverses armťes pendant le mois de
septembre.--Manoeuvres du sixiŤme corps pour couvrir Leipzig.--L'ennemi
prend l'offensive (2 octobre).--Napolťon forcť de dťplacer le thť‚tre de
la guerre.--Conversation de l'Empereur avec Marmont.--Manoeuvres autour
de Leipzig.--Erreur de Napolťon.--Mouvement rťtrograde du sixiŤme
corps.--Bataille de Leipzig.--Journťe du 17 octobre.--Marmont
blessť.--Pertes du sixiŤme corps.--Journťe du 18 octobre.--Dťfection de
la cavalerie wurtembergeoise et de l'armťe saxonne.--Le sixiŤme corps
chargť de dťfendre Leipzig.--…vacuation de la ville.--Destruction
prťmaturťe du pont sur l'Elster.--Retraite sur Weissenfels. Les
fricotteurs.--Combat de Hanau, 30 octobre.--Entrťe ŗ Mayence, 2 novembre
1813.
Il faut maintenant rendre un compte succinct de ce qui s'ťtait passť en
Silťsie et dans la direction de Berlin. On se rappelle la passion qui
animait l'Empereur contre la Prusse, et son dťsir de se venger d'elle
sans retard. Il avait donnť l'ordre au duc de Reggio, dont l'armťe ťtait
composťe des quatriŤme, septiŤme et douziŤme corps, et du troisiŤme de
cavalerie, de marcher sur Berlin, aussitŰt aprŤs l'ouverture de la
campagne. Mais cette t‚che ťtait au-dessus de la portťe du chef qu'il
avait choisi. Oudinot, homme excellent et brave soldat, ťtait peu propre
au commandement en chef d'une armťe nombreuse. Il ne possťdait pas la
force d'esprit nťcessaire pour conduire une opťration combinťe, dont la
durťe doit embrasser plusieurs jours.
ņ l'expiration de l'armistice, Oudinot rťunit son armťe ŗ Dahme, et
s'avanÁa sur Baruth. Le 19, il prit position entre Baruth et
Lackenwald, et y sťjourna le 20. Toutes les troupes alliťes en prťsence
ťtaient ťparpillťes et cantonnťes jusqu'ŗ Berlin et Postdam. Une seule
brigade de quatre bataillons, commandťe par le gťnťral de ThŁmeu, les
couvrait contre l'armťe franÁaise. Le 21, Oudinot continua son
mouvement; le quatriŤme corps opťrant ŗ droite, se dirigeant sur
Sperenberg et Saalow; le septiŤme, au centre, par le bois de
Kummersdorf, sur Ludersdorf et Gatzdorf, vers Christinendorf, et le
douziŤme, ŗ gauche, par Goltow, ŗ ScharfenbrŁck sur Trebbin.
Les Prussiens se retirŤrent sur le dťfilť de Thyrow, aprŤs un double
combat qui mit le septiŤme corps en possession du village de Nunsdorf,
et le quatriŤme de celui de Mellen. Dans la nuit du 21 au 22, l'armťe
franÁaise ťtait placťe de la maniŤre suivante: le quatriŤme corps ŗ
Dergiscow; le septiŤme, ŗ Nunsdorf et Christinendorf, et le douziŤme, ŗ
Trebbin.
En avant de cette position, les marais ŗ traverser offrent trois
passages: 1į celui de Juhnsdorf; 2į celui de Wittstock; 3į celui de
Thyrow.
Le 22, le septiŤme corps attaqua Wittstock, et s'en empara. Le quatriŤme
s'approcha de Juhnsdorf et l'occupa aprŤs la retraite de l'ennemi. Le
douziŤme corps resta en rťserve. Le 23, le quatriŤme corps dťbouche et
marche sur Blankenfeld; mais, aprŤs une faible attaque, il se replie sur
Juhnsdorf. Au mÍme moment, et pendant que le quatriŤme corps se replie,
le septiŤme se porte en avant, dťbouche des bois, et occupe
Grossheeren. Les Prussiens, concentrťs en arriŤre de ce village, et en
ťchelons jusqu'ŗ Heimersdorf, n'hťsitŤrent pas ŗ profiler de l'occasion
que leur offrait le mouvement isolť, et en pointe, de ce corps. Ils
ťtaient devenus libres de leur mouvement sur leur gauche par la retraite
du quatriŤme corps, et sur leur droite par le retard de l'arrivťe du
douziŤme. En consťquence, ils accablŤrent le septiŤme corps, qui avait
ťtť jetť ainsi, seul et imprudemment, loin de ses appuis. Ils le
forcŤrent ŗ une retraite prťcipitťe. Heureusement la tÍte du douziŤme
corps arriva enfin au secours du septiŤme. Elle le protťgea dans sa
retraite et contribua ŗ le sauver d'un imminent pťril. Le soir, toute
l'armťe franÁaise se trouva ainsi reportťe en arriŤre des dťfilťs, et
couverte par les marais qu'elle avait franchis pour attaquer.
DŤs ce moment, le duc de Reggio mit son armťe en retraite, se
rapprochant de l'Elbe par des mouvements successifs. Il vint prendre
position ŗ peu de distance, en avant de Wittenberg, oý il arriva le 4
septembre. Le combat de Grossbeeren n'avait coŻtť ŗ l'armťe franÁaise
qu'une perte de treize piŤces de canon, et quinze cents prisonniers
saxons, c'est-ŗ-dire peu de chose pour une armťe de plus de quatre-vingt
mille hommes. C'ťtait s'avouer, ŗ bon marchť, incapable de tenir la
campagne.
L'armťe ennemie, composťe en trŤs-grande majoritť de Prussiens, ťtait
commandťe par les gťnťraux Bulow, Fauentzien, Woronzoff et Czernicheff,
sous les ordres du prince royal de SuŤde. Sa force pouvait s'ťlever ŗ
cent mille hommes. Elle ťtait remplie de cet enthousiasme national qui,
pendant cette guerre, caractťrisa d'une maniŤre particuliŤre les
troupes prussiennes. L'armťe franÁaise ťtait infťrieure de dix mille
hommes. Composťe en partie de Saxons et d'Italiens, elle ťtait loin de
possťder le mÍme esprit. Cependant, si, au dťbut de la campagne, Oudinot
eŻt agi avec plus de vigueur et de cťlťritť, il eŻt surpris l'ennemi
dispersť pour vivre. Il aurait pu le battre en dťtail et arriver ŗ
Berlin; mais l'incertitude et l'incorrection des mouvements prťsidŤrent
aux premiŤres opťrations.
Napolťon, mťcontent d'un semblable rťsultat, confia cette armťe ŗ un
autre chef, qui eut l'ordre d'attaquer l'ennemi sans retard. Le marťchal
Ney, chargť de remplacer le marťchal Oudinot, exťcuta cet ordre de
marcher en avant; mais il le fit d'une maniŤre inconsidťrťe. Un homme
raisonnable ne peut trouver l'explication satisfaisante des mouvements
qu'il ordonna. Oudinot avait pťchť par un peu de timiditť et
d'incertitude; mais au moins il avait agi avec calcul et prudence; son
armťe ťtait encore intacte quand il la quitta. En peu de jours, il en
fut tout autrement sous son nouveau chef.
Pendant ces ťvťnements, la grande armťe ennemie, battue devant Dresde,
s'ťtait retirťe en BohÍme, aprŤs avoir ťchappť, par le succŤs inopinť de
Culm, ŗ une destruction qui semblait devoir Ítre certaine; mais, en mÍme
temps, l'armťe de Silťsie, dont il me reste ŗ parler, ťprouvait un de
ces grands revers dont la sťrie ne devait plus Ítre interrompue pendant
le reste de la campagne.
Napolťon, en quittant la Silťsie, et en partant le 24 pour Dresde, avait
laissť le commandement de l'armťe franÁaise au marťchal duc de Tarente.
Cette armťe, diminuťe du sixiŤme corps que Napolťon emmenait avec lui,
restait composťe des troisiŤme, cinquiŤme et onziŤme corps d'armťe, et
du deuxiŤme corps de cavalerie. Elle s'ťlevait ŗ quatre-vingt mille
hommes environ. Rťunis autour de Goldsberg, les troisiŤme et cinquiŤme
corps ťtaient en avant de cette ville; le onziŤme, et la cavalerie du
gťnťral Sťbastiani, en arriŤre.
Le gťnťral BlŁcher se dťcida ŗ reprendre sur-le-champ l'offensive, et,
dŤs le 25, il mit ses colonnes en mouvement. Le corps de Langeron fut
dirigť sur Goldsberg pour observer l'armťe franÁaise; celui de York
resta ŗ Jauer, et celui du gťnťral Sacken marcha sur Malitsch, dans la
direction de Liegnitz. De son cŰtť, le duc de Tarente, rťsolu d'attaquer
l'ennemi qu'il supposait toujours rťuni ŗ Jauer, mit en marche ses corps
d'armťe de la maniŤre suivante: le cinquiŤme corps eut l'ordre de se
porter en avant par Hennersdorf, ŗ l'exception de la division Puthod,
qui reÁut celui de marcher sur SchŲnau, et de lŗ sur Jauer. Le troisiŤme
corps dut passer la Katzbach, prŤs de Liegnitz, et suivre la grande
route par Neudorf et Malitsch. Le onziŤme corps eut pour instruction de
passer au guť de Schmogwitz et de remonter la rive droite de la
WŁthende-Neisse par Brechelshof. Enfin la cavalerie de Sťbastiani reÁut
l'ordre de passer par Kroitsch et Nieder-Crayn, en suivant la rive
gauche de la WŁthende-Neisse.
Tous ces mouvements eurent lieu le 26. Or, ce jour-lŗ mÍme, l'armťe de
BlŁcher continuait son mouvement offensif. Sacken et York devaient
passer la Katzbach au-dessus de Liegnitz, et attaquer ainsi la gauche de
l'armťe franÁaise en la tournant. Une pluie ťpouvantable, qui tombait
depuis plusieurs jours, avait grossi les riviŤres et les ruisseaux, et
en avait fait dťborder plusieurs. Enfin le temps ťtait obscur et les
mouvements incertains. Le onziŤme corps, aprŤs avoir passť la Katzbach,
se trouva inopinťment en face des corps de Sacken, marchant dans la
direction de Eichholtz, et de York, occupant les hauteurs de
Bellwitzhof. Le corps de Langeron ťtait attaquť, de son cŰtť, par le
cinquiŤme corps, qui dťbouchait de Goldsberg. En ce moment, le troisiŤme
corps, ayant reÁu ses ordres de mouvement trop tard, se trouvait en
arriŤre. Voulant rťparer le temps perdu, il se dirigea sur le guť de
Kroitsch pour y passer la riviŤre; mais sa marche se trouva contrariťe
par le mouvement de la cavalerie, dont la direction croisait la sienne,
et il y eut un grand encombrement et une grande lenteur dans le
mouvement, causť par cette rencontre au village de Kroitsch. La gauche
du onziŤme corps, se trouvant ainsi sans appui, l'ennemi se h‚ta de la
tourner par une nombreuse cavalerie. Elle fut ainsi vivement pressťe,
tandis que la division Horn, la division du prince de Mecklembourg du
corps de York, et la division de Hunneberg, en face de Schlaupe,
observaient l'autre rive de la WŁthende-Neisse. La gauche du onziŤme
corps ne put Ítre que faiblement soutenue par la cavalerie, qui, d'abord
arrÍtťe, ainsi que je l'ai dit, par la rencontre du troisiŤme corps, et
ensuite par le dťfilť de Nieder-Crayn, oý tout se trouvait pÍle-mÍle,
arrivait seulement par dťtachement et ne pouvait agir que par des
efforts partiels et impuissants. ņ la nuit, le onziŤme corps fut obligť
de cťder ŗ la fois de tous les cŰtťs. Une seule division du troisiŤme
corps avait pu entrer en ligne. Il se trouva ainsi que le duc de Tarente
n'avait opposť que trente-deux mille combattants ŗ l'ennemi, qui lui en
avait prťsentť plus de cinquante mille. Une division du troisiŤme corps,
dťbouchant par Nieder-Crayn, voulut arrÍter la poursuite; mais elle fut
culbutťe par les Prussiens, qui s'emparŤrent du dťfilť, prirent le parc
d'artillerie du onziŤme corps et tous ses bagages.
Le duc de Tarente, n'ayant d'autre retraite que sur la Katzbach, et le
guť de Schmogwitz, fit rťtrograder les deux divisions du troisiŤme corps
qui n'avaient pu entrer en ligne. Elles passŤrent ce guť et gravirent
les hauteurs au pied desquelles coule la Katzbach, pendant que le
onziŤme corps, acculť ŗ la riviŤre, soutenait un combat inťgal.
Pendant la nuit, tout le reste de l'armťe repassa la Katzbach. La gauche
se rallia ŗ Liegnitz et se retira sur Buntzlau. Le cinquiŤme corps,
attaquť le 27 devant Goldsberg par le corps de Langeron, fut forcť ŗ la
retraite. Dťpourvu de cavalerie pour protťger son mouvement, il perdit
dix-huit piŤces de canon. Il arriva le soir ŗ la hauteur de LŲwenberg.
Le 28, il repassa le Bober ŗ Buntzlau avec les troisiŤme et onziŤme
corps. Les pluies avaient tellement enflť cette riviŤre, que ce point
ťtait le seul oý il fŻt possible de la franchir.
Dans les dispositions offensives faites par le duc de Tarente, la
division Puthod, du cinquiŤme corps, avait ťtť dirigťe, comme nous
l'avons vu, sur SchŲnau, d'oý elle devait marcher sur Jauer pour se
rťunir ŗ l'armťe. Elle se trouvait ŗ Molkau pendant la bataille de la
Katzbach. Quelque diligence qu'elle fit, elle ne put arriver ŗ temps
pour se rťunir ŗ son corps d'armťe ŗ Goldsberg, et, celui-ci forcť ŗ la
retraite, elle se trouva abandonnťe. Le gťnťral Puthod se retira sur
Hirschberg; mais, le pont ťtant rompu, et le Bober trop fort pour qu'on
pŻt le rťtablir, il descendit la riviŤre et arriva ŗ LŲwenberg le 29. Il
y fit des efforts inutiles pour rťtablir le pont. Suivi par le corps de
Langeron, et ne pouvant se rendre ŗ Buntzlau, oý il avait ťtť prťvenu
par le gťnťral Radrewicz et la cavalerie du gťnťral Koeff, le gťnťral
Puthod se trouva enveloppť de toutes parts. Il prit la rťsolution
gťnťreuse de combattre jusqu'ŗ extinction. Il s'ťtablit sur les hauteurs
de Plagwitz, en avant de LŲwenberg, et attendit l'ennemi de pied ferme.
Attaquť par deux divisions d'infanterie et une de cavalerie, il
succomba, aprŤs avoir fait une dťfense opini‚tre. Cette courte campagne
de cinq jours coŻta ŗ l'armťe franÁaise dix mille hommes tuťs ou blessťs
et quinze mille prisonniers.
Il est difficile de concevoir une opťration plus mal conÁue et plus mal
conduite. La division des forces et leur ťparpillement eurent lieu sans
motif raisonnable. La marche en avant fut exťcutťe sans prudence et
sans connaÓtre les dispositions de l'ennemi. Cette offensive, prise sur
un si grand front, et particuliŤrement ŗ gauche, au lieu de l'appuyer ŗ
la droite, par oý ťtait la communication la plus courte et la plus
directe avec Dresde, seul point de retraite de l'armťe, est une de ces
fautes qui paraissent incontestables. Le retard apportť dans les ordres
donnťs au troisiŤme corps, et le croisement des colonnes, rťsultat d'une
fausse direction, expliquent suffisamment la catastrophe.
Ce revers, avec l'ťvťnement funeste de Culm, dťcidŤrent du sort de la
campagne. Le marťchal Macdonald, homme de courage, dont le caractŤre
droit et honorable mťrite l'estime et l'affection de tous ceux qui le
connaissent, n'aurait jamais dŻ Ítre chargť d'un semblable commandement;
sa capacitť, fort mťdiocre, le rend peu propre ŗ un grand commandement.
Le temps s'ťcoule avec lui en vaines paroles. Il a cette activitť
malheureuse de certains hommes qui se laissent absorber dans les
circonstances les plus importantes par les dťtails les plus minutieux. ņ
l'armťe, il ťcrit lui-mÍme les lettres relatives au service. Cette seule
circonstance le fait connaÓtre. Aussi aucune disposition ne fut-elle
prise ŗ temps et ŗ propos. La confusion rťgna partout, et l'armťe,
diminuťe d'un tiers, perdit en outre la confiance qui, jusque-lŗ,
l'avait animťe.
D'un autre cŰtť, il est ťtrange que, dans son offensive, BlŁcher ne se
soit pas appuyť aux montagnes de BohÍme, et n'ait pas agi
particuliŤrement par sa gauche. S'il eŻt manoeuvrť de maniŤre ŗ arriver,
aprŤs un succŤs, avant l'armťe franÁaise ŗ LŲwenberg, il ťtait maÓtre de
la communication la plus courte avec Dresde, et il pouvait rendre sa
retraite plus difficile et plus pťrilleuse.
L'Empereur partit de Dresde, le 3 septembre, avec sa garde et mon corps
d'armťe. S'il eŻt employť les quatre jours qui venaient de s'ťcouler ŗ
complťter ses succŤs dans la poursuite de la grande armťe, il eŻt ťtť le
maÓtre des ťvťnements. Il eŻt pu rťparer sans peine les malheurs arrivťs
en Silťsie. Toute compensation faite, il lui restait encore de grands
avantages; mais le malheur de Vandamme et le dťsastre de Silťsie firent
une masse de maux trop grande pour pouvoir rťtablir l'ťquilibre, surtout
aprŤs le parti pris par les ennemis d'ťviter dorťnavant de combattre
Napolťon en personne, et de se contenter de le harceler, de le fatiguer,
et d'user ses troupes par des marches, jusqu'au moment oý la diminution
de ses forces mettrait entre les deux armťes une telle disproportion,
qu'il n'y aurait plus aucune incertitude dans le succŤs et le rťsultat
de la lutte.
Le 4, Napolťon, aprŤs avoir dťpassť Bautzen, rencontra le duc de Tarente
se disposant ŗ ťvacuer les positions de Hohenkirchen, et ŗ repasser la
Sprťe. Il l'arrÍta, lui ordonna de se reporter en avant. L'avant-garde
ennemie fut culbutťe et se dirigea en arriŤre de Lauban.
Le 5, l'Empereur porta la majeure partie de ses forces sur Reichenbach.
L'ennemi se replia sur GŲrlitz, et se plaÁa derriŤre la Neisse ŗ Lauban.
Autant par suite du systŤme dont j'ai rendu compte plus haut qu'ŗ cause
de l'arrivťe prochaine de l'armťe de Benningsen, puissant renfort, on
devait s'attendre ŗ voir BlŁcher se retirer plus loin si l'Empereur
passait la Neisse. En consťquence, toute offensive de ce cŰtť devant
Ítre sans rťsultat, et pouvant mÍme avoir des consťquences funestes ŗ
cause du mouvement de la grande armťe alliťe sur Dresde, Napolťon quitta
l'armťe de Silťsie le 8. Il la laissa en position ŗ Hohenkirchen, aprŤs
lui avoir donnť pour renfort le huitiŤme corps. Ce secours rťparait en
partie ses pertes, et la portait ŗ une force d'environ soixante-dix
mille hommes. Le duc de Tarente, au lieu de faire des dťmonstrations
pour en imposer ŗ l'ennemi, se tint tranquille, et annonÁa ainsi ŗ
BlŁcher le dťpart de Napolťon. DŤs lors le gťnťral prussien se disposa
ŗ reprendre l'offensive.
Je reÁus en mÍme temps l'ordre de me rendre ŗ Camenz afin d'Ítre, tout ŗ
la fois, ŗ portťe de l'Elster-Noir et de Lukau. Je devais Ítre ainsi en
mesure, suivant les circonstances, de faire une diversion en faveur du
prince de la Moskowa, ou bien de me rendre ŗ Dresde. Le 8, je me portai
ŗ Hoyerswerda, et je dirigeai une forte avant-garde sur Senftenberg et
des coureurs dans la direction de Lukau. En mÍme temps j'avais donnť
l'ordre au cinquiŤme corps de cavalerie, commandť par le gťnťral
Lhťritier, mis ŗ ma disposition, de partir de Grossenhayn pour Roulau,
afin de m'appuyer; mais dans la nuit je reÁus l'ordre de me rapprocher
de Dresde ŗ marches forcťes. Le 9, j'arrivai ŗ Ottendorf, et, le 10, ŗ
Dresde, oý je m'arrÍtai. J'occupai la ville et le camp retranchť. Je pus
enfin faire reposer mes troupes. Mon corps d'armťe avait marchť, pendant
vingt-deux jours, sans un seul sťjour, livrť un assez grand nombre de
combats, et fait souvent des marches de douze lieues; mais il ťtait bien
organisť. L'esprit en ťtait admirable. ņ l'exception des blessťs, un
trŤs-petit nombre d'hommes seulement se trouvaient en arriŤre. Il ne
manquait pas une piŤce de canon, ni une voiture d'artillerie ou
d'ťquipages.
L'Empereur avait ťtť rappelť ŗ Dresde par les mouvements offensifs du
prince de Schwarzenberg. En effet, l'avant-garde de Wittgenstein s'ťtait
avancťe, le 5, ŗ Peterswald, et le 6, ŗ BerggieshŁbel, avec la division
prussienne de Ziethen. Le prince EugŤne de Wurtemberg, avec la
cavalerie de Pahlen, dťbouchait sur Dippoldiswald, tandis que le
gťnťral Klenau s'avanÁait vers Chemnitz. Le prince de Schwarzenberg,
avec les corps autrichiens de Colloredo, Chasteler, Giulay et les
rťserves, avait pris la direction d'Aussig, pour y passer l'Elbe, et
manoeuvrer sur la rive droite. Le 7, Wittgenstein occupa Pirna, et, le
8, se porta vers Dohna oý ťtaient rťunis les premier, deuxiŤme et
quatorziŤme corps.
L'Empereur, de retour, le 7, ŗ Dresde, se rendit, le 8, au camp de
Dohna. L'avant-garde de Wittgenstein fut culbutťe. Ce gťnťral se replia
sur Pirna. Le mÍme jour, le prince de Schwarzenberg, en plein mouvement,
fut instruit de la prťsence de Napolťon. Il se retira aussitŰt, et vint
prendre la position qu'il avait choisie en avant de Toeplitz. Le 9,
Napolťon porta la plus grande partie de ses forces sur Liebenthal. Ce
mouvement menaÁant de tourner le corps de Wittgenstein, celui-ci se
retira sur Nollendorf, oý il fut joint par le corps de Kleist. Les
troupes aux ordres de Klenau se rapprochŤrent de Toeplitz, et vinrent
prendre position au Sebastiansberg.
Le 10, Napolťon vint ŗ Baremberg. Le premier corps marcha sur
Peterswald, et le quatorziŤme sur FŁrstenwald. Le gťnťral Wittgenstein
se replia sur Culm. Le 11, il s'avanÁa de FŁrstenwald vers le dťfilť du
Geyersberg. La division du quatorziŤme corps, commandťe par le gťnťral
Bonnet, s'empara de la montagne; mais la difficultť du terrain empÍcha
d'y conduire de l'artillerie. Les obstacles pour dťboucher, en prťsence
de l'ennemi, dans une position inexpugnable, paraissant insurmontables,
Napolťon renonÁa ŗ l'attaquer, et se dťcida ŗ retourner ŗ Dresde. Il
laissa le premier corps en position ŗ Nollendorf, le quatorziŤme sur les
hauteurs de Berna, en avant d'Ebersdorf. Le deuxiŤme alla occuper
Steinberg, et la jeune garde le camp de Pirna. L'Empereur dut sentir
bien vivement alors la faute commise, il y avait onze jours, de n'avoir
pas complťtť ses succŤs de Dresde par un mouvement ŗ fond sur l'armťe
ennemie, au moment oý elle repassait ces mÍmes dťfilťs dans un dťsordre
incompatible avec une rťsistance sťrieuse.
Mais, pendant ces mouvements, de nouveaux dťsastres venaient accabler la
portion de l'armťe franÁaise qui avait reÁu l'ordre de marcher sur
Berlin. On a vu, le 4, le prince de la Moskowa remplacer le marťchal duc
de Reggio, et prendre le commandement de l'armťe. DŤs le lendemain, 5
septembre, il ťtait en mouvement. La division Guilleminot, en tÍte du
douziŤme corps, attaqua la division prussienne de Dobschutz, et la
chassa de Zaahn. Plus tard, le corps de Tauenzien fut attaquť ŗ Seida,
et forcť ŗ se retirer sur Dennewitz, oý il prit position. Le soir,
l'armťe franÁaise occupait les positions suivantes: le quatriŤme corps
ŗ Neundorf, le douziŤme ŗ Seida, et le septiŤme entre les deux. L'armťe
ennemie ťtait ainsi placťe: Tauenzien ŗ Dennewitz, Bulow ŗ
Klein-Lippsdorf, les Suťdois et les troupes russes, sous les ordres du
prince royal de SuŤde, sur les hauteurs de Lobez. Dans ces dispositions
respectives, le prince de la Moskowa eut l'ťtrange idťe de porter son
armťe sur Dahme pour prendre la route de Berlin, et de marcher
directement sur cette ville. En consťquence, le 6, au matin, il continua
son mouvement. Le quatriŤme corps fut chargť de s'emparer de Dennewitz,
et de couvrir la marche de flanc qu'il opťrait avec le reste de l'armťe.
L'ennemi rťsista ŗ cette attaque, perdit Dennewitz; mais se soutint avec
opini‚tretť en avant de Interburg. Pendant que Tauenzien ťtait ainsi aux
prises avec le quatriŤme corps, Bulow, qui d'abord avait pris position
en avant d'Eckmannsdorf, dťbouchait par Wolmsdorf en arriŤre de l'armťe
franÁaise. Le septiŤme corps fut alors obligť de prendre part au combat,
et vint se former prŤs de Niedergorsdorf. L'armťe franÁaise ťtait
attaquťe de front, de flanc, et ŗ revers. Le douziŤme corps vint donc
occuper le village de Goldsdorf, sur lequel tout le corps de Bulow ťtait
dirigť. AprŤs diverses alternatives de bons et de mauvais succŤs,
l'armťe se concentra prŤs de Rohrbeck. Les Saxons, placťs au centre,
ayant l‚chť pied, les deux corps franÁais se trouvŤrent sťparťs, et
forcťs ŗ une retraite divergente. Celui de droite, le quatriŤme, se
retira sur Dahme. Le douziŤme suivit la route que les fuyards avaient
prise, par Schweidnitz, dans la direction de Torgau.
Cette opťration, si singuliŤre, si absurde, ne peut s'expliquer.
Exťcuter une marche de flanc, en plein jour, aussi longue et aussi ŗ
portťe d'une armťe supťrieure en forces, ťtait l'opťration la plus
dangereuse et la plus imprudente, et dans quel objet? pour arriver avant
l'ennemi sur la route de Berlin et marcher sur cette ville. Mais, en
supposant, ce qui paraÓt impossible, cette marche exťcutťe avec un
succŤs complet, ŗ quoi aboutissait-elle? ņ placer l'armťe ennemie sur le
flanc et sur les derriŤres de l'armťe franÁaise, ce qui aurait mis
celle-ci dans le pťril le plus ťvident, et l'aurait, en dťfinitive,
empÍchť de marcher sur Berlin. Si l'armťe franÁaise ťtait en ťtat de
prendre l'offensive, elle ne pouvait pas espťrer de se rendre ŗ la
dťrobťe ŗ Berlin. Il fallait qu'elle se rťsolŻt ŗ livrer bataille. DŤs
lors, elle n'avait autre chose ŗ faire que de marcher brusquement et
rapidement par la route directe, et, aprŤs avoir enlevť Zaahn, se
dirigeant sur Treuenbrietzen et Belitz, empÍcher la rťunion des corps
ennemis qui ťtaient ŗ une certaine distance les uns des autres, les
battre en dťtail, aprŤs s'Ítre placťe ainsi au milieu d'eux. On croit
rÍver quand on approfondit les combinaisons qui furent faites alors et
la maniŤre dont on opťra.
Le lendemain, 7, le douziŤme corps et les Saxons continuŤrent leur
mouvement sur Torgau. Le quatriŤme corps, attaquť ŗ Dahme par une
division de quatre mille Prussiens, commandťe par le gťnťral Woheser, se
mit ťgalement en marche pour Torgau, aprŤs avoir rompu les ponts de
l'Elster. Le 8, il rejoignit le reste de l'armťe sous le canon de
Torgau. Cette opťration coŻta ŗ l'armťe franÁaise douze mille hommes
tuťs, blesses, ou pris, et vingt-cinq piŤces de canon.
Ainsi, chaque jour, l'ťdifice de notre puissance s'ťcroulait pour ne
plus se relever. Pendant que Napolťon ťtait accouru ŗ Dresde et avait
marchť sur la frontiŤre de BohÍme, l'armťe ennemie de Silťsie avait
repris l'offensive. DŤs le 9, elle s'ťtait mise en mouvement. Le corps
de Langeron passa la Neisse ŗ Ostritz, au-dessus de GŲrlitz: celui de
York entre Ostritz et GŲrlitz, et celui de Sacken, ŗ GŲrlitz mÍme.
L'avant-garde franÁaise se retira des bords de la Neisse sur Reichenbach
sans s'Ítre engagťe, et de lŗ sur Hohenkirchen. Le corps de Poniatowski,
attaquť par celui de Langeron a Lauban, se retira sur Neustadt.
L'armťe alliťe fut rejointe, ce jour-lŗ, par la division autrichienne de
Bubna. Le 10, le duc de Tarente quitta la position de Hohenkirchen pour
repasser la Sprťe. Le 6, il ťtait ŗ Gordau, n'ayant plus que des
avant-postes sur la Sprťe. Enfin, le 12, le duc de Tarente se replia sur
Bischofswerda, et le huitiŤme corps vint de Neustadt ŗ Stolpen. Le
rapprochement de notre armťe de Silťsie ŗ une petite marche de Dresde,
sans avoir livrť un seul combat, opťrť en mÍme temps que la perte de la
bataille de Dennewitz, favorisait la rťunion des trois armťes qui nous
entouraient. Elles pouvaient alors, ŗ volontť, agir d'une maniŤre
simultanťe.
Je restai ŗ Dresde jusqu'au 12 inclus. Pendant mon sťjour, je vis
beaucoup Napolťon. Dans la nuit du 12 au 13, je passai au moins trois
heures avec lui ŗ causer de la campagne. Il se livrait volontiers, avec
moi, ŗ la discussion de ses projets, et ŗ l'examen des ťvťnements
ťcoulťs. Il n'ťtait pas tranquille sur son issue, quoiqu'il affect‚t de
la confiance. Il se plaignait de ses lieutenants, et il avait raison;
mais pourquoi avait-il sťparť ses forces, et disposť son plan de
campagne de maniŤre ŗ rendre indispensable de confier de grands
commandements ŗ une grande distance de lui, ŗ des hommes incapables de
les exercer? Et puis, n'avait-il pas eu d'autres choix ŗ faire?
Saint-Cyr, un des premiers gťnťraux de l'Europe, pour la guerre
dťfensive, n'ťtait-il pas merveilleusement propre ŗ commander l'armťe de
Silťsie, destinťe ŗ couvrir, par sa position, les autres armťes, et ŗ
garder seulement le terrain qu'elle occupait? Il n'ťtait pas ancien
marťchal, il est vrai; mais, puisqu'il avait laissť ŗ Macdonald des
corps commandťs seulement par des officiers gťnťraux, il pouvait en
faire autant pour Saint-Cyr, et, dŤs lors, il n'y avait plus de
difficultťs. Si les inconvťnients du plan de campagne vicieux et les
mauvais choix avaient amenť tous les maux actuels, quel ťtait le
coupable? Je lui exprimai cette pensťe avec modťration et rťserve; mais
il n'ťtait pas au bout de ses erreurs et au moment de rťparer ses
fautes. Il me dit que, probablement, la guerre allait changer de
thť‚tre, et serait forcťment portťe plus en arriŤre; que les ennemis
tenteraient sans doute le passage de l'Elbe avec les deux armťes de
Silťsie et du Nord rťunies; qu'alors il devait manoeuvrer de maniŤre ŗ
empÍcher leur jonction avec la grande armťe; qu'il devenait
indispensable de nettoyer ces pays des corps qui les parcouraient, et
menaÁaient nos ťtablissements et nos communications, et que je
commencerais le mouvement. Enfin, quand je le quittai, il me dit ces
propres paroles: ęL'ťchiquier est bien embrouillť; il n'y a que moi qui
puisse s'y reconnaÓtre.Ľ Hťlas! c'est lui-mÍme qui s'est perdu dans ce
labyrinthe!
Le 13, je partis avec mon corps pour Grossenhayn. Lŗ, je me rťunis au
roi de Naples, que j'y trouvai avec un corps nombreux de cavalerie. Le
but de ce mouvement ťtait de couvrir l'arrivťe ŗ Dresde de vingt mille
quintaux de farine, arrÍtťs ŗ Torgau et embarquťs sur l'Elbe. Les
dispositions de troupes convenables ŗ ce but furent faites, et le convoi
arriva heureusement ŗ Dresde. Nous rest‚mes jusqu'au 25 dans cette
position.
Je vis journellement et familiŤrement Murat. Je le retrouvai bon
camarade et sans prťtention. Il se mit en frais d'amitiť pour moi. Je
payai cette bienveillance par la complaisance avec laquelle j'ťcoutai,
chaque jour, les rťcits qui concernaient ses …tats. Il me parlait
souvent surtout de l'amour que lui portaient ses sujets. Il y avait dans
son langage une candeur risible, une conviction profonde d'Ítre
nťcessaire ŗ leur bonheur. Entre autres choses, il me raconta que,
lorsqu'il devait quitter Naples en dernier lieu (et c'ťtait une chose
secrŤte), se promenant avec la reine, et entendant les acclamations dont
il ťtait l'objet, il dit ŗ sa femme: ęOh! les pauvres gens! Ils ne
savent pas le malheur qui les attend. Ils ignorent que je vais partir!Ľ
J'ťcoutai en souriant; mais lui, en faisant ce rťcit, ťtait encore
attendri des douleurs dont il avait ťtť la cause.
Cette rťunion de troupes ŗ Grossenhayn dťtermina BlŁcher ŗ renforcer sa
droite et ŗ porter le corps de Sacken ŗ Kamens. Ce mouvement dťcida le
duc de Tarente ŗ se rapprocher encore davantage de Dresde, et ŗ prendre
position ŗ Harta. Les avant-postes de l'armťe de Berlin ťtaient ťtablis
sur l'Elster noir. Pendant notre sťjour ŗ Grossenhayn, la grande armťe
recommenÁait des dťmonstrations offensives. L'ennemi se porta en avant
et fit replier les corps franÁais occupant les diffťrents dťbouchťs.
Napolťon partit le 15 de Dresde avec sa garde, et vint ŗ BerggieshŁbel;
mais la disposition gťnťrale de l'armťe ennemie ťtait toute dťfensive,
et la masse de ses troupes, placťe dans le bassin de Toeplitz, en face
des dťbouchťs, occupait une position inexpugnable.
Le 16 au matin, le prince de Schwarzenberg avait ses troupes placťes de
la maniŤre suivante: le corps de Wittgenstein ŗ Peterswald; la division
Czenneville ŗ Eichwald, sur la route de Zinnwald; celle du prince
Maurice Liechtenstein, ŗ Klostergraben; une avant-garde sous les ordres
du gťnťral Longueville en avant d'Aussig, sur la route d'Eule; le corps
de Kleist ŗ Mariaschein; les grenadiers et les cuirassiers russes ŗ
Sabachleben; les gardes russe et prussienne ŗ Toeplitz; le corps de
Colloredo ŗ Culm; celui de Meervelt ŗ Aussig; celui de Giulay ŗ Brunn;
celui de Klenau ŗ Marienwerder, et les rťserves de cavalerie ŗ Breslau.
ņ midi, Napolťon continua son mouvement en avant. Le corps de
Wittgenstein se replia sur Culm. La division Ziethen fut portťe dans des
abatis qui avaient ťtť faits entre Tellenitz et Jutterbach. Le corps de
Colloredo ťtait appuyť ŗ droite ŗ Strekowitz. Napolťon occupa le soir
les hauteurs de Nollendorf.
Le 17, la division Ziethen, attaquťe par la division Mouton-Duvernet, du
premier corps, fut poussťe sur Culm. Le combat s'engagea alors avec le
corps de Wittgenstein. Les villages d'Arbesau, d'Islisich, de Jourdorf,
furent emportťs; mais le corps de Meervelt s'avanÁa d'Aussig sur
Nollendorf, tandis que celui de Colloredo s'avanÁait sur Neudorf et
Kniemts. Il attaqua Arbesau, qui fut ťvacuť. La jeune garde, qui
l'occupait, en fut chassťe aprŤs avoir fait des pertes considťrables, et
le premier corps se retira sur Nollendorf. Napolťon, voyant
l'impossibilitť de dťboucher devant des forces aussi considťrables,
ramena ses troupes en avant de BerggieshŁbel, et rentra avec sa garde ŗ
Dresde le 18. Ce mouvement, recommencť pour la troisiŤme fois, et
fatigant pour les troupes, avait ťtť encore sans rťsultat.
Le prince de Schwarzenberg attendait pour agir que le corps de
Benningsen, fort de soixante mille hommes, qui, dŤs le 17, avait sa tÍte
ŗ LŲwenberg, fŻt rapprochť davantage de Dresde.
Napolťon voulut tenter de nouveau la fortune, et essaya d'ťloigner
BlŁcher. Il se rendit le 22 ŗ Hatzan, et mit en mouvement les troisiŤme,
cinquiŤme et onziŤme corps. L'avant-garde de Radrewitch fut attaquťe ŗ
Bischofswerda. Forcťe d'ťvacuer cette ville, elle se retira jusqu'ŗ
Gordau; mais Napolťon, ayant vu toute l'armťe de Silťsie en position ŗ
Bautzen, tandis que le corps de Sacken s'approchait sur sa gauche pour
menacer la communication de Bischofswerda, ne se trouvant pas assez fort
pour livrer bataille, se retira et ramena les troupes dans la position
concentrťe de Weissig, ŗ deux lieues de Dresde. Il s'en tint encore ŗ
une simple dťmonstration.
Le 24 et le 25, l'armťe de Silťsie, remplacťe dans ses positions par
l'armťe de Benningsen, fit un mouvement gťnťral par sa droite pour se
rapprocher de l'Elbe et de l'armťe du Nord. Le corps de Tauentzien,
appartenant ŗ cette derniŤre armťe, occupait dťjŗ, depuis quelque temps,
une position intermťdiaire entre les deux armťes et en ťtablissait la
liaison. Le corps de Sacken se prťsenta devant Grossenhayn pour couvrir
ce mouvement. Le roi de Naples ťtait retournť ŗ Dresde, et j'avais sous
mes ordres, outre le sixiŤme corps d'armťe, les premier et cinquiŤme
corps de cavalerie. Le 25 au soir, je reÁus l'ordre de repasser l'Elbe ŗ
Meisson et de me porter sur Wurtzen et Eulenbourg.
Le 26 au matin, je pris position sur les hauteurs de Wanterwitz,
position formidable oý j'ťtais en mesure de rťsister ŗ des forces
supťrieures. J'avais laissť une forte arriŤre-garde, composťe de la plus
grande partie du cinquiŤme corps de cavalerie. Celle-ci fut attaquťe par
une grande masse de Cosaques appartenant ŗ l'armťe de Silťsie. Elle fut
mise dans un grand dťsordre. Le gťnťral Lhťritier, son commandant,
s'ťtait fait une bonne rťputation comme colonel: mais il n'avait pas
assez de tÍte pour commander des forces considťrables. Les dťfilťs en
arriŤre ťtant fort mauvais, il devenait important de ne pas laisser
l'ennemi trop prŤs de nous pendant notre marche. Je reportai cette
cavalerie en avant, aprŤs l'avoir ralliťe moi-mÍme, sans autre secours
que ma seule prťsence et quelques mots adressťs aux premiers fuyards.
Nous rest‚mes en repos le reste de la journťe. Le 27, mon arriŤre-garde
repassa l'Elbe. L'ennemi, ayant suivi immťdiatement, voulut tenter un
coup de main sur la tÍte de pont, mais il fut vaillamment repoussť par
le 10e provisoire, composť d'un bataillon des 11e et 16e de ligne. Je
laissai le gťnťral Cohorn, avec sa brigade, pour garder ce poste
important, jusqu'ŗ ce qu'il fŻt relevť par des troupes appartenant ŗ un
autre corps, et je me mis en roule par Oschatz, Wurtzen et Eulenbourg.
Pour expliquer ce qui va suivre, il faut maintenant que je fasse
connaÓtre la position du prince de la Moskowa. AprŤs la dťfaite de
Dennewitz, le prince de la Moskowa avait repassť l'Elbe ŗ Torgau. Il
avait rťorganisť son armťe. Le douziŤme corps avait ťtť dissous, et la
division bavaroise, qui s'y trouvait, envoyťe ŗ Dresde. Le restant des
troupes, rťuni ŗ la division Guilleminot, avait ťtť attachť au quatriŤme
corps. Par suite cette armťe ne se trouvait plus composťe que de deux
corps, le quatriŤme et le septiŤme. Elle se mit en mouvement, le 25,
pour descendre l'Elbe. Le 27, le prince de la Moskowa ťtait ŗ
OranienbŁrg avec le quatriŤme corps, et le septiŤme ŗ Dessau. Ces
troupes observaient les ponts d'Acken et de Roslau. L'avant-garde
suťdoise, aprŤs avoir occupť Dessau, avait ťvacuť cette ville, et
s'ťtait retirťe sur la tÍte de pont. Lŗ, un bataillon saxon dťserta ŗ
l'ennemi avec armes et bagages. Un lťger combat avec les Suťdois fut
livrť en avant de Dessau. Toute l'armťe du Nord, commandťe par le prince
royal de SuŤde, placťe en face, sur la rive droite du fleuve, observait
les garnisons de Wittenberg et de Torgau. Des opťrations de siťge
furent mÍme commencťes par le gťnťral Bulow contre Wittenberg.
D'un autre cŰtť, depuis quelque temps, des dťtachements de troupes
lťgŤres dťsolaient les derriŤres de l'armťe franÁaise. Czernicheff avec
ses Cosaques s'ťtait avancť au delŗ de la Saale. Le gťnťral Tielemann,
dťserteur du service de Saxe, s'ťtait portť avec un corps franc dans les
environs de Leipzig, et se trouvait en liaison avec le colonel
autrichien de Mensdorf, qui opťrait dans les mÍmes cantons.
L'Empereur dťtacha vers ce point le gťnťral Lefebvre-Desnouettes avec
quatre mille chevaux, pour donner la chasse ŗ ces partisans; et, comme,
en mÍme temps, la route de Dresde ŗ Chemnitz avait ťtť interceptťe par
la brigade autrichienne de Scheilher, qui avait enlevť ŗ Freyberg trois
cents hussards westphaliens, le gťnťral Kleist faisant aussi des
dťmonstrations de ce cŰtť, il envoya ŗ Freyberg le deuxiŤme corps pour
garder ce dťbouchť. Le 11 septembre, Thielmann avait paru ŗ Weissenfels,
et inutilement attaquť un convoi en route pour Leipzig. Il fut plus
heureux ŗ Naumbourg, qu'il enleva. Il prit ensuite Mersebourg, et cinq
cents hommes par capitulation. Lŗ il fut attaquť par Lefebvre-Desnouettes,
qui le battit. Il se retira sur Zeist et Zurchau, mais aprŤs avoir vu
dťlivrer ses prisonniers, Lefebvre-Desnouettes vint ensuite occuper
Altenbourg. Platow l'en chassa, non sans lui faire ťprouver d'assez
grandes pertes, par suite des mauvaises dispositions prises par le
gťnťral franÁais en se retirant. Il avait imprudemment livrť combat en
avant d'un dťfilť. AprŤs cet ťchec, Lefebvre-Desnouettes se rendit
d'abord ŗ Weissenfels, et de lŗ revint ŗ Leipzig.
Le 25 septembre, Czernicheff, parti avec trois mille chevaux d'Eisleben,
arriva devant Cassel, dans la nuit du 27 au 28. Un bataillon
d'infanterie, placť en avant de la ville et forcť dans sa position, se
retira aprŤs avoir ťprouvť quelque perte. JťrŰme Bonaparte, roi de
Westphalie, voyant les symptŰmes d'une insurrection, s'ťloigna, laissant
le gťnťral Alix pour dťfendre Cassel avec deux bataillons.
Le 30, Czernicheff fit attaquer Cassel et s'en empara, aidť d'un
mouvement national qui ťclata en sa faveur. AprŤs avoir proclamť, au nom
des souverains alliťs, la dissolution du royaume de Westphalie, il
ťvacua la ville en emportant tout ce qu'elle renfermait de richesses
publiques transportables et aprŤs avoir organisť une insurrection
systťmatique dans cette portion de l'Allemagne.
Le 29, au matin, j'arrivai ŗ Wurtzen. J'y reÁus une lettre du duc de
Padoue qui commandait ŗ Leipzig. Il m'annonÁait la prťsence de l'ennemi,
et la crainte d'Ítre obligť d'ťvacuer cette ville. Je continuai mon
mouvement sans perdre un moment, et j'arrivai, le soir mÍme du 28, ŗ
Leipzig avec la tÍte de mes forces. Je mis le reste ŗ portťe, je
nettoyai les environs des ennemis qui s'y trouvaient. Je restai dans
cette position jusqu'au 3.
Le 2 octobre, BlŁcher se dťcida ŗ prendre l'offensive. Il se porta, avec
les corps de Bulow et de Tauentzien, au confluent de l'Elster et de
l'Elbe, jeta, dans la nuit, deux ponts et opťra son passage. Le gťnťral
Bertrand, chargť de s'y opposer, occupant une position avantageuse,
rťsista pendant la plus grande partie de la journťe; mais, vers les cinq
heures, il fut forcť, et opťra sa retraite dans la direction de Dessau.
Pendant ce temps, les Suťdois avaient dťbouchť par le pont de Roslau, et
s'ťtaient avancťs sur Dessau. Le marťchal Ney, avec le septiŤme corps,
et rejoint par le quatriŤme, se replia, remonta la rive gauche de la
Moldau, et occupa Bittersfeld et DŁclitsch. Informť de ces ťvťnements
dans la nuit du 3 au 4, je me rendis, en toute h‚te, avec mon corps, ŗ
DŁben, afin d'offrir un point d'appui au gťnťral Bertrand, et de
favoriser sa retraite. Je recueillis effectivement les troupes
wurtembergeoises qui faisaient partie de son corps et qui s'y ťtaient
retirťes, le reste de ce corps ayant rejoint la septiŤme. L'ennemi se
prťsenta bientŰt en force devant moi. Le poste de DŁben n'ťtant pas
tenable, je repassai la riviŤre, et pris position en face. Une berge
ťlevťe, ŗ une demi-portťe de canon de la ville, me donnait tous les
moyens de dťfendre avec succŤs ce dťfilť. L'ennemi fit plusieurs
tentatives pour dťboucher; mais il fut constamment repoussť.
Je plaÁai de la cavalerie en observation sur la rive gauche de la
riviŤre, pour me lier avec les troupes du marťchal Ney.
Dans cette position nous pouvions attendre ce que ferait l'ennemi; mais
tout ŗ coup, celui-ci ayant prťsentť des forces considťrables en face de
Bittersfeld sur la rive droite, le marťchal Ney s'effraya de sa
position, et, quoique l'ennemi n'eŻt rassemblť aucun moyen de passage,
et montrť aucune disposition de le tenter, le marťchal Ney me fit
prťvenir qu'il se retirait sur Kamens. Ce mouvement laissait ma gauche
tout ŗ fait ŗ dťcouvert et compromettait beaucoup ma position. Me
retirer cependant, en plein jour, ťtant aussi rapprochť de l'ennemi,
ťtait fort dťlicat. Je masquai mes prťparatifs et mon mouvement aussi
bien que possible, et je l'effectuai sans accident, avec prťcision et
vitesse. J'allai prendre la belle position de Hohen Priegnitz, en liant
ma gauche avec le prince de la Moskowa, auquel je demandai une entrevue
pour pouvoir arrÍter avec lui ce qui nous restait ŗ faire. Nous ne pŻmes
nous comprendre. Il fut impossible de lui faire entendre que rien ne
pressait dans nos mouvements de retraite, et qu'il fallait attendre que
l'ennemi se montr‚t en force pour se retirer. Le marťchal Ney, brave et
intrťpide soldat, homme de champ de bataille, n'entendait rien ŗ la
combinaison des mouvements. Son esprit s'effrayait de ce qu'il ne voyait
pas. Jamais les calculs ne dirigeaient ses actions. C'ťtait toujours
chez lui le rťsultat de la sensation du moment et comme un effet de
l'ťtat de son sang. Il pouvait s'en aller aussi bien devant trente mille
hommes en ayant cinquante qu'en attaquer cinquante avec vingt.
Toutefois, dans la circonstance, il ťtait dans une disposition de
crainte irrťflťchie et exagťrťe. Il ne voulut pas s'arrÍter, quoique des
troupes lťgŤres seules fussent en prťsence.
Ce marťchal ayant continuť son mouvement, j'allai occuper le mÍme jour,
6, les hauteurs d'Eulenbourg oý je campai. Leipzig se trouvant de
nouveau menacť, dŤs le lendemain je me portai sur cette ville, par
Taucha, afin de la couvrir, et de protťger l'arrivťe d'un convoi retenu
ŗ Naumbourg. Je l'y fis entrer.
Le 8, ayant fait une forte reconnaissance du cŰtť de Delitzsch, je
trouvai devant moi des forces de cavalerie assez considťrables; mais
elles se retirŤrent aprŤs une lťgŤre rťsistance.
Pendant que ces divers mouvements s'opťraient, Napolťon fit les
dispositions suivantes. Il laissa le marťchal Saint-Cyr ŗ Dresde, avec
les premier et quatorziŤme corps, et les chargea de garder les dťbouchťs
de la BohÍme de ce cŰtť. Le cinquiŤme corps reÁut l'ordre de se rendre ŗ
Freyberg avec le huitiŤme. Rťunis au deuxiŤme, ces trois corps furent
mis aux ordres du roi de Naples, et chargťs de couvrir les dťbouchťs de
la BohÍme sur Leipzig. Le 7, Napolťon se mit en mouvement pour descendre
l'Elbe et se rapprocher de l'armťe de Silťsie, que son intention ťtait
de combattre. Il partit avec les troisiŤme et onziŤme corps et sa garde.
Le 9, il s'avanÁa ŗ Eulenbourg, oý il fut rejoint par les quatriŤme et
septiŤme corps. Le mÍme jour, je me portai, conformťment ŗ ses ordres,
dans la direction de DŁben, et je campai ŗ la hauteur d'Eulenbourg. Une
trŤs-nombreuse cavalerie ťtait devant moi et je dus marcher avec lenteur
et prťcaution, n'ayant plus avec moi les premier et cinquiŤme corps de
cavalerie. Je trouvai l'ennemi formť prŤs de Koblein, soutenu par une
nombreuse artillerie: mais il n'entreprit rien de sťrieux et se retira
aprŤs un engagement de trois quarts d'heure environ. Le 10, je me
rťunis, ŗ DŁben, ŗ l'Empereur, et j'occupai Delitzsch par une division
et de la cavalerie.
L'armťe de Silťsie s'ťtait retirťe brusquement de DŁben, et repliťe sur
le prince royal de SuŤde. Le corps de Sacken, s'ťtant trouvť en retard,
fut obligť de repasser la Muldau ŗ Ragika. Les deux armťes du prince de
SuŤde et de BlŁcher se trouvŤrent rťunies ŗ Zerlig.
Le 11, l'Empereur donna l'ordre au gťnťral Rťgnier de passer l'Elbe ŗ
Wittenberg, et le marťchal Ney, avec le troisiŤme corps, marcha sur
Dessau. Le 12, Dessau fut emportť, et la division prussienne qui
l'occupait se retira sur Roslau, aprŤs avoir perdu trois mille hommes,
tandis que le gťnťral Rťgnier poussait la division Thumen par la rive
droite, ťgalement sur Roslau. Le gťnťral Tauentzien continua sa retraite
sur Zerbst. Le 13, le septiŤme corps rentra ŗ Wittenberg. Les deux
armťes ennemies se trouvŤrent de nouveau sťparťes: celle de Silťsie sur
Halle, et celle du prince royal de SuŤde sur Bernbourg. Le 30, le
prince de SuŤde passa la Saale et se porta sur CŲthen.
Le 11, je me portai sur Bittersfeld pour y faire une forte
reconnaissance. Je pris avec moi ma cavalerie et une division
d'infanterie. J'acquis la certitude que toute l'armťe ennemie ťtait en
deÁŗ de l'Elbe. Je revins ŗ DŁben, et j'en rendis compte ŗ l'Empereur.
Napolťon se trouvait alors avec cent trente mille hommes rťunis et
disponibles. C'ťtait assurťment l'occasion d'agir offensivement d'une
maniŤre dťcidťe, de changer le thť‚tre de la guerre et le systŤme de
dťmonstration impuissante de mouvements de va-et-vient qui avaient si
fort diminuť ses forces, et l'avaient fait si rapidement dťchoir. Une
offensive vive sur BlŁcher et le prince royal de SuŤde, qui l'aurait
portť au delŗ de la Saale, sur la ligne d'opťration de l'ennemi, ou bien
sur l'Elbe, lui promettait les avantages les plus dťcisifs. Ces
manoeuvres lui ťtaient faciles, puisqu'il possťdait toutes les places
situťes sur le fleuve. Il aurait pu, avec promptitude, se mouvoir sur
les deux rives. Huit jours d'opťrations ťnergiques lui faisaient
dťtruire les forces qu'il avait devant lui. Il pouvait rťtablir ainsi
ses affaires et rappeler la victoire sous ses drapeaux. En faisant cette
opťration il augmentait son armťe d'une partie des garnisons des
places: il appelait ŗ lui le corps de Davoust qui lui aurait amenť plus
de vingt mille hommes, en laissant encore les forces nťcessaires ŗ la
garde de Hambourg; il se faisait joindre par le corps d'Augereau, appelť
de WŁrzbourg, et dťjŗ arrivť sur la Saale, et, dans tous les cas, il
avait ses communications libres avec la France par le Bas-Rhin.
Dans ce systŤme, les trois corps, deuxiŤme, cinquiŤme et huitiŤme, avec
lesquels manoeuvrait Murat, se seraient retirťs lentement sur lui,
auraient couvert Leipzig aussi longtemps que possible. Pour complťment,
il aurait envoyť, par des ťmissaires, l'ordre au marťchal Saint Cyr
d'ťvacuer Dresde, pour se rendre ŗ grandes marches sur Wittenberg et
Torgau, par la rive droite de l'Elbe. Enfin on peut ajouter que la
nťcessitť d'abandonner Dresde, vu la marche des ťvťnements et la
direction qu'avait prise la guerre, aurait dŻ Ítre sentie d'avance, et
lui faire naÓtre, de bonne heure, l'idťe d'ťvacuer de cette ville les
malades et les blessťs, afin de rendre mobiles et disponibles les deux
corps d'armťe chargťs de dťfendre cette place, ou plutŰt ce camp
retranchť. Enfin il devait Ítre informť des dispositions hostiles de la
BaviŤre. En s'ťloignant de cette puissance, il y ťchappait ou retardait
au moins son action contre lui; mais, au lieu d'envisager les nouvelles
nťcessitťs que les circonstances lui imposaient, il resta indťcis,
voulut tout conserver ŗ la fois. Il perdit tout pour avoir voulu tout
garder.
On ne reconnaÓt plus Napolťon pendant cette campagne. J'eus une longue
conversation avec lui ŗ DŁben. Jamais cette conversation n'est sortie de
ma mťmoire. Quand j'ťtais ŗ portťe de lui, il ťtait dans l'usage de
m'envoyer chercher pour me parler de ses projets et des diffťrentes
choses qui l'occupaient d'une maniŤre particuliŤre. Un usage, fort
commode pour lui, assez bien entendu, mais insupportable pour les
autres, lui donnait beaucoup de temps ŗ employer ainsi. Lorsque les
mouvements de son quartier gťnťral le permettaient, il se couchait ŗ six
ou sept heures du soir, se levait ŗ minuit ou ŗ une heure. Les rapports
arrivant, il se trouvait ainsi tout prÍt ŗ les lire et ŗ donner des
ordres en consťquence; mais pour ceux qui avaient marchť ou combattu
pendant la journťe, pour ceux qui, ŗ la fin du jour, avaient fait les
rapports, disposť tout pour opťrer le lendemain, et devaient dormir la
nuit pour se reposer, c'ťtait une chose terrible que de renoncer, au
commencement d'un sommeil rťparateur, ŗ son action bienfaisante, et
d'aller ainsi prendre part ŗ une conversation plus ou moins
intťressante.
AprŤs donc Ítre rentrť de ma reconnaissance de Bittersfeld, et lui avoir
fait mon rapport, je venais de me coucher quand on vint me chercher de
la part de l'Empereur. Il me parla de sa position et des divers partis
qu'il avait ŗ prendre. J'insistai de toutes mes forces pour celui dont
je viens de parler et qui, seul, pouvait le sauver. Son unique moyen de
salut, selon moi, en ce moment, ťtait de s'ťloigner des champs de
bataille de la BohÍme, puisque plus tŰt il n'avait pas voulu la
conquťrir, et enfin de quitter les dťfilťs qui lui avaient ťtť si
funestes. Il ne put se dťcider ŗ l'ťvacuation volontaire de Leipzig. Il
ne prťvoyait pas que, huit jours plus tard, il y serait forcť, sous de
bien autres auspices, au milieu de dťsastres et d'une confusion qui ont
achevť sa ruine. Il se disposait, au contraire, ŗ aller combattre sous
les murs de cette ville. Je discutai en dťtail, avec lui, sur les
inconvťnients de choisir un semblable champ de bataille, au fond d'un
entonnoir, en avant d'horribles dťfilťs, longs et faciles ŗ boucher;
mais il me rťpondit ces paroles mťmorables et qui montrent les illusions
dont il ťtait encore rempli: ęJe ne combattrai qu'autant que je le
voudrai. Ils n'oseront jamais m'y attaquer.Ľ
La conversation se porta naturellement sur les ťvťnements de la
campagne. J'en fis la critique avec franchise. Je lui fis remarquer que
nos pertes ťnormes, indťpendamment de celles ťprouvťes sur le champ de
bataille, venaient essentiellement du manque de soins, de vivres et de
secours de toute espŤce qui avaient ťtť refusťs aux soldats. J'ťtablis
enfin que, si Dresde avait contenu les approvisionnements nťcessaires
pour nourrir l'armťe, si les hŰpitaux avaient ťtť pourvus de tout ce
dont ils avaient besoin pour que les malades et les blessťs reÁussent
des secours convenables, son armťe serait plus forte de cinquante mille
hommes, et certes cette ťvaluation n'ťtait pas au-dessus de la vťritť.
ęAlors, ajoutai-je, indťpendamment de l'intťrÍt qu'il y a ŗ sauver la
vie ŗ cinquante mille hommes, vous auriez ťtť dispensť, pour conserver
la mÍme force ŗ votre armťe, d'ordonner une levťe de cinquante mille
conscrits. Au lieu d'avoir en espťrance cinquante mille hommes, vous
auriez en rťalitť cinquante mille vieux soldats aguerris, et sur le
terrain mÍme des opťrations. Ces cinquante mille soldats ŗ lever, ŗ
habiller, ŗ armer, ŗ faire arriver, coŻteront sans doute bien cinquante
millions. Or, en supposant, ce qui est ťnorme, que l'augmentation de
dťpense exigťe par un meilleur entretien de l'armťe se fŻt ťlevťe ŗ
vingt-cinq millions, il en rťsulte que cette dťpense de vingt-cinq
millions, faite ŗ propos, vous eŻt ťpargnť cinquante mille hommes et
vingt-cinq millions.Ľ Je lui fis cette dťmonstration la plume ŗ la main.
Elle ťtait sans rťplique. Vaincu par l'ťvidence, il me rťpondit avec
humeur: ęSi j'avais donnť cette somme, on me l'aurait volťe, et les
choses seraient dans le mÍme ťtat.Ľ
Il n'y avait rien ŗ rťpliquer ŗ cette ťtrange rťponse qu'une chose,
c'est qu'il fallait alors renoncer ŗ gouverner et ŗ administrer.
Napolťon a toujours ťtť dans l'usage de prodiguer les moyens pour crťer
de nouvelles forces; mais jamais il n'a voulu faire le moindre sacrifice
pour entretenir celles qui existaient, et sans doute la raison commande
une marche inverse.
Cette conversation, une des plus longues que j'aie jamais eues tÍte ŗ
tÍte avec Napolťon, car elle dura plus de cinq heures, ayant commencť
vers une heure aprŤs minuit et n'ayant fini qu'aprŤs le dťjeuner, qui
eut lieu ŗ six heures du matin, varia beaucoup dans son objet. Elle
changea de nature plusieurs fois, et embrassa des questions gťnťrales,
comme il arrivait souvent avec lui. Il se plaignait de l'abandon de ses
alliťs. Il disait qu'ils lui avaient manquť de parole. ņ cette occasion,
il fit la distinction de ce qu'il appela l'homme d'honneur et l'homme de
conscience, en donnant la prťfťrence au premier, parce que, avec celui
qui tient purement et simplement sa parole et ses engagements, on sait
sur quoi compter, tandis qu'avec l'autre on dťpend de ses lumiŤres et
de son jugement. ęLe second, dit-il, est celui qui fait ce qu'il croit
devoir faire, ce qu'il suppose Ítre le mieux.Ľ Puis il ajouta: ęMon
beau-pŤre, l'empereur d'Autriche, a fait ce qu'il a cru utile aux
intťrÍts de ses peuples. C'est un honnÍte homme, un homme de conscience,
mais ce n'est pas un homme d'honneur. Vous, par exemple, si l'ennemi,
ayant envahi la France et ťtant sur la hauteur de Montmartre, vous
croyiez, mÍme avec raison, que le salut du pays vous commande de
m'abandonner et que vous le fissiez, vous seriez un bon FranÁais, un
brave homme, un homme de conscience, et non un homme d'honneur.Ľ Ces
paroles, prononcťes par Napolťon, et adressťes ŗ moi le 11 octobre 1813,
ne portaient-elles pas l'empreinte d'un caractŤre tout ŗ fait
extraordinaire? n'ont-elles pas quelque chose de surnaturel et de
prophťtique? Elles sont revenues ŗ ma pensťe aprŤs les ťvťnements
d'Essonne. Elles m'ont fait alors une impression que l'on conÁoit, et
qui jamais ne s'est effacťe de ma mťmoire.
Pendant que Napolťon s'ťtait portť sur la Muldau et campait ŗ DŁben, la
grande armťe de BohÍme ťtait entrťe en mouvement. Le corps de Colloredo
et l'armťe de Benningsen s'ťtaient portťs sur Zeist et Pirna. Le 9, ce
mouvement offensif continua. Le 10, Benningsen, arrivť devant Dresde, oý
les deux corps franÁais s'ťtaient retirťs, laissa devant cette place
TolstoÔ avec vingt mille hommes, et marcha sur Leipzig avec le reste de
ses forces, en se dirigeant par Nossen et Colditz.
DŤs le 6, la grande armťe de Schwarzenberg avait commencť aussi ŗ se
mettre en marche. Le gťnťral Klenau vint devant Penig, oý ťtait une
division du huitiŤme corps, et Wittgenstein devant Altenbourg, oý ťtait
l'autre partie de ce corps d'armťe, et Poniatowski en personne. La route
de Freyburg ŗ Chemnitz fut rouverte en chassant la division Murrai de la
position qu'elle occupait prŤs de Flohe, et le troisiŤme corps d'armťe,
aux ordres du roi de Naples, opťra avec la cavalerie par sa droite pour
se rapprocher de Leipzig et couvrir cette ville contre les troupes qui
dťbouchaient de la BohÍme. Enfin les deux armťes ťtaient, le 13, en
prťsence prŤs de Leipzig. Les FranÁais occupaient Wachau et
Liebertwolkwitz, ayant une avant-garde vers Groebern et Goffa.
Le 14, le prince de Schwarzenberg fit faire une reconnaissance gťnťrale
par les corps de Wittgenstein et de Klenau. Un combat de cavalerie fut ŗ
notre avantage, et chacun rentra le soir dans ses positions.
Le corps commandť par le marťchal duc de Castiglione, appelť de
WŁrzbourg, oý il ťtait trop faible pour rťsister aux attaques de l'armťe
bavaroise, qui d'alliťe allait devenir ennemie et quitter l'Inn pour
marcher sur nos communications, ťtait arrivť, le 9 octobre, ŗ Naumbourg.
Le prince Maurice de Liechtenstein, envoyť ŗ sa rencontre, voulut lui
barrer le chemin entre Naumbourg et Weissenfels; mais le marťchal le
chassa devant lui. Il arriva le 18 ŗ Leipzig, tandis que le corps de
Giulay, aussi dirigť de ce cŰtť dans le mÍme but, entrait ŗ
Weissenfelds, qui venait d'Ítre ťvacuť.
Le 12, je reÁus l'ordre d'aller prendre position ŗ Delitzsch, et j'en
chassai l'ennemi; mais, ayant ťtť mis ŗ la disposition du roi de Naples,
je fus appelť par lui de la maniŤre la plus pressante, et je partis
immťdiatement. Je me rendis, ŗ marches forcťes, de l'autre cŰtť de
Leipzig, et j'allai prendre position ŗ Stoetteritz le 13 au soir.
Dans la nuit, je reÁus l'ordre de l'Empereur de rťtrograder, et de
chercher une position au nord de Leipzig, qui couvrit cette ville du
cŰtť de Halle et de Landsberg. J'avais dťjŗ assez parcouru le pays pour
connaÓtre cette position existante ŗ une lieue et demie de Leipzig, ŗ
Liebenthal et Brettenfeld, sur le terrain mÍme oý Gustave-Adolphe
combattit, il y avait alors cent quarante-deux ans, et avait remportť
une victoire signalťe. J'allai l'occuper; aprŤs avoir reconnu avec soin
et dťtail le champ de bataille, je m'assurai qu'il ťtait trop vaste
pour mon corps d'armťe; mais qu'avec des travaux d'une exťcution
facile, et trente mille hommes, je pouvais tenir en ťchec, pendant
vingt-quatre heures, les armťes du Nord et de Silťsie. J'en rendis
compte ŗ Napolťon, qui me prescrivit d'exťcuter sans retard les travaux,
et m'annonÁa que, le moment venu, j'aurais le troisiŤme corps ŗ ma
disposition, ce qui porterait ma force au nombre d'hommes que j'avais
dťterminť. Je me mis ŗ la besogne, et ne nťgligeai rien pour remplir la
t‚che imposťe. Je fis faire de nombreux abatis dans le bois, en avant de
Liebenthal et en arriŤre de Radfeld. Puis je l'occupai fortement. Ce
bois devint comme une forteresse. Badfeld fut aussi occupť par mon
avant-garde, qui en chassa un corps de cavalerie considťrable, soutenu
par une artillerie assez nombreuse.
Pendant la journťe du 15, les troisiŤme, quatriŤme, septiŤme et onziŤme
corps, et la garde, firent leur mouvement sur Leipzig, qu'ils
traversŤrent. Les troisiŤme et quatriŤme restŤrent ŗ Eustritz, en
arriŤre de moi. Le onziŤme et la garde allŤrent se mettre en ligne
contre la grande armťe, et le septiŤme se porta sur Taucha.
Le 15, dans la journťe, des sapeurs, pris deux jours auparavant prŤs de
Delitzsch, conduits au quartier gťnťral ŗ Halle, et qui s'ťtaient
ťchappťs, m'informŤrent de la marche des armťes combinťes du Nord et de
Silťsie. D'aprŤs ces rapports, elles devaient Ítre en prťsence, selon
toutes les apparences, le lendemain, 16, au matin.
J'en prťvins Napolťon, dont le quartier gťnťral ťtait ŗ Reudnitz, prŤs
de Leipzig. Le 15, au soir, la cavalerie et l'artillerie, que j'avais
devant moi, furent soutenues par de l'infanterie. Je fis replier mes
postes ťloignťs, jetťs sur les bords de l'Elster. J'en donnai avis ŗ
l'Empereur. Vers dix heures du soir, je montai sur le clocher de
Liebenthal, et je pus voir de mes yeux tous les feux de l'armťe ennemie.
L'horizon en ťtait embrasť. Je me h‚tai d'en rendre compte ŗ l'Empereur
et de lui rappeler que ma position exigeait trente mille hommes. Je lui
demandais de ne pas perdre un moment pour mettre ŗ ma disposition le
troisiŤme corps qu'il m'avait promis.
J'attendais avec impatience le rťsultat de mes rapports et les effets
qui en seraient la suite, quand, le 16, ŗ huit heures du matin, je reÁus
une lettre de Napolťon, apportťe par un de ses officiers d'ordonnance,
appelť Lavesaut. Dans cette lettre, il critiquait tous mes rapports et
leur conclusion. Il prťtendait que j'ťtais dans une erreur complŤte. Je
n'avais, disait-il, personne devant moi. Il me donnait en consťquence
l'ordre de me retirer immťdiatement sur Leipzig, de traverser cette
ville, et de venir former la rťserve de l'armťe[5].
[Note 5: Dans une lettre datťe du 15 octobre, au soir, le major
gťnťral m'ťcrit: ęDans le cas oý l'ennemi dťboucherait devant vous en
grande force, votre corps, celui du gťnťral Bertrand et celui du prince
de la Moskowa sont destinťs ŗ lui Ítre opposťs.Ľ
Ces dispositions ťtaient parfaitement sages et raisonnables.
Or la marche de l'ennemi ťtait prouvťe par le rapport des sapeurs faits
prisonniers le 13, ťchappťs et arrivťs prŤs de moi le 15, rapport que
j'avais fait connaÓtre ŗ l'Empereur.
Son arrivťe ťtait prouvťe par la prťsence de l'infanterie, devant
laquelle mes avant-postes s'ťtaient repliťs.
Elle l'ťtait encore par la vue des feux de toute l'armťe, qui
s'apercevaient du clocher de Liebenthal, et dont j'avais rendu compte ŗ
neuf heures du soir.
Et, avec ces documents,
On donne l'ordre, le 16 au matin, au gťnťral Bertrand de marcher sur
Lindenau;
Au troisiŤme corps, de venir ŗ la grande armťe;
Et au sixiŤme, de traverser Leipzig et de s'ťtablir entre Leipzig et la
grande armťe!
Napolťon ne regardait alors comme vrai que ce qui entrait dans ses
combinaisons et son esprit.
(_Voir les piŤces justificatives._)]
Un pareil ordre, dans des circonstances semblables, devait Ítre
promptement exťcutť. Je ne pouvais m'y tromper: l'Empereur ťtait tombť
dans une erreur grossiŤre; mais du moment oý il ne m'envoyait pas le
troisiŤme corps, indispensable ŗ cause de l'ťtendue de la position ŗ
dťfendre je devais bien me garder d'y rester. D'ailleurs, les ordres
ťtaient prťcis; et, ŗ moins que les coups de canon ne viennent
contrarier l'exťcution d'un ordre de mouvement, il n'y a plus d'armťe ni
de succŤs possible quand on dťlibŤre ŗ cette occasion et quand on hťsite
ŗ l'exťcuter.
Gr‚ce ŗ la bonne organisation de mes troupes, ŗ leur instruction et ŗ
leur discipline, une demi-heure aprŤs l'ordre reÁu, elles ťtaient
formťes en six colonnes parallŤles, et en marche pour se rendre ŗ
Leipzig. Mais, ŗ peine le mouvement commencť, l'ennemi dťboucha sur
nous. Une forte avant-garde occupait le village de Radfeld. Elle ťtait
commandťe par un gťnťral d'une grande valeur et d'une grande capacitť,
homme d'un nom militaire illustre, le gťnťral Cohorn. Elle fut forcťe ŗ
se retirer; mais elle le fit avec lenteur et en bon ordre. Une brigade
de cavalerie lťgŤre wurtembergeoise, faisant partie de mon corps d'armťe
et qui se trouvait ŗ l'avant-garde, se conduisit aussi avec valeur et
courage. C'ťtait le dernier mouvement d'honneur et de fidťlitť du
gťnťral Normam, et de ses soldats. Quelques heures plus tard, ils nous
furent funestes au lieu de nous Ítre utiles. La deuxiŤme division,
commandťe par le gťnťral Lagrange, resta en arriŤre pour soutenir
l'arriŤre-garde et la recueillir. Quand tout fut en ordre et
convenablement disposť, le mouvement continua sur Leipzig en ťchangeant
ŗ chaque moment des coups de canon avec l'ennemi.
L'opinion de Napolťon n'ťtait plus susceptible de discussion. L'ennemi
ťtait lŗ, nous ťtions aux prises avec lui. C'ťtait toute l'armťe de
Silťsie qui ťtait en prťsence et avec laquelle nous avions affaire. Nous
ne pouvions plus aller sur le champ de bataille au sud de Leipzig.
Entrer mÍme ŗ Leipzig, et nous former derriŤre la Partha ťtait chose
pťrilleuse. Passer un dťfilť comme celui que nous avions devant nous,
dťfilť soumis ŗ l'action des hauteurs qui le dominent immťdiatement,
pouvait produire une grande confusion, et amener une catastrophe. Le
gťnťral Bertrand, ayant reÁu l'ordre de balayer l'ennemi sur les
derriŤres de l'armťe et d'ouvrir le dťbouchť de Lindenau, s'ťtait mis en
marche immťdiatement pour l'exťcuter. Mais le troisiŤme corps pouvait
Ítre encore ŗ Leipzig, et ŗ portťe de me soutenir. J'avais reconnu une
position, moins bonne que celle de Liebenthal, mais plus resserrťe et
plus rapprochťe de la ville, celle dont la droite est ŗ Eustritz et la
gauche ŗ Meckern. J'envoyai un officier auprŤs du marťchal Ney, qui
ťtait ŗ Leipzig et auquel l'Empereur avait donnť le commandement
supťrieur, pour savoir si le troisiŤme corps s'y trouvait encore. Il me
fit rťpondre affirmativement et dire que je pouvais en disposer. Je
n'hťsitai plus ŗ m'arrÍter, ŗ prendre position et ŗ livrer bataille.
J'arrÍtai mes colonnes sur le plateau et je formai ma ligne de bataille.
L'attaque de l'ennemi ne pouvait venir que par notre gauche. Notre
droite ťtait en arriŤre, appuyťe et couverte par une petite division
polonaise, commandťe par le gťnťral Dombrowsky, et qui, placťe de
l'autre cŰtť du ruisseau marťcageux et encaissť qui coule ŗ Eustritz,
prenait ainsi, de revers, la gauche de l'ennemi. Je devais donc conclure
que ce serait sur ma gauche et sur Meckern que l'ennemi se porterait. En
consťquence, je fis faire un changement de front oblique, par brigade,
la droite en avant, ce qui forma mon corps d'armťe en six lignes,
prťsentant ainsi de nombreuses rťserves. Meckern fut confiť au 2e
rťgiment de marine. Toute mon artillerie fut placťe sur le point le plus
ťlevť de la ligne occupťe par mon corps d'armťe. Mes quatre-vingt-quatre
piŤces de canon furent disposťes pour arrÍter l'ennemi. Douze piŤces de
douze, entre autres, avaient pour objet de flanquer, d'une maniŤre
avancťe, la droite du village de Meckern.
L'ennemi attaqua, avec impťtuositť, le village de Meckern, et fit
soutenir cette attaque par le feu d'une nombreuse artillerie qui se
dťveloppa en face de mon front. Mais tous ses efforts furent longtemps
impuissants. AprŤs des attaques rťitťrťes sur le village, une partie fut
ťvacuťe, mais bientŰt reprise par le mÍme rťgiment qui le dťfendait et
qui fut ramenť ŗ la charge. Culbutťs de nouveau, le 4e de marine et le
37e lťger furent successivement portťs sur Meckern, oý semblait Ítre
toute la bataille. Ils le reprirent et le conservŤrent longtemps, ainsi
qu'on devait l'attendre d'aussi bonnes troupes, malgrť les efforts
constants de l'ennemi et les troupes fraÓches qui renouvelaient les
attaques. En ce moment, j'ťprouvais une vive impatience de l'arrivťe du
troisiŤme corps que le marťchal Ney m'avait annoncť. S'il se fŻt trouvť
ŗ ma disposition, comme j'ťtais autorisť ŗ y compter, il eŻt dťbouchť
par ma droite, et un mouvement offensif sur la gauche de l'ennemi aurait
assurť le gain de la bataille, c'est-ŗ-dire la conservation de notre
position pendant toute la journťe.
Il y avait plus de quatre heures que nous combattions avec acharnement.
L'ennemi avait fait des pertes ťnormes par la supťrioritť du feu de
notre artillerie, et son action foudroyante sur ses masses, quand il
exťcuta une nouvelle charge. Elle avait ťchouť comme les prťcťdentes et
produit un grand dťsordre parmi ses troupes. Je donnai l'ordre, ŗ la
brigade de cavalerie wurtembergeoise, commandťe par le gťnťral Normam,
de charger cette infanterie prťsentant ŗ la vue la plus grande
confusion. Elle refusa d'abord d'exťcuter mes ordres, et, le moment
passť, il n'y avait plus rien ŗ entreprendre de bien utile. ņ l'arrivťe
d'un second ordre, elle s'ťbranla cependant; mais elle se jeta sur un
bataillon du 1er rťgiment de marine, le culbuta au lieu de se prťcipiter
sur l'ennemi qui se rťtablit et recommenÁa son offensive.
Cependant les choses continuaient ŗ se balancer, malgrť la disproportion
des forces, lorsqu'au moment d'une nouvelle attaque de l'ennemi la
batterie de douze, dont l'effet ťtait si favorable et si puissant, fut
tout ŗ coup mise hors de service, un obus ayant fait sauter quatre
caissons. Des caissons d'obus sautŤrent aussi. Les obus ťclatŤrent, et
prťcisťment au moment oý l'ennemi faisait une charge dťcisive. Cet
accident eut des consťquences funestes. L'ennemi, ayant rťussi dans son
attaque ŗ emporter le village de Mackern, fit avancer son centre.
Celui-ci fut bientŰt aux mains avec la premiŤre division. Le combat prit
alors un nouveau caractŤre. Nos masses et celles de l'ennemi furent si
rapprochťes les unes des autres, et pendant si longtemps, que jamais
chose pareille ne s'ťtait offerte ŗ mes yeux. Je pris avec moi les 20e
et 25e provisoires, commandťs par les colonels Maury et Drouhot, et je
les menai ŗ la charge. BientŰt moins de cent cinquante pas nous
sťparŤrent de l'ennemi. Arrivťs ŗ cette distance, nous rťtrograd‚mes;
mais, aprŤs avoir fait quelques pas, nous nous arrÍt‚mes, et fÓmes, ŗ
notre tour, rťtrograder l'ennemi. Cet ťtat de choses dura prŤs d'une
demi-heure. Alors le 1er rťgiment d'artillerie de la marine, placť ŗ ma
droite, engagť ťgalement de trŤs-prŤs avec l'ennemi, vint ŗ plier. Le
32e lťger se porta en avant, et arrÍta momentanťment l'ennemi; mais, en
ce moment, six mille chevaux vinrent nous envelopper et nous attaquer de
toute part. Il fallut se retirer sur la troisiŤme division, qui avait
peu combattu, et dont les ťchelons nous recueillirent et arrÍtŤrent la
poursuite. La nuit arriva et mit fin ŗ ce combat, un des plus chauds, un
des plus opini‚tres qui aient jamais ťtť livrťs. Les troupes y
montrŤrent la plus grande valeur. Si les Wurtemburgeois avaient fait
leur devoir, un succŤs complet aurait ťtť le prix de nos efforts.
Indťpendamment de la conservation de tout le champ de bataille, nous
aurions fait bon nombre de prisonniers. Malgrť tous les contre-temps
survenus, nous perdÓmes seulement la moitiť du terrain sur lequel nos
troupes ťtaient formťes. Nous eŻmes fort peu de soldats prisonniers;
mais vingt-sept piŤces de canon tombŤrent au pouvoir de l'ennemi. Blessť
ŗ la main gauche, d'une balle, au moment oý je menais les 20e et 25e
rťgiments ŗ la charge, je ne quittai le champ de bataille que le
dernier. Je ne fus pansť qu'ŗ dix heures du soir.
Dans cette bataille, le corps de York, fort de vingt-deux mille hommes,
fut engagť en entier, et presque tous les gťnťraux ou officiers
supťrieurs furent tuťs ou blessťs, tant ils avaient dŻ payer de leur
personne pour contenir leurs troupes et se maintenir contre la vivacitť
de nos attaques ou l'ťnergie de notre dťfense. Le corps de Langeron fut
en partie engagť. Notre champ de bataille fut le plus ensanglantť dans
cette mťmorable journťe, le lieu oý l'action fut la plus vive. J'ai ouÔ
dire ŗ divers officiers prussiens, et, entre autres, ŗ M. de Goltz,
adjudant gťnťral envoyť par le roi de Prusse auprŤs de BlŁcher, le mÍme
qui, depuis, a ťtť ministre de Prusse ŗ Paris, qu'aprŤs l'ťvacuation de
Leipzig les souverains alliťs, ayant ťtť visiter tous les champs de
bataille, furent frappťs de la physionomie de celui-ci, du nombre des
morts, et surtout de la proximitť des morts des deux armťes.
La nuit ťtant arrivťe, mes troupes prirent position ŗ Eustritz et
Gohlis. Le lendemain matin, elles repassŤrent la Partha et s'ťtablirent
sur la rive gauche de cette riviŤre.
J'avais dŻ compter sur le troisiŤme corps d'armťe; mais le marťchal Ney
en avait disposť par l'ordre de l'Empereur, et l'avait dirigť sur la
grande armťe. Napolťon, informť de mon engagement, lui envoya l'ordre de
rťtrograder, mais dťjŗ il ťtait prŤs de lui. Il se mit cependant en
mouvement pour revenir, sans pouvoir arriver ŗ temps pour nous secourir;
et, pendant cette journťe dťcisive, ayant toujours marchť d'une armťe ŗ
l'autre, il ne fut utile nulle part.
Napolťon, de son cŰtť, avait combattu avec les deuxiŤme, cinquiŤme,
huitiŤme, onziŤme corps et sa garde. Il avait gardť ses positions, mais
n'avait pas pu enlever celles de l'ennemi. Je n'entrerai pas dans le
dťtail de ce qui se passa de ce cŰtť. Ce n'est pas l'histoire complŤte
de la guerre que j'ťcris, mais seulement le rťcit des ťvťnements qui me
sont particuliŤrement personnels. Divers ťcrivains militaires ont fait
des relations de la bataille de Leipzig. Je les ai lues. La plus exacte,
celle qui se rapproche davantage de la vťritť pour les faits, malgrť le
thŤme convenu de mettre Napolťon ŗ l'abri de tout reproche, est celle
que contient le _Spectateur militaire_, et dont le gťnťral Pelet est
l'auteur.
Mon corps d'armťe perdit de six ŗ sept mille hommes. Le seul corps de
York, d'aprŤs les relations officielles, dont les ťvaluations sont
probablement fort infťrieures ŗ la vťritť, ťprouva une perte de cinq
mille quatre cent soixante-sept hommes.
Pendant cette double bataille, le quatriŤme corps, commandť par le
gťnťral Bertrand, avait passť l'Elster, s'ťtait emparť de Lindenau, et
avait ťloignť le corps de Giulay, qui occupait la plaine de Markranstadt
et de Lutzen. Cette bataille du 16 dťcidait la question de la possession
de l'Allemagne. C'est pour y commander que nous avions combattu ce
jour-lŗ. C'est pour l'affranchir de notre domination que les alliťs nous
avaient attaquťs. Il restait ŗ livrer bataille pour assurer notre salut
personnel. Ainsi, quand on fixe au 18 octobre la bataille de Leipzig, on
est dans l'erreur. Le 16, la grande question a ťtť dťcidťe. Napolťon
n'ťtant pas parvenu ŗ battre et ŗ faire reculer l'ennemi, moi m'ťtant
trouvť dans la nťcessitť de combattre un contre quatre, quoique l'armťe
du Nord, forte de soixante mille hommes, ne fŻt pas entrťe en ligne, et
la grande armťe du prince de Schwarzenberg devant recevoir, le 17, les
puissants renforts que Benningsen et Colloredo lui amenaient, il n'y
avait plus rien ŗ faire. D'ailleurs nos moyens ťtaient usťs, nos
munitions consommťes, nos corps ŗ moitiť dťtruits. Nous n'avions donc
plus d'espťrance ŗ concevoir, et notre pensťe unique devait Ítre de nous
retirer en bon ordre, de sauver nos dťbris et de regagner la France.
La journťe du 17 se passa tranquillement. L'ennemi attendait ses
renforts. Quant ŗ nous, nous ťtions occupťs ŗ remettre l'ordre dans nos
troupes. Cependant nous aurions dŻ, dŤs ce moment, commencer notre
retraite, ou au moins en prťparer les moyens, de maniŤre ŗ l'effectuer
dŤs l'entrťe de la nuit. Mais une sorte d'insouciance de la part de
Napolťon, impossible ŗ expliquer et difficile ŗ qualifier, mettait le
comble ŗ tous nos maux. Pendant toute la journťe du 17, l'armťe de
Silťsie, et ensuite l'armťe du Nord, commandťe par le prince royal de
SuŤde, dťfilŤrent sous nos yeux et remontŤrent la rive droite de la
Partha. Je fis occuper les divers ponts de la partie supťrieure de cette
riviŤre, et je plaÁai en observation, sur la rive gauche, ma cavalerie
lťgŤre. Mon infanterie ťtait campťe perpendiculairement ŗ la Partha,
faisant face ŗ Taucha, la gauche au village de Schoenfeld, la droite
sur la direction du village de Paunsdorf.
L'Empereur avait cependant senti la nťcessitť d'opťrer la retraite. Les
troupes qui avaient combattu ŗ Wachau et Liebertwolkwitz la commencŤrent
avant le jour, le 18, et se rapprochŤrent de Leipzig. Des caissons, que
l'on ne pouvait pas emmener faute d'attelages, sautŤrent, ce qui avertit
l'ennemi du mouvement qui s'opťrait. Il se mit en consťquence en mesure
d'attaquer l'armťe franÁaise. En effet, vers les dix heures du matin,
l'armťe de BohÍme marcha en avant, formťe en trois grosses masses, la
droite commandťe par le gťnťral Benningsen, le centre par Barclay de
Tolly, et celle de gauche par le prince de Hesse-Hombourg, tandis que
l'armťe de Silťsie et l'armťe du Nord dťbouchaient par Taucha.
La grande armťe franÁaise prit aussitŰt les positions suivantes: ŗ
l'extrÍme droite, le huitiŤme (Poniatowski), ensuite, vers Probstheyda,
le duc de Castiglione; puis le corps du duc de Bellune; ensuite le
cinquiŤme (gťnťral Lauriston); enfin le duc de Tarente, avec le onziŤme,
derriŤre Holzhausen. Le septiŤme, composť de Saxons, qui venait de
Taucha, devait occuper Paunsdorf. Mon corps devait Ítre ŗ gauche, et le
troisiŤme en seconde ligne.
Aucun engagement n'avait encore eu lieu; mais on devait reconnaÓtre que
le moment de l'action ťtait prochain. Je venais de visiter mes postes de
cavalerie wurtembergeoise sur la rive gauche de la Partha. J'avais donnť
pour instruction au gťnťral Normam, en le quittant, de se replier avec
lenteur sur moi quand l'ennemi arriverait sur lui en dťbouchant de
Taucha, et de me faire prťvenir, afin que mes troupes eussent le temps
de prendre les armes. Je rentrais ŗ mon camp avec sťcuritť quand je vis
la plaine couverte de cavalerie lťgŤre. Cette cavalerie en dťsordre
marchait dans notre direction et s'avanÁait sur nous. Je supposai que
les Wurtembergeois, attaquťs brusquement, fuyaient. Je fis prendre les
armes immťdiatement aux troupes. Je fis battre la gťnťrale. C'ťtait la
premiŤre fois dans ma vie que j'employais devant l'ennemi ce moyen
d'avertissement. En un petit nombre de minutes, les troupes furent en
ligne, formťes et en ťtat de combattre. La cavalerie en vue approcha.
Elle ťtait composťe de Cosaques. Normam, avec sa brigade, avait passť ŗ
l'ennemi.
Un instant aprŤs, la cavalerie saxonne, placťe au dedans de nos lignes,
s'ťbranla et marcha dans la direction de l'ennemi. Je crus d'abord
qu'elle allait se mettre en ligne dans un de nos nombreux intervalles;
mais je reconnus bientŰt ses intentions. Formťe en colonne, ses chevaux
de main ťtaient en tÍte. Elle dťpassa rapidement la ligne des troupes
franÁaises, fut reÁue dans les rangs ennemis, et promptement imitťe par
l'infanterie et l'artillerie; mais, chose odieuse! cette artillerie, ŗ
peine arrivťe ŗ une certaine distance, s'arrÍta, se mit en batterie et
tira sur nous. La diminution de nos forces nous obligea ŗ raccourcir
notre ligne. Je portai ma droite en arriŤre et la plaÁai dans la
direction de Wolkmann, plus rapprochťe de Leipzig. Ma ligne fut
complťtťe au moyen de la division Delmas, du troisiŤme corps, qui vint
remplir le vide fait par le dťpart des Saxons et occuper Wolkmann. Les
troupes que j'avais en tÍte se trouvaient Ítre composťes des deux armťes
de Silťsie et du Nord. Les Suťdois se trouvaient ŗ leur droite et
vis-ŗ-vis de ma gauche.
L'ennemi dirigea ses principales attaques sur ce point. Il dťploya
devant nous cent cinquante bouches ŗ feu. C'ťtait beaucoup; car mon
artillerie, fort diminuťe par les pertes de l'avant-veille, avait
trŤs-peu de munitions. Il fallut les mťnager, et cependant bientŰt elles
s'ťpuisŤrent. L'ennemi rapprochait son canon, mitraillait un carrť.
Cette troupe, ainsi foudroyťe, perdait du terrain, et alors j'allai la
joindre et lui ordonner de s'arrÍter. Je restai avec elle pour partager
son sort et l'encourager; mais bientŰt un autre carrť, plus maltraitť
encore, fit un mouvement de retraite. Je fus forcť de courir ŗ lui pour
lui tenir le mÍme langage et lui donner le mÍme exemple.
Pendant ce temps, les attaques sur Schoenfeld se succťdaient, et ce beau
et grand village fut pris et repris sept fois. Jamais l'ennemi ne
parvint ŗ s'en emparer complťtement. Les troupes de ma deuxiŤme division
et un dťtachement de la troisiŤme eurent la gloire de cette dťfense
hťroÔque. Elles comptaient pour rien le nombre de leurs ennemis et
soutinrent le combat prŤs de huit heures. ņ la fin de la journťe, mon
artillerie ťtant entiŤrement dťmontťe ou sans munitions, et l'ennemi
s'ťtant tellement rapprochť avec la sienne, qu'il n'y avait plus moyen
d'y tenir, mes troupes firent un lťger mouvement en arriŤre; mais,
l'artillerie du troisiŤme corps ťtant venue ŗ notre secours, ainsi que
la division Ricard, le village de Schoenfeld fut repris une huitiŤme
fois, et ainsi finit cette malheureuse, mais glorieuse journťe. Notre
perte fut considťrable en tuťs et en blessťs, surtout en officiers,
parmi lesquels huit officiers gťnťraux de mon seul corps d'armťe.
Pour donner une idťe exacte de la maniŤre dont nous nous sommes battus
pendant ces deux cťlŤbres journťes, je dirai seulement ce qui concerne
mon ťtat-major et moi-mÍme. Mon chef d'ťtat-major et le sous-chef furent
frappťs ŗ mes cŰtťs[6]; quatre aides de camp furent tuťs, blessťs ou
pris; sept officiers d'ťtat-major furent ťgalement tuťs ou blessťs[7].
Quant ŗ moi, j'eus un coup de fusil ŗ la main, une contusion au bras
gauche, une balle dans mon chapeau, une balle dans mes habits, quatre
chevaux tuťs ou blessťs sous moi[8]. Sur trois domestiques qui
m'accompagnaient, deux furent blessťs et eurent leurs chevaux tuťs.
Partout cependant nous avions rťsistť; partout nous avions conservť nos
positions. Les troupes s'ťtaient surpassťes en ťnergie et en courage, et
elles en avaient bien le sentiment. Jamais je n'ai vu les miennes plus
fiŤres de ce qu'elles avaient fait.
[Note 6: Le gťnťral Richemont, chef d'ťtat-major, tuť; l'adjudant
gťnťral Lerasseur, sous-chef d'ťtat-major, eut la cuisse fracassťe par
un boulet. (_Note de l'…diteur._)]
[Note 7: Entre autres, Laclos, chef de bataillon, tuť; le capitaine
de Charnailles, blessť et fait prisonnier; le capitaine Komierouski, la
cuisse cassťe; le lieutenant Perrťgaux, le lieutenant de Bonneval, le
lieutenant Martin, le lieutenant Baraguey-d'Hilliers, le poignet
emportť; le capitaine Jules de Mťry, prisonnier.--Nous n'avons pu nous
procurer les noms des autres officiers; mais il suffit de remarquer que,
parmi les aides de camp du marťchal, les seuls restťs debout furent le
colonel Denys de Damrťmont, premier aide de camp, et le
lieutenant-colonel Fabvier. (_Note de l'…diteur._)]
[Note 8: Le duc de Raguse, comme on l'a vu dans ses _Mťmoires_,
avait ťtť blessť en Espagne. Il fit toute la campagne de 1813 le bras en
ťcharpe; il n'ťtait pas encore guťri lorsqu'il reÁut ces derniŤres
blessures. (_Note de l'…diteur._)]
Cependant il n'y avait plus un moment ŗ perdre pour nous retirer et pour
h‚ter une retraite rendue difficile par la position particuliŤre ŗ
Leipzig, les embarras causťs par tant de corps d'armťe agglomťrťs et les
dťfilťs qu'il fallait traverser. De nombreux ponts auraient dŻ Ítre
construits sur l'Elster pour donner moyen ŗ l'infanterie de marcher sur
diverses colonnes ŗ la fois, en laissant la chaussťe libre ŗ
l'artillerie, ŗ la cavalerie et aux ťquipages; mais on n'en avait fait
aucun. L'ťtat-major n'en avait pas reÁu l'ordre et n'en eut pas la
pensťe. On aurait cru que des officiers seraient prťposťs pendant toute
la nuit pour veiller ŗ la sortie de l'artillerie et ŗ la marche
rťguliŤre de cet immense matťriel. Rien de semblable ne fut ordonnť. Les
voitures, placťes sur trois ou quatre colonnes parallŤles sur les
boulevards de Leipzig, se trouvant dans l'impossibilitť d'avancer faute
d'ordre, les soldats du train s'endormirent, et tout resta ainsi en
confusion jusqu'au 19 au matin. Alors il fallut prendre position dans
les faubourgs de la ville, afin de les dťfendre autant que possible et
de retarder l'entrťe de l'ennemi de quelques heures pour faciliter la
sortie de cette artillerie, dont on ťtait encombrť; mais, aucune
reconnaissance prťliminaire n'ayant ťtť faite, aucun de nous ne
connaissait les localitťs, les points ŗ occuper, les issues ŗ garder.
Les jardins qui entourent Leipzig rendaient d'ailleurs la dťfense
difficile. Les troupes ne pouvant pas circuler, se mouvoir et se porter
d'un point sur l'autre, l'ennemi, dans ce labyrinthe, trouva facilement
des passages pour pťnťtrer. Quelques troupes ennemies une fois entrťes,
la crainte et le dťsordre se mirent parmi nos soldats, et toute dťfense
devint impossible.
Chargť d'occuper le faubourg de Halle et de le dťfendre, je pris
position, le 19, de grand matin. Le troisiŤme corps ťtait sous mes
ordres.
Je plaÁai la plus grande partie de mes troupes ŗ la porte mÍme de Halle
et derriŤre la Partha, afin d'empÍcher l'ennemi d'arriver plus tŰt que
nous sur la communication de Lindenau, notre point de retraite, objet de
la plus grande importance. Je chargeai la division Ricard de la barriŤre
de Schoenfeld, se liant par sa droite avec le onziŤme corps qui
dťfendait la porte de Dresde. Je plaÁai en rťserve la plus grande partie
du sixiŤme corps dans les vergers, entre la barriŤre de Schoenfeld et la
porte de Halle, les troupes ne pouvant pas se former sur le boulevard,
occupť par une grande quantitť de voitures.
Nous ťtions ŗ peine formťs lorsque l'ennemi, ayant rťuni beaucoup
d'artillerie et de troupes, attaqua le onziŤme corps dans le faubourg de
Dresde. Ses attaques parvinrent peu aprŤs ŗ la barriŤre de Schoenfeld;
mais le canon qu'il avait portť de ce cŰtť, ne pouvant dťcouvrir le pied
des maisons et du mur d'enceinte, ne lui ouvrit aucun passage. Ses
tentatives furent repoussťes. Une vaste maison, hors de l'enceinte, une
manufacture, que j'avais fait occuper par un dťtachement du 70e
rťgiment, et dont j'avais donnť le commandement au major Rouget, fit
ťprouver de grandes pertes ŗ l'ennemi, en mÍme temps qu'une compagnie de
carabiniers du 23e lťger sortit de la barriŤre avec la plus grande
impťtuositť et massacra tout se qui s'ťtait avancť. J'avais appelť, au
secours de la division Ricard, la plus grande partie du sixiŤme corps,
et nous repoussions partout l'ennemi. Mais nous ne tard‚mes pas ŗ avoir
des preuves que l'ennemi avait pťnťtrť dans les faubourgs de droite. Il
se prťsenta tout ŗ coup ŗ la droite immťdiate des troupes ŗ mes ordres,
c'est-ŗ-dire ŗ la gauche du onziŤme corps, et entre ce corps et moi. Je
marchai, ŗ la tÍte du 142e et du 23e lťger, pour le chasser des rues
qu'il occupait. Un premier succŤs couronna nos efforts; mais les troupes
ennemies augmentaient sans cesse; elles furent en outre bientŰt
secondťes par le feu des troupes saxonnes et badoises qui occupaient
l'intťrieur de la ville. Cette circonstance rendit nos efforts inutiles.
Le dťsordre ťtait partout. L'encombrement causť par les voitures sur les
boulevards, l'affluence de ceux qui se retiraient, empÍchaient aucune
formation ni aucune disposition. Enfin la terreur emporta tout le monde.
L'on jugera de ses effets quand on saura qu'il y a un boulevard
circulaire entre la ville et les faubourgs, et que, les troupes se
retirant ŗ la fois par le boulevard du Nord, par celui du Midi et par
le milieu de la ville, les trois colonnes se rťunissaient sur la
chaussťe de Lindenau, dťbouchť commun.
La foule ťtait si pressťe sur ce point de rťunion, qu'ayant, pour mon
compte, fait ma retraite par les bas-cŰtťs du boulevard, jamais je ne
pus entrer, sans secours, dans le courant. Deux officiers du 86e s'en
chargŤrent, l'un frappa tellement avec son sabre qu'il parvint ŗ faire
un lťger vide, et l'autre, ayant saisi et tirť fortement la bride du
petit cheval arabe que je montais, le jeta dans cette masse confuse, oý
dans les premiers moments il fut portť, tant la foule ťtait compacte.
Cette foule s'ťcoulait et passait le pont que Napolťon avait fait miner.
J'ignorais cette disposition, et je ne compris pas le sens d'une demande
faite par le colonel du gťnie Montfort, qui s'informa auprŤs de moi de
la troupe destinťe ŗ passer la derniŤre. Je lui rťpondis qu'ŗ la maniŤre
dont la retraite s'opťrait, avec la confusion existante, on devait
croire que c'ťtait le hasard qui en dťciderait. Je continuai ma marche.
Je n'ťtais pas ŗ deux cents pas de ce malheureux pont, lorsqu'une
explosion m'annonÁa qu'il venait de sauter. Douze ou quinze mille hommes
ťtaient encore en arriťre.
Cet ťvťnement funeste fut causť par la vue de quelques Cosaques qui
avaient paru dans la prairie. Le sous-officier de sapeurs qui ťtait
chargť de la mine perdit la tÍte, crut ŗ une attaque, et y mit le feu.
Je rťunis alors une portion de mes troupes sur la rive gauche de
l'Elster, afin de protťger la retraite des hommes restťs en arriŤre, et
de recueillir ceux qui passaient l'Elster ŗ la nage. Je reÁus, en ce
moment, le marťchal Macdonald qui, arrivť trois minutes trop tard, ne
put passer le pont. Il franchit la riviŤre avec plus de bonheur que le
prince Poniatowski qui y pťrit. Quelques hommes aussi se retirŤrent par
un petit pont que l'on avait trouvť le moyen d'ťtablir. La division
Durutte, du septiŤme corps, mise sous mes ordres, prit ťgalement
position dans la prairie dans le mÍme but. Ces troupes y restŤrent tant
que leur prťsence fut utile. Plus tard elles se retirŤrent, et furent
couvertes par l'arriŤre-garde, composťe de deux divisions de jeunes
gardes, que commandait le marťchal duc de Reggio. Elles se trouvŤrent
rťunies ŗ Lindenau.
J'avais alors sous mes ordres les troisiŤme, cinquiŤme, sixiŤme et
septiŤme corps, ou plutŰt leurs misťrables dťbris. J'allai prendre
position ŗ Markranstadt. C'est lŗ que je retrouvai l'Empereur. Il ťtait
fort abattu, et il avait raison de l'Ítre. ņ peine deux mois s'ťtaient
ťcoulťs, et une immense armťe, une armťe de plus de quatre cent
cinquante mille hommes, s'ťtait fondue entre ses mains. C'ťtait la
seconde fois depuis un an qu'il prťsentait au monde ce spectacle de
destruction, dont les temps modernes n'ont pas offert d'autre exemple.
Il lui restait environ soixante mille hommes, composťs en partie de la
garde, en partie des corps de cavalerie qui avaient passť le dťfilť de
Lindenau pendant la nuit, et dans la journťe du 18, et enfin du corps de
Bertrand: seules forces rťguliŤres sur lesquelles il pŻt compter. Ce qui
sortit, le 19, au moment oý l'ennemi entrait ŗ Leipzig, n'avait plus ni
consistance ni organisation.
Le 20, nous nous port‚mes sur Weissenfels. J'occupai, avec les divers
corps sous mes ordres, dont la force ne s'ťlevait pas ensemble ŗ six
mille hommes, les hauteurs de la rive gauche de la Saale, couvrant le
passage de l'armťe contre les troupes ennemies qui auraient pu dťboucher
par Mersebourg. Le lendemain, nous camp‚mes sur les hauteurs de
Freybourg et d'Eckartsberg. Un corps ennemi, venant de Iťna, se montra
sur notre flanc vers Kosen, et voulut gÍner notre marche. Je formai mes
troupes au dťbouchť; je contins l'ennemi, et couvris ainsi les
mouvements de l'armťe. Le 22, nous prÓmes position ŗ Butelstadt; le 23
et le 24, sur les hauteurs d'Erfurth; le 25, ŗ Arsbach; le 26, ŗ Wartas;
le 27, ŗ Buttler; le 28, en avant de Fulde; le 29, ŗ SaalmŁnster.
L'ennemi nous suivait sur diffťrentes colonnes, mais ne pressait pas
notre marche. Il n'y eut qu'un seul engagement sťrieux prŤs de Gotha. La
jeune garde, d'abord aux ordres du marťchal Oudinot, puis ŗ ceux du
marťchal Mortier, faisait l'extrÍme arriŤre-garde, et avant elle
marchait ŗ peu de distance le quatriŤme corps.
Des troupes aussi dťsorganisťes que celles que nous commandions, aussi
harassťes, aussi extťnuťes par les marches, les combats, les revers et
les privations, s'abandonnŤrent bientŰt ŗ l'indiscipline.
L'impossibilitť de faire vivre les soldats par des distributions
rťguliŤres motiva et justifia leurs dispositions. Chacun s'occupa, avant
tout, ŗ trouver sa subsistance; et, comme l'esprit militaire ťtait
ťteint, comme un abattement et un dťgoŻt que rien ne saurait rendre le
remplaÁaient, tous ceux qui s'ťtaient ťloignťs des drapeaux jetŤrent
leurs armes et marchŤrent un b‚ton ŗ la main. Sur soixante mille hommes
qui restaient encore, vingt mille ťtaient ainsi formťs en troupes de
huit ou dix hommes, couvrant toute la campagne, et marchant sur les
flancs des colonnes, bivaquant pour leur compte. Les plaines et les
vallťes ťtaient, chaque nuit, couvertes d'une quantitť de feux ťpars,
et placťs sans rťgularitť. Ces soldats reÁurent de l'armťe un surnom
devenu historique, qui rappelait leur unique occupation, la recherche
des moyens de vivre; on les appela les _fricoteurs_.
Au commencement d'octobre, les nťgociations qui dťjŗ existaient depuis
quelque temps entre l'Autriche et la BaviŤre, prirent un caractŤre
sťrieux, et se terminŤrent par une alliance. L'armťe du gťnťral de
Wrede, qui, dans l'intťrÍt de l'alliance franÁaise, ťtait rassemblťe sur
les bords de l'Inn, et couvrait la BaviŤre contre les troupes de
l'Autriche, commandťes par le prince de Reuss, se rťunit ŗ celles-ci
pour nous attaquer. Se plaÁant sous les ordres mÍmes du gťnťral de
Wrede, elles se mirent en marche pour se porter sur nos derriŤres et
couper nos communications. DŤs le 15 octobre, cette armťe avait commencť
son mouvement. Le 17, elle ťtait ŗ Landshut; le 20, ŗ Nordlingen; le 22,
ŗ Anspach, et le 24 devant WŁrtzbourg. Le gťnťral Tarreau commandait
dans cette ville avec une garnison de douze cents hommes. Il refusa d'en
ouvrir les portes. De Wrede fit mettre en batterie tous les obusiers de
son armťe, et bombarder la ville pendant la nuit, mais sans effet.
Plusieurs sommations ayant ťtť infructueuses, il se disposait ŗ donner
l'assaut ŗ cette ville, dont l'ťtendue ťtait beaucoup trop grande pour
la faible garnison qui l'occupait, lorsque le gťnťral Tarreau consentit
ŗ la lui remettre et ŗ se retirer dans la citadelle. L'armťe
austro-bavaroise continua son mouvement sur Aschaffembourg et sur Hanau.
Son avant-garde entra dans cette ville; mais, chassťe par une premiŤre
colonne qui marchait ŗ deux journťes en avant de l'armťe, les Bavarois,
soutenus par des renforts, y rentrŤrent aprŤs son passage. Obligťs de
nouveau d'ťvacuer la ville et d'attendre la division du gťnťral Lamotte,
cette division et celle du gťnťral de Roy ťtant arrivťes, ils occupŤrent
la ville et les bords de la Kinzig.
Le 29, Wrede dirigea la division Rechberg sur Francfort. Elle y arriva
le 30, et occupa le faubourg de Sachsenhausen. Une avant-garde
autrichienne de cette mÍme armťe se porta sur Gelnhausen, et prit
position ŗ Altenhausen. Toute l'armťe de Wrede, forte de cinquante mille
hommes, ťtait rassemblťe sur le terrain le plus favorable pour agir
contre l'armťe franÁaise. Il eŻt dŻ porter toutes ses forces ŗ l'entrťe
du dťfilť de Gelnhausen; jamais il n'aurait ťtť au pouvoir de l'armťe
franÁaise de dťboucher; mais il se tint timidement dans la plaine, peu
en avant de la Kinzig, et ŗ portťe de repasser cette riviŤre et de se
retirer dans la vallťe du Mein, s'il ťtait battu.
Ce mÍme jour, 29, l'avant-garde de l'armťe franÁaise culbuta la brigade
autrichienne de Wolkmann, placťe ŗ peu de distance de Gelnhausen. Vers
trois heures aprŤs-midi, elle arriva devant Langenselbold qui ťtait
occupť par une division bavaroise. Cette division fut forcťe ŗ se
retirer. L'armťe ennemie s'ťtablit alors de la maniŤre suivante, en
position en avant de Hanau et de la Kinzig. Elle avait cette riviŤre ŗ
dos: sa droite, composťe de la division Becker, appuyťe ŗ la riviŤre et
ŗ la ferme de Neuhof. Venait ensuite une partie de la division
autrichienne du gťnťral de Fresnel. Au delŗ de la route de Francfort
ťtait placťe la division bavaroise de Lamotte. Plus ŗ gauche ťtait la
cavalerie bavaroise et une nombreuse artillerie. Cette ligne ťtait
terminťe par le reste de la division de Fresnel, et des Cosaques qui
voyaient la route de Friedberg. Enfin la division du gťnťral Bach
occupait la ville de Hanau.
Le 30, au matin, l'armťe franÁaise, aussitŰt qu'elle fut ŗ portťe, et
qu'elle put se dťvelopper dans la plaine, mit en action sa cavalerie et
l'artillerie de la garde. La cavalerie aux ordres du gťnťral Sťbastiani
les soutint. L'ennemi, ťcrasť par le feu auquel il fut soumis, pressť
par les charges qu'il eut ŗ supporter, plia. Quand il fut arrivť ŗ la
lisiŤre du bois, plusieurs milliers de tirailleurs furent chargťs de l'y
suivre. Les troupes peu nombreuses du duc de Bellune et du duc de
Tarente reÁurent cette mission. Deux bataillons de chasseurs de la
vieille garde, commandťs par le gťnťral Curial, curent l'ordre de les
soutenir. La maniŤre dont ces deux bataillons se portŤrent en avant et
culbutŤrent ce qu'ils avaient devant eux fut un objet d'admiration pour
ceux qui en furent tťmoins.
Appelť par le feu, dont j'entendais le bruit, et par les ordres que je
reÁus, je h‚tai ma marche et j'arrivai ŗ temps pour prendre part au
combat avec la tÍte de ma colonne. Une charge de six cents hommes faite
dans le bois ŗ l'appui de notre gauche, qui ťprouvait une fort grande
rťsistance, forÁa l'ennemi ŗ repasser la Kinzig. Tout ce qui ťtait sur
la route de Francfort se retira par Hanau, et sortit de cette ville pour
se rťunir ŗ ce qui avait fait sa retraite par le pont de Lamboi. Pendant
la nuit, je fis jeter quelques centaines d'obus dans la ville. L'ennemi
l'ťvacua, et j'en fis prendre possession. Je bivaquai en face de lui. Je
n'en ťtais sťparť que par la Kinzig. Les Bavarois perdirent dans cette
affaire environ six mille hommes. Notre perte fut moindre, vu le petit
nombre de nos combattants et notre succŤs.
L'ennemi tenta de passer la Kinzig le lendemain 31; mais il fut
constamment repoussť par mes troupes. Aucune de ses tentatives ne lui
rťussit; et, quoiqu'il fit soutenir ses mouvements offensifs par une
artillerie formidable et trŤs-supťrieure ŗ la nŰtre, ses troupes furent
constamment rejetťes ou contenues de l'autre cŰtť de la riviŤre. Le
quatriŤme corps, ťtant arrivť, me remplaÁa. Quand il fut en position, je
continuai mon mouvement sur Francfort. Alors de Wrede prit l'offensive ŗ
la fois sur la riviŤre et sur la ville. Cette derniŤre attaque
rťussissant, il voulut dťboucher sur la grande route; mais ce gťnťral,
arrivť sur le pont, reÁut une balle dans le bas-ventre. L'artillerie de
la division Morand ayant en mÍme temps mitraillť la colonne ennemie,
elle plia. Une brigade italienne chargea l'ennemi avec vigueur, le
culbuta et reprit la ville. Le soir, le gťnťral Bertrand replia ses
postes et se retira sur Francfort. L'arriŤre-garde, commandťe par le
marťchal Mortier, ťvita de passer ŗ Hanau, et se retira de Gelnhausen
directement sur Hochstadt, oý elle arriva sans Ítre inquiťtťe.
Le 1er novembre, je me rendis ŗ Hochstadt, sur la Nidda. Le pont sur
cette riviŤre avait ťtť coupť par l'ordre du marťchal Kellermann,
commandant ŗ Mayence. Ce gťnťral, sans garnison dans cette forteresse,
n'avait ŗ sa disposition que quelques dťpŰts. Craignant l'arrivťe de
l'armťe de Wrede, il avait cherchť, avec raison, ŗ lui crťer des
obstacles pour retarder sa marche. Le 2 novembre, j'entrai ŗ Mayence.
Mes troupes s'y ťtablirent, ainsi que dans les environs.
Notre retour sur le sol de l'Empire semblait mettre un terme ŗ nos
malheurs: mais ce ne devait Ítre qu'une suspension momentanťe ŗ nos
souffrances. Nous ťtions destinťs ŗ Ítre, plus tard, accablťs par bien
d'autres infortunes et bien d'autres misŤres.
CORRESPONDANCE ET DOCUMENTS
RELATIFS AU LIVRE DIX-HUITI»ME.
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęBautzen, le 6 septembre 1813, dix heures du matin.
ęD'aprŤs de nouvelles dispositions, monsieur le duc de Raguse,
l'Empereur ordonne qu'au lieu de vous porter sur Hoyerswerda vous
partiez sur-le-champ, avec votre corps d'armťe, pour vous diriger sur
_Dresde_ en passant par _KŲnigsbrŁck_. Faites-moi connaÓtre toujours oý
vous serez, afin que je puisse vous envoyer des ordres.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęBautzen, le 6 septembre 1813, dix heures du matin.
ęMon cousin, rendez-vous aujourd'hui sur _Kamens_ et _KŲnigsbrŁck_,
pour pouvoir arriver demain ŗ Dresde, s'il est nťcessaire. Je vais
moi-mÍme m'approcher aujourd'hui de Dresde, et je verrai si les choses
sont aussi sťrieuses que paraÓtrait l'annoncer la dťpÍche du marťchal
Saint-Cyr. Si cela ťtait moins sťrieux, de la petite ville de
_KŲnigsbruck_ et de _Kamens_ vous pourriez toujours vous reporter sur
_Hoyerswerda_. Emmenez tout ce qui appartient ŗ votre corps, et ne
laissez personne ŗ Bautzen.--Le gťnťral _Normam_ ayant marchť du cŰtť de
KŲnigsbruck, vous le prendrez sous vos ordres: il sera nťcessaire que
vous l'employiez ŗ flanquer votre marche.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 7 septembre 1813.
ęIl est neuf heures du matin, monsieur le duc. L'Empereur suppose que
vous avez reÁu la lettre que je vous ai ťcrite ŗ quatre heures du matin.
Jusqu'ŗ ce moment, l'ennemi ne paraÓt pas avoir de monde ŗ
Dippoldiswald, et nous sommes toujours dans l'opinion que le mouvement
que l'ennemi fait sur la rive gauche de l'Elbe a pour but de rappeler
l'Empereur de son mouvement sur la Neisse.
ęNous recevons des nouvelles du prince de la Moskowa; il a attaquť
l'ennemi le 5 ŗ deux lieues de Wittenberg; il l'a battu et repoussť
jusqu'ŗ cinq lieues sur la route de Interburg. L'Empereur pense donc
qu'il sera utile que vous vous rendiez ŗ Hoyerswerda, et de lŗ pousser
une avant-garde sur _Kalau_. Arrivť ŗ _Lukau_, vous ne serez qu'ŗ trois
fortes marches de Dresde, et ŗ mÍme distance de Berlin. Sa Majestť pense
donc que vous devez diriger de suite la valeur d'une division sur
Hoyerswerda, et garder pendant toute la journťe d'aujourd'hui votre
troisiŤme division ŗ Kamens, pour bien rallier tous vos traÓneurs.
ęVous trouverez ci-joint un ordre qui met le gťnťral Lhťritier ŗ votre
disposition. Ce gťnťral est ŗ Grossenhayn; il pourra vous rejoindre par
Elsterwerda, Senftenberg, ou par Sonnenwald. Comme il a deux bataillons
d'infanterie, quelques piŤces de canon et plus de deux mille chevaux,
s'il marche rťuni et avec prťcaution, il n'aura rien ŗ craindre dans sa
marche pour flanquer votre gauche.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęLubestadt, le 10 septembre 1813, neuf heures du matin.
ęMonsieur le duc de Raguse, l'intention de l'Empereur est que vous
restiez ŗ Dresde, et que vous avez l'oeil sur tout ce qui se passe.
ęLa position de l'armťe est aujourd'hui ainsi qu'il suit:
ęLe prince de la Moskowa et les trois corps qui ont essuyť un ťchec,
dans la journťe du 6, se rallient ŗ Torgau;
ęLe duc de Tarente vient prendre position avec son armťe aujourd'hui 10,
en avant de Bautzen. Le prince Poniatowski garde la droite; cette
retraite n'ťtait pas nťcessitťe, elle a ťtť ordonnťe par l'Empereur pour
concentrer nos forces;
ęLe gťnťral Lhťritier est ŗ Grossenhayn en observation;
ęLe sixiŤme corps est ŗ Dresde avec la brigade Pirť;
ęLe gťnťral Margaron, avec un corps de huit ŗ dix mille hommes,
cavalerie, infanterie et artillerie, est ŗ Leipzig;
ęLe marťchal Saint-Cyr, soutenu par les premier et deuxiŤme corps,
marche sur les hauteurs de Toeplitz;
ęUne division de la jeune garde est ŗ Dresde;
ęLe duc de Trťvise, avec les autres divisions, est ŗ Pirna, occupant
GieshŁbel.
ęLes corps russes et prussiens, et quelques Autrichiens qui occupaient
Borna, GieshŁbel et Altenbourg, se sont mis successivement en retraite
dans la journťe d'hier.
ęDans cette situation des choses, il est probable que ce mouvement
offensif en BohÍme rappellera les corps que l'ennemi avait jetťs sur
Freyberg et Zwickau, si tant est que l'ennemi ait jetť des corps dans
cette direction. Si l'ennemi n'a jetť que des partis, il est possible
qu'il les laisse, mais alors, monsieur le marťchal, vous pouvez faire
faire de fortes patrouilles sur Freyberg pour les poursuivre.
ęIl est nťcessaire, monsieur le duc, que vous receviez la correspondance
du gťnťral Lhťritier, que vous le souteniez s'il est nťcessaire; il faut
aussi que vous vous mettiez en correspondance avec le prince de la
Moskowa, le duc de Tarente et le prince Poniatowski.
ęIl est possible que l'Empereur soit de retour dans la journťe de demain
ŗ Dresde; Sa Majestť peut dans un jour rťunir toute sa garde et le corps
du gťnťral Latour-Maubourg ŗ votre corps d'armťe. Il est possible aussi
que, si l'Empereur trouve quelque mal ŗ faire ŗ l'ennemi, il reste
encore ťloignť de Dresde pendant quelques jours.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 12 septembre 1813.
ęL'Empereur ordonne, monsieur le duc, que vous vous mettiez en marche
demain 13, ŗ cinq heures du matin, avec votre premiŤre division; vous
vous ferez suivre par votre seconde division, qui partira ŗ six heures,
et par votre troisiŤme division qui partira ŗ sept heures du matin. Vous
vous dirigerez sur Grossenhayn, afin de chasser l'ennemi de la rive
droite de l'Elbe entre Torgau et Dresde, et de favoriser un convoi de
quinze mille quintaux de farine qui de Torgau doit venir ŗ Dresde.
L'arrivťe de ce convoi est de la plus haute importance, puisqu'elle
assurerait des subsistances pendant plusieurs mois sur notre point de
rťunion de Dresde.
ęSa Majestť le roi de Naples part demain avec le premier corps de
cavalerie pour Grossenhayn; il prendra aussi sous ses ordres le
cinquiŤme corps de cavalerie qui s'y trouve, et, soutenu par votre
corps, il manoeuvrera de maniŤre ŗ rendre libre l'Elbe, afin que le
convoi de quinze mille quintaux de farine puisse arriver ŗ Dresde, et de
maniŤre aussi ŗ ťclairer tout ce qu'il y a d'ennemis de ce cŰtť.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 14 septembre 1813.
ęMonsieur le marťchal duc de Raguse, je mande au roi que, si le but de
son expťdition est rempli, c'est-ŗ-dire si le convoi parti de Torgau le
13 a passť les points dangereux, le roi partirait demain au jour avec sa
cavalerie pour se rendre ŗ Dresde: il paraÓt que l'ennemi veut dťboucher
par Peterswald. Dans ce cas, l'intention de Sa Majestť serait que vous
fissiez partir demain, deux heures avant le jour, la division de votre
corps la plus rapprochťe de Dresde, et que vous arrivassiez de votre
personne avec cette division: le reste de votre corps d'armťe suivrait.
Il serait alors important, monsieur le duc, que vous arrivassiez le plus
tŰt possible avec votre division, afin d'avoir l'oeil sur tout.
L'Empereur sera ce soir ŗ Pirna. Le gťnťral Lhťritier s'ťchelonnerait de
Grossenhayn sur Dresde pour protťger le passage du convoi de farine:
l'arrivťe de ce convoi est de la plus haute importante et la premiŤre
considťration. L'Empereur veut ŗ son tour attaquer l'ennemi et
vigoureusement. Je vous ťcrirai dans la nuit: envoyez-moi un officier.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 15 septembre 1813, deux heures du matin.
ęMon cousin, quinze ŗ vingt mille hommes ont dťbouchť hier par
Peterswald, ce qui a obligť le comte de Lobau ŗ prendre la position de
GieshŁbel; mais, comme l'ennemi n'a point attaquť en mÍme temps Borna,
cela ne s'annonce point comme un mouvement d'armťe. Il me tarde
d'apprendre que le convoi de vivres est passť. Vous devez faire, ainsi
que le roi de Naples, tout pour faire arriver ce convoi. Cela fait, il
faudra vous tenir prÍt ŗ agir d'aprŤs les circonstances, et ŗ revenir ŗ
Dresde si cela est nťcessaire. Vous aurez, dans la journťe, des
nouvelles positives de ce qui se sera passť. Je compte me rendre prŤs de
Pirna, pour Ítre plus rapprochť de ce qui aura lieu de ce cŰtť. J'espŤre
que, si hier 14 vous n'avez pas eu de nouvelles du convoi, vous en aurez
aujourd'hui 15. Si vous avez la nouvelle qu'il a passť, prťparez-vous ŗ
faire un mouvement; mais ne vous pressez pas de le faire jusqu'ŗ ce que
vous ayez les nouvelles de la journťe.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęPirna, le 16 septembre 1813, neuf heures du matin.
ęL'Empereur a chassť hier l'ennemi au delŗ de Peterswald, mais il occupe
encore le col des hautes montagnes, entre Peterswald et Nollendorf. Sa
Majestť le fera attaquer aujourd'hui ŗ midi pour le chasser et le
rejeter entiŤrement au delŗ des montagnes.
ęSa Majestť a appris avec plaisir la nouvelle du convoi; votre prťsence,
monsieur le marťchal, ainsi que celle du roi, dans toutes ces
directions, est utile, parce qu'elle menace Berlin; Sa Majestť suppose
d'ailleurs que cela fait un moment de repos pour votre corps, comme pour
la grosse cavalerie.
ęSa Majestť a dťjŗ fait connaÓtre qu'il fallait occuper Radebourg et
KŲnigsbruck. Elle suppose que cela est fait; elle suppose aussi qu'on se
sera mis en correspondance avec le prince de la Moskowa en ťtablissant
un bateau ŗ la hauteur de l'endroit oý se trouve le roi.
ęL'Empereur dťsire, monsieur le marťchal, que vous envoyiez un officier
reconnaÓtre le ch‚teau de Meissen, le pont, la tÍte de pont: savoir si
elle est armťe et si tout est en bon ťtat.
ęLe prince vice-connťtable, major-gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęPirna, le 20 septembre 1813, quatre heures du matin.
ęMon cousin, la journťe d'hier et cette nuit sont si horribles, qu'il
n'y a pas moyen de bouger.--Le duc de Tarente a donnť une fausse alarme.
Vous devez rester, jusqu'ŗ nouvel ordre, dans votre position; il n'est
pas probable que l'infanterie ennemie ose s'avancer. Si cela ťtait, je
viendrais vous renforcer et nous livrerions bataille, ce qui serait une
chose bien avantageuse, mais qui paraÓt opposťe ŗ leur systŤme. La
grande affaire de ce moment paraÓt Ítre de conserver les armes et les
cartouches le plus possible.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęHarta, le 23 septembre 1813, une heure aprŤs midi.
ęMon cousin, l'ennemi a repassť en dťsordre la Sprťe. Le duc de Tarente
doit, dans ce moment, Ítre entrť ŗ Bautzen.--Mon intention est de faire
remplacer le gťnťral Normam par une colonne du corps du duc de Tarente
dans la journťe de demain et de vous donner ordre de vous replier demain
sur Meissen. AussitŰt que le roi de Naples sera revenu ŗ Dresde, le
gťnťral Latour-Maubourg sera sous vos ordres. Je dirige sur Meissen le
troisiŤme corps, qui sera ťgalement sous vos ordres. Il arrivera ŗ
Meissen le 25 ou au plus tard le 26.--Cela vous fera une forte armťe,
avec laquelle vous serez prÍt ŗ vous porter partout oý les circonstance
l'exigeraient. Faites prťparer des vivres ŗ Meissen et dans les
bailliages environnants. J'attache une haute importance au pont de
Meissen. Pressez les travaux du pont de Meissen, et fournissez tous les
ouvriers nťcessaires aux travaux de la tÍte de pont. Il est inutile de
changer le pont de bateaux, puisque j'espŤre que, sous huit jours, le
pont de pierre sera rťparť.--J'aurai un pont ŗ Koenigstein, un pont ŗ
Pirna, un pont ŗ Pilnitz, trois ponts ŗ Dresde et un pont ŗ Meissen.
J'ai ordonnť de construire, ŗ une demi-lieue en avant du camp retranchť
de la rive droite ŗ Dresde, deux redoutes, l'une sur la route de Berlin,
et l'autre sur celle de Bautzen. Le duc de Tarente est chargť de la
garde de camp retranchť, et occupera tous les dťbouchťs de la forÍt par
des postes retranchťs ŗ deux lieues en avant.--Par ce moyen, je pourrai
disposer des troisiŤme, cinquiŤme et huitiŤme corps, et de la plus
grande partie de la cavalerie du gťnťral Sťbastiani, ainsi que de toute
ma garde. Avec ces forces, je battrai l'ennemi de l'oeil, afin de
profiter de la premiŤre faute qu'il pourrait faire.--Envoyez un officier
au prince de la Moskowa pour lui faire connaÓtre verbalement le contenu
de cette lettre, afin d'ťviter que celui-ci puisse tomber entre les
mains de l'ennemi.--Le gťnťral Lefebvre-Desnouettes a battu Thielmann et
a rťtabli la communication avec Erfurth. Je viens aussi de recevoir sept
estafettes de Paris tout ŗ la fois.--Le cinquiŤme corps de cavalerie
restera ŗ Grossenhayn, et sera chargť de couvrir les routes de Meissen,
de Moritzbourg, etc.--Tenez vos postes en avant de Meissen le plus loin
que vous pourrez et aussi longtemps qu'il sera possible.--Faites
travailler, je vous le rťpŤte, avec la plus grande activitť ŗ la tÍte de
pont de Meissen en faisant relever vos ouvriers trois ŗ quatre fois par
jour.--Vous verrez, par les ordres que vous recevrez du major gťnťral,
que, dŤs que vous aurez repassť l'Elbe, vous devez placer vos postes de
maniŤre ŗ garder parfaitement la rive gauche jusqu'ŗ Torgau. Le
troisiŤme corps y sera plus particuliŤrement destinť.--Je vous ťcrirai
plus en dťtail de Dresde, oý je serai ce soir.
ęNAPOL…ON.Ľ
ęP. S. Ne faites aucun mouvement que vous n'en receviez l'ordre du major
gťnťral.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęHarta, le 24 septembre 1813, cinq heures du matin.
ęMon cousin, j'ai reÁu votre lettre du 23, ŗ une heure aprŤs-midi. Les
renseignements que vous me donnez sont lťgers et vagues. Vous ne me
faites pas connaÓtre de quelle nation ťtaient les troupes qui ont campť
ŗ deux lieues de vous, ni d'oý elles venaient, ni ce qu'elles ont fait.
Il paraÓt que le gťnťral Sacken s'ťtait retirť sur Kamens; mais il est
probable qu'il se sera portť ensuite sur Bautzen, oý le duc de Tarente
doit entrer ce matin. Nous allons en avoir des nouvelles
positives.--Vous aurez probablement fait raccommoder le pont de Meissen.
Vous y aurez envoyť ŗ cet effet des sapeurs.--Je suis ťtonnť qu'hier, ŗ
une heure aprŤs midi, vous n'eussiez pas encore reÁu ma lettre relative
ŗ la reconnaissance du gťnťral Delmas sur Kamens.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 25 septembre 1815.
ęMon cousin, j'ai reÁu votre lettre du 24. J'ai ordonnť
qu'effectivement, sans dťfaire le pont actuel, on ťtablit des piles sur
bateaux, qui nous donneront, sous quarante-huit heures, le passage du
pont de pierre. Faites exťcuter cet ordre. Cela fera deux ponts au lieu
d'un, ce qui nous sera avantageux jusqu'ŗ ce que nous ayons
dťfinitivement un vťritable pont.--Donnez des ordres pour qu'ŗ Meissen
on ne laisse plus descendre aucun bateau pour Torgau, puisque la riviŤre
n'est pas libre.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 27 septembre 1813, dix heures du matin.
ęMonsieur le duc de Raguse, l'Empereur ordonne que vous portiez votre
quartier gťnťral ŗ Wurtzen, et que vous placiez vos trois divisions,
l'une prŤs de Eulenbourg, une autre ŗ Wurtzen, et une autre entre
Wurtzen et Meissen: par exemple ŗ la petite ville d'Oschatz ou dans
celle de MŁgeln.
ęQuant au premier corps de cavalerie du gťnťral Latour-Maubourg,
l'intention de l'Empereur est que vous le placiez ŗ Dahlen et Schilda,
si toutefois il y a du fourrage dans ces endroits.
ęVous laisserez une brigade de grosse cavalerie et une brigade
d'infanterie ŗ Meissen, jusqu'ŗ ce qu'elles y soient relevťes.
ęJe donne l'ordre ŗ cinq cents hommes montťs du 3e de hussards et du 27e
de chasseurs, appartenant au cinquiŤme corps de cavalerie, qui sont ŗ
Wilsdruff, de se rendre ŗ Meissen pour y relever la brigade de cavalerie
que vous aurez laissťe dans cette place.
ęL'intention de l'Empereur, monsieur le marťchal, est que vous formiez
cinq colonnes, chacune de trois ŗ quatre cents hommes de cavalerie et
d'un bataillon d'infanterie; les trois premiŤres seront destinťes ŗ
occuper la position vis-ŗ-vis MŁhlberg, la petite ville de Strehla et
les positions entre Strehla et Meissen, chacune de ces colonnes ayant
six piŤces de canon sur le bord de la riviŤre. Les deux autres seront
destinťes ŗ aller en partisans pour nettoyer tout ce qui se trouverait
entre Torgau et Dresde, Colditz et Meissen, et il suffira que ces
derniŤres colonnes aient deux piŤces d'artillerie.
ęLe gťnťral Margaron a sous ses ordres, ŗ Leipzig, diffťrents
dťtachements appartenant au premier corps de cavalerie; il a dťjŗ dŻ
faire rejoindre ceux qui faisaient partie des brigades Pirť et Valin; il
doit lui rester les suivants:
PREMI»RE DIVISION ET CAVALERIE L…G»RE, G…N…RAL BERKEIM.
Hommes. Chevaux. Hommes. Chevaux.
1er de chevau-lťgers. 128 -- 135 }
3e _id._ 63 -- 71 } 352 -- 393
5e _id._ 94 -- 104 }
8e _id._ 67 -- 83 }
2e de cuirassiers. 37 -- 36 }
3e _id._ 9 -- 13 }
6e _id._ 109 -- 116 } 219 -- 244
9e _id._ 21 -- 21 }
7e de dragons 31 -- 35 }
19e de chasseurs. 12 -- 23 }
----- -----
Total 571 -- 637
ęLa division Berkeim ťtant avec le deuxiŤme corps, je donne l'ordre au
gťnťral Margaron d'envoyer les quatre premiers dťtachements ci-dessus ŗ
Freyberg pour rejoindre leurs corps. Quant aux six autres dťtachements,
je lui prescris de les diriger sur Wurtzen et de vous informer de leur
marche. Je vous prie, monsieur le marťchal, de m'instruire de leur
arrivťe et de les faire rťunir ŗ leurs rťgiments respectifs.
ęPour le prince vice-connťtable, major gťnťral.
ęLe gťnťral de division, chef de l'ťtat-major.
ęComte MONTHION.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 27 septembre 1813, quatre
heures et demie du matin.
ęMonsieur le marťchal, j'ai mis sous les yeux de l'Empereur votre lettre
du 26, qui rendait compte que votre quartier gťnťral ťtait ŗ Ocrill.
L'intention de Sa Majestť est que vous fassiez passer l'Elbe au sixiŤme
corps d'armťe et au premier corps de cavalerie, et que vous vous
ťchelonniez sur Torgau. Il serait convenable de ne faire occuper le bord
de la riviŤre que par des troupes lťgŤres et de prendre une route qui ne
serait soumise ni en vue de la rive droite.
ęLe cinquiŤme corps de cavalerie devra s'approcher de Dresde de maniŤre
ŗ garder les routes de Dresde, Radenbourg, Grossenhayn et Meissen dans
la position la plus favorable. Grossenhayn se trouvant trop loin, il ne
sera pas possible qu'on puisse garder cette place lorsque vous aurez
quittť Meissen. Le quartier gťnťral du cinquiŤme corps de cavalerie
pourrait Ítre placť ŗ Moritzbourg.
ęGardez en force la tÍte de pont de Meissen; faites-moi connaÓtre si
tous les blockhaus qui ont ťtť ťtablis de Meissen ŗ Torgau sont garnis
de troupes, afin d'Ítre assurť que la route soit gardťe.
ęSi l'infanterie ennemie s'approchait trop de Meissen pendant que vous y
serez, dťbouchez sur elle et donnez-lui une leÁon. Le prince de la
Moskowa a repoussť, le 24, l'ennemi entre Wittenberg et Torgau. Vous en
aurez sŻrement reÁu des nouvelles.--L'Empereur en attend ŗ chaque
instant, et il est probable que, dans la journťe, il vous enverra de
nouveaux ordres pour prononcer votre mouvement sur Leipzig ou Torgau; ce
sera sans doute sur Torgau. Faites en sorte que votre premiŤre division
prenne une direction intermťdiaire et que l'ennemi ne puisse connaÓtre
dťfinitivement celle que vous suivrez.
ęPour le prince vice-connťtable, major-gťnťral,
ęLe gťnťral de division, chef de l'ťtat-major,
ęComte MONTHION.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 27 septembre 1813, neuf heures du matin.
ęMon cousin, votre premiŤre division arrivera demain ŗ Eilenbourg; votre
seconde ŗ Wurtzen, et votre troisiŤme ŗ Oschatz. La cavalerie du gťnťral
Latour-Maubourg sera sur Dahlen et Schilda. Votre quartier gťnťral sera
demain ŗ Wurtzen. Vous donnerez ordre qu'une brigade de grosse cavalerie
reste ŗ Meissen jusqu'ŗ ce qu'elle y soit relevťe par six cents hommes
de cavalerie qui appartiennent au cinquiŤme corps et qui sont
aujourd'hui ŗ Wilsdruf.--Tenez votre quartier gťnťral toute la journťe
d'aujourd'hui ŗ Meissen.--Vous formerez trois colonnes, chacune de trois
ŗ quatre cents hommes de cavalerie, un bataillon d'infanterie et six
piŤces d'artillerie ŗ cheval. Vous aurez soin que ces colonnes soient
bien commandťes, et vous en enverrez une vis-ŗ-vis MŁhlberg, une sur
Strehla et la troisiŤme entre Strehla et Meissen, sur les points oý il y
avait des bacs. Ces colonnes battront toute la rive et empÍcheront tout
passage; elles feront construire des blockhaus intermťdiaires entre ceux
qui existent dťjŗ, de maniŤre qu'au lieu qu'il y en ait toutes les deux
lieues il y en ait de lieue en lieue; elles feront voir qu'elles ont de
l'artillerie en la promenant le long de la riviŤre pour la montrer
tantŰt d'un cŰtť, tantŰt de l'autre, et elles dťtruiront ŗ coups de
canon tous les bateaux de l'ennemi.--Vous formerez deux autres colonnes,
chacune de trois ŗ quatre cents hommes de cavalerie lťgŤre, cinq cents
hommes d'infanterie et deux piŤces d'artillerie. Vous les ferez
commander par des officiers intelligents qui concerteront leurs
mouvements avec le prince Poniatowski, le gťnťral Lefebvre-Desnouettes,
le gťnťral Lorge et le duc de Padoue, pour courir aprŤs les partisans
ennemis et faire en sorte qu'il n'y en ait aucun entre Leipzig et
l'Elbe.--Faites une instruction pour toutes ces colonnes: elles ne
doivent jamais passer la nuit dans le lieu oý elles auraient vu coucher
le soleil. Toutes ces colonnes doivent Ítre trŤs-actives, correspondre
entre elles et purger entiŤrement le pays des partis ennemis.--Le prince
Poniatowski est ŗ Waldheim; sa cavalerie lťgŤre est ŗ Colditz; elle se
liera donc avec la vŰtre. Le gťnťral Lefebvre-Desnouettes est ŗ
Altenbourg, et le duc de Padoue a beaucoup de cavalerie ŗ Leipzig.
Mettez-vous en correspondance avec lui. Le prince de la Moskowa est ŗ
Pretsch et ŗ Kemberg.--Dans cette position, vous serez ŗ portťe de vous
joindre au prince de la Moskowa pour couvrir Leipzig et couper ŗ
l'ennemi le chemin de l'Elbe, ou bien de prendre l'offensive par
Wittenberg pour faire tomber tous les ponts de l'ennemi, ou enfin
revenir sur Dresde, sur Chemnitz ou sur Altenbourg, pour s'opposer aux
mouvements que l'ennemi pourrait faire de la BohÍme. Le duc de Bellune
est ŗ Freyberg.--Il va vous arriver d'Erfurth trois mille hommes
d'infanterie pour votre corps.--Je donne ordre au gťnťral Margaron de
renvoyer au premier corps de cavalerie les mille hommes de ce corps
qu'il a ŗ Leipzig.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 28 septembre 1813.
ęMonsieur le marťchal duc de Raguse, je vous prťviens que, d'aprŤs les
intentions de l'Empereur, je donne l'ordre au gťnťral Lhťritier de
rťunir tout le cinquiŤme corps de cavalerie ŗ Meissen et de rester dans
cette place. Ce gťnťral formera deux colonnes, chacune de quatre ŗ cinq
cents chevaux, avec deux piŤces d'artillerie. L'une sera chargťe de la
garde de l'Elbe depuis Meissen jusqu'ŗ Riesa, et l'autre de Meissen ŗ
Dresde, et il se tiendra avec le reste de son corps ŗ Meissen pour se
porter partout oý cela serait nťcessaire. Par ce moyen, monsieur le duc,
vous pourrez ne former que deux colonnes au lieu de trois pour garder la
rive gauche de l'Elbe.
ęL'Empereur ordonne, monsieur le marťchal, que vous laissiez une brigade
d'infanterie, avec sa batterie, pour occuper Meissen jusqu'ŗ ce qu'elle
y soit remplacťe par d'autres troupes; elle tiendra un bataillon dans la
tÍte de pont. Le pont sera attachť aux piles du pont de pierre. Les
canons du ch‚teau et l'artillerie de la brigade seront mis en batterie
sur la rive gauche pour protťger la tÍte de pont. S'il ťtait ŗ craindre
que le pont fŻt rompu, il serait ťtabli un bac pour la communication
d'une rive ŗ l'autre. Sa Majestť vous recommande, monsieur le duc, de
laisser un bon gťnťral de brigade pour Ítre chargť du commandement de
la brigade que vous laisserez ŗ Meissen jusqu'ŗ ce qu'elle soit
remplacťe. Je vous prie de m'informer de l'exťcution de ces
dispositions.
ęPour le prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęLe gťnťral de division, chef d'ťtat-major,
ęComte MONTHION.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 28 septembre 1813.
ęMon cousin, je vous suppose aujourd'hui ŗ Wurtzen. L'ennemi, qui avait
ťtabli un pont vis-ŗ-vis de l'Elster et qui avait une trŤs-belle tÍte de
pont, a reployť son pont, le gťnťral Bertrand l'ayant chassť de
Wartenbourg. Ce gťnťral a dťmoli la tÍte de pont et s'est portť le 26 ŗ
l'appui du prince de la Moskowa, qui marchait sur Dessau.--Le gťnťral
Lefebvre-Desnouettes ťtait toujours ŗ Altenbourg. Il aurait marchť sur
Zwickau, mais les mouvements de Dessau l'empÍchaient de s'ťloigner de
Leipzig.--Le duc de Castiglione sera avec tout son corps aprŤs-demain ŗ
Iťna.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAR…CHAL NEY AU MAR…CHAL MARMONT.
ęSchleesen, le 28 septembre 1813, cinq heures du matin.
ęMon cher marťchal, j'ai poussť l'ennemi le 26 et le 27 jusque prŤs de
Dessau; il a brŻlť ses ponts sur la Mulde et passť l'Elbe. Je ferai, ce
matin, la mÍme opťration qu'ŗ Wartenbourg, resserrant l'ennemi dans sa
tÍte de pont par les deux rives de la Mulde et la gauche de l'Elbe; mais
il est probable qu'il ne laissera personne sur cette rive et qu'il
repliera son pont. On a distinguť hier un grand mouvement dans l'armťe
ennemie, vers Roslau, et on a remarquť une colonne marchant sur Zerbst,
oý est le quartier gťnťral du prince royal de SuŤde, et une autre se
dirigeant sur Koswig.
ęIl paraÓt que l'ennemi a fait une ligne de circonvallation ŗ sept cent
toises de Wittenberg, et qu'il prťpare des batteries pour repousser nos
colonnes si elles dťbouchaient par cette place. Le bombardement a
continuť cette nuit. J'envoie ce matin le gťnťral du gťnie Blein ŗ
Wittenberg pour reconnaÓtre la tranchťe ennemie. On pense que c'est
Bulow qui est chargť de ce siťge, et que Tauenzien est en observation
vers l'Elster. Les corps suťdois et russes sont vers Koswig et Zerbst.
Les Suťdois, en quittant Dessau, ont dit qu'ils repassaient l'Elbe,
parce que l'Autriche avait fait une paix sťparťe avec l'empereur
Napolťon.
ęJe compte ťtablir le gťnťral Dabrowski ŗ Acken afin de l'employer ŗ
chasser tous les partis ennemis qui peuvent se trouver entre la Saale et
la Mulde, et de rťtablir insensiblement nos communications avec
Magdebourg.
ęJe pars pour Dessau.
ęMarťchal prince DE LA MOSKOWA.Ľ
ę_P. S._ Le gťnťral Bertrand est avec ses principales forces ŗ Kemberg.
Une de ses divisions est ici et l'autre en arriŤre de Schmiedeberg et
Pretsch. Le gťnťral Rťgnier reste ŗ Oranienbaum. La premiŤre brigade du
gťnťral Guilleminot, avec la cavalerie lťgŤre, resserrera l'ennemi dans
sa tÍte de pont de Roslau.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 30 septembre 1813, trois heures du matin.
ęL'Empereur me charge de vous faire connaÓtre que le prince Poniatowski
a l'ordre de se porter aujourd'hui ŗ Frohbourg, et qu'il dirige sa
cavalerie sur Altenbourg et Borna. Le gťnťral Lauriston partira ŗ la
pointe du jour pour se rendre ŗ Nossen, et enverra une avant-garde sur
Waldheim. Ce gťnťral se mettra en correspondance avec vous. Le duc de
Bellune porte sur Chemnitz une forte division avec de la cavalerie, et
l'ťclairera fortement du cŰtť de Marienberg; il mettra son quartier
gťnťral en avant de Freyberg.--Le gťnťral Souham, qui a son quartier
gťnťral sur le chemin de Grossenhayn, ŗ la hauteur du camp retranchť de
Dresde, a l'ordre de faire partir, ŗ cinq heures du matin, en les
faisant passer de la rive droite sur la rive gauche, une batterie de
douze et les batteries d'artillerie ŗ cheval, ainsi qu'une division
d'infanterie, la brigade de cavalerie lťgŤre du gťnťral Beurmann, et le
quartier gťnťral de son corps d'armťe. Tout cela se rendra ŗ Meissen
par la rive gauche. Arrivť ŗ Meissen, le gťnťral Souham renverra la
brigade d'infanterie du sixiŤme corps, qui s'y trouve, rejoindre son
corps, ainsi que toute l'artillerie qui appartiendra au sixiŤme corps.
ęLe prince Poniatowski sera ainsi placť ŗ une journťe sur votre gauche.
Vous devez correspondre, monsieur le duc, avec le gťnťral Lauriston et
le prince Poniatowski, pour agir selon les circonstances. Il n'est pas
encore dťmontrť que l'ennemi ait fait sur Altenbourg un mouvement
considťrable d'infanterie; Sa Majestť suppose qu'il a envoyť seulement
quelques divisions lťgŤres pour soutenir sa cavalerie; il est probable
que cela l'ťclairera parfaitement dans la journťe. Le prince de la
Moskowa ayant pris Dessau, l'ennemi a voulu le reprendre en l'attaquant
avec la garde suťdoise: mais elle a ťchouť et a ťtť ťcrasťe.
ęPour le prince vice-connťtable, major-gťnťral,
ęComte MONTHION.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 30 septembre 1813, trois heures et demie du matin
ęMon cousin, je reÁois votre lettre du 28, oý vous me faites connaÓtre
que vous vous rendrez ŗ Leipzig et rťunirez le premier corps de
cavalerie ŗ Wurtzen. Le prince Poniatowski se rend aujourd'hui de
Waldheim ŗ Frohbourg, ŗ une journťe sur votre gauche: il fera battre
Altenbourg et Borna. Le cinquiŤme corps se rend ŗ Nossen, son
avant-garde ŗ Waldheim; le deuxiŤme corps se rend ŗ Chemnitz avec le
cinquiŤme corps de cavalerie. Le duc de Castiglione devra arriver demain
ŗ Iťna.--Je fais relever votre brigade ŗ Meissen par la division
Souham.--L'ennemi a-t-il dirigť vingt-cinq mille hommes d'infanterie sur
Altenbourg? Si cela est, il faut couper et enlever ce corps. N'a-t-il
envoyť que de la cavalerie; il faut encore harceler et obliger ce corps
ŗ se reployer.--Le prince de la Moskowa, avec les quatriŤme et septiŤme
corps, le troisiŤme corps de cavalerie et la division Dombrowski[9] se
trouve avoir quarante mille hommes.--Le sixiŤme corps, le huitiŤme, le
cinquiŤme, le premier corps de cavalerie, le quatriŤme et la division
Margaron, cela vous fera prŤs de soixante mille hommes.--Correspondez
avec le prince Poniatowski et le gťnťral Lauriston.
ęNAPOL…ON.Ľ
[Note 9: Dans la _Correspondance et Documents_, les noms de lieux et
de personnes sont diversement ťcrits, par exemple, l'Empereur ťcrit
_Dombrowski_, le marťchal Ney _Dabrowski_, etc., etc. Nous avons cru
devoir laisser subsister les deux orthographes, puisqu'elles sont dans
les originaux. (_Note de l'…diteur._)]
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 1er octobre 1813, quatre heures du matin.
ęMon cousin, je reÁois votre lettre du 29, ŗ onze heures du soir.--La
brigade que vous avez laissťe ŗ Meissen a ťtť remplacťe par le troisiŤme
corps. Laissez du monde ŗ Wurtzen et faites-y travailler ŗ la double
tÍte de pont, et surtout ŗ l'ťtablissement d'un bon pont sur pilotis. La
Mulde dťborde. Il est nťcessaire que nous soyons maÓtres de ce
passage.--Le 30, le prince Poniatowski a eu son quartier gťnťral ŗ
Rochlitz. Aujourd'hui, 1er octobre, il sera ŗ Frohbourg ou ŗ Altenbourg.
Le comte de Valmy a dŻ coucher, le 30, ŗ Frohbourg et a dŻ envoyer un
fort dťtachement sur Borna. Le gťnťral Uminski a dŻ occuper Boda, et le
prince Sulkowski a ťtť sur Penig.--Le cinquiŤme corps ťtait hier, 30, ŗ
Nossen et ŗ Waldheim.--Les troupes du duc de Castiglione ne devaient pas
tarder ŗ paraÓtre du cŰtť d'Iťna.--Jusqu'ŗ cette heure, il paraÓtrait
que le gťnťral Platow, fils de l'hetman, avec Thielman, et soutenu d'une
division lťgŤre, se porte sur la Saale. Il paraÓtrait que cette division
lťgŤre serait commandťe par le gťnťral Baumgarten. Le gťnťral Klenau
paraÓtrait se trouver ŗ Comotau.--Dans la journťe, tout ceci va
parfaitement s'ťclaircir.--Il paraÓtrait que Platow avait sous ses
ordres mille ŗ douze cents Cosaques; le rťgiment palatin de Ferdinand
autrichien, et le rťgiment de Hesse-Hombourg autrichien; enfin, il
paraÓtrait que le gťnťral Platow se serait portť sur Penig et de lŗ sur
Altenbourg, laissant le gťnťral Baumgarten ŗ Chemnitz.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 1er octobre 1813, quatre heures du matin.
ęMon cousin, vous nous avez pris douze cents quintaux de farine ŗ
Meissen. Renvoyez-nous-les. Le duc de Padoue a l'ťtat de ce que Leipzig,
Wurtzen et autres bailliages nous doivent fournir ici. Prenez toutes les
mesures pour nous faire venir mille quintaux de farine par jour. …crivez
aux baillis. Envoyez des commissions et faites partir des convois. Nous
avons aussi du riz qui nous appartient ŗ Leipzig. Prenez des
informations et faites-le partir. Enfin prenez des mesures pour nous
approvisionner. Le duc de Padoue est au fait de la distribution que la
rťgence a faite, entre tous les bailliages, pour les farines que chacun
doit fournir. --Surtout ne retenez rien pour vous de tout ce qui doit
nous Ítre adressť ŗ Dresde.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAR…CHAL NEY AU MAR…CHAL MARMONT.
ęPŲtnitz, le 1er octobre 1813.
ęMon cher marťchal, je viens de recevoir la lettre que vous m'avez fait
l'honneur de m'ťcrire hier de Leipzig. J'en ai ťgalement reÁu une cette
nuit du prince major gťnťral, en date du 29 septembre, par laquelle il
me mande que l'Empereur dťsire que votre corps d'armťe soit employť dans
l'opťration qui aura pour objet de faire lever le siťge de Wittenberg.
En attendant qu'elle ait lieu, je pense que la position qu'il serait le
plus convenable de faire prendre ŗ vos troupes, pour remplir le double
but de couvrir Leipzig et de m'appuyer au besoin, serait de placer une
de vos divisions ŗ DŁben, une autre ŗ Bitterfeld et Delitzsch, et la
troisiŤme qui, avec la cavalerie du gťnťral Latour-Maubourg, couvrirait
les communications de Dresde, pourrait Ítre ťtablie ŗ Wurtzen.
Dites-moi, mon cher marťchal, si vous jugez ŗ propos de faire exťcuter
ce mouvement ŗ votre corps d'armťe, afin que, si vous y consentez, je
puisse faire serrer sur moi les troupes que j'ai sur ces divers points,
et qui me seront trŤs-utiles pour resserrer et observer l'ennemi et
l'empÍcher de passer l'Elbe en corps d'armťe. Je pense que le gťnťral
Dalton se dťcidera enfin bientŰt ŗ envoyer d'Erfurth ŗ Leipzig les
troupes dont il peut disposer, et qui sont au nombre de douze mille
hommes, et que dŤs lors M. le duc de Padoue n'aura plus besoin de votre
appui ni du mien pour conserver cette ville.
ęNous ouvrons la tranchťe devant la tÍte de pont de l'ennemi, entre la
droite de la Mulde et la gauche de l'Elbe, et nous ťlevons des
batteries: dťjŗ tous ses postes sont rentrťs, et nous sommes ŗ quatre
cents toises de ses ouvrages; j'espŤre que demain nous nous en serons
approchťs ŗ deux cents. Lorsque cette opťration sera terminťe sur cette
rive de la Mulde, je la ferai faire ťgalement sur la rive gauche. Je
fais aussi ťtablir sur cette riviŤre un pont de bateaux ŗ six cents
toises de la tÍte de pont, afin que mes troupes puissent rapidement
passer d'une rive ŗ l'autre et se soutenir au besoin. On s'occupe
ťgalement ŗ retrancher les points principaux de Dessau, de maniŤre ŗ
mettre cette ville ŗ l'abri d'un coup de main et ŗ en faire une espŤce
de tÍte de pont. Woronzow et Czernitchef sont toujours entre Acken et
Dessau avec quelques dťtachements d'infanterie. Mais ce ne sera que
lorsque j'aurai mis l'ennemi dans l'impossibilitť de dťboucher par
Roslau que je pourrai m'occuper de forcer ces partisans ŗ ťvacuer le
pays entre la Saale et la Mulde. Le camp principal de l'ennemi est
toujours ŗ Roslau et le quartier gťnťral du prince de SuŤde ŗ Zerbst.
ęMarťchal prince DE LA MOSKOWA.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 3 octobre 1813.
ęMon cousin, tous les bruits que l'on fait courir sont controuvťs. Il
n'y a pas de corps d'armťe ennemi sur Gťra; il n'y en a pas sur
Altenbourg: il n'y a de ce cŰtť que le corps de l'hetman Platow et de
Thielmann. Il faut mettre une grande circonspection dans vos mouvements.
Avant tout, il faut soutenir le prince de la Moskowa. Le roi de Naples,
avec le deuxiŤme, le cinquiŤme et le huitiŤme corps, qui sont entre
Freyberg, Chemnitz et Altenbourg, se trouve, dans l'ordre naturel,
opposť ŗ tout ce qui arriverait de BohÍme. D'ailleurs, un officier que
vous m'enverriez en poste pourrait, en moins de vingt heures, vous
rapporter ma rťponse. Je vous le rťpŤte: couvrir Leipzig, puisque vous y
Ítes, empÍcher le passage de l'Elbe de Wittenberg ŗ Torgau, secourir
Torgau, appuyer le prince de la Moskowa, voilŗ le premier but que vous
devez vous proposer: le reste viendra aprŤs. J'attends aujourd'hui des
nouvelles du prince Poniatowski et l'arrivťe de mes troupes ŗ Chemnitz,
ce qui me mettra ŗ mÍme de prendre un parti.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 3 octobre 1813.
ęMon cousin, le prince Poniatowski est arrivť ŗ Altenbourg le 2
octobre.--Voici ce qui s'est passť:--Dans les premiers jours de
septembre, le colonel MŁnsdorf est arrivť ŗ Altenbourg avec un
dťtachement de mille ŗ onze cents chevaux.--Thielmann est venu le
rejoindre avec trois mille chevaux. D'Altenbourg, ces troupes poussŤrent
des partis sur Zeitz, Borna, Freybourg, Weissenfels, Mersebourg et Gťra.
Le gťnťral Lefebvre-Desnouettes les repoussa, les rejeta sur Altenbourg,
et ensuite sur Zwickau. Mais, le 28, l'hetman Platow dťboucha sur
Altenbourg avec ses Cosaques, trois mille hommes d'infanterie
autrichienne et deux mille cavaliers autrichiens. Le gťnťral Lefebvre
fut attaquť de front dans le temps que Thielmann le tournait sur Zeitz.
Le 28 au soir, Platow ťtait de retour ŗ Altenbourg; le 29, Thielmann y
ťtait ťgalement revenu. Platow rentra avec sa troupe ŗ Chemnitz, en
partie le 29 et en partie le 30.--Thielmann et le comte MŁnsdorf
restŤrent ŗ Altenbourg; mais, le 2, au moment oý ils faisaient leur
mouvement de retraite sur Zwickau, la cavalerie du prince Poniatowski
les chargea, leur sabra cinq ŗ six cents hommes, et fit trois cents
prisonniers. En faisant ses adieux aux magistrats d'Altenbourg,
Thielmann leur a dit qu'il jugeait que les FranÁais venaient sur lui,
que la ville serait occupťe par eux, et qu'il s'en allait. Il paraÓt que
l'infanterie autrichienne que Platow avait sous ses ordres ťtait du
corps de Klenau; que ce corps de Klenau n'est que de six mille hommes de
cavalerie et au plus de quinze mille hommes d'infanterie; qu'il occupe
Chemnitz, Marienberg et Augustenbourg.--Le prince Poniatowski occupe
Frohbourg et Windischleybe.--J'attends ŗ chaque instant des nouvelles de
l'entrťe du roi de Naples ŗ Chemnitz. Vous voyez donc que le mouvement
de vingt mille Autrichiens sur Altenbourg est controuvť.--Faites mettre
dans les journaux de Leipzig que le gťnťral Thielmann a ťtť battu par le
prince Poniatowski, qui lui a fait six cents prisonniers et lui a tuť et
sabrť beaucoup de monde.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAR…CHAL NEY AU MAR…CHAL MARMONT.
ęPŲtnitz, le 3 octobre 1813
ęMon cher marťchal, je reÁois votre lettre d'hier.
ęL'Empereur m'a ťcrit, le 1er, pour me faire connaÓtre l'emplacement des
corps d'armťe. Sa Majestť pense que l'ennemi pourrait dťboucher de la
BohÍme par Marienberg. J'attends des nouvelles du gťnťral Bertrand, qui
est parti de Worlitz dans la nuit du 1er au 2 pour se rendre ŗ
Wartenbourg, afin de rejeter sur la rive droite des dťtachements
prussiens du corps de Borstell, qui travaillent au rťtablissement du
pont vis-ŗ-vis d'Elster. On a entendu hier le bruit du canon dans cette
direction. Ma ligne est bien ťtendue, et je ne pourrais opposer qu'une
faible rťsistance aux mouvements de l'ennemi s'il dťbouchait par son
pont de Roslau. Les ouvrages qui couvrent ce pont sont tellement forts
et si bien armťs, que je ne puis raisonnablement entreprendre de les
forcer. Le gťnťral Dabrowski quitte Delitzsch pour s'ťtablir ŗ Dessau.
Le gťnťral Fournier occupe Raguhn et envoie des reconnaissances sur
Delitzsch et DŁben. Si je parviens ŗ resserrer l'ennemi dans ses
ouvrages de maniŤre ŗ ce qu'il ne puisse pas dťboucher, alors je
t‚cherai de chasser les partis qui se trouvent entre la Saale et la
Mulde. Si Czernitcheff est en marche sur la Westphalie, il reste
ťgalement ici beaucoup de cavalerie lťgŤre sous les ordres de Woronzow.
ęMarťchal prince DE LA MOSKOWA.Ľ
LE MAR…CHAL NEY AU MAR…CHAL MARMONT.
ęPŲtnitz, le 3 octobre 1813, cinq heures du soir.
ęLe gťnťral Bertrand m'ťcrit ce matin de Wartenbourg ŗ onze heures; il
est aux prises depuis sept heures avec l'ennemi, qui attaque
vigoureusement et auquel il suppose beaucoup de forces. Il me paraÓt
bien important que vous fassiez occuper fortement le point de DŁben,
afin que, si l'ennemi forÁait ma droite, il ne puisse pas arriver sans
obstacle ŗ Leipzig. C'est d'ailleurs dans cette position de DŁben que
vous seriez en mesure de me soutenir, suivant l'ordre que l'Empereur
m'annonce, par sa lettre d'avant-hier, qu'il vous en a donnť.
ęMarťchal prince DE LA MOSKOWA.Ľ
LE MAR…CHAL NEY AU MAR…CHAL MARMONT.
ęBitterfeld, le 4 octobre 1813, deux heures de l'aprŤs-midi.
ęMon cher marťchal, l'armťe ennemie de Silťsie, aprŤs avoir marchť
presque sans interruption pendant cinq jours et cinq nuits, a jetť un
pont sur l'Elbe, vis-ŗ-vis Elster, dans la nuit du 2 au 3, et a attaquť
hier, ŗ sept heures du matin, le gťnťral Bertrand, qui occupait la forte
position de Wartenbourg, et qui, aprŤs s'Ítre battu depuis sept heures
du matin jusqu'ŗ six heures du soir, et aprŤs avoir fait ťprouver ŗ
l'ennemi une perte considťrable, a dŻ se replier sur Klitzschena. Ma
droite se trouvant ainsi tournťe par des forces trŤs-supťrieures, et
pouvant Ítre attaquťe sur les deux rives de la Mulde par l'armťe du
prince de SuŤde, il m'a paru indispensable de me retirer sur Delitzsch.
Il est de la derniŤre importance que l'Empereur prenne sur-le-champ un
parti dťcisif: car, d'ici au 6, l'ennemi peut diriger plus de cent mille
hommes sur Leipzig. Les prisonniers faits par le gťnťral Bertrand
appartiennent aux corps de Langeron, Kleist et Sacken. La perte du
quatriŤme corps n'est pas considťrable, parce que les troupes ťtaient
avantageusement postťes derriŤre des digues et des abatis; mais la
division wurtembergeoise, qui ťtait de quatorze cents hommes et qui
dťfendait le village de Blodding, a ťtť presque entiŤrement dťtruite.
ęJ'occupe faiblement DŁben: le reste de mes troupes est ŗ Bitterfeld et
ŗ Delitzsch.
ęMarťchal prince DE LA MOSKOWA.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 4 octobre 1813.
ęMon cousin, je reÁois votre lettre. J'approuve le parti que vous
prenez. Rťunissez votre corps, le premier corps de cavalerie, et marchez
ŗ l'ennemi: enlevez-lui ses ponts de Waldenbourg, Dessau et Acken; qu'il
ne lui en reste aucun.--Le duc de Castiglione doit Ítre arrivť
aujourd'hui ŗ Iťna. Le prince Poniatowski est ŗ Altenbourg.--Le roi de
Naples doit Ítre ŗ Chemnitz. J'en attends des nouvelles ŗ chaque
instant. On a fait hier deux ou trois cents prisonniers ŗ la division
Baumgarten entre Chemnitz et Freyberg.--Vous m'envoyez des officiers qui
sont des enfants, qui ne savent rien et ne peuvent donner verbalement
aucun renseignement; envoyez-moi des hommes.--Le troisiŤme corps se
porte sur Torgau; une de ses divisions sera demain, 5, ŗ Belgern.
ęNAPOL…ON.Ľ
ę_P. S._ Communiquez ces nouvelles au prince de la Moskowa, et
faites-lui connaÓtre combien il est important d'enlever ŗ l'ennemi tous
ses ponts.Ľ
LE MAR…CHAL NEY AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDelitzsch, le 5 octobre 1813.
ęJe m'empresse de vous faire connaÓtre les positions qu'occupent les
troupes sous mes ordres.
ęLe gťnťral Dabrowski est ŗ Bitterfeld.
ęLa division de cavalerie lťgŤre du gťnťral Fournier, ŗ Landsberg,
poussant des reconnaissances sur Halle.
ęLa division de cavalerie du gťnťral Defrance, en seconde ligne,
derriŤre le gťnťral Fournier, ŗ Zschernitz.
ęLe septiŤme corps aura la division Durutte ŗ GŲllmenz et Lukenwhna,
point intermťdiaire de DŁben et Eulenbourg. Les deux autres divisions de
ce corps, ŗ Broda, occupant Delitzsch et Bendorf. Sa cavalerie lťgŤre ŗ
Koltzau.
ęLe quatriŤme corps, ŗ Zschortau.
ęJe sais que vous occupez DŁben et Eulenbourg, et je pense que vous avez
toujours une ou deux divisions ŗ Leipzig.
ęNous manquons de munitions. Le quatriŤme corps a tout consommť. Ne
pourriez-vous pas, mon cher marťchal, cťder au gťnťral Bertrand un
approvisionnement simple pour six piŤces de douze, deux obusiers de six
pouces, douze piŤces de six et quatre obusiers de vingt-quatre, ainsi
que dix caissons de cartouches d'infanterie. On assure qu'il y a des
dťpŰts considťrables ŗ Torgau, et qu'il s'y trouve, entre autres, plus
d'un million de cartouches en rťserve; vous pourriez vous remplacer dans
cette ville, avec laquelle vous communiquez.
ęMarťchal prince DE LA MOSKOWA.Ľ
LE MAR…CHAL NEY AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDelitzsch, le 5 octobre 1813, huit heures du soir.
ęMon cher marťchal, j'ai reÁu la lettre que vous m'avez ťcrite
aujourd'hui de Hohen-Priegnitz. Il ne s'agit pas, je crois, de serrer
sur Eulenbourg pour conserver ce dťbouchť, mais bien de nous rassembler
le plus promptement possible sur Leipzig.
ęLes divisions Fournier et Defrance, que j'ai dťtachťes aujourd'hui sur
Landsberg, ont ťtť forcťes de rťtrograder, et l'ennemi les a suivies
jusqu'ŗ une demi-lieue d'ici, en avant de Gros-KŁhna. L'ennemi s'est
ťgalement prťsentť ŗ Schenkenberg; il a fallu de l'infanterie et du
canon pour l'ťloigner. Enfin, le gťnťral Dabrowski, aprŤs s'Ítre battu
contre des forces supťrieures, a ťvacuť Bitterfeld; il est ŗ Paupitzsch
et se rapprochera encore cette nuit de Delitzsch. Ce gťnťral a vu plus
de quatre mille hommes de cavalerie passer la Mulde entre Bitterfeld et
DŁben.
ęJe viens d'ordonner ŗ la division Durutte, qui est ŗ Lukenwhna, de
rentrer en ligne demain matin ŗ la hauteur de Mocherwitz. Je pense, mon
cher marťchal, que vous devez venir prendre position ŗ Lukenwhna,
gardant Eulenbourg par un rťgiment d'infanterie et un dťtachement de
cavalerie; cette troupe aurait, en cas d'ťvťnement, sa retraite assurťe
sur Leipzig, et pourrait mÍme, au besoin, se diriger sur Wurtzen.
ęSi vous jugez convenable de vous rassembler ŗ Lukenwhna ou ŗ Cremsitz,
j'attendrai l'ennemi demain ŗ Delitzsch; nous nous trouverions
parfaitement en mesure de livrer bataille ŗ l'ennemi ou de nous retirer
ensemble, s'il nous prťsentait des forces supťrieures. Je ne crois pas
que l'ennemi ose engager un petit corps avec la Mulde ŗ dos; ainsi nous
pourrions attendre et gagner la journťe de demain. Il faut espťrer que
l'Empereur nous donnera de ses nouvelles, et que Sa Majestť va prendre
un grand parti.
ęJ'attends, mon cher marťchal, votre rťponse ŗ la proposition que je
viens de vous faire pour prendre mes dispositions dťfinitives.
ęMarťchal prince DE LA MOSKOWA.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 5 octobre 1813, deux heures du matin.
ęMon cousin, je reÁois votre lettre du 4 octobre, datťe d'Eulenbourg. Je
n'ai encore reÁu aucune nouvelle des affaires du gťnťral Bertrand que
par votre lettre d'hier. J'aurais bien voulu que vous m'eussiez donnť
quelques dťtails. Donnez-moi tous ceux que vous aurez.--Le troisiŤme
corps a dŻ avoir, hier 4, une division ŗ Meissen, une ŗ Riesa et l'autre
ŗ Strehla. J'ai donnť ordre qu'une division march‚t sur Belgern. Je
donne au troisiŤme corps l'ordre de marcher tout entier sur Torgau. Il
est, dŤs ce moment, ŗ votre disposition. Ordonnez qu'ŗ Torgau on y
joigne tous les hommes de son dťpŰt qui sont disponibles.--Il est de la
plus haute importance que vous faisiez rťtablir le pont de DŁben, et que
vous marchiez rapidement pour dťtruire le pont de l'ennemi. Votre
rťunion avec le prince de la Moskowa et le gťnťral Dombrowski, est aussi
de la plus haute importance.--Je donne ordre au duc de Castiglione de se
porter sur Leipzig avec son corps d'armťe.--Il est urgent de rejeter
l'ennemi au delŗ de la riviŤre, avant qu'il ait de nouveaux renforts.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDresde, le 6 octobre 1813, neuf heures du matin.
ęMon cousin, le duc de Padoue me fait passer votre lettre, datťe le 5 de
Lindenhain. J'avais reÁu vos lettres prťcťdentes. J'ai ťgalement reÁu,
par le duc de Padoue, une lettre du prince de la Moskowa, du 4 ŗ deux
heures aprŤs-midi.--Je vous ai dťjŗ fait connaÓtre que le troisiŤme
corps ťtait ťchelonnť sur la route de Meissen ŗ Torgau; il a dŻ Ítre
concentrť, aujourd'hui 6, ŗ Torgau. Je serai ce soir ŗ Meissen, avec
quatre-vingt mille hommes, ayant mon avant-garde ŗ l'embranchement de la
route de Leipzig et de celle de Torgau. J'y recevrai vos lettres qui me
dťcideront ŗ prendre l'une ou l'autre de ces routes. Les reconnaissances
envoyťes hier sur la rive droite, jusqu'ŗ dix lieues de Dresde, n'ont
trouvť que peu de monde, et le commissaire du cercle de KŲnigsbruck nous
a instruit en dťtail des forces et du mouvement de l'armťe
ennemie.--Comme le troisiŤme corps est sous vos ordres, j'ignore la
direction que vous lui avez donnťe; mais je suppose que demain matin je
serai parfaitement ťclairť lŗ-dessus.--Je me propose de me porter sur
Torgau, et de lŗ de marcher sur la rive droite pour couper l'ennemi et
lui enlever tous ses ponts sans Ítre obligť de lutter contre ses tÍtes
de pont. En marchant par la rive gauche, il y a l'inconvťnient que
l'ennemi peut repasser la riviŤre et ťviter la bataille; mais, dans
cette seconde hypothŤse, nous pouvons dťboucher par Wittenberg.--Au
reste, comme l'ennemi a l'initiative du mouvement, je ne pourrai me
dťcider sur le plan ŗ adopter dťfinitivement que lorsque je connaÓtrai
l'ťtat de la question le 6 au soir.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAR…CHAL NEY AU MAR…CHAL MARMONT.
ęGŲllmenz, le 6 octobre 1813, six heures du matin.
ęJe viens de recevoir la lettre que vous m'avez ťcrite ce matin ŗ quatre
heures.
ęJe sens parfaitement que vous ne pouvez pas quitter de jour votre
position devant l'ennemi qui, ayant rťtabli le pont de DŁben, ne
manquerait pas de faire du mal ŗ votre arriŤre-garde. J'ťtablis en
consťquence les quatriŤme et septiŤme corps ŗ Naundorf et KlwŲlkan. La
division Dabrowski restera ŗ Delitzsch tant qu'elle pourra s'y
maintenir. La division Fournier prend position ŗ Lindenhain, s'ťclairant
sur Bitterfeld par Reihitz. La division Defrance restera ici ŗ GŲllmenz.
Comme il serait impossible que nos deux corps, en partant ce soir ŗ la
chute du jour, pussent passer sur la droite de la Mulde ŗ Eulenbourg, je
resterai en seconde ligne derriŤre vous jusqu'ŗ quatre heures de
l'aprŤs-midi, heure ŗ laquelle je me mettrai en marche sur Wurtzen, d'oý
j'irai prendre position ŗ Schilda. Vous, mon cher marťchal, aprŤs avoir
passť par Eulenbourg, vous iriez prendre position ŗ Mackern ou
Reichenbach, et nous serons dŤs lors en mesure de marcher sur le flanc
de l'ennemi.
ęFaites-moi part, je vous prie, de vos observations sur le mouvement
projetť et l'ensemble des manoeuvres.
ęMarťchal prince DE LA MOSKOWA.Ľ
LE MAR…CHAL NEY AU MAR…CHAL MARMONT.
ęBennewitz, le 7 octobre 1813, six heures du matin.
ęJe reÁois votre lettre d'hier soir.
ęLe gťnťral Rťgnier prend position ŗ Pichen; il ťtablit sur la Mulde,
vis-ŗ-vis Colla, un pont qui sera achevť ce matin. Ce gťnťral se mettra
en communication avec votre corps d'armťe ŗ Taucha.
ęLe quatriŤme corps prend la direction de Torgau pour rallier le
troisiŤme, s'il est encore prŤs de cette place. Je ne vois pas que le
troisiŤme corps puisse Ítre exposť dans sa marche sur Eulenbourg, s'il a
reÁu l'ordre que vous lui avez donnť de s'y rendre, puisque vous
m'annoncez que l'ennemi a peu de monde aux environs de cette ville et
que vous pensez qu'il opŤre sur votre gauche. Le duc de Padoue me mande
que quelques rťgiments d'infanterie ennemie doivent Ítre arrivťs ŗ
Halle.
ęDonnez des ordres, mon cher marťchal, pour faire arriver en toute h‚te
sur Leipzig tous les convois qui peuvent Ítre entre cette ville et
Erfurth; il faut rappeler tous les dťtachements et Ítre serrť en masse.
Il ne s'agit plus, comme vous le remarquez fort bien, que de gagner du
temps; l'Empereur, qui est dťfinitivement en mouvement, ne tardera sans
doute pas ŗ faire changer la face des affaires.
ęMarťchal prince DE LA MOSKOWA.Ľ
LE MAR…CHAL NEY AU MAR…CHAL MARMONT.
ęBennewitz, le 7 octobre 1813, une heure de l'aprŤs-midi.
ęLe gťnťral Dombrowski, auquel j'avais donnť l'ordre de tenir hier
jusqu'ŗ quatre heures de l'aprŤs-midi le poste de Delitzsch, tandis que
votre corps d'armťe et celui du gťnťral Rťgnier faisaient leur
mouvement, a ťtť attaquť trŤs-vivement par la cavalerie lťgŤre ennemie
qu'il a toujours repoussťe; il est parti de sa position ŗ une heure du
matin, et son arriŤre-garde a ťtť suivie jusqu'ŗ Taucha.
ęLe gťnťral Rťgnier m'a rendu compte que vos troupes avaient entiŤrement
ťvacuť Eulenbourg hier au soir; je lui ai ordonnť d'y envoyer mille ŗ
douze cents hommes pour la garde du pont, qui devient un dťbouchť
important, en ce moment oý l'arrivťe des renforts que l'Empereur conduit
en personne annonce que nous allons reprendre l'offensive.
ęLes Cosaques qui ťtaient hier ŗ Wurtzen y ont laissť une proclamation
qui annonce aux Saxons que le gťnťral BlŁcher marche sur Leipzig avec
soixante mille hommes, et que l'armťe franÁaise est dťtruite.
ęMarťchal prince DE LA MOSKOWA.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT ņ NAPOL…ON.
ę6 octobre 1813, quatre heures
ęSire, j'ai eu l'honneur de rendre hier au soir ŗ Votre Majestť un
compte dťtaillť de ma position. En consťquence, je ne l'en entretiendrai
pas encore une fois. Je prendrai la libertť seulement, au nom du bien du
service, de lui dire qu'il est de la plus grande urgence qu'elle vienne
ici; car, si elle ne vient pas, nous allons faire de la mauvaise
besogne, je ne puis en douter aux dispositions que je vois prendre. Le
premier ordre que je reÁois, si je l'exťcutais, compromettrait l'armťe
de la maniŤre la plus ťminente, car il n'a ťtť le rťsultat d'aucune
espŤce de calcul, ni de temps, ni d'opťration. Je n'entre pas dans de
plus grands dťtails pour ne pas fatiguer Votre Majestť. Je me borne ŗ
lui rťitťrer l'assurance que rien ne serait plus f‚cheux pour son
service que de voir la direction des opťrations, dans la position
dťlicate oý nous sommes, confiťe aux mÍmes mains.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT ņ NAPOL…ON.
ę8 octobre 1813 soir.
ęSire, je reÁois la lettre de reproches que Votre Majestť a chargť le
major gťnťral de m'ťcrire. Nous serions restťs sur la Mulde sans
difficultť, et nous y serions encore, sans les ťtranges combinaisons du
prince de la Moskowa, les craintes exagťrťes, plus ťtranges encore,
qu'il a eues de l'ennemi.
ęJe n'ai quittť DŁben que vingt quatre heures aprŤs que les troupes qui
ťtaient ŗ ma hauteur s'ťtaient retirťes. Je n'ai quittť Hohen-Priegnitz
que lorsque les troupes du prince de la Moskowa ťtaient depuis longtemps
en marche sur Wurtzen. ęSentant la nťcessitť de couvrir Leipzig, j'ai
demandť avec instance au prince de la Moskowa de s'y rendre, et je
serais restť ŗ Eulenbourg pour garder les passages de la Mulde et
rallier le troisiŤme corps, quoique ce mouvement fŻt naturel au prince
de la Moskowa, puisqu'il ťtait plus ŗ portťe que moi; il s'y est refusť
formellement et a persistť ŗ se porter sur Wurtzen, trouvant apparemment
qu'il n'ťtait en sŻretť que lŗ.
ęJ'ai dŻ me porter sur Leipzig, parce que c'ťtait le rŰle qu'il m'avait
assignť. Le prince de la Moskowa s'est chargť formellement de faire
immťdiatement un dťtour convenable pour rallier le gťnťral Souham ŗ
Wurtzen dans le cas oý il aurait reÁu l'ordre que je lui avais expťdiť,
chose dont il ťtait possible de douter.
ęEnfin je n'ai point dťtruit le pont d'Eulenbourg, comme on l'a dit ŗ
Votre Majestť; mais je l'ai fait couper de maniŤre ŗ exiger cinq ŗ six
heures de rťparation en faisant le calcul que, si le gťnťral Souham
avait reÁu l'ordre de mouvement, il serait garanti par lŗ, pendant la
matinťe, de l'action des troupes qui m'avaient suivi et dont le nombre
pouvait Ítre fort augmentť pendant la nuit, et qu'ainsi il aurait sa
retraite libre sur Wurtzen.
ęTelles sont, Sire, les justifications que mon honneur exige que je
prťsente ŗ Votre Majestť, et qui, je l'espŤre, me mettront ŗ l'abri de
tout bl‚me ŗ ses yeux.Ľ
LE MAR…CHAL NEY AU MAR…CHAL MARMONT.
ęBennewitz, le 8 octobre 1813.
ęJe reÁois la lettre que vous m'avez ťcrite de SchŲnfeld hier ŗ onze
heures du soir. Je ne crois pas l'ennemi en mesure de venir
immťdiatement ŗ Leipzig pour y livrer bataille, et il est ŗ prťsumer,
d'aprŤs divers renseignements, que son projet est de prendre Wittenberg
avant de se livrer ŗ aucune entreprise sťrieuse. Au surplus, il me
semble que vous auriez tort de vous engager fortement avant notre
rťunion totale, et qu'il est convenable d'attendre, pour opťrer cette
rťunion, que nous sachions si l'Empereur veut manoeuvrer entre l'Elbe et
la Mulde, ou entre la Mulde et la Saale. Quoi qu'il en soit, je prescris
au gťnťral Rťgnier d'ťtablir aujourd'hui sa ligne de maniŤre que sa
droite soit ŗ la hauteur de Gotha et sa gauche vers Taucha, ayant un
poste ŗ Eulenbourg.
ęJ'ťcris au gťnťral Souham que, s'il ne croit pas pouvoir se maintenir ŗ
Eulenbourg, il remonte la Mulde pour venir s'ťtablir ŗ Nitzschwitz; il
restera dans cette position jusqu'au retour sur la Mulde du gťnťral
Bertrand, qui est allť ŗ Torgau tant pour y prendre des munitions que
pour avoir des nouvelles de l'Empereur.
ęLe gťnťral Dombrowsky est ŗ SchmŲllen, au-dessus de Wurtzen. Dans cette
position, je puis en une marche me rťunir ŗ vous; mais je ne crois pas
qu'il faille livrer bataille ŗ Leipzig, et que, lorsque le convoi
d'artillerie sera arrivť, il sera convenable que nous nous rapprochions
de la Mulde pour y attendre les ordres de l'Empereur, que nous ne
pouvons pas tarder ŗ recevoir.
ęMarťchal prince DE LA MOSKOWA.Ľ
ę_P. S._ Le gťnťral Souham est arrivť ŗ Wurtzen.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęWurtzen, le 9 octobre 1813, une heure et demie du matin.
ęL'Empereur ordonne que vous fassiez partir ŗ six heures du matin le
gťnťral Latour-Maubourg, avec tout le premier corps de cavalerie; le
gťnťral Lefebvre-Desnouettes avec toute la cavalerie de la garde; la
brigade du gťnťral Pirť et la brigade du gťnťral Vallin. Pendant la
marche, le gťnťral Lefebvre sera sous les ordres du gťnťral
Latour-Maubourg. Donnez vos ordres pour que ces corps arrivent le plus
tŰt possible ŗ Eulenbourg, oý l'Empereur se trouvera de sa personne. Il
est nťcessaire qu'ils y soient ŗ onze heures du matin, et qu'ils battent
le chemin direct de DŁben. Prescrivez au gťnťral Lefebvre et au gťnťral
Latour-Maubourg d'envoyer chacun un officier auprŤs de l'Empereur pour
faire connaÓtre l'heure ŗ laquelle ils arriveront. Cette cavalerie
nettoiera ainsi tout le pays depuis la route de Leipzig ŗ Eulenbourg
jusqu'ŗ celle de Leipzig ŗ DŁben.
ęQuant ŗ vous, monsieur le marťchal, portez-vous aujourd'hui, avec votre
corps d'armťe, sur la route de DŁben; vous aurez votre cavalerie lťgŤre
et la division de cavalerie du gťnťral Lorge. Vous ferez ťclairer par
une colonne mobile la route de Leipzig ŗ Delitzsch.
ęAccťlťrez le retour de la division que vous avez dťtachťe, et placez-la
en rťserve. Cela n'empÍche pas, monsieur le marťchal, que vous ne
fassiez partir ŗ six heures du matin une bonne avant-garde d'infanterie,
de cavalerie et d'artillerie, et que vous ne la suiviez avec vos deux
divisions, attendu qu'il est nťcessaire que vous soyez ŗ la hauteur
d'Eulenbourg aujourd'hui avant onze heures du matin.
ęL'Empereur sera ŗ huit heures du matin ŗ Eulenbourg, marchant,
aujourd'hui 9, avec cent vingt mille hommes sur DŁben.
ęPour le prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęLe gťnťral de division, chef de l'ťtat-major,
ęComte MONTHION.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęEulenbourg, le 10 octobre 1813, quatre heures du matin.
ęL'Empereur ordonne que vous vous portiez, aujourd'hui 10, sur DŁben, oý
sera le quartier gťnťral. Je vous prťviens que le gťnťral Rťgnier est
arrivť hier ŗ DŁben, que le gťnťral Langeron a ťvacuť ŗ son approche.
Vous devez, monsieur le duc, vous assurer du mouvement que fait l'ennemi
ŗ Delitzsch et si son avant-garde, qui y ťtait hier, a fait un mouvement
rťtrograde sur Bitterfeld. Si, au contraire, les troupes de l'ennemi qui
ťtaient ŗ Bitterfeld se portaient sur Delitzsch pour marcher sur
Leipzig, vous prendrez alors une position parallŤle ŗ celle de l'ennemi,
ayant votre ligne d'opťration sur DŁben, de maniŤre ŗ couvrir DŁben et
Eulenbourg. Il est nťcessaire, monsieur le marťchal, que vous
correspondiez plusieurs fois par jour avec le quartier gťnťral. Je donne
ordre au gťnťral Lefebvre-Desnouettes de marcher entre la Mulde et vous
afin de maintenir toujours votre communication avec nous.
ęPour le prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęLe gťnťral de division, chef de l'ťtat-major,
ęComte MONTHION.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDŁben, le 10 octobre 1813, six heures et demie du soir.
ęJ'envoie un officier au-devant de votre premiŤre division pour lui dire
de prendre position sur la rive gauche, sans passer ce soir la riviŤre.
Cet officier continuera ensuite sa route jusqu'ŗ ce qu'il rencontre vos
deux autres divisions, pour leur dire ťgalement de prendre position oý
il les trouvera, afin qu'elles ne se fatiguent pas inutilement. Il
reviendra ensuite faire connaÓtre oý vos trois divisions auront pris
position, ainsi que votre cavalerie et votre artillerie.
ęL'intention de l'Empereur, monsieur le marťchal, est que, de votre
personne, vous veniez voir Sa Majestť ce soir ou cette nuit.
ęPour le prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęLe gťnťral de division, chef de l'ťtat-major,
ęComte MONTHION.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDŁben, le 11 octobre 1813, quatre heures du matin.
ęL'Empereur me charge de vous prescrire de passer aujourd'hui la Mulde
aussitŰt que DŁben sera dťsencombrť. Vous laisserez les gťnťraux Lorge
et Normam sur la rive gauche, et leur donnerez pour instruction de faire
courir des partis sur Delitzsch et Bitterfeld. Vous dirigerez avec cette
cavalerie, sur Bitterfeld, l'infanterie, nťcessaire pour obliger
l'infanterie ennemie ŗ ťvacuer cette position. L'Empereur dťsire,
monsieur le duc, que vous dirigiez l'opťration et que vous fassiez
partir les troupes une heure avant le jour, de maniŤre ŗ savoir de bonne
heure l'intention de l'ennemi sur Bitterfeld et Jesnitz.
ęPour le prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęLe gťnťral de division, chef de l'ťtat-major,
ęComte MONTHION.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ĽDŁben, le 11 octobre 1813, onze
heures du matin.
ĽMon cousin, faites-moi connaÓtre ce que veut dire le mouvement de
l'ennemi sur Zorbig. Est-ce pour aller ŗ Dessau, ou pour se porter sur
Halle ou sur Acken?
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDŁben, le 11 octobre 1813, trois heures aprŤs-midi.
ęMon cousin, un postillon qui arrive de CŲthen, et qui en est parti hier
ŗ trois heures aprŤs midi, fait le rapport que l'ennemi n'a plus
personne ŗ Raguhn, ŗ Jesnitz, et fort peu de monde ŗ Dessau. Il est donc
trŤs-important que vous poussiez ŗ fond vos reconnaissances, et que vous
sachiez positivement ce qu'il y a ŗ Zorbig et dans la direction de
CŲthen et de Halle.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDŁben, le 12 octobre 1813, quatre heures du matin.
ęMon cousin, choisissez une position d'oý vous puissiez couvrir ŗ la
fois DŁben, Jesnitz et Leipzig. Vous pourriez peut-Ítre vous couvrir de
la branche de la Mulde qui passe ŗ Delitzsch, si toutefois elle n'est
pas guťable. Alors vous vous trouveriez en communication avec le duc de
Reggio qui a une avant-garde ŗ Raguhn et ŗ Jesnitz; vous couvririez
parfaitement DŁben, dont vous pourriez vous placer ŗ trois lieues, et
vous seriez ŗ portťe de vous rendre, en une petite marche, sur Leipzig,
et surtout de tomber sur le flanc du corps qui voudrait marcher de Halle
sur cette ville.--Votre corps, baraquť ainsi dans une position
avantageuse, serait d'un trŤs-heureux rťsultat. Il ferait le
prolongement de la ligne de Dessau, par Jesnitz, jusqu'ŗ Borna oý se
trouve le roi de Naples. Vous couvrirez par ce moyen Eulenbourg, et le
gťnťral Lefebvre-Desnouettes pourra se porter en avant pour ťclairer
votre gauche.--En cas de nťcessitť, la garde dťboucherait sur vous par
DŁben et Eulenbourg.--Il faudra placer des avant-gardes de cavalerie,
infanterie et artillerie sur les routes de Halle, CŲthen et
Leipzig.--AussitŰt que vous aurez choisi votre position et que votre
corps sera en mouvement pour s'y rendre, vous vous mettrez en
correspondance avec le duc de Padoue ŗ Leipzig, avec lequel votre
correspondance doit Ítre trŤs-sŻre et trŤs-rapide.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDŁben, le 12 octobre 1813, onze heures du soir.
ęMon cousin, je reÁois votre lettre, que m'apporte l'officier
d'ordonnance Gourgaud; elle est datťe d'aujourd'hui ŗ neuf heures du
soir.--Le prince de la Moskowa s'est emparť de Dessau; il a fait deux
mille cinq cents prisonniers, dont cinquante officiers. Il me mande, ŗ
trois heures aprŤs midi, que le gťnťral Tauenzien a passť ŗ Dessau les
ponts pour aller du cŰtť de Roslau, et qu'on voit sur la rive droite des
colonnes immenses de bagages et de pares qui remontent la riviŤre, et
toutes les probabilitťs sont que l'armťe de Berlin tout entiŤre a passť
sur la rive droite aux ponts de Dessau et d'Acken.--Le gťnťral Rťgnier,
le gťnťral Dombrowski et le duc de Tarente avaient passť ŗ Wittenberg
sur la rive droite; ŗ trois heures, nos avant-postes avaient passť
Koswig.--ņ quatre heures, on a entendu une canonnade trŤs-vive qui a
durť jusqu'ŗ six heures. Je n'en connais point encore le rťsultat;
c'ťtait l'attaque du gťnťral Rťgnier et du gťnťral Dombrowski sur la
rive droite ŗ Roslau.--L'ennemi paraissait Ítre dans une grande
ťpouvante.--Le duc de Castiglione ťtait arrivť ŗ Leipzig. Il avait eu,
il y a trois jours, une affaire avec Thielman et Liechtenstein; il a
battu complŤtement ce dernier, l'a mis en dťroute et lui a fait douze
cents prisonniers.--Le roi de Naples occupe la position de Grosbern, oý
il me mande qu'il tiendra toute la journťe de demain 13.--Mon intention
est que vous vous mettiez en marche pour vous rapprocher de Leipzig, et
que vous envoyiez demander des ordres au roi de Naples. Je compte donc
que vous serez ŗ sept ou huit heures du matin, comme vous le proposez,
sur Hohleim.--Je vous ťcrirai, du reste, de nouveau.--Votre arrivťe au
roi de Naples lui complťtera quatre-vingt-dix mille hommes.--Si le
gťnťral Rťgnier ne s'est pas emparť aujourd'hui de Roslau, cela me
donnera le temps de m'en emparer demain, de bien battre l'armťe de
Berlin, et de terminer toutes ces affaires-lŗ.--Je suppose que les
reconnaissances que vous aurez envoyťes sur la route de Halle vous
auront enfin donnť des nouvelles. Envoyez de fortes reconnaissances
dans cette direction.--Marchez de maniŤre ŗ pouvoir surtout secourir
Leipzig, et envoyez demander des ordres au roi pour entrer en bataille.
Le moment dťcisif paraÓt Ítre arrivť: il ne peut plus Ítre question que
de se bien battre.--Si vous entendez le canon sur Leipzig, activez votre
marche et prenez part ŗ l'affaire.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDŁben, le 12 octobre 1813, trois heures et demie aprŤs midi.
ęMon cousin, je n'ai point reÁu de nouvelles de vous aujourd'hui:
j'espŤre ne pas tarder ŗ en recevoir. Je suppose que vous vous serez
placť ŗ quatre lieues de Leipzig.--Nous nous sommes emparťs des ponts de
l'ennemi sur l'Elbe, et il paraÓt que l'armťe de Berlin s'est portťe sur
la rive droite.--D'un autre cŰtť, le roi de Naples occupe la position de
Grosbern, qu'il a prise ce matin. Je lui mande de la conserver toute la
journťe de demain 13.--Mon intention est que, si ce prince doit pouvoir
conserver cette position, vous partiez ŗ trois heures du matin pour
prendre une position sur la route de Dobern, ayant votre gauche ŗ
Tachau.--Je me mettrai en marche de DŁben, avec la vieille garde, pour
vous rejoindre. La division Curial se mettra en marche d'Eulenbourg avec
la division Lefebvre, de sorte que demain, vers midi, nous serons
soixante-dix mille hommes rťunis ŗ portťe de Leipzig. Toute mon armťe se
mettra en mouvement; et, dans la journťe du 14, elle sera toute arrivťe,
et je pourrai livrer bataille ŗ l'armťe ennemie avec deux cent mille
hommes.--Faites-moi connaÓtre les renseignements que vous auriez de
votre cŰtť sur l'armťe de Silťsie et sur les positions que l'on pourrait
prendre contre cette armťe, contre l'armťe qui viendrait par Halle et
par Dessau.--Faites-moi bien connaÓtre la position que vous occuperez,
et ŗ quelle heure vous pourrez Ítre rendu ŗ portťe de Leipzig.
ęNAPOL…ON.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDŁben, le 13 octobre 1813, dix heures du matin.
ęMon cousin, je reÁois votre lettre d'aujourd'hui 13, ŗ trois du matin,
par laquelle vous m'annoncez que vous serez ŗ huit heures ŗ Hohleim.--Je
pense qu'il est nťcessaire que vous ne vous massiez en ligne sur la rive
gauche de la Partha qu'autant que le roi serait attaquť; mais ce serait
une grande faute que de vous porter en ligne sur la rive gauche de la
Partha, puisqu'on peut avoir ŗ craindre que BlŁcher ne vienne ŗ
dťboucher par Halle ou par quelque autre point. Je pense donc que vous
devez reconnaÓtre la position de Brettenfeld et la ligne de la Partha
jusqu'ŗ Taucha, et avoir des avant-gardes sur Skindits ainsi que sur la
route de Landsberg. Par ce moyen vous vous dťploieriez promptement, la
gauche ŗ l'Elster et la droite ŗ la Partha, pour recevoir ce qui
viendrait par ces chemins. Reconnaissez bien cette position. Ayez trois
ponts sur la Partha, pour dťboucher rapidement sur la rive gauche s'il
en ťtait besoin; mais tenez votre cavalerie dans les directions de Halle
et de Landsberg. Battez les routes de Delitzsch et de DŁben, afin de
maintenir toutes ces communications parfaitement libres.--Toute ma garde
arrive ici dans la journťe, et je suppose que la tÍte arrivera
aujourd'hui sur Lindenhain ou sur Hohleim.--ņ mesure que les autres
corps d'armťe arriveront, on les placera autour de Leipzig, la garde au
centre en rťserve.--Si vous ťtiez placť en ligne sur la gauche de la
Partha, et qu'il fallŻt vous porter contre quelque chose qui viendrait
du cŰtť de BlŁcher, cela dťrangerait toute la ligne et serait du plus
mauvais effet. Il est important que l'armťe de Silťsie n'approche pas ŗ
deux lieues de Leipzig.--Vos trois divisions peuvent Ítre trŤs-espacťes,
avec les bonnes troupes qui les composent. Le temps de reconnaÓtre la
position qu'elles occuperont donnera celui nťcessaire pour se mettre ŗ
l'abri de toute attaque. Mon intention est que vous placiez vos troupes
sur deux rangs au lieu de trois. Le troisiŤme rang ne sert ŗ rien au
feu, il sert encore moins ŗ la baÔonnette. Quand on sera en colonnes
serrťes par bataillon, trois divisions formeront six rangs et trois
rangs de serre-file. Vous verrez l'avantage que cela aura. Votre feu
sera meilleur; vos forces seront _tiercťes_. L'ennemi, accoutumť ŗ nous
savoir sur trois rangs, jugera nos bataillons plus forts d'un
tiers.--Donnez les ordres les plus prťcis pour l'exťcution de la
prťsente disposition.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęDŁben, le 13 octobre 1813, une heure du matin.
ęMonsieur le duc de Raguse, l'Empereur me charge de vous donner l'ordre
d'Ítre rendu _aujourd'hui, 13, ŗ sept heures du matin, ŗ trois lieues_
de Leipzig, et de prendre les ordres du roi de Naples pour votre
position, pour entrer en ligne. Ne perdez pas un instant pour exťcuter
l'ordre de Sa Majestť, et envoyez ŗ l'avance un officier au roi de
Naples pour lui faire connaÓtre votre marche.
ęPour le prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęLe gťnťral de division, chef de l'ťtat-major,
ęComte MONTHION.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęRettuis, le 14 octobre 1813, six heures du soir.
ęMon cousin, mon quartier gťnťral est dans le Koll Garten, au village de
Rettuis, sur la gauche de la Partha, ŗ peu prŤs ŗ l'intersection des
routes de Taucha et de Wurtzen, ŗ une demi-lieue de Leipzig. Mon
officier d'ordonnance Caraman me rend compte que vous prenez position ŗ
Stameln, Liebenthal et Brettenfeld. Le gťnťral Bertrand a ordre de
prendre position, la gauche ŗ GŲhlis et la droite ŗ la Partha, couvrant
le pont de SchŲnfeld. Il est ainsi en arriŤre de votre gauche et vous
servira de rťserve.--Le duc de Tarente a passť ŗ deux heures aprŤs midi
le pont de DŁben et s'avancera demain sur Leipzig.--Il y a eu
aujourd'hui une canonnade assez vive. L'ennemi a ťtť repoussť. Nous
occupons Liebertwolkwitz, la droite appuyťe ŗ l'Elster. L'ennemi se
prolonge sur sa gauche ou sur notre droite.--Toute ma garde, cavalerie,
infanterie, artillerie, vient se placer autour de mon logement. Il
serait bien convenable de remuer un peu de terre, de faire quelques
abatis et de planter des palissades oý cela peut Ítre utile.--Je vous
envoie une relation de la bataille de Gustave-Adolphe qui traite des
positions que vous occupez.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAR…CHAL MACDONALD AU MAR…CHAL MARMONT.
ęLindenhain, le 14 octobre 1813, dix heures et demie du soir.
ęSon Altesse le major gťnťral m'informe de votre position et de celles
que l'armťe a prises ce soir. Je me mettrai en marche ŗ deux ou trois
heures du matin, suivi du prince de la Moskowa. Dans le cas oý l'ennemi
dťboucherait en grande force sur moi par Delitzsch, et que, sans
compromettre le onziŤme corps, je ne pourrais lui faire face,
j'appuierai ŗ gauche pour passer la Partha sur l'un des ponts que
m'indique le major gťnťral. Le deuxiŤme corps de cavalerie et les deux
divisions du premier arriveront, j'espŤre, ŗ temps pour flanquer ma
droite. Je suis instruit que vous devez envoyer au-devant de moi. Je
serai fort aise d'avoir de vos nouvelles et de ce que vous aurez vu ou
appris.
ęLe marťchal duc de Tarente,
ęMACDONALD.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęReudnitz, prŤs Leipzig, le 15 octobre 1813, dix heures du soir.
ęMon cousin, les rapports de la ville sont que le prince royal est ŗ
Mersebourg. On croit ce soir voir beaucoup de feux ŗ Markranstadt, ce
qui me ferait supposer que la force de l'ennemi ne se prťsenterait pas
sur le chemin de Halle ŗ Leipzig, mais sur celui de Weissenfels ŗ
Leipzig, d'oý il se joindrait par Zwickau ou Pťgau ŗ l'armťe de BohÍme.
Il est indispensable que vous ayez un officier sur la tour de Lindenau,
et que vous en envoyiez un autre ŗ la tour de Leipzig pour y lorgner ŗ
la pointe du jour.--Je suis f‚chť que vous n'ayez pas poussť une
reconnaissance jusqu'ŗ Schkenditz.--Il est bien nťcessaire que tout
votre corps ne reste pas dans la situation oý il se trouve si l'ennemi
attaquait ailleurs.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęReudnitz, le 15 octobre 1813, onze heures du soir.
ęMonsieur le marťchal duc de Raguse, l'Empereur est surpris que vous ne
soyez pas encore en communication avec le gťnťral Bertrand. Ce gťnťral
est depuis hier au soir de bonne heure ŗ Eustritz.--L'Empereur livre
demain bataille ŗ l'armťe autrichienne, ŗ la hauteur de Liebertwolkwitz,
oý le quartier gťnťral de l'Empereur sera demain 16, ŗ sept heures du
matin. Si vous n'avez que de la cavalerie ou peu d'infanterie devant
vous, poussez-la loin et tenez-vous prÍt ŗ joindre l'Empereur. Le
gťnťral Bertrand serait suffisant pour garder la position de ce cŰtť si
toute l'armťe de Silťsie ne dťbouche pas par lŗ. Dans le cas contraire,
le corps du prince de la Moskowa est ŗ Mokau, et, si l'ennemi dťbouchait
devant vous en grande force, votre corps, celui du gťnťral Bertrand et
celui du prince de la Moskowa sont destinťs ŗ lui Ítre opposťs[10].
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
[Note 10: Cette disposition ťtait parfaitement sage et conforme ŗ la
raison; et c'est quand m'est parvenu le rapport des sapeurs ťchappťs de
Halle, qui m'annonÁait la marche dťcidťe de l'armťe; quand le rapport du
15, ŗ neuf heures du soir, fait connaÓtre que l'infanterie prussienne
est en face des avant-postes, et que la vue des feux prouve que toute
l'armťe ennemie est en prťsence, que, le 16 au matin, l'ordre est donnť
au quatriŤme corps de marcher sur Lindenau, et au troisiŤme, de venir ŗ
la grande armťe.(_Note du duc de Raguse._)]
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęReudnitz, le 16 octobre 1813, huit heures du matin.
ęL'Empereur vient d'ordonner au prince de la Moskowa de se tenir dans la
journťe prŤs de Leipzig, ayant sous ses ordres le sixiŤme corps, le
quatriŤme, le troisiŤme, les divisions Lorge, Defrance et Fournier.
Prenez en consťquence les ordres de ce prince. Si ce matin on n'avait
point aperÁu d'armťe dťbouchant par Halle, comme tout porte ŗ penser
qu'on n'a rien vu, vous repasserez le pont de Leipzig et viendrez vous
mettre en bataille entre Leipzig et Liebertwolkwitz, vos trois divisions
en ťchelons, et vous, vous resterez ŗ une demi-lieue sur la grande route
de Leipzig ŗ Liebertwolkwitz, dans une maison oý vous ťtablirez votre
quartier gťnťral. Vous enverrez un aide de camp auprŤs de l'Empereur,
afin qu'on puisse vous retrouver et vous mettre rapidement en marche si
cela paraÓt nťcessaire ŗ Sa Majestť pour prendre part ŗ la bataille, ou
pour vous porter dans la ville ou pourvoir ŗ tout ťvťnement imprťvu.
ęVous attendrez, pour l'exťcution de ces dispositions, les ordres du
prince de la Moskowa.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ę16 octobre 1813, trois heures du matin.
ęMon cousin, je reÁois votre lettre du 15 octobre ŗ neuf heures du soir.
Je ne tiens pas pour certain que le bataillon qui ťtait ŗ Hanicher se
soit repliť devant de l'infanterie. Il paraÓt, au contraire, qu'il
n'avait devant lui que de la cavalerie. Il eŻt ťtť convenable que vous
fissiez soutenir ce bataillon sur Hanicher, pour avoir des prisonniers.
Il n'est pas dans les rŤgles qu'une reconnaissance de l'ennemi qui n'est
pas soutenue par un camp puisse s'approcher et reconnaÓtre notre camp.
L'instruction que vous aviez donnťe pour que ce bataillon se repli‚t
s'il trouvait l'ennemi en corps d'armťe a reÁu une mauvaise application,
puisque votre troupe s'est retirťe sans que l'ennemi se soit prťsentť en
corps de bataille. Avec cette maniŤre de faire la guerre, il est
impossible de rien apprendre. Vous auriez dŻ, depuis deux jours, envoyer
des espions ŗ Halle et ŗ Mersebourg, et faire ce qui est d'usage ŗ la
guerre, en ordonnant au bourgmestre de vous donner un paysan, dont on
retient la femme en otage, et en envoyant avec ce paysan un soldat
dťguisť comme domestique qui le suive dans sa mission[11]. Cela rťussit
sur tous les points; mais vous n'employez aucune des prťcautions dont on
se sert ŗ la guerre. Comment, depuis deux jours, avec trente mille
hommes, n'avez-vous fait aucun prisonnier[12]? Le fait est que votre
corps est un des plus beaux de l'armťe, qu'il est en bataille contre
rien, et que vous manoeuvrez comme si vous aviez, ŗ une lieue et demie
de vous, une armťe campťe, tandis qu'il est clair qu'avant-hier et hier
vous n'avez vu personne.
ęNAPOL…ON.Ľ
[Note 11: Les sapeurs franÁais ťchappťs et arrivťs le 15 donnaient
de meilleurs renseignements que ceux des paysans. (_Note du duc de
Raguse._)]
[Note 12: Comment faire des prisonniers ŗ quatre ou cinq mille
hommes de cavalerie qui nous entouraient, quand on a moins de mille ŗ
douze cents chevaux? (_Note du duc de Raguse._)]
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęReudnitz, le 16 octobre 1813, six heures du matin.
ęMon cousin, il me paraÓt que rien n'annonce que l'ennemi veuille
dťboucher par Halle, et qu'il n'y a lŗ qu'un corps de cavalerie. Il
paraÓt douteux qu'on ait vu hier, comme on le prťtend, quelques
bataillons d'infanterie.--ņ la rentrťe des reconnaissances, ce matin,
cela sera entiŤrement vťrifiť, et, comme je vais faire attaquer les
Autrichiens, je pense qu'il est convenable que vous passiez la ville au
pont de la Partha, dans le faubourg et que vous veniez vous placer en
rťserve, ŗ une demi-lieue de la ville, entre Leipzig et Liebertwolkwitz,
vos divisions en ťchelons. De lŗ vous pourrez vous porter sur Lindenau,
si l'ennemi faisait une attaque sťrieuse de ce cŰtť, ce qui me
paraÓtrait absurde. Je vous appellerai ŗ la bataille, aussitŰt que je
verrai la force de l'ennemi et que je serai certain que l'ennemi
s'engage.--Enfin vous pourrez vous porter au secours du gťnťral Bertrand
qui placera des postes sur votre position, si, ce qui n'arrivera
probablement pas, une armťe ennemie pouvait paraÓtre sur le chemin de
Halle.--Il faudra vous tenir, de votre personne, sur la grande route,
hors de la ville. Il faudra laisser la division Lorge au gťnťral
Bertrand, afin que cette division, soutenue par l'infanterie du gťnťral
Bertrand, occupe toujours vos postes avancťs.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT AU MAJOR G…N…RAL.
ę19 octobre 1813.
ęMonseigneur, la part qu'a prise le sixiŤme corps d'armťe aux batailles
des 16 et 18 octobre, devant Leipzig, ťtant de nature ŗ mťriter
l'intťrÍt de Sa Majestť, je crois de mon devoir de vous en adresser le
rapport.
ęLe sixiŤme corps ťtait placť, depuis plusieurs jours, ŗ Liebenthal,
chargť d'observer les mouvements de l'ennemi, qui pourrait dťboucher de
ce cŰtť. Le 16, au matin, Sa Majestť ťtant dans l'intention d'attaquer
l'ennemi, et aucun corps d'armťe considťrable ne s'ťtant encore montrť
devant moi, je reÁus l'ordre de me rapprocher de Leipzig, afin, tout en
le couvrant, d'Ítre plus ŗ mÍme de prendre part, s'il y avait lieu, au
combat qui devait se livrer de l'autre cŰtť de cette ville. Je mis en
marche mes ťquipages, et bientŰt aprŤs mon corps d'armťe s'ťbranla.
ęņ peine mon mouvement ťtait-il commencť, que de grosses masses de
troupes ennemies dťbouchŤrent par les routes de Halle et Gandsberg.
ęIl ťtait trop tard, et j'ťtais trop faible, pour occuper la position de
Liebenthal. En consťquence, je continuai ma marche sur Leipzig, en
soutenant mon mouvement par une vive canonnade. L'ennemi nous suivit
avec activitť, en ne montrant toutefois que des forces qui n'ťtaient pas
trop supťrieures aux miennes.
ęJ'avais deux partis ŗ prendre: ou continuer ma marche et passer par le
dťfilť de Leipzig, sous le feu et les efforts de l'ennemi, avec tous les
dťsavantages que le terrain comporte, ou de faire face ŗ l'ennemi.
ęJ'y fus d'autant plus dťcidť, que je reÁus plusieurs fois du prince de
la Moskowa l'assurance que la disposition ordonnťe par Sa Majestť pour
que le troisiŤme corps me soutint ťtait exťcutťe, et qu'il marchait ŗ
mon secours. Je m'arrÍtai donc; je fis face ŗ l'ennemi, j'occupai la
position qui ŗ sa droite au ruisseau d'Eutritz et sa gauche ŗ l'Elster,
au village de Meckern, et je me prťparai ŗ combattre, soutenu par prŤs
de cent piŤces de canon.
ęL'armťe ennemie marcha ŗ moi avec rapiditť. Ses forces semblaient
sortir de dessous terre; elles grossirent ŗ vue d'oeil: c'ťtait toute
l'armťe de Silťsie.
ęL'attaque de l'ennemi se dirigea d'abord sur le village de Meckern. Ce
village fut attaquť avec vigueur, et l'ennemi supporta tout le feu de
mon artillerie. Il fut dťfendu de mÍme par les troupes de la deuxiŤme
division, sous les ordres du gťnťral Lagrange. Le 2e rťgiment
d'artillerie de marine, qui ťtait chargť de ce poste, y mit vigueur et
tťnacitť; il conserva ce village pendant longtemps, le perdit et le
reprit plusieurs fois. Mais l'ennemi redoubla d'efforts et envoya de
puissants secours, ne s'occupant que de ce point. Alors je fis exťcuter
un changement de front oblique par brigade, ce qui forma immťdiatement
six lignes en ťchelons, qui ťtaient ťgalement bien disposťes pour
soutenir ce village, oý paraissait Ítre toute la bataille.
ęLe 37e lťger et le 4e rťgiment de marine furent successivement portťs
sur ce village; ils le reprirent et le dťfendirent avec tout le courage
qu'on pouvait attendre d'aussi bonnes troupes.
ęLe combat se soutenait avec le mÍme acharnement depuis trois heures, et
l'ennemi avait fait des pertes ťnormes par l'avantage que nous donnait
la position de notre artillerie pour ťcraser ses masses. Mais de
nouvelles forces se prťsentaient sans cesse et renouvelaient les
attaques. Une explosion de quatre caissons de douze, qui eut lieu ŗ la
fois, ťteignit pour un instant le feu d'une de nos principales
batteries, et, en ce moment, l'ennemi faisait une charge dťcisive.
ęJ'engageai alors les troupes de la premiŤre division, qui formaient les
ťchelons du centre, pour soutenir les troupes engagťes et combattre
l'ennemi, qui taisait un mouvement par son centre.
ęLe combat prit un nouveau caractŤre, et nos masses d'infanterie se
trouvŤrent en un moment ŗ moins de trente pas de l'ennemi. Jamais action
ne fut plus vive. En peu d'instants, blessť moi-mÍme et mes habits
criblťs, tout ce qui m'environnait pťrit ou fut frappť.
ęLes 20e et 25e rťgiments provisoire, commandťs par les colonels Maury
et Drouhot, se couvrirent de gloire dans cette circonstance. Ils
marchŤrent ŗ l'ennemi et le forcŤrent ŗ plier; mais, accablťs par le
nombre, ces rťgiments furent obligťs de s'arrÍter, en parvenant
toutefois ŗ se soutenir dans leur position. Le 32e lťger fit aussi des
prodiges. Les troupes de la troisiŤme division, qui formaient les
derniers ťchelons, prirent part au combat, autant pour soutenir les
troupes qui ťtaient engagťes que pour rťsister ŗ quelques troupes que
l'ennemi faisait marcher par sa gauche.
ęLes choses ťtaient dans cette situation, et le troisiŤme corps, dont
l'arrivťe eŻt ťtť si dťcisive, ne paraissait pas, lorsque l'ennemi
prťcipita six mille chevaux sur toutes nos masses, qui ťtaient dťjŗ aux
prises ŗ une si petite distance avec l'infanterie ennemie.
ęNotre infanterie montra en gťnťral beaucoup de sang-froid et de
courage. Mais plusieurs bataillons des 1er et 3e rťgiments de marine,
qui occupaient une position importante, pliŤrent, ce qui forÁa nos
masses ŗ se rapprocher pour se mieux soutenir. L'ennemi fit de nouveaux
efforts qui furent repousses avec un nouveau courage, et l'infanterie
combattit ŗ la fois contre l'infanterie et la cavalerie ennemie, et
repoussa toujours de nouvelles attaques jusqu'ŗ la nuit.
ęAlors je rťunis mes troupes, et je pris position ŗ Entritz et ŗ GŲhlis.
ęAinsi, les troupes du sixiŤme corps ont rťsistť, pendant cinq heures, ŗ
des forces quadruples, et la victoire eŻt ťtť le prix de nos efforts,
malgrť la disproportion des forces, si les ordres que Sa Majestť avaient
donnťs pour le secours ŗ m'envoyer eussent ťtť exťcutťs.
ęJ'ai eu dans cette circonstance extrÍmement ŗ me louer des gťnťraux et
officiers supťrieurs, mais je dois faire une mention particuliŤre du
gťnťral Lagrange, qui a beaucoup combattu au commencement de l'action,
et du gťnťral Cohorn, qui a soutenu tous les efforts de l'ennemi ŗ la
fin de la journťe. Nous avons fait de grandes pertes, mais l'ennemi en a
dŻ faire d'ťnormes. Des prisonniers, faits depuis, les portent ŗ dix
mille hommes.
ęLe lendemain matin, je repassai la Partha pour me lier ŗ l'armťe. Le 17
fut employť ŗ rťparer le dťsordre qu'une affaire aussi chaude avait dŻ
nťcessairement causer, et ŗ mettre les troupes en ťtat de combattre.
ęLe 18 au matin, le sixiŤme corps ťtait concentrť dans les environs de
SchŲnfeld, observant par des dťtachements les bords de la Partha,
dťfendant les guťs et les diffťrents passages. L'ennemi avait manoeuvrť
pendant la nuit pour se porter sur Taucha. Il y passa la Partha, et
descendit cette riviŤre. Lorsqu'il fut ŗ la hauteur de Neutsch et de
Naundorf, les postes qui dťfendaient ces passages se repliŤrent sur moi,
et j'ťtablis ma ligne, la gauche ŗ Schoenfeld, la droite dans la
direction du village de Paunsdorf.
ęMais la dťfection des Saxons ayant forcť le gťnťral Rťgnier ŗ ťvacuer
Paunsdorf, et ŗ se rapprocher de Leipzig, je pris une nouvelle ligne, la
gauche ŗ Schoenfeld, la droite dans la direction du village de
Wolkmansdorf, et, aprŤs avoir fait ťtablir mes masses en ťchiquier et
border leur front de toute mon artillerie, j'attendis l'ennemi sans
inquiťtude.
ęņ l'armťe de Silťsie, que j'avais combattue l'avant-veille, se trouvait
rťunie l'armťe suťdoise; mais, cette fois, j'ťtais soutenu par le
troisiŤme corps qui fournit mÍme une division, commandťe par le gťnťral
Delmas, pour complťter ma ligne.
ęL'ennemi dťploya devant nous cent cinquante bouches ŗ feu, en mÍme
temps qu'il fit attaquer le village de Schoenfeld avec la plus grande
vigueur. Sept fois l'ennemi parvint ŗ s'emparer de la plus grande
portion de ce village, et sept fois il en fut chassť. C'ťtait encore la
division commandťe par le gťnťral Lagrange, et un dťtachement de la
troisiŤme, qui eurent la gloire de la dťfense de ce village, et jamais
troupes ne se sont comportťes d'une maniŤre plus hťroÔque, car elles
comptaient pour rien le nombre de leurs ennemis.
ęLes troupes de la troisiŤme division, qui occupaient la ligne en
plaine, furent exposťes au feu de mitraille le plus ťpouvantable, sans
imaginer, pendant neuf heures, de faire un pas rťtrograde. ņ la fin de
la journťe, notre artillerie dťmontťe et nos munitions ťpuisťes
permirent ŗ l'ennemi d'approcher tellement son immense artillerie, que
la position n'ťtait plus tenable, ce qui forÁa ŗ prendre position un peu
en arriŤre. Mais l'artillerie du troisiŤme corps arriva, et la division
Ricard se porta rapidement ŗ la position que nous venions de quitter, et
chassa une huitiŤme fois l'ennemi du village de Schoenfeld. Ainsi finit
cette glorieuse journťe.
ęJe ne connais pas d'ťloges dont ne soient dignes des troupes aussi
braves, aussi dťvouťes, et qui, malgrť les pertes qu'elles avaient
ťprouvťes l'avant-veille, n'en combattaient pas avec moins de courage.
ęNotre perte dans cette journťe a ťtť considťrable. Elle a consistť
particuliŤrement en officiers gťnťraux. Le gťnťral Richemont, mon chef
d'ťtat-major, a ťtť tuť ŗ mes cŰtťs. Les gťnťraux Delmas, Friederich et
Cohorn ont ťtť blessťs mortellement. Les gťnťraux Compans, Pelleport et
Choisy l'ont ťtť d'une maniŤre moins grave. Mon sous-chef d'ťtat-major,
quatre de mes aides de camp, et cinq officiers de mon ťtat-major ont ťtť
tuťs ou blessťs.
ęEt, dŤs ce moment, je dois faire une mention particuliŤre du courage et
du zŤle que les colonels Denis de Damrťmont et Fabvier, employťs prŤs de
moi, ont montrťs.Ľ
LE MAR…CHAL MARMONT ņ NAPOL…ON.
ę20 octobre 1813.
ęSire, je supplie Votre Majestť de me permettre de lui exprimer la vive
affliction que j'ai ťprouvťe ŗ la lecture de son bulletin du 19, qui
vient de me parvenir.--Sire, tout ce qui est relatif ŗ la dťfense de
Schoenfeld et de toute la plaine, jusqu'ŗ la hauteur en arriŤre de
Paunsdorf, le 18 octobre, m'appartient tout entier, tant pour la
disposition des troupes que pour leur commandement sur le champ de
bataille, et non au prince de la Moskowa, auquel Votre Majestť attribue
les succŤs obtenus.--Il a paru ŗ peine en tout dix minutes sur ce point.
J'ai ťtť personnellement dix heures sous la mitraille de l'ennemi par la
nťcessitť des circonstances, parce que c'ťtait seulement en payant de sa
personne et par la prťsence du chef qu'un aussi petit nombre d'hommes
que celui que j'avais pouvait rťsister ŗ des forces aussi supťrieures
que celles qui ťtaient devant moi. C'est ce jour-lŗ, Sire, que tout ce
qui m'environnait a pťri.--Jamais, ŗ aucune ťpoque de ma vie, je ne vous
ai servi avec plus de dťvouement que dans cette occasion.--Il n'y a pas
un soldat du sixiŤme corps qui ne puisse l'attester; et cependant Votre
Majestť n'a pas daignť prononcer mon nom dans le rťcit de cette
glorieuse journťe.--Sire, aprŤs l'humiliation et le danger plus grand
encore d'Ítre sous les ordres d'un homme tel que le prince de la
Moskowa, je ne vois rien de pire que de se voir aussi complťtement
oubliť en pareille circonstance.
ęL'objet de mes affections et de mes voeux est d'obtenir votre
bienveillance; et Votre Majestť ne saurait me refuser sa justice.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęOllendorf, le 22 octobre 1813, onze heures et demie du soir.
ęMonsieur le duc de Raguse, l'intention de l'Empereur est que, avec les
troisiŤme, sixiŤme et septiŤme corps d'armťe, vous continuiez, demain
23, votre mouvement sur Erfurth, pour prendre position sur les hauteurs,
en arriŤre de la forteresse. Ayez soin d'envoyer ŗ l'avance un officier
pour reconnaÓtre la position que vous devrez occuper.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęOllendorf, le 22 octobre 1813, onze heures et demie.
ęJe donne l'ordre au gťnťral Sťbastiani de flanquer la marche de
l'armťe, et de protťger ce qui passera entre vous et le duc de Reggio.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęErfurth, le 24 octobre 1813, deux heures du matin.
ęL'intention de l'Empereur est que vous placiez vos corps dans des
villages plus prŤs d'Erfurth, afin de bien vous rallier ce matin et de
prendre les effets d'habillement et d'armement dont vous pouvez avoir
besoin.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.
ę_P. S._ Faites-moi connaÓtre le nom des villages oý vos corps seront
placťs.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęGotha, le 25 octobre 1813.
ęMonsieur le marťchal duc de Raguse, l'Empereur ordonne que vous partiez
demain ŗ deux heures du matin pour vous rendre ŗ Eisenach. Vous y
prendrez une position militaire pour soutenir la ville et le gťnťral
Sťbastiani, qui a beaucoup de cavalerie ennemie en prťsence, et vous
vous tiendrez prÍt ŗ aller plus loin du cŰtť de Berka.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
ORDRE POUR M. LE DUC DE RAGUSE.
ęRothenbergen, le 30 octobre 1813.
ęLes bagages et tous les parcs d'artillerie de l'armťe se rendront d'ici
ŗ Langenselbold, de lŗ ŗ Hochstšdt, passant par Bruckobel, et de lŗ,
d'aprŤs les nouvelles que l'on aura, ils se dirigeront sur Francfort ou
sur Bergen. Tous les isolťs et blessťs, tous les chevaux blessťs, les
hommes de cavalerie, non combattants ŗ leur rťgiment, suivront la mÍme
route. Le duc de Padoue, avec le troisiŤme corps de cavalerie, marchera
en tÍte de cette colonne et la dirigera.
ęMM. les marťchaux commandant en chef les corps d'armťe, le gťnťral
Sorbier, le gťnťral Rogniat, le gťnťral Dulauloy, le gťnťral Nansouty,
commandant en chef la cavalerie, le directeur gťnťral de
l'administration de l'armťe, et enfin tous chefs d'autoritť militaires
ou d'administration, feront exťcuter, chacun en ce qui le concerne, les
dispositions ci-dessus. M. le gťnťral Radet est spťcialement chargť et
responsable de l'exťcution de cet ordre. Il placera des postes de
gendarmerie en consťquence, de maniŤre qu'il n'y ait que l'artillerie
active des corps d'armťe et les combattants qui suivent la grande route
de Hanau, et que tout le reste prenne la route indiquťe dans l'ordre
ci-dessus. M. le gťnťral Radet fera mettre deux poteaux avec des
ťcriteaux.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęAu camp, quatre heures du matin.
ęMonsieur le duc de Raguse, j'ai remis ŗ l'Empereur le petit croquis que
vous m'avez envoyť de votre position. Sa Majestť fait demander si, ce
matin, vous pouvez attaquer la ville de Hanau de votre cŰtť. Pouvez-vous
passer le pont de bois?
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
ę_P. S._ Nous avons jetť toute la nuit des obus dans la ville.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęņ une lieue en avant de Hanau, le 31 octobre 1813,
dix heures et demie.
ęMonsieur le duc de Raguse, l'officier d'ťtat-major que je vous ai
envoyť arrive. L'Empereur me charge de vous dire de continuer ŗ canonner
l'ennemi avec toute votre artillerie.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęAu bivac, devant Hanau, le 31 octobre 1813.
ęMonsieur le marťchal duc de Raguse, l'ennemi a ťvacuť Hanau, le duc de
Bellune et le duc de Castiglione partent pour Francfort; vous laisserez
au pont les troupes nťcessaires pour contenir l'ennemi. Le gťnťral
Bertrand a ordre d'occuper Hanau; concertez-vous avec lui, et, lorsqu'il
se sera emparť des positions, continuez votre mouvement sur Francfort.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
ę_P. S._ Le gťnťral Bertrand pourra remplacer les troupes que vous avez
au pont de bois: concertez-vous avec lui.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęFrancfort, le 31 octobre 1813.
ęVous pouvez prendre position en avant du faubourg de Hanau; vous ferez
prendre pour deux jours de vivres ŗ Francfort, et ŗ cet effet vous
enverrez des corvťes en rŤgle dans la ville pour recevoir cette
distribution.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęFrancfort, la 1er novembre 1813, trois heures et demie du matin.
ęL'Empereur ordonne qu'avec les troisiŤme et sixiŤme corps d'armťe vous
vous portiez ŗ HŲchst, que vous y passiez la Nidda et que vous preniez
position jusqu'ŗ nouvel ordre sur cette riviŤre. Mettez-vous en
mouvement ŗ six heures du matin.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
ę_P. S._ Faites partir les isolťs et les voitures qui peuvent Ítre
autour de vous.Ľ
NAPOL…ON AU MAR…CHAL MARMONT.
ęMayence, le 2 novembre 1813.
ęMon cousin, je reÁois votre lettre; vous n'avez envoyť, ni ŗ moi, ni ŗ
l'ťtat-major, aucune relation des batailles du 16 et du 18: ce que vous
auriez dŻ faire.
ęNAPOL…ON.Ľ
LE MAJOR G…N…RAL AU MAR…CHAL MARMONT.
ęHŲchst, le 2 novembre 1813, une heure et demie du matin.
ęVous tiendrez la position que vous occupez sur la Nidda, ŗ HŲchst,
jusqu'ŗ l'arrivťe du gťnťral Curial, c'est-ŗ-dire de la premiŤre de ses
divisions; ensuite vous vous mettrez en route avec votre corps pour vous
rendre ŗ Mayence. Le gťnťral Sťbastiani a l'ordre de flanquer la droite
de la route d'ici ŗ Mayence. Vous remettrez la garde des ponts ŗ ce
gťnťral.
ęLe prince vice-connťtable, major gťnťral,
ęALEXANDRE.Ľ
FIN DU TOME CINQUI»ME.
End of the Project Gutenberg EBook of Mťmoires du marťchal Marmont, duc de
Raguse (5/9), by Auguste Frťdťric Louis Viesse de Marmont
*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK M…MOIRES DU MAR…CHAL MARMONT ***
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Mémoires du maréchal Marmont, duc de Raguse (5/9)
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The Project Gutenberg EBook of Mťmoires du marťchal Marmont, duc de Raguse
(5/9), by Auguste Frťdťric Louis Viesse de Marmont
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Title: Mťmoires du marťchal Marmont, duc de Raguse (5/9)
Author: Auguste Frťdťric Louis Viesse de Marmont
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— End of Mémoires du maréchal Marmont, duc de Raguse (5/9) —
Book Information
- Title
- Mémoires du maréchal Marmont, duc de Raguse (5/9)
- Author(s)
- Marmont, Auguste Frédéric Louis Viesse de, duc de Raguse
- Language
- French
- Type
- Text
- Release Date
- October 2, 2010
- Word Count
- 88,085 words
- Library of Congress Classification
- DC
- Bookshelves
- FR Biographie, Mémoires, Journal intime, Correspondance, Browsing: Biographies, Browsing: History - European, Browsing: History - General
- Rights
- Public domain in the USA.
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